CUM ON MY SELECTOR 7 : Young Fathers, Sand Circles, Ital Tek, Egyptology, Jason Grove, Burial, GoldFFinch, Barker & Baumecker

Posted in Chroniques on December 28th, 2012 by Dat'


Tomorrow comes today



Parceque c’est la fin de l’année, je balance un dernier petit Cum On My Selector, avant le sempiternel top de l’année, qui sera publié début Janvier, comme d’habitude. De quoi patienter et écouter quelques gemmes avant le nouvel an, et revenir sur deux trois disques que je n’ai pas eu le temps de chroniquer, en plus de quelques gemmes parues sur des Ep/Lp sortis trop discretements. Bonnes fêtes donc, et rendez-vous début janvier pour le (j’espère) gargantuesque Top 2012 !




Young Fathers – Sister

A la première écoute de ce morceau, je n’ai pas pu m’empêcher de lancer un “putain ce tube !”  à haute voix. Pour le moment, le groupe n’est rien, mais risque de peser lourd après la sortie de leur premier EP, par Anticon, pour début 2013. Si j’ai bien compris, Young Fathers avait déjà sorti discrètement la galette en autoprod, et le label californien a fleuré le filon, en signant le groupe écossais pour rééditer le tout. Franchement, je n’avais pas été autant frappé par un morceau estampillé Anticon depuis le Can’t Feel Love anymore de Bike For Three. Ce Sisters est une tuerie, un mix parfait entre le hiphop cockney et un rock tribal à la Tv On The Radio. A dire vrai, c’est presque ce que j’avais imaginé pour le futur de la bande à Sitek, ce que le groupe aurait du pondre : Instrue folle, couplets parfaits, et surtout refrain lumineux, superbe, imparable.
Les mecs sortent de nul part, et balancent une mixture qui écrase toute concurrence. A chanter sous la douche, à mettre à fond dans sa voiture, à écouter comme un dingue en sautant dans sa chambre pour se donner un peu de courage avant une nouvelle semaine de boulot. “Fuckin Awesome song” dit un commentaire youtube, pour une vidéo inexplicablement encore trop peu consultée. Autant vous dire que si le reste de l’Ep est du même calibre que ce Sisters, on tient déjà l’une des sorties majeur de 2013.







Barker & Baumecker – Schlang Bang

Pas eu le temps de faire une chronique en bonne et due forme, car le LP de Barker & Baumecker est arrivé bien en retard au Japon. Et ça m’embête, car j’ai aussi un peu pris mon temps avant de me pencher sur ce LP, qui pourrait bien se retrouver dans les plus gros disques de cette année 2012. Pris mon temps, car malgré les bonnes critiques, j’étais sur de tomber sur une galette de techno allemande bien dark et assommante, ce qui me fatigue pas mal ces temps-ci. Grosse erreur. Car le disque part dans tous les sens, et réserve pas mal de surprises, entre techno choquante (Buttcracker) et fresques belles à pleurer (Spur, Sektor…). Mais l’album, c’est aussi beaucoup d’electro fortement influencée Uk Garage, comme ce Schlang Bang ahurissant, morceau 2step vicieux et défectueux, qui te rend dingue avec cette bassline bien traumatisante, qui te casse la tronche avec ses rythmes claudiquants. On a l’impression d’entendre Jacques Greene faisant la BO du clown ça, il est revenu, via une musique qui transpire les caves londoniennes/boites berlinoises, mais avec des danseurs aux moignons protubérants au milieu du dancefloor. Inhospitalier, excessif, imparable. Tube vicié, mais tube absolu, évidemment.







Ital Tek – Yesterday Tomorrow Today

Parler d’une époque révolue, c’est toujours marrant. Il fut un temps, en 2007, où Planet-Mu allait changer doucement la facette de la musique electro en Europe, en commençant à balancer des LP de Dubstep bien lourds et métalliques, sans savoir que ces derniers allaient engendrer, quelques années après, des monstres ignobles. On peut parler du sublime premier LP de Distance, My Demons. Ou de l’excellent MRK 1. Du plus apaisé Pinch. Des mecs qui n’existent plus vraiment, broyé par la vague du bro/dubstep actuel. Mais en 2007, il y a eu aussi l’Ep d’Ital Tek, indispensable 4 titres lui aussi précurseur d’un genre. Avec, en point d’orgue, le morceau White Mark, qui m’avait foutu une baffe monumentale à sa sortie. Le mec a senti le vent tourner, et s’il est resté sur Mu, sa musique ne flirte que de très loin avec le mouv’ dubstep. Pas eu le temps de chroniquer son nouvel LP sorti il y a quelques semaines, faute professionnelle, car Nebula Dance est une sacré galette. Juke-electronica, ou IDM légèrement footworkée, comme le veut la tendance actuelle chez Mu, Ital Tek balance avec Yesterday Tomorrow Today une intro qui pourrait presque être celle d’Itsu de Plaid, avant de lâcher les rythmes épileptiques fourmillant de partout. C’est super beau, parfaitement maitrisé, et même si un peu trop sage, impossible de ne pas s’en délecter.







Sand Circles – White Sand

Le LP Motor City de Sand Circles est un drôle d’objet. On y trouve quelques complaintes synthétiques brumeuses, deux trois fresques chiantes comme la pluie, et une poignée d’élucubrations techno façon Detroit sous morphine. Et au milieu de tout ça, une track magistrale, White Sand, qui concentre toutes les directions arpentées dans le LP, pour accoucher d’un bordel techno-shoegaze fascinant, rouleau compresseur frisant les tympans, à base de clavier larmoyants et nappes étouffantes. Le beat est lourd, pesant, binaire et presque atone, bâillonné par le mur de synthés assourdissant. On écoute ce White Sand les yeux écarquillés, à tenter d’identifier un semblant de logique dans cette mélodie de fin du monde. My Bloody Valentine réinterprété par une baleine dans les fonds marins, ou un Fuck Buttons dépressif coulé sous trois mètre de béton. On aurait juste voulu que le titre dure 3 minutes de plus, histoire de voir tous nos repères temporels voler en éclats, annihilés par cet ovni one-shot, secouant un disque un peu trop sage. On va quand même surveiller ça de près.







Egyptology – Airborn Corridor

Des groupes qui font de la musique avec comme base des synthés vintages, il y en une tripoté. C’est parfois très beau, souvent banal, flirte entre le boursouflé et le fascinant. Sur ce Airborn Corridor, ça commence de façon un peu neutre, loin d’être saisissant. Mais le morceau dure plus de 7 minutes, et semble vouloir prendre son temps. Tu comprends que le bordel va être une tuerie à 2min56 exactement. Cette petite mélodie imparable qui débarque. Qui se déplie, qui se dédouble, qui te parasite graduellement les synapses. La science de la litanie. On peut dire ce que l’on veut, c’est quand cette dernière est belle qu’un morceau est réussi. Et là, à partir de cette fameuse 2min56, le morceau part dans une complainte mélancolico-spatiale, un truc beau qui te plante des étoiles dans les yeux et des rêves dans le cul, qui te donne envie de dériver sans vie dans les voies lactées, à la recherche d’une planète inconnue emplie de miel et de corps nus. Slagsmålsklubben émo après une rupture amoureuse, Emeralds décharné en train de chuter dans un ravin sans fin, Egyptology lâche un album contenant quelques pistes sacrées. On est d’autant plus étonné de voir que derrière ce blaze se trouve notre (ancien) hystérique O.Lamm et son pote Domotic. Glisser sur ce morceau en pleine nuit blanche ? Bonheur.







Burial – Truant / Rough Sleeper

 Sérieusement, ça commence à me foutre sur les nerfs de me faire baiser à chaque fois. A CHAQUE FOIS. quand un nouvel Ep du mec sort, je me dis toujours “bon Burial, j’adore vraiment, mais il faudrait que le mec change un peu de recette, qu’il évolue quoi”. Le mec fait peu ou prou la même chose, si l’on écoute pas attentivement. Et pourtant, il me défonce le coeur. A chaque release. Et celle là peut être encore plus qu’une autre. Le mec continue son trip de morceau très longs contenant plusieurs segments differents les uns des autres. Les ruptures peuvent gener. Mais bordel, comme c’est beau. Comme c’est pur. Comme c’est parfait. Les synthés de Truant te donnent envie de chialer. Cette voix qui intervient à partir de 1min50 me brulent l’échine. “I felt in love with youuu”, c’est exactement ça, continue de susurrer mademoiselle, car je t’aime tellement.
C’est marrant, car cet Ep d’une demi heure ressemblerait presque à une mixtape, d’idées jetées les unes avec les autres, rampe de lancement pour un prochain album. On rêverait presque d’un disque de la sorte, une piste seule d’une heure, compilant une quinzaine de petites tracks ans début ni fin, que l’on croiserait dans nos oreilles comme de simples tranches de vie dans le métro. Burial est un fou, Burial est un enfoiré, Burial est toujours trop haut. Ici, on a l’impression que le bonhomme tend vers un Uk Garage plus assumé, moins enfumé, et ce n’est pas pour me déplaire. Allez, continue de sortir tes claviers émo, tes voix d’anges et tes rythmes biaisés. Et sort ton album bonhomme. En attendant, on se bouffe ton Ep parfait jusqu’à la mort. Petite anecdote, cette video pur Truant montre le trajet inverse exact (Odaiba vers Shimbashi) de celui de la video du Boards Of Canada x Machinedrum. La coïncidence est assez marrante pour être signalée.







Jason Grove – Bonus Beats

Oh, oh, oh. A la première écoute de ce Jason Grove, je n’ai pas pu empêcher un très large sourire se dessiner sur mon visage. Car Bonus Beats, c’est tout ce que j’aime, et que j’ai pourtant du mal à trouver. Alors oui, c’est de la Deep House. Et de la Deep House, il y en a plein. Oui c’est aussi quelque peu mâtiné de Uk Garage, avec voix puputes-soul et rythme boiteux. Là aussi, il y en a beaucoup, des morceaux de la sorte. Mais celui-ci arrive à trouver l’équilibre PARFAIT entre Deep House et Uk Garage. Putain, tout est mortel, c’est parfait, absolu, ça pue le sexe et le stupre, la mélancolie et la nuit, les mannequins fatiguées sur hauts talons et les vieux camés affalés sur canapé. Malheureusement, l’album 313.4Ever n’est pas aussi parfait sur toute sa longueur (sinon il se serait retrouvé direct en haut de mon top de l’année) mais recèle de bijoux gravement affriolants. Ce Bonus Beats, ce n’est pas de la drague sur internet, mais du putain de racolage bien moite entre deux bières dans une boite de nuit. Un truc qui fait bander, mouiller et battre les cœurs. Et c’est bien ça le plus important.







GoldFFinch – Belle

Hey, je ne pouvais pas finir un Cum On My Selector sans un morceau de 2step bien cliché, avec voix pitchées, beats à la El-B et mélodie émo ! Alors ce Belle, je suis tombé un peu par hasard, et quelle bombinette les amis. Hilghlight d’un excellent EP (Model fracasse pas mal aussi), cette production de GoldFFinch (from Belgique, pas bien connu) existe surtout grâce aux très beaux synthés planants œuvrant dans le fond, bouffés par la midinette essoufflée qui lance ses “togezer gess you gat to ké di try” inintelligibles, mais diablement sexy. Vu les 3 ou 4 ep sorti par le bonhomme cette année, on devrait en savoir plus en 2013. Du bon boulot.







Dat’

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Tessei Tojo – My Little Beautiful

Posted in Chroniques on December 19th, 2012 by Dat'


It’s not me, it’s you



Cela peut sembler bizarre, mais je me fais un peu de soucis pour la musique électronique japonaise, tout du moins celle présente dans les magasins de disques à Tokyo. Il y a certes un terreau hallucinant de producteurs japonais electronica-ambiant dans les net-labels, ou des mecs balançant une musique de haut niveau en arpentant toutes les salles de concert underground de la capitale. Mais malheureusement, ce n’est pas cette musique électronique qui intéresse les japonais, et à fortiori les rayons de disque.

Car à Tower Records et compagnie, 95% des disques du rayon Electro sont en fait des horreurs lounge-world-chill à base de piano et teintes champêtres façon musique d’ascenseur. Alors que l’electro jap d’il y a 3 ans souffrait d’un mal tout aussi grave, aka le copier coller des recettes Ed Banger, on assiste aujourd’hui à une lente nécrose des rayons (pourtant toujours bien fournis), tendant vers l’apathisme le plus total. Oh, certes, des mecs comme Geskia!, Aoki Takamasa, Ametsub ou Daisuke Tanabe sont toujours bien mis en avant, mais ils deviennent des exceptions, là où ils étaient norme il y a 6 ou 7 ans.

Alors d’une part, l’achat à l’aveugle, qui était ma discipline favorite à l’époque, est devenu bien trop dangereux. Et surtout, on peut passer 1 heure dans le magasin à écouter des merdes avant de tomber enfin sur le petit bijou tant attendu. Autant casser le suspense tout de suite, ce My Little Beautiful de Tessei Tojo fait parti des belles surprises.








Que les Japonais soient traumatisés par le rap US ou la musique électronique française est un fait, et cela se ressent dans la majorités de leurs releases. Mais le label Warp a lui aussi fait son petit bonhomme de chemin chez les nippons, en inspirant bien des carrières. Pour Tessei Tojo, point d’innovation, impossible de ne pas avoir des références en pleine tronche quand on écoute ce My Little Beautiful. Recette déjà arpentée donc, mais rondement menée, assurément. Le label Progressive Form tient une place importante dans l’évolution de l’electro japonaise, mais sur cette release, les influences sont évidentes.

Ambiguous Reality démarre le LP à fond les ballons : superbes nappes pas étrangères du vieux Warp en guoguette, mais martyrisées par un rythme electronica complètement peté, entre acid anglais et relents de juke mutante. C’est drôlement beau, superbement maitrisé, flirtant avec le fan-service. Mais quand c’est parfaitement branlé, on ne va pas faire la gueule. Quand Innocence démarre, on a envie de s’exclamer “hey mais c’est du Squarepusher!”. Clairement, on nage dans le Tom Jenkinson de la grande époque (et non pas celui du dernier album) avec les quasi-même claviers utilisés. Ici aussi, c’est mélodie cristalline qui n’en fini plus de s’envoler, c’est rythmes electronica qui fourmillent de détails, et surtout un coté épique vs fragilité qui fait tant défaut à un bon nombre de productions d’aujourd’hui. D’autant plus que le japonais s’amuse à mettre l’accent sur une mélodie qui n’en finit plus de chialer, plutôt qu’à tenter l’esbroufe du rythme impossible à capter.

Indivisual Truth sera encore plus atmosphérique, avec une bassline dantesque, un rythme plus lourd, et un chapelet de synthés toujours enclins à broyer les cœurs. La base du morceau vrombit à n’en plus finir, tandis que les mélodies s’occupent de chasser les étoiles. Parfait morceau oscillant entre cauchemar pour les voisins et litanie electronica belle à en pleurer. Tessei Tojo est haut, très haut. Et même si la fin est un peu abrupte, décidant de se dérober après trois petites minutes, on ne peut qu’en ressortir le cœur léger, avec des ailes d’anges plantées dans le cul en bonus.

Mind Game sonnera la charge, en dévoilant une facette plus agressive du Japonais. Vrombissements à faire trembler un immeuble, longue intro à base de claviers tubesques complètement fous, le rythme pachydermique et déstructuré ne déboulera qu’après deux longues minutes dissonantes et belles comme la mort. Cette fois, on se prend une grosse claque de 5 minutes, tunnel techno épileptique qui hérisse les poils et malaxe la colonne. Et même si l’attaque est héroïque, Tessei Tojo n’en démord pas, sa musique garde ce coté hypnotique et étouffant inhérent au LP. Une sacrée claque.





Que la scène Juke mise en lumière ait marqué le Japon, impossible de le contester. Dans les magasins Tokyoites, chaque sortie Juke est placée en tête de gondole, et Planet Mu dominerait presque les rayons electro “import”, avec ses compilations Footwork (Bangs and Works Vol I& II) bénéficiant d’encarts publicitaires cartonnés aussi grands que le dernier Rihanna ou Frank Ocean. Et on croise de plus en plus de musiciens s’attaquant aux rythmes épileptiques made in Chicago dans leurs albums, live et dj set. Ici, on sent que Tessei Tojo a du se prendre une jolie claque en posant une oreille sur ce mouvement tant Opposite Side sent le Footwork tuné à la Blade Runner façon Severant (encore un !). Comme depuis le début, c’est nickel, impressionnant de maitrise, super épique.

An Imperfect Spring ravira les esgourdes, mais frustrera gravement aussi, avec ce sublime morceau d’abstract enfumé qui ne durera que… 2 petites minutes. Le sacrilège. Deux fois plus longue, on tenait le bijou absolu. La grosse erreur du LP. Bon, on pourra se dire qu’il suffit de se passer le morceau deux fois d’affiler, mais quand même, impossible de ne pas grincer des dents devant ce chef d’œuvre avorté. Heureusement, Child Song partira vers des territoires encore plus brumeux, avec une ambiant passée à la moulinette purée de pois. Petite mélopée toute fragile qui se fraie un chemin dans ses synthés sortant du brouillard, c’est beau, ça prend tout le temps nécessaire pour se déplier avec grâce et candeur.

