Boredoms – Chocolate Synthesizer



Munyu munyu, drums and alcohol





Je me demande bien pourquoi Melt Banana, Christine23Onna, Lightning Bolt ou Animal Collective sont dans ses pages, alors qu’aucun article ici n’a traité du groupe Boredoms, semblant pourtant cristalliser tout ce qui peut se faire de mieux dans les formations précitées.

L’envie d’écrire sur ce groupe a été ravivée récemment à la sortie de Super Roots 9, dernier album en date de la formation japonaise. Mais surtout à cause de la relative déception accompagnant la découverte de ce nouvel opus. Vu la relative monotonie de cette grande piste bien solitaire, intéressante mais clairement en deçà de ce que pouvait nous servir le groupe il y a quelques années. Boredoms, c’est une bande d’allumés nippons ayant commencé à torturer le Rock avant les années 90, et toujours en activité aujourd’hui donc, commençant par des disques complètements fous, ravagés jusqu’à la moelle, représentant le crétinisme assumé le plus insondable possible. Des pochettes immondes à la musique completement insaisissable, la formation avait jeté un vrai pavé dans une mare sûrement trop lisse, avec à sa tête le cultissime Yamatsuka Eye, à la voix presque indescriptible, tête de Hanatarash, et compagnon d’ Otomo Yoshihide ou de John Zorn pour les Naked city…

Petit à petit la musique du groupe a laissé des éléments de Rock psyché infiltrer sa mixture cinglée, pour partir disques après disques dans des constructions de plus en plus épiques, tribales et étirées, finissant sur un mythique concert avec 77 batteurs ( !!!) sous un pont de Brooklyn. Puis plus rien, ou presque. Des performances Live, un groupe qui mute, constamment, qui change même de nom pendant un moment.


La nouvelle galette donc, dernière née de la série des Super Roots, propose 40 minutes de choeurs angéliques matraqués par trois batteurs et un Eye bidouilleur. Cool. Mais c’est clairement en écoutant cette galette (sans compter qu’une opportunité assez miraculeuse m’a récemment permis de compléter la discographie de Boredoms ), au final assez linéaire, que l’envie folle de me replonger dans un disque que j’ai chéri de longues années m’a tenaillé comme jamais : Chocolate Synthesizer. Il me fallait en parler. Trop crétin pour ressurgir dans les discussions sans passer pour un taré. Trop de temps à avoir sauté dessus comme un con, à gueuler des Aciiiid Poliiiiice avec des potes pleins comme des barriques. Trop de temps à tenter de le faire apprécier avec pour seuls résultat quelques regards compatissants ou effrayés, tentant d’etre comprehensifs sur un eventuel probleme de synapses, comme dire que “tout va bien” à quelqu’un alors qu’il vient de toiletter un chat avec une râpe à fromage…
















Désolé pour l’agression visuelle. Mais pour le coup, impossible de l’éviter, vu que la pochette représente à merveille ce que l’on trouve dans cette galette. Et encore, on peut parler d’art ici, vu que les précédentes pochettes du groupes sont toutes aussi hideuses, ayant pour sommet celle de l’ineffable Pop Tatari qui… euh… non… je ne peux pas l’expliquer en fait… A l’intérieur, c’est une orgie de collages et de déguisements débiles à coup de capotes géantes, lunettes en papier et autres chapeaux montgolfières. Tout va bien.








