Scuba – A Mutual Antipathy



Acappellas & Cathedrals





Je ne sais pas trop comment commencer. A dire vrai, quand tout le monde se prend la déferlante d’un mouvement dans la gueule, on tente de surnager, de ne pas se noyer dans un océan de sorties au début ultra-attirantes, pour ne tomber au final que sur du générique, de la recette déclinée au kilomètre. Puis des têtes, apparaissant parfois presque par magie, tentent de se démarquer du genre, pour le porter sur d’autres rives, télescopant les influencent pour construire des oeuvres hors normes, difficilement classables. On ingurgite tout une tendance et on la malaxe avec son background musical.

C’est un peu le cas de Scuba, membre actif de la sphère Dubstep depuis trois ans, balançant des Ep vinyles à tour de bras, tabassant les amateurs de basses grondantes. Perso je n’en sais pas grand chose, je ne connaissais point le monsieur avant l’annonce de son premier disque ici présent. A dire, vrai, je n’aurais peut être pas jeté une oreille à ses prods sans des premiers échos annonçant un album très aérien, au son cristal-taillé-à-la-serpe, explosant la “norme” Dubstep de plus en plus synonyme de compilations ramenées par un pote au pays des Fish&chips.

















Soyons franc, en plus des échos alléchants suscités, il est évident que la pochette avait fini de me convaincre. Je pense ne pas trop prendre de risque en avançant que cet ornement d’un certain Luke Berry risque d’être sur le podium des Artworks de l’année, souffrant du syndrome j’ai-le-disque-en-version-Cd-mais-je-le-veux-aussi-en-vinyle-pour-le-mettre-sur-mes-murs-ou-en-évidence-sur-mon-bureau-tellement-il-claque. Cette devanture tranche d’ailleurs avec le contenu super sobre du reste des feuillets, à la limite de l’abstrait.

Bon, on avait beau être prévenu de l’aspect qu’allait avoir la musique de Scuba, j’attendais quand même quelques Booooouuuwww booooouuuuwww boooouuuwww et autres Brrrr Brrr Brrrrrllrlrlrlrlrlrlrlrlr (oui je sais, on me dit souvent que je sais bien faire le Dubstep avec la bouche). Bref, de la bonne Wobble bass des familles et autres déflagrations sourdes, à faire danser le meringue au lustre du voisin ayant le malheur d’habiter sous vos pieds. Et bien non. N’espérez pas faire trembler le quartier, Scuba offre vraiment une approche nettement plus aérienne dans sa manière de titiller les neurones et la paire de jambe qui va avec.
Donnée importante, le disque de l’anglais a été enregistré autant à Londres qu’a Berlin. L’histoire d’un déménagement réussi en somme. Car si la musique de Scuba pose clairement ses fondations dans la musicalité Anglaise de ces derniers temps, avec la lenteur du tempo et le lent déploiement des morceaux, il plonge aussi clairement l’ossature de son Dubstep dans la préciosité de la Techno Berlinoise.









Systematic Decline ne va pas me faire mentir. Lente montée d’un clavier noyé dans un écho cristallin, rapidement accompagné de percus puis d’un beat appuyé mais pas envahissant. On avance tranquillement, on laisse les synthés rêveurs se dérouler, on se voit au dessus des nuages à flirter avec le soleil. Pour avoir une idée, on est assez proche d’un Pinch dans la manière de traiter la musique, en misant le plus possible sur l’espace sonore, sur cette envie de construire une sorte de Dub des cathédrales.


Impression renforcée avec le sublime et énigmatique Hard Boiled qui, s’il se pare d’un semblant de rythme tribal bien entraînant, n’abandonne jamais cette ligne sonore étrange, semblable à un souffle de vent au fond d’une grotte. A une chute sans fin dans les tréfonds d’une musique puant les psychotropes. Et quand le titre se pose, c’est pour mieux échouer sur de sublimes claviers, Dub dans leurs échos, Techno dans leur manière de geindre. Ces derniers claquent comme un marteau sur un bloc de glace, avant de partir dans des répercussions presque renversantes. La gestion de la “spatialité” du son est ahurissante, et le coup du vent sifflant dans les oreilles façon mouvement perpétuel magnifie la sensation de chute dans un univers ouaté, doucereux, cristallin. Ouai, ce morceau, c’est tomber dans une caverne de glace sans fond, avec les anges qui jouent du synthé comme ultime requiem. Tiens, les anges vont même se permettre de pousser quelques choeurs fantomatiques en fin de course, histoire de vous arracher la colonne vertébrale de la plus belle des manières.
Une chose impressionnante, c’est cette gestion parfaite du silence. Le son respire, prend son temps, marque parfois des pauses d’une demi seconde, reprends son souffle, profite des latences pour mieux nous inonder d’échos l’instant d’après. C’est la musique qui prend vie, qui voit son coeur battre. Attention, je ne parle pas de naissance à la Autechre, grouillante et difforme. Non ici, c’est comme voir la plus belle des princesses ouvrir les yeux et s’étonner avec une candeur folle de sa première inspiration. Alors on lui prend la main avec la plus grande des prudences, tant cette dernière semble fragile, et l’on continue de choir dans le gouffre en enlaçant la belle.