L’album continuera sa mutation dans des univers plus ouatés et apaisés avec Kikori, morceau façon caverne de glace, bourré de détails, de mélodies accouchant de mélodies, de synthés sortant de nulle part, s’amourachant les uns les autres sans être perturbés le moins du monde par un rythme glitché et irrégulier certes, mais presque mutin, en position de retrait. Au final, seule l’avant dernière track, Bass, partira dans un trip plus caverneux, tout en sensibilité, délaissant les nuages pour un essai ambiant mélancolique…  En conclusion, My Abstract refera la part belle aux synthés taquins, ambiances Warp rétro et arpèges de synthés émo, pour un exercice très candide, que l’on aurait aimer voir s’envoler pour de bon sur la fin, mais qui restera une jolie façon de clore le débat.

Deux remixes bonus agrémenteront le CD, et si la refonte d’Innocence par Nyolfen est loin d’être indispensable, celle de Indivisul Truth par Fugenn & The White Elephants impressionnera par la “consistence” du son, décapante dans la dernière minute. Le morceau devient encore plus épique que l’original, et se paiera une conclusion folle furieuse, en mode Drill’n’bass vs claviers à chialer, qui m’a littéralement scotché à la première écoute. C’est rare qu’un remix placé en fin de disque me fasse autant d’effet, et celui-ci se glisse même dans les indispensables du LP.






Alors oui, en écoutant ce disque, on pense méchamment à Squarepusher, un peu à Clark, et l’on voit constamment un gros WARP RECORDS qui clignote en mode gros néon rose dans ta face. Ici, on ne cherche pas ici l’innovation, le disque qui casse les limites. Mais les mélodies, superbes, sont là. Les rythmes déstructurés aussi. Impossible de ne pas prendre de plaisir en écoutant ce My Little Beautiful qui se complait certes dans le fan-service, mais qui le fait avec talent. Et justement, au moment où pas mal de légendes Warp se mettent à la guitare folk ou tentent des comeback fallacieux, il est appréciable d’écouter un disque qui fait de l’electronica comme “avant”, et qui le fait bien, un peu comme Yimino il y a quelques temps.

Bien qu’un peu court, et ultra référencé, ce petit LP de Tessei Tojo contient certains des plus beaux morceaux electronica entendus cette année. A ne pas louper.






Tessei Tojo “Innocence” from yuma saito on Vimeo.






12 titres – Progressive Form

Dat’

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CUM ON MY SELECTOR 6 : Ricardo Tobar, Vect, Quam, Harmonimix, Boards Of Canada, Disclosure, Nick Solé, Frank Ocean

Posted in Chroniques on December 10th, 2012 by Dat'



Cum On My Selector 6



Ricardo Tobar – Recuerdos

Si je regarde d’un œil curieux les sorties de In Paradisium, j’étais passé à coté de l’édition simple de cet Ep de Ricardo Tobar lâchée en début d’année. Il a fallu qu’il ressorte, cet automne, agrémenté de remixes de Mondkopf et Qoso, pour passer sur mon radar. Et quel EP ! Une techno dure, sombre, ultra mélodique, pas loin des premiers essais de Das Glow. Mais avec ce brouillard, cette purée de pois sonore gluante et étouffante, qui donne un charme tout particulier à cette release. Et si le beau Esoteric ou le traumatisant Carnaval resplendissent, c’est clairement Recuerdos qui te fout une grosse mandale dans la gueule. Cette espèce de longue progression glaireuse, sublimée par cette ligne acid à bout de souffle, drague rapidement la colonne vertébrale. On est complètement perdu dans ce tunnel glauque, nous donnant l’impression de danser à 4h du matin  dans un club où la fumée de clope nous empêcherait de voir même nos propres mains. Se laisse envelopper par ce brouillard cancérigène, et dériver aux grès de substances alcoolisées. C’est beau, on en veut plus. Surement l’un des meilleurs EP de ces derniers mois.







VECT – What I’m Gonna Do (Everydayz remix)

Alors, pour Vect, je suis tombé complètement par hasard sur ce monsieur, qui m’a tout de suite accroché l’oreille avec son abstract hiphop/bas music superbement troussé. Ce français (ou belge?) a sorti cette année un  petit LP (de 30 minutes), Altitudes, que l’on peut chopper sur son bandcamp pour une somme bien modique. Et ces 5 euros seront bien mieux dépensés dans ce disque que dans un paquet clope, Vect nous offrant un superbe abstract bourré de samples soul et voix pitchées, des trucs qui te font claquer des doigts tout en te draguant la nuque, dans la directe lignée de mecs comme Two Let Ears, Lapalux ou Fulgeance. What I’m Gonna Do est un des highlights de ce LP, et on le trouve ici remixé par Everydayz, autre compatriote de l’abstract timide mais superbement taillé. Moins direct, mais encore plus beau, le morceau ici remixé se retrouve plongé dans un excellent écrin slow-motion, hypnotique et ouaté, qui dressera les poils de tout amateur d’abstract lunaire. J’ai longtemps repoussé cette petite chronique de ce Altitudes par Vect, que j’écoute depuis sa sortie. On est en décembre, il était temps de le faire, car ce mini-album se trouve être l’une des belles surprises de 2012.







Trimbal – Confidence Boost (Harmonimix)

On ne va pas reparler de James Blake et de son premier LP qui a déchiré le monde en deux à sa sortie. On ne va pas non plus s’épancher sur le fait que l’on regrette le James Blake Uk garage et funky des premiers Ep, avant qu’il ne se mette à minauder avec plus ou moins de réussite. Mais il y avait un autre projet de Blake qui avait disparu dans l’oubli lors de la consécration de l’anglais : Harmonimix, alias utilisé pour remixer des titres mainstream afin de les transformer en bombes droguées. Si certaines relectures étaient discutables, le remix du A Milli de Lil Wayne par James Blake était un petit bijou de hiphop mélodique et camé, avec un sacré travail sur la déformation de voix. Sans crier gare donc, l’anglais réactive son projet, et s’attaque à Trim, ancien Mc de Roll Deep, que l’on a pu croiser depuis chez The Streets ou Dusk & Blackdown. Son flow est ici littéralement violé par James Blake, qui balance un morceau claustrophobe, hypnotique et étouffant, loin des escapades grime habituelles du Mc. On pourrait croire que les effets sur la voix sont irritants au premier abord, mais dès que le morceau s’envole, c’est main dans la gueule en mode rotatif, sifflements dans les oreilles et gorge sèche. Tu viens de te faire rouler dessus par un 33 tonnes, normal.







QUAM – IZ

Parce que je vénère un culte à Kuedo, parce que j’aime bien la juke mutante de certaines releases (mais pas toute) de Planet Mu, et que les boites à rythme en mode mitraillette me donnent des papillons dans le ventre, un beatmakeur masqué m’a conseillé d’écouter ce Iz de Quam. Et bordel, quelle beauté que ce morceau planant épileptique, avec ses synthés lunaires et ses vocaux chelous non identifiés. Impossible de trouver des infos sur ce producteur, qui semble n’avoir quasiment rien sorti. Mais 1/ ça donne envie d’en entendre bien plus, et va falloir que le mec sorte de sa cave 2/ Le mec a un nom à la con pour trouver des infos, mais il aurait pu s’appeler Guam et cela aurait été pire. 3/ Ca me rappelle que Kuedo n’a rien sorti depuis 6 mois, et que je suis triste, très triste, déprimé. A surveiller.







Boards Of Canada – Untilted (Machinedrum Edit)

Plus jeune, j’étais à un concert de Dj Krush, mon enregistreur Zoom dans la poche, parce qu’il y avait une interview de planifiée. Bref, pendant le concert, Krush balance un morceau sublime, que je n’avais jamais entendu à l’époque. Je sors mon enregistreur, et je capte ce moment unique pour le cœur d’une groupie comme moi. Je ne sais pas où j’ai foutu cet enregistrement, il doit bien être quelque part, et je ne pense pas que ce morceau soit sorti depuis. Je ne l’ai jamais reconnu en tout cas. Machinedrum, il a fait pareil, mais avec des légendes, ce qui aide pas mal. Lors d’un des seuls concerts de Boards Of Canada il y a 12 ans ( !), le bonhomme sort son enregistreur et imprime sur bande un inédit de BOC. Et vu que les mecs ont complètement disparu depuis des années, un inédit vaut cher. Une décennie après, Machinedrum reprend l’enregistrement, le nettoie, le modifie, le remixe un peu, pour lui redonner vie. Et bam, tu te prends une fresque de 11 minutes, superbe, qui te donne envie de prendre le premier avion vers l’Ecosse afin d’obliger les deux zozos à se bouger le cul. En plus, la vidéo montre le parcours en métro entre Shimbashi et Odaiba, ce qui est tout bénef pour la rétine.







Disclosure – Whats in you head

J’ai compris avec ce morceau que l’appli Shazam pouvait être bien pratique. Ce What’s In Your Head de Disclosure, je l’avais entendu une première fois, et j’avais trouvé le tout bien mortel. On oublie, et au détour d’un magasin, plusieurs mois âpres, le morceau passe à nouveau. Le temps de télécharger Shazam en stress avant la fin de la track, et hop, Disclosure apparaît. Ce titre, qui pourrait sembler banal au premier abord est pour moi un petit tube parfait de Uk Garage, avec voix pitchées puputes, rythme mortel et synthés house qui caressent les bassins. Fan service. Une vraie bombinette, faisant le pont parfait entre porte-jarretelles, talons haut et caves crades londoniennes. Ce What’s In Your Head est clairement le meilleur de l’Ep The Face, qui oscille donc entre l’excellent et l’anodin. Seul problème, les gros espoirs que j’avais placé dans Disclosure ont été rapidement anéantis, la dernière sortie du groupe frôlant l’horreur boréale.







Nick Solé – Love Song

Il est souvent difficile de séparer le bon grain de l’ivraie en Deep House (et surtout House tout court), tant les sorties ineptes tombent en rafale, cachant par leur surnombre les petites perles. Heureusement qu’un pote m’a fortement conseillé d’aller jeter un coup d’oreille à ce Flowers For You de Nick Solé, superbement exécuté, sentant le sexe et exultant de chaleur grâce à ces beats bien ronds et ses samples de voix soul inhérentes au genre. Si l’album, un peu court, ne me convint pas à 100% (Money, un peu niais et trainard par ex), il contient de superbes pépites bien Deep pour ravir les esgourdes. A dire vrai, je voulais mettre en avant le parfait Women Of The Rain, de loin le plus beau morceau de ce LP,  mais impossible de le trouver sur youtube/soundcloud. Je me rattrape donc avec Love Song, superbe track house bien mélodique, mélangeant cordes grandiloquentes et effets dubby taillés avec soin. Le genre de morceau que je ne supporte pas d’écouter pendant la journée, mais qui prend tout son sens en pleine nuit, à la recherche d’un sommeil impossible. Un petit diamant ouvrant un excellent Lp.







Frank Ocean – Pink Matter

Bon, je ne vais pas me mettre à parler du Orange Channel de Frank Ocean, parce que tout le monde en a déjà trop dit. Un des albums de l’année ? Surement. Thinking About You, morceau parfait, beau à en chialer ? Evidemment. Crack Rock, Super Rich Kid, Bad Religion, des trucs à chanter mille fois sous la douche ? Je confirme. Pyramids, un tube absolu ? Sans hésitation. Mais il y a un morceau sur ce Orange Channel qui m’a complément bousillé la gueule, réduit le palpitant en bouillie : Pink Matter. Ce chant hallucinant de justesse. La mélodie voleuse d’âme. Les bruits bizarres en fond sonore. Les cordes à chialer. Et ce refrain glaçant, fou. Le morceau se délie, deux couplets de Frank, puis tout se casse, une basse lance une ligne imparable, et tu veux juste dire DAT BASS, parce que ces 15 secondes sont les secondes les plus jouissives que tu as entendu cette année. Andre 3000 se lance, assassine littéralement le morceau, et te fait un gros fuck dans le même mouvement, genre « je lance un couplet de malade et je me casse connard, on se revoit dans 6 mois pour un autre feat de 30 secondes ». Dédé se tait, et la guitare se tord, transpire le cul, la tristesse et la classe absolue. C’est putain de dingue. La dernière ligne de chant toute pêtée finira de t’écraser la tête à coup de talon. Ce morceau vient d’ailleurs. Un truc d’extra-terrestre, hors norme.







Dat’

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Woob – Have Landed

Posted in Chroniques on December 4th, 2012 by Dat'


Something wicked this way lands



Qu’est devenu Woob depuis une bonne dizaine d’années ? A dire vrai, je ne me souvenais même plus de ce type jusqu’ à ce qu’un pote m’en parle avec des yeux brillants. Pourtant Woob faisait parti, il y a plus de 15 ans ( !!) des incontournables de l’electronica/ambiant. Mais n’avait quasiment rien sorti entre 1995 et 2010. Un retour en catimini il y a deux ans, avec un album et une BO presque coup sur coup. Que je n’avais pas écouté évidemment, tant ces sorties s’étaient faites discrètes. Bref, mon pote me somme d’écouter Woob, et je me rend compte avoir un très vieux LP du bonhomme, Woob 1194, que j’avais du chopper je-ne-sais-comment, pour l’écouter dans ma période de boulimie musicale, avant de l’oublier complètement. Pourtant l’anglais faisait parti des figures incontournables de l’electronica, en ayant sorti deux albums sur le label de legende em:t, spécialisé dans l’ambiant bardé d’artworks animaliers. Mais il était peut être plus connu pour les oreilles actuelles via son projet Max & Harvey, et ses (trop) rares morceaux sortis il y a quelques années, qui nous donnaient vraiment envie d’en entendre plus… avant d’oublier doucement cela aussi.

Woob revient donc en cette fin d’année avec un nouvel album, Have Landed, au concept se rapprochant d’une compilation de morceaux déjà existants (Les morceaux de Max & Harvey notamment) et de nouveaux titres. Que reste t’il de l’ambiant-electronica-world-classical-psyché de Woob, après presque deux décennies ? Beaucoup de choses.








Woob a toujours fait un ambiant extrêmement mélodique, étonnamment basé sur de vrais instruments et samples vocaux plutôt que de simples nappes discrètes. Cette habitude n’est pas perdue, et si le terme “d’ambiant” correspond parfaitement pour définir Mr Woob, on est loin d’un Ametsub dans les sonorités proposées. L’anglais étant un multi-instrumentiste, il nous fait profiter de ses talents.  Ici, les teintes sont chaudes, et l’on n’hésite pas à sortir les cordes et les guitares. Même si tout se fait de façon doucereuse, avec une précision hors norme. If I don’t make it home débute le LP de la plus belle des façons, avec cordes qui chialent une mélodie crève cœur, à peine bousculée par quelques bugs électroniques. Une voix d’ange s’élève, sur symphonie au point mort. Elle balance un chorus à filer la frousse, les notes de musiques se déplient à n’en plus finir, et roulent dans nos tympans façon pluie de minuit. The Great Divide en prend presque directement la suite, avec ses violons sublimes, ces nappes discrètes et sourdes donnant l’impression de marcher au bord d’une abime, et surtout ces bugs electro-glitch beaucoup plus présents, qui salissent sérieusement le tout. Quand le rythme industriel se met à gronder, avec cette bassline fracassant le calme de la première moitié du disque, tu chavires, et tu te fais casser la colonne vertébrale sans demander ton reste. C’est presque tubesque, crade et fragile comme la mort. La longue fin façon champ de bataille d’après conflit, où seuls voix fantomatiques et violons ombrageux se faufilent dans nos oreilles, tabassera même les plus sensibles. Le petit chef d’œuvre de ce disque.

Toujours aussi naturellement, Have Landed continue avec le superbe Sleep (sorti sous le blaze Max & Harvey), lui aussi ballottant entre violon tire-larmes et mélodie cristalline belle comme le jour. C’est émouvant en diable, presque funeste, mais dieu comme c’est puissant. Rien de spécial hein. Des cordes, une litanie, une basse discrète, et c’est tout. Mais ça te crève le cœur. Parce que c’est parfait. Parce que c’est hallucinant de maitrise, de richesse, de préciosité. Pas si loin de certains exercices écoutés sur l’indispensable He has left us alone… de A Silver Mt Zion. Ne pas lancer cela dans un moment de cafard, ou c’est l’envie de pleurer en position fœtale qui va poindre. Et putain, je me répète, mais c’est vraiment beau.