Le pire, c’est que le disque a du se faire des milliers d’adeptes sur son premier titre, Acid Police, ultra fédérateur. D’abords gueulés à cappella, ces deux mots vont se gerber jusqu’à overdose pendant de longues secondes, avant qu’une guitare acérée débarque en balançant une ligne bien tubesque. Eye frôle l’extinction de voix, alors que débarque une rythmique pachydermique et un mur de guitare à faire imploser votre système d’écoute permettant au groupe entier d’hurler la fameuse puchline. Le marasme est en fusion, se transforme en mouvement perpétuel, oscillant entre hymne de stade et brûlot expérimental, supplanté par une déflagration Noise-rock éffarante. Silence, on reprend son souffle, les percussions se muent en attentat industriel, avec un Eye au bord de l’hystérie.
Ce titre, c’est juste l’ouverture parfaite pour un disque de Rock, un truc qui pourrait être repris en coeur et en cris par dix mille personnes dans une manifestation anarcho-truc, dans une enceinte de gladiateur, en faisant du ski nautique, dans une école, dans une bagnole lancée à fond les ballons sur l’autoroute (c’est pas bien), dans une soirée de beuverie absolue, sur un chalet jaune placé en haut de la tour eiffel. C’est régressif comme jamais, completement abêtissant mais surtout ultra jouissif, profondément libérateur après une journée de boulot harassante au moins aussi inutile que ce morceau. Et pour le coup, il cristallise bien ce que l’on peut retrouver au sein du disque : Malgré des compos souvent plus escarpées que cette dantesque ouverture, jamais Boredoms ne mettra de coté ce coté “jouissif”, groovy et entêtant. Malgré un taux d’instabilité mental hautement perceptible, le disque ne s’enlisera jamais dans les travers parfois fatiguant de certains Fantomas… Oui, parce qu’il va falloir se préparer à avoir envie d’hurler les mélodies de cette galette sur toute une journée, façon mmm monsieur machin, vous pouvez me passer ce dossier ? non désolé ! ACIIIIIIIIIDDD POLLLIIIIIICCEEEEEE. …









Bon je dis ça, mais le court Chocolate Synthesizer est sûrement le morceau éponyme d’un album le plus pourri de l’univers, ce qui est en soi un vrai tour de force. Non, sautons sur l’énorme Shock City, qui, après une introduction façon je-frappe-des-maracas-sur-un-egouttoir-à-salade-accompagné-d’une-six-cordes-plus-des-sifflements-lofi, bascule dans un Hardrock hargneux, massif comme la mort, avec un Eye hurlant comme jamais d’une voix suraigu ou caressant nos tympans avec des grondements d’outre tombe. Les guitares électriques feraient trembler la terre entière, et l’on ne peux que sauter partout dans la pièce en s’enfilant du verre pilé dans la gorge. Break, petit intermède latin de pacotille, avec des instruments sûrement dénichés à la brocante du coin, façon turliton de gamin doré à 1euros, avec pour seule partie chantée une sympathique imitation des Gremlins. La batterie tonne au loin, le rythme est épileptique, s’intensifie, débarque en grondant à la vitesse de la lumière, guitares électriques ahurissante et arsenal Noise qui explosent façon bombe atomique, emportant tout sur son passage, piaillements psychotiques, un vrai Tsunami. Le passage à tabac est monstrueux.
Et ce n’est pas Tomato Synthesizer qui rassurera sur les intentions du groupe, passant pour une bande de serial killer compléments détraqués, croquant encore la cuisse du dernier enfant écharpé. On flippe, c’est comme entendre le clown de Stephen King tentant de copuler avec Elvis sur le premier disque des Pixies. Le dernier tiers, juste abominable pour tous cerveaux normalement constitués, tétanisant tant il est hors moeurs/normes, finira de parachever le décors hôpital psy. Ah sinon, la chanson peut se chanter facilement dans la douche, et parasitera votre bulbe rachidien carbonisé en moins de temps qu’il se faut pour le dire. Anarchy in the Ukk tentera de faire cohabiter des zébrures Noise avec du Rock-pop fm, des effets Dub, quelques réminiscences 60’s et un carnaval folklorique japonais composé de zombis assoiffés de sang. Déglingué, et presque sage. (toutes proportions gardées)
Merci à Mama Brain de remettre les choses en place, qui, après une intro de corniaud bourré, va basculer sur une ligne rock qui frôle la tuerie, super dansante. On lève les bras, on transpire, et voila que le Eye repique sa crise, changeant de voix à chaque phrase, entre le gosse de 5 ans découvrant un nouveau mot et le gorille qui se coince un ongle dans une porte. Retour sur le refrain tubesque du titre, on jouit, avant de se retrouver dans un train fantôme psychédélique, avec une batterie transformée en fusil à pompe et des synthés ayant fermenté dans du Lsd pendant 3 mois. Tube rock expérimental faussement crétin du siècle. Enfin non, mais il est gigantesque quand même. On se comprend.








