Filastine – Burn It !



Trente-cinq jours sans voir la terre… Pull rayé, mal rasé, on vient de débarquer…






A la base, ce disque ne devait pas foncièrement atterrir sur ces pages. Mais plus je l’écoute, 4 mois après sa sortie, plus je me laisse happer par cet espèce de tour du monde défoncé par la musique électronique te le hip-hop. Le cross over parfait. Le genre de disque qui vous balance aux quatre coins du monde en 1 heures, sans laisser pour compte machines criardes et autres truanderies sonores. Surtout que le mec en lui-même, détaché de son disque, mérite bien aussi un petit paragraphe. Un activiste radical comme l’on en fait peu…


Il y a des musiciens qui passent plus de temps à faire le tour du monde qu’à s’enfermer dans leurs studios, et Filastine en fait clairement parti. Mais ce dernier n’est pas qu’un vieux baroudeur des familles, mais surtout un véritable militant bien hardcore : Alter-mondialiste jusqu’à la moelle, perturbateur en chef des sommets du G8 ou de l’OMC, il sillonne surtout la planète pour produire des groupes locaux donner des concerts n’importe où, tant que l’amour de la musique y est et qu’il y a moyen de gueuler :

Dans une voiture retapée en Soundsystem aux USA, pour une campagne électorale perché sur un camion dans le centre de Tokyo, habillé comme un détenu de Guantanamo à Montreal, Seul déambulant dans des parcs avec son pc sur un caddie, au sein d’une communauté Zapatiste à Mexico, ou foutant le bordel dans les colocs commerciaux avec son Internationale Noise Brigade… Les exemples et anecdotes ne doivent pas manquer. Surtout que le mec sillonne le globe pour sampler des sons, et former des groupes en veux-tu en voila.




Toujours à l’affût de petites perles, en ne délimitant désormais plus son champ d’action au seul hexagone, Jarring Effects, qui s’ouvre décidemment aux citoyens du monde (cf l’indispensable coffret CapeTown Beats from Afrique du Sud) a du plonger sans hésité une seconde dans l’aventure à l’écoute de ce vrai petit bijoux, qui respecte d’ailleurs le cahier des charges du label à la lettre, en télescopant de la plus belle des manières cultures de multiples destinations avec l’électro ou/et le hip-hop.












Beaucoup de gens mêlent électro et musique world en prenant à droite et à gauche différents Samples, habillables avec plus ou moins de talent. Filastine lui, va directement chercher à la source. Peu d’albums ont autant eu le goût de voyage que ce Burn It. Vraiment. Fresques électroniques, brûlots Hiphop, chants traditionnels, expérimentations en tout genre, Burn It prend tout.

Et après une brève intro, Quémalo Ya nous plonge dans un Hip-hop que l’on a peu, à l’instar du Japonais, ou de celui des pays de l’est (sautez sur la compile “Scandinavian hiphop Invasion” si le genre vous intéresse !), la possibilité d’entendre malgré son extrême richesse : Celui qui vient d’Amerique du sud, où percus et rythmes saccadés ont généralement la part belle et s’ajustent mieux aux flows hachés et chantants du genre. Effet garanti sur le bassin. Dans le même genre, on trouvera plus loin The Last Redoupt dans une veine plus chaloupée, avec un refrain du plus bel effet, zébré de cette ligne synthétique un peu vieillotte. Un putain d’excellent titre, qui sait draguer MTV sans tomber dans la banalité. Toujours en Hiphop, mais sans parole pour cette fois, Judas Goat) est une vraie petite pépite, rappelant les premiers morceaux de Dj Krush. Sample oriental martelé d’un beat à casser les nuques, accompagné sur la fin de percus sèches, on se croirait presque à marcher dans le désert sous un soleil de plomb, en priant de tomber sur une oasis salvatrice. Les Derviches Tourneurs se mettent à l’abstract hip-hop.










Mais le premier vrai morceau à nous arracher la gueule, à nous retourner tout en nous baladant dans tous les coins tant sa structure est au départ insaisissable, c’est Splinter Faction Delight 4éme plage du disque. Démarrant sur un superbe chant traditionnel à vous dresser tout les poils de votre corps, et rapidement chapeauté par une rythmique massive et bien crade, le titre va basculer sans prévenir dans un Hiphop dégueulasse (mais vraiment, genre ODB coincé à poil dans une cave depuis trois semaines) ou les certains L3arbee & Lna vont cracher des flows taillés à la pierre ponce. Le schisme entre la pureté de la complainte féminine et des assauts des deux rappeurs est à couper le souffle, tant le tout est saccagé, maladif, presque trop brutal pour être accepté par quelqu’un de sain mentalement. On croirait un morceau empli de grâce complètement parasité, détruit, cassé par Filastine et ses deux potes. Le tout renforcé par ces changements de rythmes brutaux et ces bruits de fréquence de portables qui grésillent.
Ce titre, c’est un peu le bootleg parfait entre la pureté du diamant et les bas fond d’un quartier sordide. Impressionnant.