Sèche tes yeux, Finale débarque et laisse entrer le soleil. Après une intro de 2min qui me fait fortement penser à un morceau sans que je puisse me remémorer lequel (sample déjà utilisé où ?), cette fresque toute aussi jolie que les précédentes va se parer de teintes discrètement latines, à base de guitare acoustique et percussions rythmées. Tu as envie de claquer des doigts, de foutre ta trogne sur la plage, et de te laisser glisser sur un matelas gonflable en contemplant les nuages. Ouai. Sauf que tu as toujours envie de chialer quand la mélodie reprend ses aises dans le dernier tiers, parce que là aussi, c’est tellement fou que ça t’en briserait presque la nuque : ces nappes dingues, ces cuivres qui violent l’âme, cette montée tout en douceur en mode ascenseur émotionnel…





Je disais dans l’intro que ce disque était autant album que compilation. Et si ce premier tiers du LP impressionne par sa cohérence (tout coule de source, les morceaux s’imbriquent à la perfection), le bas blesse un peu pendant quelques morceaux, à partir de Spine. Ce dernier, plutôt réussi, entre en rupture avec les mélopées sublimes pour filer vers quelque chose de plus caverneux, moins émotionnel, moins direct, et moins sensible. L’orientalisant Untilted Dialogue est trop cinématographique pour être honnête, et bien que fascinant dans ses textures et sa production (les voix !), il ne file pas les mêmes mandales que les 4 premiers morceaux. Le bel interlude Interval ravi avant de se dérober bien trop rapidement pour laisser place à Bognor Regis Stripper, et son jazz goguenard, embaumant le gros cigare et les bars américains mafieux, plutôt sympa… mais qui, vu son ambiance, n’a rien à faire dans ce LP à part pour en casser l’harmonie. Étonnamment donc, on passe de 4 morceaux qui s’imbriquaient à la perfection à 4 morceaux sans aucune logique ni point commun. Heureusement, Woob semble rectifier le tir, et balance avec La Luna Y El Caballero une bonne progression ambiant-jazz-classical, avec cordes, cuivres et voix d’opéra qui s’élèvent à n’en plus finir et filent la frousse.

Mais c’est avec Thieves que Woob revient vers les émotions à fleur de peaux du début du LP, ce morceau ne sera d’ailleurs pas inconnu aux acheteurs de la gargantuesque compilation You Don’t Know de Ninja Tunes. Thieves lui, nous flingue littéralement la gueule dès le début du morceau, trop beau pour ne pas casser des palpitants. Serieusement, ce violon, ce truc qui te prend l’échine, qui te la tort et te la découpe en petit morceau. Cette mélodie qui te donne envie de pleurer tes morts. Et surtout, ces samples de voix découpés, inintelligibles, et pourtant sublimes, frôlant la perfection en te détruisant la mâchoire à coup de pompe. Sérieusement, à la première écoute de ce titre, en pleine nuit, j’ai littéralement eu les cheveux qui se sont dressés sur ma tête. Un diamant absolu.

Space Therapy portera bien son nom, en te laissant dériver pendant plus de 3 minutes au grès de chœurs fantomatiques qui filent la chair de poule, avant de partir sur une attaque épique (et presque violente) de cordes bien énervées. Même si le coté “film d’action/attaque de l’empire” un peu gênant de la deuxième moitié du morceau pourra en gêner certains, le tout est bien assez varié et impressionnant dans sa progression comme dans ses changements d’ambiances soudains (sur plus de 9minutes), et draguera assez facilement nos tympans. Big Amoeba Sound (nom du label) part lui vers les ambiances du Bayou américain en slow motion (et fait peut être écho à l’interlude Amoeba de Woob sorti sur 1194) en donnant de la place à une gratte sèche, et des voix copulant sur font de cordes. C’est beau, c’est classe, c’est posé, c’est lumineux, et cela aurait pu se glisser sur le Elusive de Pressure Drop sans choquer. Un joli morceau pour clore le disque, qui comporte en plus Departure Deferred, en bonus digital (allez checker les packagings alléchants sur le bandcamp du monsieur avant), ambiant sombre et légèrement électronique tirant gentiment vers les abimes.





Ce Have Landed de Woob pourrait souffrir de son côté compilation/album, le cul entre deux chaises… qui ne se remarque que le temps de quatre morceaux, bons, mais un peu hors sujets, de la 5 à la 8ème piste. Tout comme les un ou deux essais lorgnant un peu trop sur le cinématographique lambda.

Mais l’anglais balance des morceaux synonymes de perfection absolue le reste du temps. C’est bien simple, ce Have Landed semble contenir les plus belles mélodies que j’ai pu entendre sur un LP en 2012, et arrache littéralement les colonnes vertébrales sur certaines fresques (If I don’t Make It Home, Sleep, Finale, The Great Divide ou Thieves en tête). Et moi, quand on me sert des mélodies pareilles, je ne peux qu’éteindre la lumière, m’incliner et écouter ça la gorge nouée.

Prendre le temps de se plonger ce disque, au calme, la nuit, avec le moral en berne. L’effet sera violent. Un indispensable.





Woob – The Great Divide





Woob (Max & Harvey) – Thieves (à écouter fort, les yeux fermés)






14 Titres – Big Amoeba Sounds

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Crystal Castles – (III)

Posted in Chroniques on November 26th, 2012 by Dat'


Usé jusqu’à la corde



En deux ans, je suis rentré 2 fois en collision avec Crystal Castles. Un hasard complet la deuxième fois, et lors d’une soirée organisée par des potes il y plus d’un an pour la première. J’en avais entendu des choses, sur Crystal Castles : Le groupe était ingérable, défoncé 24/24, ultra tatillon, et assimilable, pour résumé, à une belle bande de bidons. Et pourquoi pas ? Les deux zozos ont toujours cultivé cette image hype faussement rebelle qui a fait leur succès, à base d’interviews foutages de gueule, de concerts annulés et autres photos jouant sur la gueule atypique d’Alice (car à la base, le duo pondait une simple musique 8bit vaguement punky qui, en temps normal, n’aurait pas promis à un succès populaire).

Bref, avant même que la soirée commence, tous les signaux étaient au rouge. Mes potes paniquent, Alice s’est cassée la jambe il y a quelques jours, et CC est loin d’avoir envie de trainer dans un club pour faire un Dj Set. Malgré tout, le groupe avait assuré les concerts à Tokyo, la gambette dans le plâtre. Alors, être dans l’équipe qui gère l’arrivée de Crystal Castles, c’est forcément stressant, vu l’aura détestable et antipathique que traine le groupe derrière lui. Le public est compact, on ne compte plus le nombre de personnes au m2 dans une petite pièce, c’est irrespirable. Tout le monde attend l’entrée du duo, qui doit obligatoirement passer par la foule pour arriver au dj booth. L’ascenseur s’ouvre, les gueules sont cadavériques. Tout le monde hurle, se jette sur le groupe, on doit faire barrage comme on peut, Alice semble complètement flippée par le monstre-foule qui tente de l’avaler, elle et sa jambe plâtrée. Après dix minutes façon Moïse du pauvre, ils atteignent les platines et commence leur set. La demoiselle s’affale au fond du booth, et Ethan dicte ses ordres toutes les 5 minutes, au risque de provoquer une émeute : Eteignez la lumière, ou j’arrête immédiatement le set. Apportez nous plusieurs verres de bière, ou j’arrête immédiatement le set. Arrêtez de prendre des photos, ou j’arrête immédiatement le set. Ci-gît les dernières onces de sympathies que l’on pourrait avoir pour le groupe.


Après 45 courtes minutes au final bien violentes et enlevées, le set se termine, et intervient l’obligation de vider la salle, pour éviter de retraverser le maelstrom humain. Le processus va durer très longtemps, ce qui nous permet de converser un peu plus avec le groupe. Et l’on comprend un truc. Ils ne sont pas cons. Ils sont crevés. Morts. Exténués. Au bout du rouleau. Un japonais embusqué prend des photos du groupe, tel un paparazzi. Ethan demande gentiment si le mec peut arrêter. Peine perdue. Le musicien nous balance alors de façon laconique et abattue qu’il n’en peut plus, qu’il ne supporte plus tout ça, qu’il va peter un plomb. L’un des mecs affilié au tourneur du duo nous lance que le groupe est au bord de l’implosion. Pas parce que les deux ne s’entendent plus, bien au contraire. C’est peut être seulement grâce à ce lien que CC tient encore. Mais parce que les deux sont ballotés de pays en pays, d’hôtels en hôtels, depuis plus d’un an, sans s’arrêter une seconde, comme des pions que l’on ferait avancer sur des cases à coup de dès, cercle vicieux et éreintant des tournées ultra-intensives. Ca ne marche plus. Ils sont en mode automatique, la tête baissée, zombies de la musique. On ne va pas les plaindre, mais on comprend mieux leur mine déconfite.

La salle vidée, le groupe part vers son hôtel, Ethan recroquevillé sur lui même, et Alice en claudiquant avec sa jambe pétée. Embourbés dans un processus qui semble les dépasser.








En 2010, le groupe avait sorti un deuxième album en demi-teinte, porté par quelques bombinettes (Baptism, Empathy, Doe Deer…), mais vraiment inégal dans sa globalité. Le tout se terminant néanmoins sur le superbe I Am Made Of Chalk, meilleur morceau de Crystal Castles, et de loin, sorte de fusion absolue du duo, entre mélodies tire-larmes et râles non identifiables. Ce III, et avec l’image du groupe que j’avais dans la tête, devait être accouché dans la douleur, celui que CC allait lâcher, en bout de course, sur les rotules, après une tournée de folie.

Autant dire que l’album commence bien. Plague est absolument mortel, avec ses synthés de cathédrale, cette mélodie tubesque, ces voix qui surnagent à peine ce tabassage épique, aux claviers parfaitement placés entre Trance putassière et dance dépressive. Mais tout est diffus, plongé dans le brouillard. Je suis convaincu que ce même morceau, sur le premier album, aurait été un festival de hurlements et autres borognymes hystériques. Mais pas là. Un peu plus loin, Wrath of God donne la même impression. C’est un tube, sans contestation. Une mélodie qui défonce, une charge folle. Mais là aussi, on a une salve complètement abattue, défaite. Le soulèvement final te titille l’échine, non pas par sa violence, mais par sa beauté crevée, ce coté anthem épuisé, cafardeux.

Et ce coté à bout de souffle perdure tout le long du disque. Pas une seule grosse machine pour faire danser, pas de brûlot épileptique. Si Alice gueule encore, c’est bien loin au fond de l’eau, ou derrière un mur de béton. Noyé dans les effets, la rage est annihilée, ici semblable aux exclamations d’une gamine tombée dans un fossé, au bord de la route, la cheville foulée, une averse sur la tronche, et hurlant pour attirer l’attention des bagnoles passant à toute allure. Afin de demander de l’aide. Sans succès.

Kérosene, très belle divagation anémiée sortant un peu du carcan “gros rouleau compresseur de synthés” peut s’enorgueillir d’être l’un des tous meilleurs morceaux du disque, comme Affection qui sortira les boites à rythmes pour une balade electro-pop bien mieux portante que les niaiseries des deux précédents disques. Parce que là aussi, on a l’impression que le duo a composé ces derniers avec des sacs plastiques sur la gueule, histoire de bien s’étouffer en triturant ses machines. Oh, certes, on a toujours deux trois missives insupportables sur le disque, comme Violent Youth, et ses sonorités façon jouet Smoby que l’on espérait ne plus jamais entendre, ou Sad Eyes, qui franchit malheureusement la limite entre renoncement et putasserie si bien entretenue par les morceaux plus hauts, et se roule dans des synthés ultra crispants (voir presque inaudibles en fin de morceau).

Car c’est clairement quand le groupe me renvoi à cette image de duo au bord de l’implosion, à bout de force, qu’il réussit à voler les cœurs. Transgender est parfait dans le genre pop sous lexomil, et Mercenary fleure bon les nuits blanches entre 4 murs de béton, entre bass-music caverneuse et vocaux dans le gaz complet. Avec une bassline bien jouissive en fin de morceau, qui pourrait casser plus d’un mur de club. Sans oublier l’excellent Telepath, instrumental imparable, qui remporte la palme du morceau le plus évident du LP, tout en restant poisseux comme la mort.






L’image du groupe me saoule, et ce nouvel LP n’échappe pas à la règle. On avait l’artwork foireux du deuxième disque “bouhou on se balade dans les cimetières”, on a toujours les “bouhou on fait de la musique de cimetière”. Les prises de position à la con et postures zéro-transgressives se ramassent à la pelle, les lyrics depressivo-gothiques de ce troisième album font d’ailleurs souvent plus rire que déprimer à base de “bouhou mon enfant je vais te faire du mal”, “bouhou je dois me purifier à l’essence” et “bouhou on fait trop de la bleak music”.

Sauf que… malgré tout ce coté rebelle en carton et faussement insoumis malheureusement inhérent à CC, l’album tient la route. Je voulais juste une nana qui gueule sur des beaux synthés. Et bien c’est ce que j’ai. Et dieu sait comme les synthés sont beaux, comme les mélodies défoncent. Alice peut parler tant qu’elle veut du fait que se couper les veines c’est trop bath, on s’en fout, ça marche quand même. Des claviers bien putassiers, et des mélodies simili-émo, matinées de voix fantomatiques. Trance de dépression post-coïtale. Bonne recette. Et en suivant cette logique, c’est clairement l’album le plus cohérent de Crystal Castles.

Et ce coté complètement anéanti du disque, sans force, anémié, est presque fascinant. Comme si le LP avait été accouché en trois jours après une tournée éreintante, histoire de se débarrasser d’un poids avant de repartir pour 2 ans de voyages incessants. Je me fais surement des idées, mais pour moi, ce III est le prolongement parfait d’un duo physiquement en lambeaux. Un disque fait en bout de course, les pieds en sangs, la mine déconfite, les poumons nécrosés, bouteille d’insuline vide. Un disque privé d’oxygène mais ne manquant pas de souffle épique.

Parfois, c’est vain. Souvent, c’est beau. Mais c’est surtout la retranscription parfaite d’un groupe au bout du rouleau.






Crystal Castles – Plague






12 Titres – Fiction / Last Gang

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Grischa Lichtenberger – And IV (Inertia)

Posted in Chroniques on November 19th, 2012 by Dat'


Equation


Ca faisait un bail que je n’avais pas fait un tour du coté de chez Raster-Noton. Autrefois ultra fan des LP d’Alva Noto, Ryuchi Sakamoto, Ikeda ou SND, j’au un peu laissé tombé le label, avec cette recrudescence de disques en mode bruits blancs vs silence qui me passionnaient de moins en moins (alors que le tout me fascinait plus jeune), même si quelques galettes prenaient un peu les chemins de traverse.

Grischa Lichtenberger avait tout pour me gonfler à première vue : une pochette ultra classique qui n’attirera l’œil de personne, un nom imprononçable et surtout, cette vilaine manie de balancer un tracklisting illisible, désincarné et froid, avec des tracks aux noms composés de chiffres et autres rébus absurdes pour mathématiciens. Pourtant, le bonhomme frappe fort dès l’oreille posé sur ses productions.








Car il faut le dire, le disque impressionne par sa maitrise du “son”, avec un grand S. Ca se nécrose dans tous les sens, ça pulse comme une artère de camé en manque, ça vrille et fuse dans tous les coins. Les morceaux, passés sur de belles enceintes, sont parfois ahurissants dans leur architecture, dans ces détails distillés avec une préciosité sans pareil. Mais contrairement à pas mal de disques en mode expérimental froid inoffensif, Grischa Lichtenberger distille dans ses pièces abstraites une bonne dose de techno imparable.

Apres trois ou quatre morceaux fortement dépouillés déboule Uu78, un putain de tube, mandale industrielle pouvant retourner un dancefloor zombifié, à base de beats écorchés et mélodie flirtant avec le magma métallique de fin du monde. Ca cassera bien des cerveaux, et n’importe quel Dj prenant le risque de passer un morceau pareil sera pendu sur la place publique, mais bordel, ça décrasse les oreilles. Juste après 0112_01_Lv_! viendra lui aussi faire le ménage avec un clavier évident, techno de cave bousillées par des attaques androïdes. Le basculement sur un rythme ultra sourd, faisant presque office de palpitant, façon à travers un mur de béton avant de repartir comme en 40, tabasse par son coté imparable, et impressionne dans le sound-design. C’est d’ailleurs quand ces deux notions, souvent antinomiques, se rejoignent, que le disque s’envole dans les nuages. Le coté répétitif, froid, mais dansant, pourra renvoyer à Untilted, avec une petite dose de binaire supplémentaire pour ravir les esgourdes. Même quand le disque s’enfonce dans des tirades ultra expérimentales, fascinantes dans l’agencement des sons, Grischa file des claques avec ce petit coté rentre dedans. La tristesse d’un 1011_27_# 5b, aux râles hypnotiques, est contrebalancé par l’aspect massif des machines roulant sur elles mêmes, coulée de lave avalant tout sur son passage. Le bonheur.

Et les exemples sont nombreux le long de cette vingtaine de morceaux. 1210_08_Lv_4+ et sa mélodie aigue sur rythme claudiquant pourrait faire penser à du Gescom remixant un VHS Head qui se serait envoyé tout Lain en une nuit. Même chose pour l’excellent 0111_05_Z Red qui semble être le cadavre d’un morceau dance-deep passé à tabac dans une impasse crade.  Rearr Re traumatise en te filant une presse industrielle en pleine crise d’hystérie, crachant au milieu du maelstrom une litanie qui glace le sang (on le répète, mais le morceau est ici aussi absolument hallucinant en terme de production). 0311_01 Re 0510_24 fera claquer les fouets avec un rythme lapidaire, laissant à peine quelques cris de claviers s’exprimer, grillés par des zébrures hypnotiques façon serpent à sonnette métallique sautant à la gorge de quelques notes désaccordées. Et après trois minutes de cataclysme, le morceau va vriller sur une fin plus concrète, histoire de bien te flinguer la gueule.