Action Synthesizer Hero, lui, frôlera le point de non retour en terme de folie, en nous arrachant la gueule avec cette vague Noisy presque aussi palpable qu’un cul de nonne dénuée de toute obligation morale, avant de basculer dans un rockabilly hystérique que l’on a parfois eu l’habitude de croiser dans les premiers Mr Bungle. Guitare sautillante, rythme ensoleillé, on s’y croirait chez Johnny Burnette si le chanteur n’essayait pas d’imiter le phoque male cancéreux en train de se faire égorger par un pécheur pas gentil. Phoque qui se fera finalement réduire en purée par une dernière vague sonore à faire pâlir le plus crado des synthés. Hop gros carton à nouveau. Les amoureux du genre tomberont aussi en pamoison devant B for Boredoms, tout aussi énergique, lumineux et hystérique. Merci pour les headbangings furieux, les nuques s’en souviendront.

Mais les Boredoms sauront ne jamais laisser sur place le coté le plus expérimental et barré de leur musique, avec certains titres s’étirant sur plus de 6 minutes, comme Voredoms, pouvant se traduire en langage “montagne russe” : Je te balance trente secondes de faux calme malsain, puis je détruis, fracasse le tout avec des pétages de plombs industriello-noise-core, le tout chapeauté par un chant plus solennelle que précédemment, renvoyant presque à un Hardrock lourd, sombre et poisseux. Puis vous prenez tous ce que vous pouvez trouver dans une cuisine, vous insérez une bonne centaine de pétards et vous mettez le feu au tout, tout en hurlant comme un damné au fond de sa caverne. Les derniers petits grésillements, et une guitare mourante suffiront pour habiller votre envie de réinterpréter les cris géniaux de votre petit cousin mangé par des bêtes sauvages, après être malencontreusement passé sous les roues d’une voiture.

Sinon pour savoir ce que ça donne un orchestre de Jazz passé dans un mixeur, arrosé de bouts de bidoches Punk hardcore, il faudra passer sur Eedoms, alors que Turn Table Boredoms, qui n’a rien avoir avec quelconque Dj, balancera aussi un Rock poisseux entrecoupé de crises d’épilepsie vocales que même le démarrages des soldes ne provoqueraient pas. Le syndrome de la tourette mis en musique.
Le cercle des cinglés disparus se terminera sur un titre presque “normal” après la tempête insensée du disque : Now Gom Synthesizer Way (why ?). Ok je dis ça, mais le tout contient peut être 5 ou 6 phases différentes, mais les passages seront aisément affiliés à du rock fiévreux et acharné. Première minute offrant un duo entre une batterie (qui aurait troqué ses fûts contre des casseroles) et un kazoo, avant qu’un lit de napalm nous transporte sur une guitare bien crade et entraînante, coupé par une trompette toute belle. Ça serait presque mélancolique. Enfin jusqu’à ce que Eye hurle ses problèmes comme un enragé sur un maelstrom de percussions et de gratte électrique, ne brisant étonnament pas cette jolie mélodie égrenée par un xylophone cristallin qui doit vraiment se demander où il a bien pu mettre les pieds. Les dernières minutent crèveront sur un Jazz encore plus chargé en alcool que celui de Kid Koala…










Apres écoute de cet alien total, qui détonne encore aujourd’hui par sa folie, sa liberté et son jusqu’auboutisme, on se demande ce qu’il s’est passé pour que le groupe devienne aussi sérieux. Ce Chocolate Synthesizer étant completement différent de ce que le groupe balancera par la suite. Bon en même temps on va pas s’en plaindre vu que les Cds suivant sont aussi des petits chef d’oeuvres, permettant au final d’explorer tout une frange du Rock grâce à la discographie de Boredoms. Il est clair que ce dernier a du filer de bonnes idées à des formation comme Fantomas, tout en se prévalant de sortir le disque de Rock le plus décomplexé qu’il m’ait été donné d’entendre.