Tiens je parlais d’Autechre. Hey bien figurez bous qu’à l’écoute de certains titres du disque, j’ai clairement pensé au duo Anglais et à leurs premiers disques, au visage beaucoup plus doux et éthéré qu’aujourd’hui. A leur album Amber précisément (et “Montreal” notamment). Aka ses grandes plages de synthés à crever tellement elles sont belles surplombées de beats concassés et fracturés.
Disorder, c’est un peu ça, avec le rythme qui semble se broyer au fur et à mesure que la piste prend son envol. La mélodie ne semble pas se soucier de cette marche chaotique, en allant tutoyer les sphères de l’extatiques, perlant dans vos oreilles d’une façon bien ronde, en montant constamment lors du dénouement, histoire de vous hérisser les cheveux comme il faut, s’il vous plait.
Le parallele avec Amber sera encore plus évident lors de Ruptured qui laissera un beat hardcore (mais très étouffé) se démener d’une façon martiale, tentant de suriner violemment une mélopée cette fois directement tirée de l’au delà. Messe spectrale implorant grâce ou synthés taillés au quartz, cette dernière rend le rythme presque inoffensif dans cette rage à sens unique, presque absurde dans sa conquête de pervertir la pureté du tout. A tomber à la renverse.









A dire vrai, la seule piste qui laisse trahir clairement des racines Dub est Poppies avec cette basse presque traditionnelle qui se roule dans une résonance hypnotisante, et une voix balançant des phrases avec un ton grave. Sauf qu’elle trahit dans le même mouvement les influences Techno du Monsieur, vu que les pistes du genre qui égrènent des synthés envoûtants et des voix robotisées sont légions. Juste que l’Ibiza-anthem semble être passé en Slow-motion, avec une fumée impénétrable en couverture. On écarte les bras, on admire les clubbeurs se mouvoir dans du coton, et les lumières éclairer par intermittence ce lieu de débauche passé au Bullet-time. On se laissera aussi envelopper par le long Suck qui alterne entre phases Dub massives et passages de synthés grandiloquents, presque Vangelis, sublimes.


Mais le sublime a un nom dans ce A Mutual Antipathy : From Within. Le bijou absolu du disque, un travail d’orfèvre qui met à genoux dès première écoute. Pourtant il est bien plus minimaliste que la plupart des compositions peuplant la galette. La première moitié du titre est extrêmement diffuse, quasiment dénuée de rythme, simplement bardée de nappes nébuleuses, presque sibyllines, dévoilant petit à petit un air fragile, lumineux. Le beat est placé à l’horizon, 3km derrière les montagnes, histoire de ne percevoir que les réverbérations sourdes de ce dernier. Et c’est là que le miracle opère. Une mélodie, dépouillée, réduite à son plus simple apparat, chante trois notes jusqu’à overdose, tourbillonnant dans cet écrin de porcelaine. Imaginez les synthés d’une piste cheesy façon “Tu du du Tu du du” qui seraient découpées au millimètre près, puis plongés dans le cristal pur avant d’être jeté dans vos tympans. Le rythme renforce son emprise, et l’on se laisse littéralement happer par cet espèce de songe sur patte, flirtant avec la perfection sur deux minutes. Une perfection tout en retenue, presque minimaliste. Le plus beau des baisers, celui qui vous effleure les lèvres avant de disparaître à jamais.
Encore une fois, c’est foutre une Rave dans un bocal, et l’enterrer au plus profond de la terre. C’est ressentir les vibrations d’une boite de nuit à travers le trottoir, l’oreille collée contre le bitume. C’est danser seul au milieu d’une église completement déserte, sur le simple souvenir passé d’une soirée trop arrosée. C’est gaspiller sa dernière seconde de vie au milieu d’un dancefloor, et aimer comme jamais regarder le monde vaciller.










C’est tout l’interet de A Mutual Antipathy. Se dévoiler de plus en plus à chaque écoute. Nous happer graduellement dans cette caverne de glace électronique, ce microcosme où le son a une existence propre, se laissant aller à la respiration, à la divagation sub-consciente. Chaque couche, chaque nappe semble avoir été taillée dans le verre, avec des rythmes résonnants, créant des précédents comme un caillou plongeant dans une étendu d’eau. Les ondes se propagent graduellement, sans aspérité aucune. Le plaisir simple d’entendre une véritable cathédrale sonore, un édifice d’une beauté parfois frappante. Attention, cette derniere étant parfois cachée, pleine de sous entendus, et qu’il faut dénicher, accepter, assimiler. L’écoute au casque est même presque obligatoire. Ou dans à fond sur des enceintes qui coûtent la peau du cul.