Grischa s’autorisera même quelques instants sous anesthésie, notamment sur 1011_11104_V_Re_61011s1b, surement le plus beau morceau du LP, laissant (enfin) une mélodie tire-larmes survivre et prendre le dessus sur le chaos névrotique du disque. Oh, évidemment, des explosions tenteront bien de mettre à mal ce moment de recueillement, mais sans jamais réussir à tout annihiler. L’ambiant Ssfl fera lui aussi bien le boulot, sur plus de 6minutes.

Mais le disque a un défaut, et de taille : c’est le bordel, c’est bien trop chargé et éclaté, et c’est impossible à bouffer d’une traite. A dire vrai, ce And IV (Inertia) souffre presque du même mal que le Quaristice d’Autechre, en moins grave néanmoins. On te balance un tracklisting d’une vingtaine de morceaux, dont la moitié n’ont ni queue ni tête, s’arrêtant sans crier gare ou partant dans la démo de plug-ins. On échappe donc pas aux vignettes un peu vide de sens, frôlant l’esbroufe sculpturale (0811_09 Re 0611_29_Lv_1b ou 91028_V1) ou les flatulences de machines sans intérêt (66 Audio, Sysolrot…), sans oublier (et c’est pire) les idées pas finies, les peintures non finalisées donnant des tracks ultra frustrantes (pourquoi arrêter le superbe 0811_11_Re_0411_08_Mas_Rm3 après une minute trente ? Quel gâchis… Ou Globalbpm qui s’annonce monstrueux, mais qui ne dure même pas 60 secondes…)





Et c’est bien le problème. Grischa aurait pu sortir un des disques de l’année s’il s’était limité à 10 gros titres de 5 ou 6 minutes, bien sélectionnés, plutôt qu’à un gargantuesque essai de 22 tracks sur 70 minutes. Car certains morceaux du LP sont grands, affolant dans leur construction sonore comme dans leur façon de tabasser frontalement.

Ce LP n’invente rien, et pourrait passer pour une sortie Warp et affiliés, très marquée Gescom ou Autechre début 2000, en mode reboot via les techniques actuelles, donnant un coté presque nostalgique au disque (non voulu ?). Mais ce petit coté rentre dedans, qui pourra porter certains morceaux de ce And IV sur des dancefloors courageux, transcende le tout, et lui donne une sacrée plus value face aux LP des laborantins lambdas sacrifiant l’émotion pour le tout technique.

Une jolie baffe donc, dont l’impact est malheureusement grandement atténuée par le coté disparate et excessif du disque. Mais dans l’ère du numérique où la playlist itunes est reine, on ne pourra s’empêcher d’écrémer le disque et de sélectionner en priorités les jolies bombinettes techno-experimentales distillées dans ce LP de Grischa Lichtenberger. Une sortie à ne pas manquer pour les oreilles en manques d’explosions déstructurées et autres cathédrales électroniques.









22 titres – Raster-Noton

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GESKIA! : Les LP indispensables du Japonais

Posted in Chroniques on November 5th, 2012 by Dat'


I’m not ready for the grave yet



En cette fin d’année, il me fallait faire un focus sur le Japonais Geskia!, car ce dernier, en plus d’avoir sorti deux disques en 2012, a une trajectoire peu commune dans l’electronica japonaise. Après avoir fait ses armes dans l’electro-glitch, le bonhomme a subitement sorti un LP de Hiphop sauvage, déstructuré et épileptique, en invitant des MCs sur ses compositions pour son deuxième album. Se faisant un nom dans le Hiphop (Geskia! est d’ailleurs toujours classé dans cette section au Japon, alors que ses disques suivant/précédant n’ont strictement rien à voir avec le genre), le mec fait des lives accompagné de rappeurs et remixe des stars gangsta locales. Puis il va se laisser porter vers un abstract instrumental, avant de piler pour balancer un des piliers de l’IDM made in Japan en 2011… pour glisser enfin, tranquillement, depuis cette année, sur une ambiant-electronica éthérée, à mille lieux de ce qu’il faisait il y a même pas deux ans.

Présentation d’un des meilleurs beatmakeurs electronica du Japon en 4 disques indispensables :








2009 – Hiphop Japonais vs experimental drogué / Album : PresidentIDM

Le premier choc de Geskia! dans mes oreilles, c’est bien ce PresidentIDM, qui, comme son nom ne l’indique pas, est un disque de Hiphop. Avec des MCs exclusivement japonais, balançant des textes de damnés sur les instrues complètement cramées de Geskia. S’il n’est plus à prouver que la langue japonaise s’acoquine encore mieux aux productions expérimentales, le beatmakeur pousse le vice de vraiment torturer ses hôtes, parfois de renom (Hairo De Rossi, Dotama…), et ne se refuse rien : avalanches drill’n’bass, rythmes organiques mutants qui pourraient rendre jaloux Autechre (Mystery feat Dotama), chiptune folle (Film Beat feat Yamane), musique expérimentale complètement lunaire et flippante (Retrospect Have You Made Easy feat Fake?), Glitch-Hop massif (蜘蛛の糸 ou Inferno) voir carrément des bruits non identifiés échappés de l’écurie Raster Noton (Original feat 3 Mansell Army)… d’autant plus que certains MCs subliment l’ambiance complètement hallucinante du disque par leurs flows hors cadres (les râles gutturaux de Fake font de l’effet, tout comme le pétage de plomb des 3 Mansell Army).

Même quand le disque commence “hiphop”, avec une boucle a peu près normale, qui pourrait faire bouger les nuques et claquer des doigts, le mec fini par tout casser en tapant du poing sur ses machines, histoire de bien nous faire comprendre que l’on écoute l’œuvre d’un putain de psychopathe (les attaques soniques de la fin de 遠雷 O.S.T sont ahurissantes, et l’on ne parle pas de la nécrose complète de Drum Anagram, qui interroge sur la capacité d’un MC à survivre à un traumatisme pareil).

> Ce PresidentIDM ? L’un des plus grands albums du hiphop expérimental Japonais.



Geskia! – PresidentIDM album teaser





2011 – IDM-drill’n’bass épique / Album : Alien

Après avoir traumatisé bien des amateurs de rap avec son précédant LP, Geskia! décide de revenir en 2011 avec un LP en hommage à Coil, avec une superbe cover signé Bun (aux abonnés absents depuis son diamant sorti en 2010). La musique de ce Alien décontenancera bien des fans (qui continuent de bloquer Geskia! dans le hiphop, comme énoncé plus haut), et moi même, j’ai longtemps boudé ce disque, déçu de voir un LP exclusivement instrumental, sans aucun MC. Quelle erreur. Car cela revenait à faire l’impasse sur l’un des plus grands albums IDM sorti au Japon, toutes périodes confondues. Tout début 2012, je me décide à lancer Alien. La baffe fut ultime. Il faut imaginer un Japonais qui se dit : “hey, si je me composais mon Richard D James rien qu’à moi ?”.
Donc cet LP, c’est drill’n bass folle, IDM à chialer de beauté, chaos absolu, échappées acid, violentes charges presque breakcore. Oui, c’est parfois sauvage et ultra violent (Helter Skelter, hystérique, qui n’aurait pas fait tache dans les années énervées de Planet Mu), mais c’est surtout beau comme la mort, avec des mélodies qui te brisent la colonne vertébrale en mille. Locus Solus, l’un des meilleurs titres de l’album, convie le maelstrom d’une drum explosée avec des tirades de synthés à arracher le cœur, façon Shimmering Hour de Wisp. La même pour Slum Club, ou Nuts Star, ultra référencé Warp, mais putain de sublime. C’est épique comme un train qui sortirait de la station de Shinjuku en écrasant tout le monde, pour s’envoler vers un soleil couchant. Même les derniers reliquats hiphop du bonhomme (le début de Made In Nothing par exemple), se retrouveront noyés dans des mélodies à tomber par terre featuring cavalcades de beats. Headroom Mindphone, c’est l’electronica angélique et cristalline qui se fait écharper par des coups de couteaux ultra saccadés. Là aussi, si tu ne te vois pas partir vers l’espace en conduisant une Cadillac rose tunée, c’est qu’il y a un problème. Un grave problème.

> Ce Alien ? L’un des tous meilleurs albums IDM-drill’n’bass from Japan, un indispensable pour tout amateur du genre.



Geskia! – Headroom Mindphone





2012 – Le calme ambiant-electronica / Albums : Muon & 323 Sayonara Memories

Et voilà qu’après avoir saccagé le Hiphop, puis défoncé les oreilles avec de l’IDM sauvage, Geskia! va tranquillement, cette année, sortir deux albums coup sur coup, lorgnant plus que dangereusement vers des fresques calmes et éthérées. Les deux albums vont d’ailleurs imprimer cette logique du calme, le deuxième opus flirtant avec le mutisme abstrait. Muon tout d’abord, et ses tracks ambiant matinées de beat electronica encore tordus et fracassés, mais n’intervenant parfois qu’après de longues minutes de nappes béates (Orion, qui laisse échapper des beats déstructurés après de belles tirades émo, Melamine, et ses taquets réguliers). Geskia! cherchait auparavant l’émotion dans le chaos, dans le conflit entre les mélodies angéliques et les attaques brutales et guerrières. Sur Muon, il nous tire désormais la chair de poule via de lentes et belles progressions, mille-feuilles de field-recording et claviers en apesanteur. Quand le rythme désossé d’Abuttal rentre dans la danse, c’est pour magnifier les nappes mêlées aux voix angéliques copulant depuis le départ, coup de boule final sur nos nuques trop exposées. Le bonhomme n’oublierait pas non plus ses anciennes velléités hiphop (Lachrymose), mais le rythme n’apparaitra qu’après de longues minutes d’errances.

Pour son deuxieme album de cette année 2012, le Japonais pousse le concept encore plus loin avec 323 Sayonara Mémories, LP de 13 tracks faisant toutes 3min23 (j’ai cru à un bug en voyant le tout s’afficher sur mon itunes). Et ici, on pousse l’idée du calme et de l’ambiant encore plus loin, avec beaucoup plus de field recordings, voir une bonne partie de morceaux beatless (ou quasiment). On part vers des fresques à la The Caretaker, en ressuscitant les morts via samples de musiques surannées et voix anonymes apparaissant aussi subrepticement que des spectres dans des couloirs d’hôtel (Sour Leaf). Pure divagations cristallines (R.I.P, fantomatique, habillé d’un très discret rythme), boites à musiques candides (Colors), ou nappes sur samples désaccordés. Ici, l’émotion est dans la précision, cette dernière étant hors norme. Mais Geskia! a aussi l’intelligence de parsemer son album ambiant de quelques morceaux plus enlevés, et là aussi, ses racines IDM refont surface, notamment sur Clear Perspective ou le parfait Answer Song, coup de semonce génial, à la mélodie presque tubesque, et au rythme lourd, imposant. Seul petit bémol, l’album est un peu prisonnier de son concept, certains morceaux auraient mérités d’être étirés sur 5 ou 6 minutes. LP qui finira néanmoins sur un très ambiant Poem From My Room qui dressera bien des cheveux sur les têtes.

> Ces Muon et 323 Sayonara Memories ? Deux superbes albums ambiant pour conclure 2012.



Geskia! – Abuttal (album Muon)





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Paulie Jan – Humian EP

Posted in Chroniques on October 26th, 2012 by Dat'


Your Path To Divinity



Bon, C’est sympa le r’n’b pour midinette, la pop mignonette et la techno ambiant pour toucher craquette… Mais il y a des fois où tu veux du synthé bien crade. Un truc qui te vrille les oreilles, qui te fait secouer l’anus tout en te plantant des papillons dans le ventre. Ce Paulie Jan, je ne le connais ni d’Ève ni dedans. Juste un sacré zozo qui s’escrime à appuyer sur des claviers pour faire hurler des mélodies, histoire d’accoucher d’un funk robotique futuristo-vintage qui grogne dur. Un truc épique, qui colle des baffes et bifle des bouilles. Qui te fais hésiter entre le générique de Cosmos 1999 et une soirée dans l’appart de Crystal.
Paulie Jan, inconnu au bataillon, mais, en écoutant sa musique, je vois un gros mec poilu, avec des rouflaquettes plein le visage, qui appuie sur ses synthés en tressautant du bassin. Et derrière son dos, un écran, d’où jaillissent les étoiles. Le kaléidoscope façon il était une fois la vie, c’est le fluo, c’est plein de couleurs, il y a des constellations partout, comme un clip d’Aphrodites Child tourné aux Chandelles. Voilà, le mec, en écoutant Humian EP, je suis sur que c’est Demis Roussos coincé dans un porno High budget.








Alors tu te dis, “ouai mais bon, des synthés qui copulent à n’en plus finir, on ne peut pas faire mieux que Emeralds”. Et tu as surement raison. Sauf qu’ici, on n’est pas dans la fresque contemplative, mais plutôt dans le passage à tabac au bord d’un fleuve. Et sous le pont, à mon avis les gnons sont beaux. Lance Gestified,  pour comprendre que le mec n’est pas là pour rigoler. Qu’il te sort une mixture, genre Depth Affect vénèr qui voudrait te casser la gueule au détour d’une rue sombre, en t’écrasant la tronche dans les poubelles. Merde, cette montée finale, cette progression façon canasson de l’enfer qui cabre et part au galop vers le soleil couchant, c’est beau. En fait Paulie Jan, c’est le guitar héro du synthé. Tu entends comme ça gueule sur la dernière minute ? La tornade, le traumatisme, la déraison. Te donner envie de sauter en hurlant contre les murs de ta maison.

Oh, il sait y aller délicatement, avec prestance, tension presque étouffée sur This, qui tient plus du film à suspense qu’à la cavalcade hallucinés des 4 cavaliers grecs, 666. Ce morceau, il est superbe. Ces bleeps hypnotiques qui s’enfilent sur un rythme décalqué, claudiquant, en bout de course, qui file ad nauseam vers l’espace, en te balançant des graines d’étoiles opales plein la gueule. Et puis ça grince de partout, ça bourdonne dans tous les sens, te donnant l’impression de regarder les astres depuis ton spationef, avec des machines déréglées qui n’en finissent plus d’imploser. Avec ce bordel, on ne risque pas de revenir sur terre. C’est un tube ce This. Un putain de tube.
Le terme est galvaudé il paraît, mais Minski Palace, ça commence comme une sacrée baffe abstract hiphop. Ce morceau, c’est un sacré truc de mac. Manteaux de fourrures, gros chiens en laisse et relations délestées d’amour chienne, tu en chies et ne prévoit pas, à partir de 2minutes, que ça va être baffes sur baffes : techno turbine qui n’explosera jamais, et qui préfèrera faire couler le miel, via rythmes pachydermiques imparables et arpèges de synthés te foutant dans un club emplie de donzelles en stilletos et porte-jarretelles.

Bon, on a eu les pimps, on a les barbus crados, et les mélodies épiques façon BO de super héros. Mais les humains blafards plantés devant leurs ordis, on en fait quoi ? Ben on leur banane un morceau presque IDM avec Dogjxnzkc, rejeton gueulard et groovy d’une expérimentation tout droit sortie d’un bunker des cornouailles. Ca gicle dans tous les sens, ça fourmille de détails, c’est bonheur. Pour ceux qui pensaient que je partait trop loin en parlant de voyage intersidéral, le musicien me mâche le travail en explicitant l’utilisation du terme dans The Hum Of Your Spaceship (moins indispensable que les autres tracks peut-être). Mais je vous promets que j’avais collé ces métaphores avant de lire le titre. Il se serait appelé “a angry cow fucking your hosepipes” que j’aurai pensé pareil.

Et puisque dans la vie, il faut pleurer aussi, Pour Ont Son te balance la complainte mélancolique qui te collera toutes les lettres de tes ex dans la gueule en 4 minutes, c’est aussi poignant qu’un chant de baleine amoureuse, ça te donnera envie d’enfiler une cape et de voler au dessus de Los Angeles pour ramasser les cœurs brisés afin de les rafistoler un à un. Le truc est magnifique, à 2min50 ça tordra bien des colonnes vertébrales. Tu veux juste tirer une bagnole et partir à la conquête de la nuit, à trancher les artères de la mégalopole, balayée par néons et réverbères, à mater dans le rétroviseur tes larmes couler, en pensant au flingue dans la boite à gant.





Un pote m’a juste dis, tiens, écoute ça, c’est cool. Sale con. Ca fait deux jours que je me le balance en boucle, je ne suis pas sorti de chez moi, pas lavé, mon chat ne me regarde même plus, pathétique. Je fixe cette page word, j’étais parti pour une petite brève chronique, couplée à un autre album. Ca sera pour une autre fois. Sérieusement, cet Ep est bon. Cet Ep est grand. Là je suis parti sur une chro un peu à l’arrache, sans réfléchir, je ne sais pas si le mec a fait des trucs avant, s’il a un album de prévu ou autre. Il est peut être déjà connu d’ailleurs. Aucune idée. On verra ça après. Là on savoure, en prend sa baffe, et on décolle.

