Beirut – The Flying Club Cup



Sunday Smile








Certains traversent l’océan atlantique pour atteindre l’eldorado Amérique, qui cristallise la réussite, le succès, l’exposition maximum. Beirut, a.k.a Zach Condon, a fait le chemin inverse, quittant les USA pour sillonner l’Europe de l’Est, trimballant sa mélancolie de pays en pays, engrangeant une culture musicale impressionnante, hésitant entre Gitannes et Tsiganes, pour accoucher d’un grand disque, tout seul, « Gulag Orkestar », qui a fait connaître le bonhomme très rapidement, avec ce mélange de folk, pop et musiques de l’Est. (Il suffisait d’écouter le sublimissime morceau “Elephant Gun” pour s’en convaincre).
Mais Zach Condon semble vouloir se poser, et tombe amoureux de la France. Mélangée à une joie de vivre parasitée par une infinie tristesse, le Beirut nouveau nous sort Flying Club Cup en Septembre dernier… Ou comment se faire broyer l’échine en 13 leçons.











Je ne sais par où commencer. L’étonnement de voir certains titres de morceaux en Français peut être, alors que tout est chanté en Anglais. Le petit Condon semble bien maîtriser la langue de Molière soit dit en passant. Le chanteur et la Blogotheque (les fameux réalisateurs des “Concerts à emporter”) ont aussi réalisé des très bons petits films pour chaque morceau, joués en live un peu partout, dans la rue, dans une cour, sur une rive, dans un camion… Il faut enfin savoir que Beirut a éclairci sa recette sur cette nouvelle galette. Grand fan de musique Tziganes et d’Accordéon, un disque comme « The Flying Club Cup », c’est presque du fan-service pour mes oreilles. Mais quand on mélange le tout avec des mélodies à pleurer, on se demande s’il est encore nécessaire de continuer à écouter de la musique après ça.









Et c’est Nantes qui ouvre le bal. Magistralement. Ambiance guillerette, accordéon joyeux, le chant est toujours aussi déchirant, timide, brisé, fragile. Et le rythme s’emballe, claudiquant, typique du style, les cuivres montent, résonnent, entament une valse qui ne retombera pas. Tout tourne, accompagne le chanteur dans sa balade. Apres la petite pause, c’est le paradis que l’on frôle, avec ces choeurs discrets, se greffant petit à petit sur la ligne directrice.
A Sunday Smile ? L’un des miracles de l’album. Une chanson sublime. C’est l’histoire d’un vieux manège, tournant tristement, sans enfant pour l’accompagner dans sa ronde. Le soleil perle entre les barres scellant les cheveux de plastiques, mais seules les feuilles mortes se permettent de virevolter dans les airs. Zach Condon, au guichet, attend désespérément des sourires de marmots qui ne viendront jamais. Alors il chante, seul, sur la bande sonore vieillissante de son attraction. Jusqu’au refrain où toute une bande de gamins arrive, transportant le tableau dans une allégresse pétrifiante. Alors les cuivres s’invitent, la valse se fait plus appuyée, le tenancier n’est plus seul, les voix du refrain vous arrachent le coeur tellement la ritournelle est magnifique.
Mais ce titre, c’est surtout le parfait équilibre entre tristesse et joie pétrie de mélancolie. La tristesse d’avoir quitté l’être aimé, mélangée à la joie des vieux souvenirs qui refont surface. Courir les bras écartés, en pleurant de désespoir, en riant de bonheur. Indescriptible.

On ne redescendra pas. Guyamas Sonara nous crache à la gueule que Beirut sait créer des mélodies à filer la chair de poule à n’importe qui, avec cette trompette, instrument leader du morceau, qui vous pétrifie à chacun de ses soubresaut. Et quand une rythmique courageuse s’installe, explose, pour vous propulser chez les anges, avec un chanteur qui ne se lasse pas de s’envoler, c’est pour nous gratifier d’un des plus beaux moments du disque. On aimerait que ce moment dure 5 minutes, 10 minutes, trois quarts d’heure… la beauté est parfois bien frustrante. A se faire sauter le caisson en hurlant de joie.