Surtout que sous ses faux airs de crétinisme intégrale, le disque est au final extrêmement précis dans ses constructions, alternant phases de tueries absolues avec expérimentations énormes, le tout saupoudré de borognymes inintelligibles et d’un sentiment de puissance affolant ( Mama Brain, pour n’en citer qu’un). Même si, évidemment, Chocolate Synthesizer contient ce qu’il peut y avoir de plus débile dans le rock, osant même commencer un morceau par un Gimme a B, Gimme an O, Gimme a R, Gimme… BOREDOOOOOOOMS !!!, ce qui, vous en conviendrez, frôle le néant absolu en terme de sérieux dans ce monde de la musique en pleine déconfiture.


Le disque forme un amas absolu, un objet culte rempli de moments indescriptibles, à écouter à fond (mais vraiment) sous peine de ne pas pouvoir surnager dans cette sublime ignominie. Il faut clairement prendre son élan avant de se jeter dans cette galette repoussante au premier abord, qui filera des boutons et grillera le cerveau de n’importe qui en moins de deux.

A écouter en poussant le volume au max donc, tout simplement parce que Chocolate Synthesizer est juste ce que l’on peut trouver de mieux, de plus fou, et surtout de plus jouissif dans le Rock-hardcore-experimental-screamo-psyché-cretin-punk-pop-electro-debile-free-crado-tout-pourri.









Boredoms









15 Titres – Reprise Records
Dat’










  1. Nexus5 Says:

    La derniere photo de l’article est juste enorme ! :ouch:
    Vite, faut que j’ecoute ca !

  2. wony, visiteur Says:

    o_O , c est tentant mais je tiens a mon cerveau, que faire?

  3. Aeneman Says:

    Ah ouais. Carrément. J’ai toujours dit que ces japs étaient des braqués ^^…

    Par contre honte à toi, Fantomas n’est jamais chiant *avis indiscutable sur la question xD*

    …enfin à part le premier peut-être ^^… :nerd:

  4. Dat' Says:

    Nexus5 ==} clair, la prise est juste parfaite…! A la base, c’est un poster filé dans le disque “Vision Creation Newsun”

    Wony ==} Le dilemme est cornelien effectivement ^^ Bah tu as survecu à Melt Banana donc ton cerveau est deja mort… donc tant qu’à faire…

    Aeneman ==} Pour Fantomas, je dis pas que c’est chiant oula, je suis un gros fan de ce qu’ils font ! juste que parfois, sur certains disques, le groupe s’embourbe un peu et au final offre des galettes qui s’écouteront qu’à tres petites doses (Le premier, ou delirium cordia par ex, ou le “fun” est oublié, contrairement à leur Suspended animation par ex…)

  5. pamparachutiste Says:

    Excellente chronique 🙂
    Ca me fait penser qu’il faut que je le (re)réécoute… J’ai un peu tendance à rester sur le duo Shock City/Tomato Synthesizer ces derniers temps (plus j’écoute, plus je kiffe, et ce truc me fait un tel effet que je suis plus en état pour écouter le reste du skeud)

  6. KIKINAWAK, visiteur Says:

    Ouais moi aussi je me suis fait passer pour un malade mental en voulant faire partager ce meilleur album des boredoms à mon entourage! Mais qu’est ce que c’est bon! Comme un hurlement avant la bataille!

  7. Dat' Says:

    Ahah, c’est sur que ce n’est pas le disque à passer durant les reunions de famille, c’est sur… Meme les Boredoms sous leur aspect plus “tribal” sont vraiment barges aussi d’ailleurs…

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