L’Ep est parfait, pas une foirade en 6 titres (même si The Hum Of Your Spaceship a moins d’impact et de personnalité que les autres peut être), pas un faux pas, et pourtant ça balaie les genres, ça balaie les gens, tornade de claviers pour titres magistraux (je ne me remet pas de This, Gestified et Pour Ont Son). La seule petite remarque que l’on pourra faire à Paulie Jan, c’est qu’il aurait du tenter un ou deux titres avec des vocals dessus. Une minette qui chuinte des phrases cyprinées, ou un mec vocodé qui baragouine des incantations robotiques (ça aurait pu grave coller sur l’excellent Minski Palace par ex). Attention, je ne dis pas de faire du Kavinsky vs Abstract Keal Agram feat Ginette au mic. Non. Mais un truc qui aurait autant sa place dans un bar à striptease que dans le vieil autoradio d’une Cadillac lancée à fond les ballons sur le périf’.

Paulie Jan balance un EP de folie, un 6 titres indispensable qui pue le foutre et l’apocalypse. Peignoir rose et vieilles chips. Haut talons, néons roses, la grande classe, j’insiste.






Pauli Jan – Pour Ont Son





PS : Restez branché sur les Chroniques Automatiques, un gros gros truc arrive dimanche (si je ne crève pas entre temps). Teasing, stay tuned.





6 titres – Fin De Siècle

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PMPDJ – Haterville (Grems & Entek & Starlion & MiM)

Posted in Chroniques on October 18th, 2012 by Dat'


PMPDM



On parlait d’un Kid606, et de notre incapacité à deviner quel virage adopté à chaque release. C’est un peu la même chose pour Grems. D’autant plus que le mec nous balance des galettes tous les 6 mois. Après le diamant expérimental-electro-drogué qu’était Broka Billy, puis le LP bien dubstep qu’était le premier Pour Ma Paire De Jordan avec Ntek, le très Uk Klub Sandwich avec Disiz, et le très hiphop/boom-bap Algèbre 2.0, Grems nous avait promis, avant un prochain solo, un deuxième LP de son groupe PMPDJ.

Le premier opus était, selon les dires de l’auteur, surtout là pour enrichir leurs lives. Et cela s’entendait. C’était brutal, wobble bass à fond, et si l’on avait aucun doute sur le fait que le truc devait flinguer des enceintes et retourner des mâchoires en concert, il était plus difficile de se l’enchainer en entier chez soi. Tu kiffais pas mal, mais tu callais avant d’arriver à la fin, façon double Whopper.

Alors, il paraitrait que ce nouveau PMPDJ est un reboot du groupe. Déjà parce que Starlion fait son entrée dans le crew, et que si MiM est toujours à la molette, la direction musicale change : fini les wobbles, on va faire du beau, du tube, de la saleté, du deep, du deepkho, du uk. On va continuer à prendre des claques, pas parce que les productions te crachent à la gueule, mais parce qu’elles te foutent des papillons dans le ventre. Pour Ma Paire De Mandales.








Il faut obligatoirement le préciser : ce LP ne bénéficie pas de sortie physique. Pour l’acheter, c’est mp3 only, faire chauffer Itunes tu dois. C’est d’autant plus dommageable que l’artwork de Néopen est superbe, et que l’édition physique de Algèbre 2.0 déchirait les rétines. Il y avait grave moyen de faire un objet beau comme un cul de mannequin, mais il faudra s’en passer, et continuer à se toucher sur du jpeg.

Donc PMPDJ, c’est désormais trois Mc. Au micro, on sent que les mecs se sont vraiment marrés, à balancer sur la plupart des morceaux des textes qui tournent autour d’un concept ou d’une sonorité (VV, CPMPDJ…), sans oublier les charges brutales (Stachmou) ou les ego-trip (Haterville, 5D…). C’est décontracté de la glotte et ça passe crème. Mais pour tout vous dire, j’étais un peu circonspect par la venue de Starlion au départ. Le mec assure parfaitement sur des instrues posées (cf son album, Toast, Chat Man…) mais on le sentait un peu à la ramasse sur le premier extrait de PMPDJ, surtout à coté de Grems et Ntek, qui ont l’habitude de chevaucher des instrues complètement cramées. Et bien, méa culpa, je me suis grave trompé. Le mec est fou. Il te balance des couplets dingos, à la vitesse de la lumière, et arrive à passer de phases très calmes, presque chantées, à des déclamations frénétiques affolantes. Sur certains morceaux, c’est crise d’épilepsie lyricale dans le salon.

Il faut de plus saluer la pertinence et la cohérence du groupe, les trois flow étant extrêmement complémentaires, la voix un peu plus aigue et joyeuse de Starlion contrebalançant parfaitement le flow ultra-technique de Grems, et la voix grave de Ntek. Au final, Starlion offre une respiration salutaire à chacune de ses interventions, bouffée d’air qui manquait dans le premier PMPDJ, et sa présence dans le groupe devient une évidence dès la première écoute du LP.


Alors niveau tracks, histoire de rentrer dans le détail : MiM c’est déchiré. On connaissait déjà MMP#!, qui défonçait pas mal en premier single, mais qui ne reflète pas forcément le contenu du LP. Car ce Haterville, ce n’est pas du tabassage, c’est le disque d’un putain de scientifique aux manettes. MiM te balance les plus belles instrues de 2012. Attends, je dis pas ça juste parce qu’il y a des Mc dessus. Tu me files le LP en version instrumentale, je te dis déjà que c’est l’une des meilleures galettes de l’année. Car ce PMPDJ, c’est surtout ça : de la techno-deep passée au mixeur pour enfanter des boucles folles à ravir les esgourdes.

Sur Haterville, MiM a décidé d’être minimaliste. Mais de façon intelligente. De décortiquer le 2step, la techno, de réduire parfois l’instrue à un seul gimmick, comme sur PMPDJ, superbe boucle que l’on croirait sortie d’un Robert Hood. Sur certains morceaux, on aurait presque l’impression d’entendre une fusion entre un Hell Hath No Fury des Clipse et la techno de Deepchord. C’est difficilement descriptible, MiM (et Grems, qui co-produit le morceau) semble se concentrer sur une seule sonorité, absolument imparable et tubesque, tout comme sur Pilon, où une bassline de l’enfer, pas plus, se fraie un chemin entre les bugs sonores. Mais parce que les mecs en ont dans le citron, ils te foutent une mandale en fin de tracks avec un soulèvement de synthés absolument sublime, chute dans le vide en mode techno-autiste qui te dresse les poils sur la gueule.

Et puis vient Tictac, et là, la baffe est grande. Cette instrue, on la croirait sortie du dernier Machinedrum, ou du Sepalcure. Mais en mode décharné, décortiqué au maximum. Un putain de 2step absolument sublime, avec le rythme claudiquant, le synthé fantomatique qui remplit l’espace et des basses affolantes. Sérieux, ce truc c’est une ode à la cyprine, ça transpire le sexe à mort, c’est hypnotique en diable. Quand je disais minimaliste, ce n’était pas synonyme de sans détail. Parce que là, ça fout le vertige tellement chaque élément, chaque son, est distillé avec prestance. On te sort un truc qui pourrait rivaliser avec le meilleur du Uk garage/2step, comme ça, d’un coup, sans prévenir.


Dans le même genre, tu as Haterville, tout aussi fascinante. Au départ, il n’y a pas grand chose, si l’on excepte ce rythme boiteux et cette ligne de basse louche, un peu aigue. Entek commence à cracher en mode psychotique, une bonne bassline vient caresser les oreilles sur le passage de Starlion, et tu sens que tu es en train d’assister à l’accouchement d’un tube. Break, Grems déboule et tabasse tout ce qui bouge pendant que des synthés puputes font muter le morceau en mode club crade à 4h du mat’, avec fumée de clopes, stroboscopes, minijupes et porte-jarretelles. Ca mouille dur. MiM, qui n’a pas produit le début de la track (concoctée par Chamade Beat), vient apposer sa patte en conclusion avec un petit “16” qui explose dans tous les sens, via breaks et cassures qui giclent en 3D dans tes oreilles, l’instrue se disloquant complètement pour notre plus grand plaisir.

Usle le S.A.V, c’est la grosse claque dans la gueule une fois encore, avec une instrue ENORME, parfait mélange entre un hiphop pimp, bass music que ne renierait pas Lunice et une techno bien ronde. Merde, Starlion est absolument monstrueux sur ce morceau, en partant sur un couplet très lent, avant d’éructer comme un dingue et de partir dans un trip flow TGV qui en laissera plus d’un sur le carreau.  Tu passes ça en club que les danseurs s’écartent pour laisser passer les Low Riders. Le compteur d’écoutes itunes fume déjà. Mais La palme du passage à tabac revient à 5D, featuring le vétéran Dadoo (qui avait déjà lâché un sacré couplet de mutant bien fou avec Bunk de Set&Match). Ici, chacun son couplet, chacun sa punition SM. Starlion, c’est des rythmes pachydermiques et synthés trance, ça te fout une trempe de l’enfer. Dadoo débarque, l’instrue se mue en electro psychotiques qui n’aurait pas démérité dans un EP de Reso. Avec Grems, on debarque sur une partie destructuré et expérimentale, avant de filer sur un dubstep ultra enervé pour le final hystérique de Entek. Ecouter ce morceau c’est comme te prendre des fessées avec une serviette mouillée : évidemment que ça fait mal, mais c’est putain de bon.

Merde permettra de poser un peu l’ambiance après le typhon du dessus, avec une instrue bien sombre, tout en basses et grondements, profondeurs de zalem et ghetto futuriste. Pour les amoureux du premier PMPDJ, Anthem ressortira le gros dubstep bien gras, qui donnera l’impression à tes oreilles de passer le mur du son, et ferra surement le bonheur des caves à concert.






PMPDJ étonne par la qualité de sa galette. Comme si le groupe avait réussi, juste pour ce LP, à trouver l’équilibre parfait entre expérimentations et amour du hiphop. Comme si les quatres zozos avaient voulu jouer les petits chimistes, pour accoucher de la recette optimale après avoir tenté de multiples mélanges. Les mecs envoient tout balader, font des doigts d’honneur à tout le monde, puis se mettent autour d’une table pour reconstruire un objet à la cohérence folle.

La force de Grems et sa clique est de s’octroyer toute les libertés dans le hiphop, sans jamais tomber dans  l’inadéquat, le hors propos. Sur ce PMPDJ, cette prise de risque, pourtant extrême, sonne juste à 100%. Cette envie de briser les limites, de pousser les murs, tout en gardant les pieds sur terre est le fil rouge indiscutable de ce LP. Tout semble couler dans nos oreilles avec logique, amour et humour. Et puis sérieusement, comment ne pas revenir sur le taff de MiM, dantesque, arrivant à balancer un pur disque de rap, en proposant pourtant des instrues lorgnant à 90% vers l’electro cramée. Cela aurait pu flirter dangereusement avec l’album concept bancal, (il suffisait de peu, en poussant un peu trop le délire) mais les 4 mecs, en ajustant et en dosant tous les éléments à la perfection, accouchent d’un LP rempli de tubes aux productions à tomber par terre.

Les chats ont beau faire de sacrées conneries, ils retombent toujours sur leurs pattes.






PMPDJ – Usle le S.A.V






PMPDJ – Stachmou





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Grems – Interview

Klub Sandwich – Les Valcheuzes

Grems – Broka Billy





11 Titres – Grems Industry

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World’s End Girlfriend – I Know You & Virgin Babylon Records Releases (Ryoma Maeda – Kashiwa Daisuke)

Posted in Chroniques on October 14th, 2012 by Dat'


They Were Poisoned



World’s End Girlfriend s’était fait extrêmement discret depuis le chef d’œuvre absolu qu’était Seven Idiots LP en 2010, dernier album en date, cathédrale improbable mélangeant drill’n bass et guitares folles. Pour le voir assez régulièrement en concert, Katsuhiko Maeda, après avoir flirté avec le death métal accompagné de son Black Hole Carnival, revient à des sonorités en solo, accompagné d’un VJ. Le retour vers une electronica-post rock se fait sentir, et en attendant un nouvel album, WEG sort un EP difficile à dénicher (en concert et dans quelques magasins), qui devrait néanmoins arriver sur le shop du label dans quelques temps.






Cet EP, en collaboration avec la japonaise graphiste LY DIK (qui, en plus du CD, vend des skates et des teeshirts au design très Die Antwoord, et qui dessine des bites partout), se décompose en deux titres, qui composent une unique fresque de 20 minutes. KID, morceau electronica à base de clochettes candides, voix fantomatiques et rythme de folie. Comme toujours avec WEG, on est dans l’émotion pure. Le break presque cartonnesque du milieu rend le morceau encore “âme d’enfant”, et les cordes à pleurer de la deuxième partie n’embrayeront pas sur une montée arrache cœur, mais un rythme pachydermique de folie. Un petit diamant, comme seul Katsuhiko Maeda peut les faire.

OLD, long de 13 minutes, fait la part belle aux cordes, mêlées à des sonorités cristallines, se la jouera territoire d’après guerre désolé, balafré par la neige. Seul un pied sourd, pulsation du dernier soldat en vie, servira de rythme sur la première moitié, avant qu’une grosse montée shoegaze vienne secouer le tout, et nous triturer la colonne vertébrale avec. Le reste du titre oscillera entre ses chevauchées fantastiques et moments d’accalmie. La mélodie de KID reviendra pour conclure le morceau au milieu du typhon, histoire de bien nous arracher la gueule C’est à broyer le palpitant, et cela semble augurer du meilleur quand à un nouveau LP de World’s End Girlfriend, qui, s’il suit cette direction, devrait revenir vers une electronica-shoegaze from paradise.

Cerise sur le gateau, World’s End Girlfriend vient de sortir 3 morceaux gratuits, Story Telling Again And Again à télécharger via amazon (pas très pratique mais bon tant pis, on fait avec) à cette adresse : http://www.amazon.co.jp/dp/B009P6YKHE







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Mais World’s End Girlfriend, c’est aussi un label, Virgin Babylon Records, qui va connaître une fin d’année chargée. Première sortie d’automne, celle de Ryoma Maeda, le frère de World’s End Girlfriend, qui sort son première album début novembre : Fantastic Suicide, avec un artwork assez fantastique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le tout s’annonce encore plus barré qu’une rave party sous LSD dans un Maid café d’Akihabara. Déluge de samples complètement cramés, musiques de dessins animés passées au mixeur, Drill’n bass hystérique… écouter le sampler de l’album revient à se foutre de l’héroïne dans les veines en regardant fixement un épisode de FuliCuli. Ne pas louper le premier single Roll Over Beethoveeeen, et les snippets de l’album à venir. Eloignez tout objet tranchant pendant écoute, le tout pouvant vous donner envie de vous arracher la peau du visage avec un coupe-légume.



Ryoma Maeda – Roll Over Beethoveeeen




Ryoma Maeda – Fantastic Suicide Album Teaser





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Plus paisible, moins épileptique et débordant d’émotion, Kashiwa Daisuke sortira fin novembre Re :, et semble cibler, au vu du premier single, à une musique plus post-rock, après le modern classical de son dernier LP. Ici, c’est donc une longue fresque au piano ultra émo, mêlée de chants religieux et bugs informatiques, avant de laisser cordes épiques et beats destructurés sublimer la mélancolie du tout. Pour le clip, point de lapin en pleine crise d’hystérie, mas de jolis plans de sakura. C’est beau, on va surveiller ça de près.








Virgin Babylon Records

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Tame Impala – Lonerism

Posted in Chroniques on October 9th, 2012 by Dat'


Les Valseuses



Tame Impala, inconnu au bataillon il y a deux ans, avait réussi à se hisser en haut de pas mal de tops 2010 (dont le mien) grâce au splendide Innerspeaker, petit chef d’œuvre de pop psyché, électronique hallucinée et teintes vintages. Australien sur son passeport, le groupe alignait une musique catchy, immédiate, aux refrains imparables, faciles à chanter sous la douche. Sauf que le tout était plongé dans une mare de drogue absolument gigantesque, avec tout ce qu’il fallait de guitares qui crachent, de synthés qui dérapent et de couches noisy bien crades. Attention, c’était loin d’être je-m’en-foutiste à la Wavves ! Tout était chiadé à la perfection, taillé à la serpe, chaque bug sonore semblait avoir été bichonné avec plus de soin qu’un caniche de concours. Ecouter Innerspeaker, c’était comme se dorer la pilule sur un yacht en sirotant un cocktail plein de LSD. Ce premier opus était le synonyme parfait de l’expression “album de tubes viciés”.

Autant dire que ce Lonerism était foutrement attendu au tournant. Difficile de croire que Kevin Parker pouvait balancer un album aussi évident et lumineux que le premier disque, qui se devait de comporter au moins autant de bombes capables de nous dresser les cheveux sur la gueule. Sinon j’écris cette chronique après une nuit blanche complète, ça va être compliqué d’enfiler les mots les uns après les autres, mais cet état est parfait pour appréhender le LP.