Mais “The Flying Club Cup” tire aussi dans le minimalisme de façade, où seul un élément va tenter de colmater les blessures : The Penalty et Un dernier verre (pour la route) sont de ceux là. Le premier avec un simple ukulélé, et la voix de Condon, déchirante. Le final, qui laisse perler un accordéon triste à en crever, est juste superbe. Quand au second, c’est un piano, presque terne, qui va accompagner le gus dans ses élucubrations. Au moment où l’on commence à se demander si l’on ne tient pas la ballade mollassonne du disque débarque une fanfare, pour un final tellement beau que l’on se demande encore pourquoi ce dernier ne dure pas une éternité. C’est comme se prendre un mur apparu, de nulle part, de plein fouet, après une longue et chiante ballade en voiture. Il faut l’entendre pour le croire. C’est majestueux, pas d’autre terme en magasin.

Tout le contraire de l’alambiqué Cliquot l’un des plus beaux morceaux du disque (Mais sincèrement, y’en a-t-il un plus beau qu’un autre ?), avec ses trois phases bien distinctes, concentrant tout ce qui se fait de mieux chez le Beirut, avec cet accordéon supplanté par une marche militaire, qui va déboucher sur un passage lumineux, avec une mélodie d’une beauté absolue, violon en avant, pour échouer sur une transe des balkans, tourbillon d’instruments, à tirer des larmes au plus renfrogné des hommes sur terre.

Comment ne pas finir sur la petite pièce St Appollonia le morceau le plus marquant écoute par écoute. Ukulélé, violon et voix claire, pour un ensemble triste, grave, presque mortuaire. Sans prévenir, silence. Chute. Explosion. Tous les instruments se mettent à tonner, Zach Condon se déchaîne sur sa mini guitare, on monte lentement, lentement, pour attendre un état de grâce hallucinant, à vous violer l’âme en seulement moins de 3 minutes










Beirut semble avoir tout vu, tout vécu pour nous offrir un disque pareil. La tristesse et la joie de vivre s’entremêlent à n’en plus finir, pour former un ensemble compacte, indissociable, un sourire plein de larmes. Zach Condon n’est pas tout seul, mais Beirut n’est point un groupe non plus. L’américain se pose en chef d’orchestre, en multi-instrumentiste de génie.
On ne saurait quelle chanson choisir dans l’album pour son enterrement, tant la beauté transpire à chaque seconde de musique, tant les notes égrenées accompagneront avec perfection la peine absolue des gens assis dans l’église, tout en donnant une lumière, une clarté qui leur donnerait à tous l’envie d’avancer, de dépasser en riant l’immense chagrin.


J’en fais trop ? Assurément. Mais comment ne pas s’enliser dans l’emphase et les phrases boursouflées en écoutant un disque pareil ? Le disque est parsemé de petits diamants, de moments de grâce suprêmes, joue aux montagnes russes de l’ivresse des sentiments. L’envie de s’éteindre à jamais, harassé par les pièges de la vie, en étant pourtant si excité de voir poindre un nouveau jour, plein de surprise et de bonheur.




Ce disque rend triste, joyeux, enivre, tremblant, il déprime, il épuise, il nous enflamme, il nous transporte, aux grés des questionnements et des émotions sur la petite vie de Zach Condon. Il en peint des tableaux, des fresques aux mélodies sublimes, sans se soucier une seconde des précipices de mélancolie qu’il a autour des yeux.



Et nous, nous restons cons, abattus, étranglés par tant de sublime.











Beirut – Sunday Smile / Shot in Brooklyn










Beirut – Nantes / Shot in Paris











Beirut – St Apollonia / Shot In Brooklyn (Mon dieu ce panorama…)








Enfin, je ne peux résister d’inclure la vidéo de Elephant Gun , titre présent sur le precedent Ep de Beirut, et qui donnera une meilleure idée du son “Beirut” version Studio.







Beirut – Elephant Gun










13 Titres – Ba Da Bing Records
Dat’









  1. Skorn Says:

    “Ce disque rend triste, joyeux, enivre, tremblant, il déprime, il épuise, il nous enflamme, il nous transporte”

    Que dire d’autre… Ce mec est grand.
    Une baffe monumentale pour moi.
    Pensé pour St.Apollonia qui me trucide le coeur. Indescriptible comme dirait l’autre.
    Ou comment te remué les trips en quelques seconde… tout mélanger…
    On aurai envie que ça dure toujours…

  2. LordMarth Says:

    Tiens tiens tiens, très intéressant tout ça, j’aime les musiciens qui prennent au bide, ta chronique est si enthousiaste que çà donne envie d’écouter le disque chez toi une binouse à la main, les yeux fermés et le casque sur la tempe…

    Les vidéos donne envie d’aller plus loin pour ma part, tu m’as déjà tué avec Burial là ^^

  3. Nexus5 Says:

    Tain mais ca dechire tout !!! o_o
    Ok je fonce a la FNAC des que je suis a Bordeaux la semaine prochaine !