On en se relèvera plus. La suite est du même niveau, voir plus. A commencer par Crescent Occupation, qui part sur une Drum & Bass bien classique au rythme ultra rapide. Mais rapidement le titre devient lumineux en accueillant ce violon crachant sa peine de la plus belle des manières. Le morceau ralenti, repart de plus belle, accompagnant ces cordes aux teintes d’Europe de l’est. Badmarsh&Shri sont dans la place (même s’ils viennent d’Inde, m’enfin on se comprend).










Mais le vrai bijou, que dis-je, le petit chef d’oeuvre de ce Burn It, c’est bien Autology. Apres une longue intro où une note de violon se fait de plus en plus pressante, la belle du morceau Splinter Faction Delight , présentement nommé Mlle « Jessika Skeletalia Kenny » revient pousser la chansonnette avec sa voix sublime, à crever le coeur. Ici, on lui laisse la liberté de s’appesantir sans qu’une bande de désaxés lui coupe la parole. Pourtant le morceau sera tout aussi dérangé et imprévisible dans sa structure. Filastine lui-même intervenant ici en zébrant le tout de beats acérés, transformant ce chant divin en chair à canon pour un Break-Jungle de grande classe. C’est absolument sublime. LE titre qui convaincra tous les sceptiques.

Toujours dans le créneau dépaysement garanti, Dance Of the Garbage Man va vous noyer au milieu du fameux carnaval brésilien, en balançant une Batucada endiablée et survitaminée (voir presque fatigante sur le long terme). Sympa avant d’aller au boulot, histoire de voir de jeunes filles aux habits multicolores frétiller dans les mornes couloirs du Métro. On lui préférera (dans un style radicalement différent certes) l’excellent Hip-hop dérangé de Boca de Ouro, où nappes synthétiques iront de paires avec deux couplets ultra maîtrisées, enlaçant un refrain aérien où chant étouffé et (encore) parasité s’alignera sur un violon de toute beauté, avant un final presque psychotique.

Je le disais enfin plus haut, mais là où Filastine semble le meilleur, c’est bien quand il apaise ses machines pour nous envoyer sur une autre planète. Cela tombe bien, les deux derniers titres (sans compter l’interlude qui les sépare) sont de ceux là. Ja Helo tire dans l’electro tribale progressive, avec cette longue ascension qui va déboucher sur de superbes choeurs, très « GhostInTheShelliens » allant et venant sur vos oreilles comme le ferait les vagues sur une plage de sable. Le tout est juste pétrifiant.

Dreams From The Wounded Mouth, lui, virera dans le mystique, avec un chant toujours aussi pur et sublime, dérange, bousculé, par des digressions industrielles. Le rythme pachydermique démarre, s’emballe, flirtant avec le Breakcore, la demoiselle s’envole directement au paradis dans cette énième version tentative de marier la beauté suprême avec le chaos. On massacre tout, presque avec violence, avant de retomber dans une conclusion angélique, pleine de sérénité.
En haut du plus haut des sommets, à admirer la plus impressionnante des vus, en se laissant aller au grés du vent et de cette voix mourant peu à peu dans une ultime excursion électronique, déformant doucement le chant calme et emplie de plénitude. A chialer de beauté. Satisfait ou (pas) remboursé. On ne pouvait rêver meilleure conclusion.









On peut dire que Filastine invente les montagnes russes internationales, celles qui traversent tous les pays, en n’oubliant pas d’y intégrer des Loopings à faire peur, pour pimenter le tout. Les balades autour du globe, on connaît. Mais autant secouées et riches que ce Burn It, c’est plutôt rare. Certes la recette n’est vraiment pas nouvelle, et on pourrait presque craindre la redite, mais Filastine se sort tellement bien du piège je-maquille-de-la-musique-world que le disque risque de faire parti des meilleurs du genre, malgré une hétérogénéité extrêmement poussé qui risque de refroidir ceux qui n’aime pas sauter du coq à l’âne dix fois dans la même galette. (Voir au milieu même d’un titre). A dire vrai, à part l’irritant Palmares, curieux et désagréable morceau où une demoiselle égraine en français des phrases sans rapport apparent, Burn It frôle le carton plein, oscillant entre titres fiévreux et rageurs, et morceaux lumineux et sublimes.