Et autant dire que Lonerism ne commence pas de façon aussi ouverte et spontanée qu’Innerspeaker. Les deux premiers morceaux sabrent étonnamment ce que l’on préférait chez Tame Impala : au revoir les refrains à chanter après trop de bières, oubliez la mélodie facile que l’on va baragouiner dans le métro. Place aux textures folles, et à une construction flirtant avec l’expérimental. Be Above It, c’est en premier lieu un rythme cinglé. Des parasites bien ancrés dans le mille-feuille sonore. Et surtout, ces gros synthés qui explosent et t’en foutent plein la poire, façon voix lactée qui se rétracte sur elle même. Une voix hystérique à l’horizon repète ad-nauseam le titre de la chanson, métronome vocal hypnotique. Le chant se fait lui toujours langoureux et pop, tentant de se frayer un chemin dans ce concert de lasers électro. Ce morceau, c’est comme écouter les beatles donner un concert en pleine attaque finale de l’étoile noire.

Endors-toi (l’album a été en parti enregistré sur Paris) continue dans cette veine droguée, avec des guitares passées au Flanger comme s’il en pleuvait (cet effet étant surement le meilleur ami de Tame Impala) et des synthés (décidemment plus présents) qui déboulent de partout et rasent tout ce qui dépasse. Au milieu du morceau, notre chanteur perché commence à déclamer des phrases, sans raison, sans chorus, sans refrain, juste quelques lignes qui vont se faire emporter par une tempête d’effets psychés de guitares bien sales, les 30 dernières secondes te foutant d’ailleurs un sacré coup de pied au cul. Ok, on comprend donc que Tame Impala a profité de l’argent récolté lors de ses deux dernières années pour tenter de faire un maximum d’overdoses, et de mettre le tout en musique. On est perdu, mais c’est sacrement cool.

Et après ces deux gang-bang auditifs, Lonerism va partir sur quelque chose d’un peu plus cadré, rappelant la première galette. Apocalypse Dream nous sort une structure identifiable, avec couplets, hook et refrains. C’est beau, planant, grandiloquent, ça fait du bien. Ca pourrait paraître un peu sage après les deux brulots du dessus, mais c’est du tout bon. Par contre, on a un peu peur, car l’album rentre cabre un peu et nous emmène sur des terrains pas désagréables, mais trop inoffensifs avec Mind Mischief et Music to walk home back, sympathiques pop-songs vaguement brinquebalantes, un peu faciles, qui n’ont ni la dimension des tubes de Innerspeaker, ni la folie de l’ouverture du nouveau LP.





Alors forcément, on s’inquiète un peu, on espère que l’album ne va pas se ratatiner petit à petit, qu’il va réussir à se cabrer et nous balancer des trésors dans la tronche. On ne pouvait pas espérer mieux. C’est bien simple, à partir de Why Won’t They Talk To Me ?, on débarque dans LA portion affolante de l’album. Ce morceau d’abord, renoue avec le coté pop-sous-la-douche que sait si bien faire Tame Impala, en mâtinant le tout de claviers électro qui n’en finissent plus de monter vers les étoiles. On tape des mains, on dodeline de la tête, mais quand le refrain arrive, super mélancolique, beau comme la mort, on est juste trop haut. Merde, ce truc, tu as envie de le chanter partout, avec le sourire, en allant au boulot, monté sur une licorne rose avec des petits soleils accrochés au cul. 3min30, c’est vraiment superbe, bourré d’émotion, imparable, sans compter cette dernière explosion à filer la frousse. Ce morceau a tout pour plaire.

Feels Like We Only Go Backwards est encore plus pop-cristalline, presque tire-larmes avec ce coté voix perdue dans la brume, John Lennon imprimé sur un buvard, soleil, plage et pipe à crack. Il n’y a rien de spécial hein, c’est surement du déjà entendu, du déjà fait, c’est ultra référencé 60’s… sauf que c’est absolument parfait. Le refrain est parfait, l’instrue est parfaite, et les détails fourmillent de partout. Ce morceau, tu vas l’avoir collé dans le cortex pendant des journées entières, il va s’infiltrer sous ta peau, dans tes poumons, dans tes viscères. Pour te coller des papillons partout dans le ventre, et c’est bien ça le plus important.

Keep On Lying, c’est un peu là même chose, en tout aussi réussi. Le morceau semble avoir commencé depuis des lustres quand il file dans nos oreilles. Pas d’introduction, pas d’entame, on débarque directement dans cette complainte ultra mélancolique, avec des motifs qui se répètent à n’en plus finir, et des voix qui copulent comme en 69. Les guitares arrachent le cœur tellement elles sont belles. Tu entends des rires, des conversations, valse de field-recording sur fond de mélodie fragile, c’est de toute beauté. C’est comme si tu avais pris du LSD sur un quai de gare, que tu arrivais à capter toutes les conversations des voyageurs, qui formeraient un tout, une bulle de phrases partant dans tous les sens, avec un rock band derrière pour assurer l’ambiance. C’est absolument sublime. Graduellement, le monstre foule et ses hystériques palabres tend à s’effacer, remplacé par une mélodie jouée cent fois, avec des instruments différents à chaque fois. Le bad-trip semble poindre, la mélopée se casse parfois la gueule, tangue, boite et te prépare la grosse mandale du morceau : un solo de guitare qui arrache comme jamais, bordélique, camé jusqu’à l’os, c’est indescriptible, ça part dans tous les sens. Et quand la guitare se déchaine sur la dernière minute, c’est l’orgasme absolue, la jouissance suprême, tu te prends à faire le guitar hero en sautant comme un dingue au milieu de ton appart. Le morceau va repartir comme il est arrivé, il n’y a pas de fin, pas de conclusion, le tout s’efface au milieu d’un couplet. Comme si Tame Impala venait de nous offrir un instantané, une photo, un bout de vie qui n‘aurait ni naissance ni mort. Un diamant absolu.

Histoire de bien te finir la mâchoire à coup de pelle, le groupe balance carrément le plus gros tube du disque, Elephant, fresque vandale ahurissante sortant les guitares et basses bien dégueulasses : c’est juste imparable, tube de stade, mélodie sublime, effets sonores dingues. Dès que le solo démarre au bout d’une minute trente, on n’est même plus sur terre tellement c’est épique, Tame Impala nous envoie combattre le crime sur Saturne, on se sent bien, on se sent plus fort que la mort, près à défier le soleil, à foncer droit dans les flammes. Sérieux, comment définir ce passage absolument insensé vers les 2min20 ? Une mandale monumentale. Les voisins n’ont pas fini de hurler sur les mois à venir, tant on ne peut résister à l’envie de passer cette bombe H24 à fond les ballons.

Nothing That Has Happened So Far Has Been Anything We Could Control, calmera le jeu avec son synthé fragile, ses voix complètement cramées par la drogue et les milliers de détails qui semblent se faufiler dans tous les interstices de la chanson. On va encore partir dans une overdose de Flanger histoire de bien nous ramollir le ciboulot et nous faire perdre tout repère temporel. La deuxième partie, qui va flirter avec l’electro sexuelle en slow motion, plongée dans une orgie de cassures en tout genre (on passe en revue toute la pédale à effets là) finira de nous achever et de nous laisser pour mort dans un lit de psychotropes. Malheureusement, après cet enchainement de morceaux proprement hallucinant, après cette brochette qui peut se résumer par le mot « bonheur », la conclusion Sun’s Coming Up gâche un peu le trip. C’est le seul plantage du disque, balade au piano désagréable et inutile.






Sincérement, ce disque est une bombe. Arrivant à être plus riche que son prédécesseur, tout en gardant ce coté imparable et pop, Lonerism nous prend par la main pour nous emmener dans des territoires que l’on osait même pas espérer. C’est psyché comme jamais, c’est beau, lumineux, mélancolique… Tu as des solos de guitares qui butent, et des synthés électro qui défoncent.

Bon, ok je te l’accorde, au bout d’une demi-heure d’écoute, tu as déjà envie de filer en cure de désintox. Mais quand le trip est beau, pas moyen de refuser le voyage. Car sur certains morceaux, ce Lonerism est sidérant.

Un putain d’exploit, une des gemmes de 2012.






Tame Impala – Elephant






Tame Impala – Endors Toi





12 titres – Modular

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Kid606 – Lost In The Game

Posted in Chroniques on September 30th, 2012 by Dat'


Boss du cloud crème



Il est désormais impossible de prédire quel type de musique Kid606 va arpenter sur chacune de ses sorties. Autrefois patron du breakcore et de l’IDM craqué avec son cultissime et indispensable The Action Packed Mentallist Brings You The Fucking Jam, ou les sympathiques Kill Sound Before Sound Kills You et GQ On The EQ++, le vénézuélien c’est donné la mission de prendre à contre pied ses auditeurs, chaque année ou presque. Pour les nostalgiques du vieux Kid606, fini la techno hystérique passée au mixeur, le musicien affirmant que la seule façon de le pousser à recomposer de la musique fracassée est “qu’on lui donne une machine à remonter le temps pour une époque où le breakcore n’existait pas”.

Alors Kid606 a vogué vers des terres plus apaisées via le ouaté Resilience, avant de sortir un excellent Pretty Girls Make Raves et un album étrange de drone-ambiant à la pochette et au titre inoubliable, Songs About Fucking Steve Albini. Et voici que sans prévenir, un Lost In The Game déboule dans nos rayons, apportant son lot de mystères quand à la nouvelle orientation du bonhomme, qui n’a pas perdu son humour, au vu du tracklisting proposé.








Bon, l’année dernière, il y a deux types de musique qui ont drôlement bien marchés, et que l’on entendait un peu partout : La juke, via planet-mu, transformée et modelée par Kuedo et Machinedrum… et le Hiphop enfumé, plein de purple syrup, balancé par des mecs comme Clams Casino ou Harry Fraud. Et bien, le nouveau Kid606 se pose pile entre les deux. Godspeed You African American Emperor (ahah) commence superbement l’album, avec ces synthés pesants, lourds, poisseux, qui nous semblent tout droit échappés d’un vieux Abstract Keal Agram. De façon très progressive, un beat se fait entendre, noyé dans ma mélasse, tonnant dan le noir, et une petite mélodie cristalline fini de transformer la fresque en vrai hiphop slow-motion ultra caverneux. Horrifique ? nah t’inquiète ne te fais pas bile, passe le à fond dans ta wago direction Cluster ville.

Gimme Summer ne donnera certainement pas des envies de playa, mais plus de psychotropes missionnés pour te mettre faya. Gros claviers bien ronds, mélodie et rythme qui donnent envie de mettre les mains au dessus de la tête, avec claquements de doigts en prime. Même Asap Rocky trouverait ça trop cotonneux. Mais pas toi, tu t’enfonces dans ton canapé avec ta bière en dodelinant lentement de la tête, avant de t’enfoncer dans les lymbes de ton inconscient. Et tout le disque est dans cet ordre d’idée, mi-pimp mi-coma, comme si tu conduisais un Low-rider sur les plages de Miami, la gueule débordant de rivotril et l’âme encore embuée par la mort de l’amour de ta vie. Mélange étonnant. Pas nouveau, mais étonnant. Comme si Kid606 voulait pousser le délire du Purple Hiphop encore plus loin, quitte à le faire flirter avec l’ambiant décanillé, aussi dense qu’une vase dégoulinant des enceintes.

I Want To Join a Cult, un peu plus loin dans l’album, est peut être le plus beau titre de ce Lost In The Game, avec cette mélodie superbe qui n’en fini plus de se délier, ce coté rêverie hiphop vs rentre-dedans céleste. Pas vraiment d’évolution pendant ces 5 minutes, juste de la brume enveloppant une mélopée planante, et un beat sourd en horizon. Meeguk So Horny lorgnera lui aussi du coté de Clams Casino, avec claviers bancaux en prime, avec une conclusion super émo qui draguera plus d’une colonne vertébrale. Reste qu’avec des bombes abstract hiphop screwed&chopped à la Big Black Ketamine Jesus (ahah), tu frôles le tube MTV passé en slow motion, que tout Mc ayant plus d’un flow pain aux raisins aimerait foutre dans sa mixtape. Même combat pour les excellents I Need To Start a Cult, Night Club vs Book Club ou Baroque and Out Of Money (ahah).

Et le parallèle (certes ténu) fait plus haut avec des français adeptes d’abstract n’est pas si stupide en entendant des morceaux comme New Boss Same As Old Boss, et ses synthés saccadés, saturés et sombres, très proches de ce que peut balancer nos chéris de chez Depth Affect (la similitude est frappante, même si la fresque de Kid606 est bien plus embrumée, et épouse un rythme plus footwork). Le morceau est une grosse mandale, et l’on aimerait vraiment entendre deux trois rappeurs s’ébattre sur ces claviers graisseux.





En mixant les rythmes épileptiques de la Juke (ici ultra étouffés) à des drones drogués et des atmosphères hiphop presque screwed&chopped, Kid606 balance un album qui n’invente rien (mais alors, vraiment rien) mais qui déroule sa musique avec classe et prestance, en te filant pile ce que voulait tes esgourdes pour les mois d’automne. Un album qui ne marquera pas sur l’instant, mais qui devrait, petit à petit, s’immiscer dans nos synapses et s’installer durablement lors de trop longues nuits à rester éveillé.

Le LP porte bien son nom, car Lost in the game, Kid606 l’est surement, prenant la place d’un producteur de hiphop perdu dans son monde, à pondre des instrues de neurasthéniques laissant poindre de succinctes réminiscences pimp. Boss du rap game perdu dans la blanche, enfermé dans un labyrinthe de fumée, à n’en plus trouver la sortie. Le rapprochement avec des pontes comme Clams Casino ou Kuedo coule de source. On sent d’ailleurs que ce dernier a ouvert une brèche que beaucoup vont arpenter (il suffit d’écouter les premiers extrait du prochain µ-Ziq, qui viennent de disparaitre du soundcloud malheuresement), et que le Severant du bonhomme risque d’être énormément cité en influence dans les années à venir, sorte de Untrue 2011, même si Kuedo semble être condamné à rester dans l’ombre, célébré par une petite poignée de producteurs seulement.

Le seul défaut réel de cet album de Kid606 est évident : ne pas avoir débaucher de Mc pour poser sur la musique de Lost In The Game. Car cela aurait pu devenir un superbe album de Cloud Rap complètement perché, transformant ces élucubrations autistes en ôde à la drogue musique. A écouter sur de bonnes grosses enceintes qui ronflent un max,  par contre, cela me semble indispensable de le préciser. La nuit, une bière à la main, posé.






Kid606 – I Want To Join a Cult










13 titres – Tigerbeat6

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Kid Koala – 12 Bit Blues

Posted in Chroniques on September 20th, 2012 by Dat'


My scratches laugh behind the mask



C’est marrant, on parle beaucoup de Turntablism ces temps ci, avec l’avènement de mecs comme Scratch Bandits Crew ou C2C. On ne refuse plus de comparer ces derniers à leurs compatriotes Birdy Nam Nam, ou au collègue nippon Dj Kentaro. Mais on ne parle pas assez de Kid Koala. Ce mec tient d’ailleurs une place importante dans mon parcours musical. Premièrement, c’est rare venant d’un Dj, il a enrichi mon vocabulaire en m’apprenant ce qu’était un Syndrome du Canal Carpien, notion qui m’était totalement étrangère à l’époque. Deuxièmement, il m’avait administré une claque gigantesque avec son premier album en 2000, en me jetant dans la gueule une manière d’aborder le turntablism complètement alien, comme je ne l’avais jamais vraiment imaginé auparavant. Pour moi, jouer avec des platines, c’était faire le chaud sur ses vinyles pour placer le plus de scratchs possibles en tordant ses bras dans tous les sens, j’en étais super friand d’ailleurs.  Mais chez Kid Koala, on découvrait une musique sans esbroufe, sans désir de nous jeter à la gueule sa technicité et ses tours de passe-passe : Kid Koala est l’antithèse du groupe de péquins voulant faire passer un concert de turntablism pour une branlette spectaculaire (et parfois bien vaine) de la platine. Fog avait d’ailleurs enfoncé le clou juste après. Et à l’époque, ça m’avait complètement mindfucké, un peu comme le jour où j’avais découvert que l’accordéon pouvait être beau en chialant sa tristesse, et ne pas seulement être un truc de guignol de salles des fêtes.

Il y avait un amour insolent dans la musique du Kid, complètement millimétrée, dosée au scratch près, ces derniers n’arrivant pas par milliers sur une boucle. C’était d’ailleurs frustrant au départ, désarçonné par l’aridité de certains morceaux, avant de comprendre qu’orgie n’était pas synonyme de coup de foudre.

Pourtant, Kid Koala ne m’a jamais fait chavirer sur la durée un album. Souvent cabochards, bourrés d’humour et de mélancolie, ses LP restaient souvent inégaux, lorgnant parfois vers la blague (Like Irregular Chickens me fera toujours marrer), et brillant surtout par la présence de quelques morceaux incontournables (Drunk Trompet, Fender Bender, Skanky Panky, le récent Moon River, le sublime Basin Street Blues qui est surement son meilleur morceau peut être… et pleins d’autres que j’oublie évidemment). C’était d’ailleurs quand le Kid se rapprochait du Blues qu’il réussissait le plus à voler mon cœur. Alors forcément, quand un Lp intitulé 12 Bit Blues fait surface, je ne pouvais que me rendre chez mon disquaire favori en mode facétieux sauts de cabris.