  4. chocoborg Says:

    Wow mais c’est génial ! Je connaissais pas du tout, mais je suis vraiment sous le charme. Merci pour cette découverte ^^

  5. axtrix Says:

    J’étais tombé sur son myspace par hasard et je dois bien avoué que je suis resté scié devant les quelques compos dispos toutes plus mélancoliques les unes que les autres.
    Bon, y’a plus qu’à chopper l’album maintenant ^^

  6. Aeneman Says:

    Aaah enfin tu l’as chroniqué :cool:, un très très bel album comme tu le dis, rempli à la fois de cette joie mélancolique (oui je sais c’est contradictoire mais c’est ce que ça me fait penser), de paysages d’antan et surtout d’une classe très rare dans la beauté simple touchant, l’âme humaine…

    Assurément une des plus belles choses de 2007. Et de loin.

  7. Croytaque, visiteur Says:

    Echine broyée mais coeur palpitant et peau dansante, y en a quelques uns, comme ça, heureusement qu’il n’y en a pas trop et qu’il y a beaucoup de laideur pour s’en remettre. C’était quand la dernière fois? Peut-être Arcade Fire, ou pour moi un peu plus perso, Tricot Machine ou Deux accords diront

  8. Zdenek, visiteur Says:

    Content de voir que tu es tombé sous le charme toi aussi 😉

    A plus mec

    (je m’attaque à l’EP de Daedelus bientôt sur mon blog, enfin j’éspère avant les vacances, j’éspère te voir réagir ^^)

  9. Fate Says:

    Super ! Ca fait plaisir de voir que quelqu’un d’autres connait ces mecs. Je t’aime Datura, tu as des goûts superbes – normal, j’ai en parti les mêmes, mais mes connaissances sont largement en dessous des tiennes. 8D

  10. Jaylinx Says:

    Ouah une battle de connaissances musicale :love:

  11. kermalex Says:

    J’ai découvert ce groupe (outre ton article) par le morceau “Nantes” qui passe sur Nova, vraiment je suis sous le charme!

    Et très bon article, as usual 😉

  12. LordMarth Says:

    Que dire si ce n’est que ce Beirut est absolument un régal pour les oreilles, ce monsieur est un autiste de l’instru couplé à un vocalist de talent

  13. Tomma Says:

    sympa ce groupe 🙂

    Ca me rappelle que j’ai une chanson d’eux, il faudrait que je retrouve l’album dont il est extrait. La chanson s’appelle “Mount Wroclai (idle days)”.

    Je suis étonné que Tony Gatlif n’ai pas encore fait appel à eux pour l’un de ces films 🙂 écoute les BO, si tu ne connais pas 😉

  14. Dat' Says:

    La BO de Gadjo Dilo c’est ZE classique ! (bon je n’ai écouté que celle là de Tony Gatlif en meme temps, mais j’ai vu le mec en Live, avec un groupe gitans, plus une selections d’autres groupes qu’apprecie le monsieur.)

  15. Tomma Says:

    belle BO 🙂

    Perso j’aime beaucoup celle de Swing. Celle de Transylvania est pas mal non plus (pas vu le film en revanche).

    j’ai trouvé celle-ci sur Deezer :
    http://www.deezer.com/?urlIdSong=183973

    Sur ce, je retourne écouter la BO de Swing !

  16. Dat' Says:

    Ah oui transylvania! au contraire, j’ai vu le film, mais pas écouté la BO “sur disque”. Reste que sur les “images”, c’etait assez sublime…

  17. romrom, visiteur Says:

    avait découvert tout par hasard à la sortie du premier disque sur un site minable du fin fond des usa, et puis. paf, révélation.

    j’avais peur de connaitre la meme déception qu’avec neon bible, en écoutant ce flying club. certaines chansons me restent là… magnifiques (cherbourg et nantes -avec cette phrase magnifique “it’s been a long time since i’ve seen you smile, gambled away my fright”).
    d’autres me font déja moins rever… peut etre lui laisser encore un peu de temps.

    magnifique chronique.

  18. Coni, visiteur Says:

    est ce que quelqu’un sait dou vient le petit dialogue qui se trouve a peu pret au milieu de la chanson ” Nantes ” ! repondez moi s’il vous plait , je veux savoir …

  19. Lisa, visiteur Says:

    The flying Club Cup est grandiose .
    Quelqu’un connaitrait-il les titres des films dont Beirut met quelques extraits ?

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