A Mutual Antipathy est un disque qui se découvre, qui se déflore à chaque écoute, et qui explose, rayonne, émerveille dans sa gestion parfaite des silences, des respirations, des réverbérations. Froid si l’on y pose une oreille discrète, impressionnant si l’on accepte de s’y abandonner. Superbe disque.









11 titres – Hot Flush Recordings
Dat’










  1. Aeneman Says:

    Aaah la sphère Dubstep…ceci dit il a l’air pas mal intéressant celui-ci. Mais c’est un peu difficile de me faire une opinion en ne connaissant que Burial…

  2. hha, visiteur Says:

    excellent

  3. Demosth Says:

    Excellent ton article, tout comme l’album!

  4. funky5, visiteur Says:

    m ayant interesser au dub en ecoutant les vieux lee scratch perry,les nouveaux pole les album 1 2 3,c’ etait plutot un style qui te plaque au sole pratiquement tu peux plus bouger(le dernier scorn).mais la dub c’est diversifier mais plutot dans le style assez tranquille ou lent de ce que je connais ainsi que ce nouveau scuba.Un petit nouveau est arrivé 2562 sur tectonic sa bouge plus,je trouve qu appeler sa un nouveau style est un peu exagerer trop proche du dub.Vivement que la hype tombe pour que reste les meilleurs et que les artistes y ajoutent plus de leur personnalités ce qui ne serait tarder……….

  5. Dat' Says:

    “2562 sur tectonic “

    Ah bah justement, pas mal de gens en parle, ça m’interresserai d’écouter ça, il parait que le mec est tres bon…

  6. funky5, visiteur Says:

    alors passe sur myspace

  7. Dat' Says:

    Ouai je n’ai pas trop le reflexe Myspace en fait, je trouve qu’une fois sur deux, les morceaux sont mal choisis, et representent mal le groupe… M’enfin je vais essayer…

  8. Kiteklat, visiteur Says:

    Yep,

    Très bonne chronique ! Ayant arpenter le Scuba de fond en comble, je suis entièrement d’accord avec toi. J’ai une légère préférence pour Hard Boiled (mais From Within…pfiou quel titre !)

    2562 défonce. J’espère que tu en parleras. Plus techno et dubby, des sons très simples mais, comme scuba, la gestion de l’espace reste irréprochable.

  9. drill'n'roll, visiteur Says:

    2562 personnellement j adore leger est lourd en meme temps.structure dub tempo techno excellent…mon dj dubstep préférer avec burial dans son style plus tranquille

  10. drill'n'roll, visiteur Says:

    datura je voulais savoir ce que tu pensais de ital tek:cyclical par rapport a mutual antipathy j’ai vu que tu l ecoutais sur lastfm.Et a tu entendu parler de la compil de mary anne hobs evangeline il parait quelle est vachement calé dubstep

  11. Dat' Says:

    J’aime enormement le Ital Tek. Malgré un coté un peu “bourrin”, il est jamais lourd, jamais etouffant. Et il y a de superbes compos dedans, comme l’ineffable White Mark !

    Pour Mary anne, je sais pas si la compil est sortie, il faut que je me renseigne tiens…

    Kiteklak ==} j’ai pas reussi à mettre la main dessus en magasin pour le moment, mais je ne desespere pas… Je crois que Norman records a le 2562 en stock sinon, j’espere l’avoir en debut de mois prochain…

  12. Miaw, visiteur Says:

    ce cd est incroyable
    Délicat, envoutant, entrainant, incroyable

    -hum décidément les cds présentés ici sont à mon gout-

    je ne peux que faire le rapprochement avec Murcof, qui fait de l’électro très planante, mais aussi parsemée de beats prenants, et que je conseille très vivement
    (tous les albums sont bons, peut-être que pour commencer Martes sera plus accessible, tandis que le dernier sorti en début d’année il me semble, Cosmos, est plus difficile d’accès à l’écoute)

    Hum, le myspace de ce murcof : http://www.myspace.com/murcof

    encore merci pour la découverte de Scuba, c’est un orgasme auditif

  13. Dat' Says:

    Tiens pas faux pour Murcof, que j’aime beaucoup aussi, on retrouve cette même fragilitée teinté d’electro, meme si Murcof tape plus dans le “classique” et scuba dans la techno cristalline… mais c’est vrai que leurs demarches peuvent etre mises en parallele !

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