Bon, l’autre attribut incontournable de Kid Koala, c’est le soin apporté aux artworks et CD qu’il sort. Entre petites Bd déglinguées dessinées par le Kid lui même, qui s’étaleront parfois sur plus de 300 pages ( !!), ou petites surprises cartonnées à découper dans les livrets, la découverte d’un LP du canadien a toujours été un petit plaisir coupable. Le genre d’édition qui te donne envie de continuer à acheter des disques pour la vie. Dans 12 bit blues, outre la superbe pochette cartonnée, on trouve pêle-mêle : un jeu de domino pour les voyages en avion ( ?), une photo du studio hallucinant de Kid Koala, des dessins + textes explicatifs des instruments qu’il adore et qu’il a utilisé, des anecdotes vraiment sympa (il explique pourquoi son premier album était en Mono par exemple), et un manuel d’explication pour construire sa propre Turntable. Comment ça? Oui carrément ! Parce que dans le disque, tu trouves aussi de planches cartonnées et un vinyle en plastique pour construire ta platine “hand powered” ! Alors bon, franchement, moi et le bricolage, ça fait 6, ce qui fait que j’ai VRAIMENT galéré pour construire le truc, et que le résultât ressemblait plus à une mouette morte qu’à la superbe platine vintage dessinée sur la pochette. Mais ça marche quand même ! Enfin, quand tu fais tourner le vinyle, ça fait “iiiiiiouuuuuiiiiicrrrrrrrrffffiiiii” je n’ai pas réussi à entendre le message malheureusement. A charge de revanche. Sinon, sur le livret est écrit : Stay tuned for Zombie Ramen Puppet Tour, Mosquito Book, Slew II tour, Creatures album and an animated film about something. Bref, on risque de continuer à entendre parler du Kid dans les années à venir…


Alors donc, ce LP fait la part belle au Blues. C’est une info importante, car si le blues te fait chier à la base, tu ne vas pas aimer. Vraiment. J’ai fais écouter ce disque à des personnes réfractaires au genre, elles sont parties en courant. De mon coté, j’ai un attachement fort à cette musique, comme pour celle des balkans, ce qui expliquera la non-objectivité de cette chronique. Oh, ne vous y méprenez pas, je n’y connais pas grand chose en blues, à part les têtes incontournables du genre. Mais j’ai baigné dans cette musique toute ma jeunesse. A cause de ma mère, qui écoutait ça toute la journée, et qui, à l’instar des bars slaves craignos de Paris, me trainait tout jeune dans les vieux clubs Blues où des papys s’escrimaient à sortir des trucs super pimp avec une guitare canée et une voix éraillée. Ma mère, elle s’en foutait que je crève à 10ans, étouffé par la fumée de clope, ou que je me perde entouré de 10 mecs pleins de rides dans les toilettes sombres des bouges à blues parisiens. Et putain, elle avait drôlement raison.

Alors, tu l’entends tout de suite, dès 1 Bit Blues (10.000 miles), Kid Koala fait comme d’hab’, il recréer des morceaux avec des éléments importés d’un peu partout. Ici tu as le piano au groove imparable, la voix décrépie passée en boucle… et un méchant beat Hiphop balancé par le Kid. Ca balance grave, ta nuque fait forcément des soubresauts, et tu as tout de suite envie d’une vieille cigarette chiffonnée pour maugréer sur ta vie avec prestance. Les scratchs ? Mais ouai mec, il y en a une sacré tripotée ! C’est la classe. La grosse classe.

Bon, le concept du blues déconstruit puis reconstruit se développe sur tout le disque de la même manière, difficile d’en parler sur 10 paragraphes, donc on va faire court. Reste que des titres sortent méchamment du lot. Kid Koala connaît bien ses bases, et fait intervenir des guitares qui te foutent des fourmis dans les hanches, en plus de cuivres alcoolisés tartinés de scratchs sur 2 Bit Blues, et ça fait grave du bien. D’autant plus que là, les voix sont laissées presque intacts pour cracher leurs couplets, et la conclusion avec son piano devenu dingue déchire l’hymen de sa maman. 3 Bit Blues est incroyablement groovy, ça défonce tellement que tu fais du air-guitare en fumant un air-cigare et en balançant des ooooooh baaaaby dans un air-micro. Un putain de air-orgasme. Mon dieu ce rythme de folie, cette guitare défoncée par les scratchs qui déboulent et te file la frousse, avant une montée furibarde, classe comme la mort elle même, qui te liquide la colonne vertébrale à coup de fusil à pompe. “To please youuuuu” qu’il dit, le sample vocal. Ouai, you pleased me a fucking lot, merci very much.



Tu as aussi 7 Bit Blues, qui commence sur les chapeaux de roues avec un rythme d’enfer et des scratchs de folie qui concassent le bluesman du jour. Tu sens tes doigts qui veulent tapoter en rythme sur la table ? Tu sens ta nuque qui se rebelle ? Tu sens ton bassin qui frémit de façon incontrôlable comme lors de ta première partie de sexe ? C’est bon pour les oreilles, c’est malsain pour le corps. Ces scratchs de la classe à 1min45 ! Et puis tout à coup, tout s’éteint. Juste un clavier, qui frise la mélancolie… la voix qui hulule au loin, et une charge héroïque qui s’annonce avec les cuivres, montée de fou, le chanteur qui perd la boule, les bugs informatiques qui se précisent, et VLAN le beat et les scratches qui tonnent à nouveau et détruisent tout ce qui bouge. Paie ta grosse jouissance. Il y a aussi le petit tube 8 Bit Blues (Chicago to LA to NY) qui démonte franchement, même s’il n’a pas la progression fulgurante des précités. La track la plus hiphop dans sa démarche peut être, la plus accessible aussi, très plaisante, avec un beat bien massif.

Mais dans ce disque, il y a deux perles, beaucoup plus calmes, qui ne filent pas des taloches par leur puissance sonore, mais qui te labourent l’âme par leur beauté. 5 Bit Blues tout d’abord. Qui joue de la répétition, avec ce piano qui lâche les mêmes notes indéfiniment, comme pour les cuivres, qui ne font que pleurer à intervalles régulières. Il y a cette voix féminine qui te fout la frousse à l’horizon. Et cette voix de bluesman cassée, mise en premier plan, à peine touchée par les scratches. Ici, pas vraiment de gros rythme, pas de secousse. Kid Koala nous transporte dans un bar enfumé, où tout le monde est absorbé par ce petit homme en costume, prostré sur son micro, qui t’arrache le palpitant avec rien, ou presque.

L’autre crève cœur, c’est 6 Bit Blues qui dodeline en maugréant sur son existence, avec une voix qui fout encore la frousse. C’est beau, tranquille, tu prends ton pied. Et tout à coup, un espèce de chœur déboule dans le morceau, et te décolle de ton siège. Regarde ton bras mec, les poils tentent de rejoindre le plafond. C’est ce chœur fantomatique qui fait le morceau, ces chants d’outre tombe que les scratchs n’arrivent même pas à altérer qui te flinguent le cerveau. Le seul problème du disque, c’est qu’il se casse un peu la gueule en fin de parcours, avec deux morceaux qui font plus office d’interludes que de vraies compositions, et c’est dommageable (10 Bit Blues n’a pas vraiment d’intérêt, et aurait mieux fait de se caser en milieu de disque pour passer inaperçu). Mais ce n’est pas grand chose face à ce que propose le disque dans son ensemble.





En se débarrassant, pour la première fois, de ses tracks foutraques rigolotes et autres interludes blagueurs, Kid Koala se concentre sur un album de 12 titres solides, qui s’enchainent en balançant tout ce qu’ils peuvent. Un album concept, certes, qui touchera en premier les personnes ayant un minimum d’accointance avec le Blues, sous peine de passer pour un disque d’easy listening pour les oreilles distraites. Mais la porté du disque est toute autre : en introduction, je parlais de show, de technique, de prouesse, discours inhérent au genre et aux chroniques traitant de du Kid, de C2C ou de Birdy Nam Nam. Et derrière cet album se cache bien des tonnes d’histoires de sampler, de turntablist, de scratchs, de travaille de fourmis dans la juxtaposition des samples, du fait que tout est fait en temps réel, ce qui conforteront la légende “Kid Koala”.

Sauf qu’à l’écoute de ce 12 Bit Blues, on ne pense plus du tout à tout cela. Parce que c’est beau, juste beau, et c’est tout. Ce n’est plus de la technique, ce ne sont plus des assemblages de sons de folie, achitectures de samples. On ne pense plus à la création, à la performance. On se fout de savoir si Koala a 4 bras et six platines. Là, ce n’est plus le problème. Le seul problème, c’est de savoir si  l’on va pouvoir écouter certains de ces morceaux sans verser une larme. Un petit chef d’œuvre.






Kid Koala – 3 Bit Blues





Kid Koala – 5 Bit Blues





Kid Koala – 8 Bit Blues (Chicago to LA to NY)





12 Titres – Ninja Tune

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CUM ON MY SELECTOR 5 : Piri Piri, Rone, Mao, Hyacinthe, Unicorn Kid, xxyyxx

Posted in Chroniques on September 18th, 2012 by Dat'


 

Cum On My Selector 5 



MAO – Harken

Même si l’artiste est inconnu au bataillon, et que son nom n’a surement rien à voir avec la Musique Assistée par Ordinateur, le bonhomme balance avec Harken une petite tuerie. La progression du morceau est scandaleusement jouissive, la mélodie aux synthés file la frousse, les voix puputes sont parfaitement placées, et le petit coté Soul via les breaks de piano ouatés en dragueront plus d’un. Ce morceau est un tube incroyable, une bombe bien vicieuse, une longue fresque tout en finesse qui donne envie de se jeter contre les murs en conviant autant le stupre et la moiteur du 2step que la mélodie des hit dance des années 90. Une baffe qui donne envie de tendre la joue pour se prendre des mandales en mode rotatif ad vitam eternam. MAO n’a sorti qu’un EP de deux titres, “Harken / Emeralds”, mais vous pouvez être certain que je vais suivre ce monsieur à la trace.






 

Piri Piri – You Seem

On a le tube pour danser avec les anges juste au dessus, on veut désormais s’étendre au milieu des tombes avec une marguerite coincée entre les dents. Des les premières notes du morceau, on est convaincu que le tout va désosser : mélodie lugubre, voix perdues dans le brouillard, rythme disparate.  A l’arrivée des cupidons pitchés, le morceau s’emballe doucement, et nous plonge dans un Uk Garage mélancolique qui se permettra carrément de nous chaparder le palpitant sur la conclusion et sa montée cristalline. You Seem est issu d’un Ep sympathique, assez remuant (le morceau Postal est un bon exemple) mais qui n’attendra jamais le sommet de ce You Seem, au contraste salvateur. En espérant que Piri Piri nous livre en fin d’année d’autres compos basées sur cette forte facette émo non mise en exergue dans les tracks de l’Ep.






 

XXYYXX – Luv U Grl

Bon alors là, j’ai du louper un truc. Je n’ai strictement jamais entendu parlé de XXYYXX, et pourtant, le mec cumule les centaines de milliers de vues sur youtube (voir les millions pour son morceau About You). Je pourrais me rassurer en me disant que le mec a surement sorti un seul petit EP qui a buzzé un max, mais non, XXYYXX a sorti deux LP  en même pas un an. Je me suis coupé les veines en comprenant que je n’étais pas hype. Sinon le morceau ? Bordel, ce Luv U Grl est incroyable. Ca commence doucement, avec beat 2step étouffé, semblant s’échapper d’un club au fond d’une impasse. C’est dépouillé, presque aride, mais un petit synthé que n’aurait pas renié James Blake fait graduellement son entrée, et te hérisse les poils du cul dans le même mouvement. Le coté ultra aride de la première moitié du morceau interpelle, jusqu’à la deuxième minute, où tout explose, avec un clavier parfait qui te fout une belle taloche, avant de retomber dans ce coté “étouffé-musique-sortant-d’un-mur-de-béton”. Ce va-et-vient constant, qui te racle la gueule est ultra jouissif sur ce morceau, et transforme Luv U Grl en sacre bombinette. Voilà, je vous laisse, moi j’ai ses albums à écouter tout de suite, là, maintenant, vraiment.






 

Rone – Parade

Okay ! Je n’en peux plus d’attendre le nouvel album de Rone. Faut arrêter de déconner les mecs de chez Infiné. Sortez le putain, sortez le ! En combler l’attente, j’ai compté jusqu’à 18500, j’ai tabassé des gens au hasard dans la rue, j’ai rangé mes disques par ordre alphabétique, j’ai pris beaucoup de somnifère pour dormir d’une traite. Rien n’y fait, il me faut cet album bordel de merde. Et c’est au bord de la rupture d’anévrisme qu’est apparu Parade pour me soulager, don des dieux, nouveau single de Rone, pour son LP Tohu Bohu de novembre. Et bien, c’est beau. C’est court, mais c’est putain de beau. On espère une version longue sur l’album, mais sinon tout y est : les mélodies à chialer, le souffle épique, cette pincée d’humeur candide, les montées qui draguent la colonne. Bon, plus qu’à attendre l’album, on se revoit pour la chronique. 18501, 18502, 18503, 18504, 18505, 18506, 18507…






 

Hyacinthe – La connasse au refrain

Tout a commencé par le fameux Wesh Morray de Booba, qui vient d’engendrer d’un monstre en faisant tomber le rap français dans une guerre sans fin. En voulant réécouter le morceau sur youtube, je vois apparaître un “remix de Hyacinthe“. Je ne connais pas le bonhomme, j’écoute, je me marre et je prends mon pied. Le mec a une voix de folie, bien hargneuse, une présence d’enfoirée, qui porte clairement le morceau. D’autant plus qu’il te sort deux trois belles phases (“J’bouffe du saumon, des chattes de norvégiennes / Avant d’les larguer par facebook pour préserver mon hygiène…”). Bref, je commence à cliquer au grès des liens youtube, et tombe directement sur Ma petite biatch en sucre, où Hyacinthe se met carrément à rapper sur l’énorme Truth Flood de Kuedo (qui a sorti le meilleur album de 2011 avec Seekae, on se souvient). Un Mc qui pose sur du Kuedo ne peut être qu’un Mc sympa. Et hop, voilà que se faufile dans mes oreilles La connasse au refrain, le tube évident de l’Ep Gratuit de Hyacinthe et Krampf. Le morceau a une instrue qui défonce (les prods de Krampf sont excellentes sur l’Ep), entre claviers bien drogué, gimmick parfait (la connasse qui s’incruste après les couplets donc) et un solo de guitare qui n’a rien à faire là mais qui se révèle pourtant indispensable. Certes, si Hyacinthe abuse clairement trop du champ lexical autour des mots “bite” et “foutre”, il dégomme tellement sur certaines punchlines, dégueulasses, hargneuses, parfaitement tournées, et non dénuées d’humour, qu’on lui pardonne ses fixettes chibreuses.
D’autant plus que le mec est vraiment méchant au micro, avec sa voix complètement dégommée. Au niveau flow/voix, Hyacinthe est la fusion entre un Kaaris qui se serait éclaté la cloison nasale à force de cocaïne et un Soklak te vomissant dessus en tenant bien fort sa bouteille de Koenigsbier. Du tout bon, impatience sur les prochaines livraisons.






 

Unicorn Kid – Need U

Je n’ai jamais caché mes amours pour la dance du début des 90’s, pour la Trance émo et les claviers bien putes. Certes, je dois presque avoir autant de Cd “Dance Machine” que de LP Warp dans ma collection de disques, mais ils seront bien content de ça quand ils auront besoin d’un connard défoncé pour animer leurs soirées “puputes-dance-rétro-mélancolico-kitsch-anniversaires”. Car là où l’on parle des vieux tubes dance comme des trucs marrant et débiles pour danser, moi j’y vois souvent des synthés à chialer et des mélodies super jolies qui me vrillent le cœur. Et bien ce Need U de Unicorn Kid, c’est pareil. Certes, c’est un putain de tube imparable, et je me demande d’ailleurs pourquoi ce morceau n’a pas plus de 10.000 vues étant donné que Need U pourrait retourner tous les clubs en manque de bombinettes putassières. Tube, donc, mais surtout beau morceau. Vraiment, ce truc me fait planer et me rend super nostalgique, ça me fait penser à mon adolescence, ça me donne envie d’être un émo et courir dans les champs en ouvrant les bras bien grands. La mélodie est mortelle, ultra bordelière, pas subtile pour un sous. Sans compter qu’il y a les petites voix pitchées et les montées fédératrices façon anthem de stade, histoire de former le morceau pupute parfait. Ne pas bouder son plaisir. J’imagine donc que ce truc est fait pour danser. Mais pour moi, à l’instar d’un Sun de Caribou, ce Need U serait presque un morceau tire-larmes.