Burn It, est le témoignage foisonnant d’un artiste ayant fait le tour du monde, et qui tente de nous en transmettre quelques bribes, non sans oublier de les avoir enfilé dans la moulinette de son esprit malade. Loin des Tour Operators et des circuits organisés bien cadrés, Filastine balance un album d’une richesse assez incroyable, saccagé en diable, nous offrant un nouveau port à chaque encrage sonore. Certains titres sont justes mirifiques, comme Autology, Splinter Faction Delight, Boca de Ouro ou l’incroyable conclusion Dreams From The Wounded Mouth.

Tres très chaudement recommandé.






















16 titres – Jarring Effects
Dat’










  1. wony, visiteur Says:

    je me demandais pourquoi tu ne l avais pas chronoiqué depuis un bon bout de temps! Un disque sublime, et je suis tout a fait d accord avec toi pour Autology, l album mérite d etre acheté rien que pour cette piste, ca doit etre un des sons que j ai le plus écouté ces derniers mois, sans aucun doute !

  2. Blooguear Says:

    J’me le suis écouté aujourd’hui.

    J’ai pas lu la chronique encore, mais j’avoue que le début m’a perturbé, les paroles en français un peu à part, j’ai trouvé ça moche… mais quand on écoute bien, les instrus sont géniale, et puis l’ambiance sur chaque morceau !! on dirait qu’on voyage partout dans le monde ^^

  3. Dat' Says:

    Ouai le morceau en Français est assez moche… Mais à partir de la 4éme piste, c’est du très très bon !

    Wony ==} Ah ben on est bien d’accord sur Autology…

    et ne pas oublier Splinter Faction Delight !

  4. LordMarth Says:

    Tiens pour une fois que je met la main sur une galette peu avant que tu pondes la chronique qui va avec, un nouvelle expérimentation de lecture fort appréciable !

    Autology envoie du lourd, impossible de le nier, et j’aime aussi la gnawaienne Dance of the Garbageman, niquel pour commencer la journée 😀
    Pensée aussi pour l’autre bijou sorti de ce vent ethnique qui souffle sur ce disque, l’incroyable mais vrai Boca de Ouro !

    Sinon, que dire de l’image de bas de billet qui est juste énorme 😀

  5. Skorn Says:

    Ca m’as intrigué. L’air cool.

  6. Neska, visiteur Says:

    J’ai envi de dire “merci” pour cette chronique, puisque bizarrement, j’avais un peu rapidement rangé ce disque “au placard”, ne m’étant arrêter que sur une Autology et une Judas Goat absolument géniales. Merci donc pour les quelques réécoutes qui m’ont fait redécouvrir ce disque excellent dans son ensemble !
    Tout à fait d’accord avec LordMarth en ce qui concerne l’image…
    J’en profite pour te poser une petite question pas du tout innocente : à quand une chronique de Psykick Lyrikah ?
    Nouvel album le 30 avril 😉
    Et j’en profite encore pour faire un peu de pub aux personnes en quête d’informations sur les sorties à venir des disques/albums ==> http://adiktblog.blogspot.com
    A bientot :d

  7. Dat' Says:

    Le Psykick, ça m’a un peu embeté que Teddybear ne soit plus de la partie…
    Je ferais peut etre une chronique du sublime premier disque…
    En tout cas j’attends quand même le nouveau avec grande impatience… !

  8. Neska, visiteur Says:

    Oui, malheureusement, Mr Teddy l’ours ne sera plus là… Mais ce ne serait pas Robert le Magnifique qui le remplace pour ce prochain opus ?? Si c’est le cas, je suis toujours aussi heureux.. Et vu ce que ça donne sur “De plein fouet”, qui est sur le myspace du groupe, je n’ai que plus hâte d’avoir cette galette qui s’annonce extraordinaire (je ne suis pas du tout objectif, je suis plus que fan de ce groupe !!)
    D’ailleurs Robert vient de sortir un cd également..(pas encore écouté)

  9. Dat' Says:

    Oh j’etais pas au courant pour le greffon Robert. Clair que cela casserait bien la baraque aussi.
    Pas ecouté le nouveau Robert non plus mais s’il est du niveau des deux precedents, faut clairement y jeter une oreille…

  10. Deepo Says:

    Dans le même esprit, ya le Archipelagoes de Maga Bo qui est vachement bien aussi!

    http://www.discogs.com/Maga-Bo-Archipelagoes/release/1592070

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