 

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Yagya – The Inescapable Decay Of My Heart

Posted in Chroniques on September 14th, 2012 by Dat'


 

I’d rather die than to be with you…



Plus jeune, beaucoup plus jeune même (milieu/fin des années 90), j’aimais gribouiller sur les murs même si c’était vraiment moche. J’aimais bien sonner aux portes puis me barrer en courant avec mes potes, même si c’était franchement attardé vu que l’on arrête normalement de faire ça quand on a dix ans. Mais surtout je restais collé à mon discman, qui m’accompagnait jours et nuits. Dans ma période 100% electronica, j’avais une aversion absolue pour ces musiciens que j’aimais par dessous tout, qui soudainement se mettaient à utiliser des chanteurs pour poser sur leurs magnifiques fresques. Ca me rendait dingue, fou, je trouvais ça proche du blasphème, et pestais comme un dingue si le compositeur n’avait pas inclus une version “instrumentale” dans son LP. Je n’explique pas du tout cette façon de penser, je ne me souviens même plus des groupes en question. Mais j’ai toujours ce sentiment pesant, d’avoir, à un moment de ma jeunesse, écarté connement les artistes electronica qui, soudainement, se mettaient à convier des chanteurs sur leurs compos. Ce qui était d’autant plus illogique car à coté de cela, j’étais dingue de trucs comme Chemical Brothers, Lamb ou The Prodigy, qui n’étaient pas avares en “vocals”.

Le plus marrant, c’est le revirement opéré au bout d’un moment, sans explication. Sur la majorité de ce que j’écoutais, je me disais “putain mais pourquoi personne ne chante là dessus ?”. Je me suis toujours demandé pourquoi aucun Mc n’avait jamais eu envie de poser sur le Dawn Chorus de Boards Of Canada par exemple. Merde, si un américain l’avait fait, Asap Rocky aurait eu dix ans de retard ! Je me souviens, peut être au début des années 2000, Thom Yorke avait émis le souhait de chanter sur des morceaux d’Autechre, ce qui n’a jamais été fait, alors que c’était une idée géniale. Bref, ce que je honnissais plus jeune me faisait fantasmer quelques années plus tard. Anticon avait d’ailleurs réussi à assouvir cette envie d’entendre des gens rapper/chanter sur des musiques bizarres, et mon amour pour ce label vient peut être précisément de là à la base. Ils avaient comblé un vide dans mes oreilles (avec Clouddead précisément).







Pourquoi je parle de tout ça ? Parce que Yagya sort un nouvel album. Yagya, c’est un islandais qui avait sorti un sublime disque il y a quelques années, un certain Will I dream during the process qui avait un artwork à tomber, et un Rigning bien sympa lui aussi un peu plus tard. Oscillant entre ambiant cristallin, et Techno un poil dubby, le bonhomme frôlait bien souvent le grand chelem sur ses disques. Alors quand The Inescapable Decay Of My Heart fut annoncé, bien des palpitants s’emballèrent à l’idée de replonger dans l’univers ouaté de Yagya.

Et c’est là que les deux paragraphes du dessus interviennent. L’islandais a eu l’idée étonnante (au regard de ses précédentes sortie j’entends) de nous sortir un disque où des chanteurs/euses seront conviés sur tous les morceaux, ou presque. Une galette instrumentale sera incluse pour les grincheux. Bonne nouvelle en soi, l’univers de Yagya, confronté à des voix sensibles, ça ne peut que marcher, et éviter que l’artiste fasse du surplace grâce à cette ouverture de recette. Puis on écoute le premier morceau clipé, et on a un doute. Tears Will Fall, feat Ellen Kristjánsdóttir, pour ne pas le nommer : la compo derriere est incroyable. Ces synthés cristallins, qui perlent et se perdent dans des échos dub, ce petit rythme techno présent mais discret, c’est très beau. La voix de la dame est parfaitement placée aussi, sensible et tire-larmes. Pourtant il y a quelque chose qui ne marche pas. Quelque chose qui gène, quelque chose de gnangnan dans ce morceau, qui flirterait presque avec du mauvais Morcheeba du début des années 2000 ou un Everything But The Girl complètement faisandé. Alors on se rassure, on se dit que l’instrue est foutrement reussie (réellement) et que l’on va se rabattre sur la version instrumentale du disque :  Après quelques minutes à écouter ces musiques dénuées de chanteur parasite, les claviers ne finissent plus de s’enrouler dans nos tympans, on dodeline de la tête et l’on se prend à rêver de balades dans les cieux. Mais rapidement, quelque chose cloche. Il manque un truc à ces morceaux : les voix.




Ce Yagya souffre d’un mal TERRIBLE, pas si commun dans la musique. Ce problème, je le nomme le “Ni-Ni”. Je m’explique, avec un exemple trendy et fashion : tu farfouilles sur youtube, et tombe sur le dernier morceau de Usher, Climax. Tu écoutes le morceau, tu te dis “putain, cette instru est magnifique, c’est mortel, que ce chanteur dégage de là“. Alors tu vas sur Hype Machine, tu cherches “Climax Instrumental” pendant une bonne demi heure, avant de la trouver, et de la lancer sur itunes. Ouai, mortel. Mais il manque quelque chose : le chanteur. La prod’ ne marche plus toute seule. Tu as envie d’entendre le morceau sans le chanteur, mais dès l’absence de ce dernier, il manque gravement à la bonne marche du tout. Climax ne marche ni avec Usher, ni sans lui. Ni-Ni. Et pourtant le morceau est vraiment plaisant ! Mais coincé à frustrer son monde jusqu’à la mort.

Ok, j’ai réussi l’exploit de parler de Usher dans un article sur Yagya, revenons à nos moutons. Sur ce Tears Will Fall, le morceau démonte au premier abord, mais la chanteuse pose gravement problème. Sauf que quand on se rabat sur la version instrumentale, on est frustré de l’absence de cette dernière. Car le morceau n’est tout simplement pas fait pour être écouté sans voix. Ou que l’oreille s’est habituée, même après une écoute, à entendre une mégère geindre sur les claviers.

Et ce syndrome, on le retrouve sur une bonne tripotée de morceaux de ce Inescapable Decay Of My Heart. Gabriel, My Star is a new song, Dronwed in Dreams, Waiting for the Rain… tous partagent ce coté chant de l’horreur ultra daté et ringard… tout en étant sublimes dans leurs instrues, avec ces synthés ahurissants dans leur traitement (ceux de Drowned in Dreams me filent des frissons). Sans compter les paroles ultra niaises et clichées qui te donneront, après 30 minutes d’écoute, envie de foutre du Godflesh à fond en égorgeant des poulets (I’m waiting for the rain to wash me away… / sometimes I feel that the only way to survive is to kill my dreams… blablablabla, mon dieu donnez moi deux doigts que je puisse les coller dans ma gorge et me faire vomir).


Malgré ça, tu n’arrives pas à te convaincre du fait que l’album est raté. Pour ce coté Ni-Ni d’une part, mais aussi car Yagya n’a pas oublié ses premiers amours, et file des morceaux dénués de vocals. Modelés dès le départ pour être sans chanteur. Et là, c’est méchamment beau. Ca frise la perfection. Reverbs and Delays qui porte plutôt bien son nom, flirte avec l’absolu, et n’aurait pas fait tache dans un disque de Modell. Techno aérienne pleine d’échos dub, avec des claviers à tomber, et une richesse folle dans les textures que n’ont pas les autres morceaux accompagnés de chanteurs. Ce Reverbs and Delays, c’est un peu l’orgasme pour les amateurs de Techno-ambiant, avec ces synthés faramineux. Il y a aussi The Salt On Her Cheeks, très belle, avec cette mélodie cristalline en filagramme, qui emplit graduellement le spectre pour s’étaler dans tes oreilles et te filer une érection auditive du tonnerre. Merde, dans les 4minutes, c’est à chialer tellement ça frise la perfection. Un album entièrement de ce calibre aurait littéralement changé le game de la techno ambiant, et poussé ses rivaux au clash fébrile via vidéos youtube.

Et sur le disque, il y a aussi un morceau qui marche de façon incroyable, malgré la présence d’un chanteur. C’est Cold Hands. La mélodie va friser bien des colonnes vertébrales. L’introduction va faire chavirer bien des coeurs. Les petits synthés d’après refrain vont dresser bien des chevelures. Même le chant masculin, grave mais aérien de Aðalsteinn Guðmundsson, copule avec grâce sur la techno de Yagya. Et le plus drôle, c’est que le morceau marche aussi très bien en version instrumentale ! Un petit bijou.





Alors que faire ? Conseiller ce disque en sachant qu’il frustrera la plupart de ses auditeurs ? Qu’il pourrait passer dans le même mouvement comme un horrible disque lounge-guimauve ou un album de techno-dub-pop magnifique ? Faudrait-il conseiller de s’engouffrer directement sur les versions instrumentales pour que l’oreille n’ait pas le temps de s’enticher des voix parcourant la majorité du disque ? Conseiller de prendre le LP pour écouter ses petits bijoux (Cold Hands x2, Reverbs and Delays, The Salt On Her Cheeks, la deuxième moitié de Bright Moonlight Sky) en priorité, et voir ce que l’on peut apprécier dans le reste du LP, en sachant que l’on avance sur un terrain miné, blindé de lyrics horribles ?

Impossible à dire. The Inescapable Decay of my Heart, est un excellent mauvais album, un superbe LP frustrant, une déception de qualité. Un disque aux synthés fous, qui nous font diablement regretter le fait que Yagya n’ait pas tenté le coup d’un nouveau disque instrumental esquissé sur seulement deux morceaux du LP.

Un disque Ni-Ni donc, sans aucun doute possible.






Le très beau Yagya – Cold Hands feat Aðalsteinn Guðmundsson






Le “Ni-Ni” Yagya – Tears Will Fall feat. Ellen Kristjánsdóttir






10titres + 10 titres – Kilk Records

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Deepchord – Sommer

Posted in Chroniques on September 5th, 2012 by Dat'


La tong summer gang



Agoniser dans la neige. Puis se perdre dans une mégalopole bardée de néons. Rod Modell semble maintenant vouloir nous emmener en vacances, sur les bords de mer, après une étrange escapade qui ne m’avait pas volé le coeur (Hash-Bar Loops). En balançant 3 albums en 3 ans, tous sortant au même moment (l’été, étonnant vu la froideur de la musique de Modell), l’aventure Deepchord (qui ne présente plus Echospace) prend des allures de rendez-vous obligatoire, à l’instar d’un bon Breaking Bad des familles. Comme si Modell voulait absolument nous administrer notre dose de techno enfumée, pleine de réverbération et d’échos, bourrée de drogues, à écouter en marchant le long d’immenses artères routières baignées dans des lumières blafardes. Et pourquoi pas finalement ? Peu sont ceux qui peuvent rivaliser avec le bonhomme, si l’on excepte un Andy Stott qui a hypnotisé 2011, et un Robert Hood qui revient nous secouer dans pas longtemps… Reste à voir si la plage promise sous les néons arrive à nous ensorceler avec le même talent.








Deux choses sautent aux yeux. La pochette d’une part, superbe. Et le tracklisting : 90% des morceaux font dans les 5 minutes, là où les fresques techno-brumeuses des 3 derniers albums tiraient assez souvent vers les 7, 8, voir 12 minutes. Sommer contiendrait des bombes plus resserrées, plus évidentes, plus frappantes ? Loin de là.

L’album commence comme les précédants. Comme si le disque était loin, très loin, et que nous devions le rejoindre à pied, s’en approcher, doucement, et se laisser envelopper par ce dernier. Il fallait se frayer un chemin entre la foule et les fils électriques dans Liumin. Ici, c’est sur un bord de mer sépulcral, teinté de gris et de violet, où seuls fantômes et âmes errantes s’y promènent. Après quelques minutes de marche, à courber le dos sous des synthés hypnotiques, on sent la fête techno organisée sur la plage poindre, avec ce beat sourd et lointain qui commence à tonner. Glow donne l’impression d’arriver après deux nuits blanches dans une rave sauvage installée sur la plage, complètement shooté par des psychotropes, à ne plus savoir ou aller, à simplement se repérer grâce à ses oreilles, avec les reflux à droite, les pas qui crissent sous le sable et le rythme étouffé loin devant.

La caractéristique principale de Sommer, qui ne rend d’ailleurs pas la tâche facile au chroniqueur, est qu’il est difficile d’en extirper des individualités. Tout coule comme un ensemble uni, où il est parfois difficile de s’y retrouver et de savoir depuis combien de temps nous avons la tête plantée dans le LP. Il est loin de temps des solos de Rod Modell, et évidemment de Liumin, qui malgré son coté “bloc techno monolithique” savait donner des respirations salvatrices, et quelques incartades sonores d’une piste à l’autre (le parfait Summer Haze et son introduction à casser une colonne vertébrale, le dingue BCN Dub, l’apaisant Warm…). Et l’on est à l’opposé de The Coldest Season, qui variait les tempos et savait lancer des quasi-tubes de temps à autre (Celestialis, qui portait bien son nom, et surtout le sublime Sunset, qui a bien du me faire chialer une ou deux fois). Non, sur Sommer, c’est une autoroute, ou plutôt une plage pour rester dans le thème du disque, qui s’étend à perte de vue. Ecouter ce disque, c’est être à un point A du bord de mer, et se dire qu’il va falloir marcher jusqu’au point B, à l’horizon, le vent en pleine gueule, sans rencontrer personne, si ce n’est quelques aspérités lâchées par houle et marées. Du sable sur la gauche, de l’eau sur la droite, la horde avance le nez dans la techno, à contrer des synthés sans faillir.

Oh, il y a bien un Fourier, qui surprendra au milieu du disque, avec un rythme ultra sourd et appuyé, tout droit sorti d’une cave enfouie sous le sable, où des fêtards fantômes semblent s’y abandonner jusqu’à suffocation. Il y a le très beau Beneteau aussi, un peu moins ouaté que les autres, qui tabassera tout en conviant les nuages dans la danse. L’étouffant Flow-Induced Vibrations, qui reposera plus sur de grosses nappes bien mélasses, impressionnantes quand les basses sont tournées à fond. Ou la très belle conclusion Wind Farm, donnant l’impression que le marcheur a finalement abandonné en cours de route, n’ayant plus la force de cavaler vers l’horizon, en choisissant subitement de se tourner vers la droite pour s’immerger dans la mer doucement, et y mourir.





De part son coté monolithique et étouffé, il est difficile d’écouter ce disque n’importe quand, n’importe comment. Comme tous les disques de Deepchord / Echospace, il faut trouver son moment, sa méthode, pour apprécier les élucubrations droguées de Modell, et pour réussir à se laisser envelopper par ses fresques quasi-neurasthéniques. Pour moi, deux moments s’imposent :

Il est 3 heures du matin. Avachi devant son ordinateur, à regarder des conneries, à surfer nonchalamment sur internet, sans but, sans réel intérêt. A attendre le sommeil. A le provoquer même, après avoir avalé ses sempiternels somnifères. Quand les effets de ces derniers apparaissent, quand ils commencent à t’enlacer avec leur langues gluantes, quand ton corps commence à s’engourdir, mais que tu t’obliges à resté planté devant ton écran encore un peu. A ce moment là précisément, lancer un Deepchord / Echospace prend toute son ampleur. Les yeux torves, à ne plus voir le temps défiler, à se sentir doucement attiré par le lit derrière soi. Quand ton âme est déconnectée, quand tes mains continuent de taper sur un clavier que tu ne ressens pourtant plus au toucher. Quand le Rivotril vient de s’immiscer dans tes synapses, comprimant ton cerveau doucement jusqu’à ce que tu ne puisses plus tenir debout. Quand le monde tangue, quand le sol tombe. Alors, Sommer fait son petit effet. Comme les disques précédents. La dose distillée par Rod Modell libère ses effluves.

Et étonnamment, si le propos du disque semble évoquer le littoral, Sommer marchera aussi bien, comme Liumin, si tu te laisses bouffer par la mégalopole. Sommer est parfait sous les néons, à déambuler dans les rues après une sortie de club, où d’une fête avec des potes. Quand les métros ne sont plus, quand les seules âmes errantes sont des cadavres remplis d’alcool, des hôtesses en quêtes de clients et des taxis tournant doucement dans la nuit, sentinelles de la mégalopole. Là aussi, de l’alcool, des cigarettes, des somnifères, ou une simple fatigue extrême s’imposent. Tout ce qui peut te plonger dans un état second, tout ce qui peut de castrer les sens, tout ce qui peut te faire oublier la sensation des pieds claquant sur le bitume. Comme une bonne nuit blanche, évidemment.



Depuis deux albums, le “Echospace” semble manquer au “Deepchord”, et pas simplement dans le nom. La musique est plus opaque, insondable, moins évidente. Je continue de préférer The Coldest Season et Liumin à Hash-Bar Loops et ce Sommer. Pourtant, ce dernier m’accroche plus que le précédant. Peut être une simple histoire d’état, de moment, d’ouverture à la drogue sonore distillée par Deepchord. Dommage que le morceau Jeanneau, donné en free download par Soma il y a peu, ne soit pas intégré dans le disque lui aussi.

Car encore une fois, aucune raison de refuser cette nouvelle dose estivale fournie par Modell.











13 titres – SOMA

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