Du Dehors
C’est l’été. Et pendant cette saison, en plus de dépérir sous la clim’ ou en face d’un ventilo qui ronronne et empêche de dormir, on ne peut que déprimer en voyant des rayons de disques restés inchangés depuis mi juillet. Peu (pas) de sortie, tout est bloqué, on attend fin aout et son avalanche de bonnes galettes, qui feront toutes moins de 35 minutes vu que cela semble être la norme en 2010…
Alors forcément, c’est souvent une période vers laquelle on dérape vers ses classiques, vers les oldies, vers les plaques que l’on écoute régulièrement et distraitement dans son appart, mais que l’on n’a pas posées dans son discman depuis un bail, histoire d’arpenter les rues la nuit, des souvenirs dégoulinant la gueule. Dans une période où pains aux chocolats rimaient avec découverte musicale constante, ou crise de catalepsie en classe de maths copulaient avec synthés électro et beats tronica. A suivre de plus en plus d’artistes, de semaines en semaines, de mois en mois, d’années en années, les disques s’empilant, immuablement. Un cd reste un classique, figé, incarné plus par le titre de l’album lui, plus que l’artiste lui même. “Yep, un de mes disques préférés, c’était le sublime Electronic Highway, de CJ… euh… Roland ? Folley ? Folland ? merde”. Avoir des trous de mémoire pareil, c’est rageant. Alors on fouille dans ses cd, (on retrouve des galettes plus ou moins marquantes (“Ah Lunatic Asylum putain !” ” Hey Bosco !” “Ouah le SourceLab” “Merde j’avais acheté un Urban Cookie Collective ?” “The Beloved, je me le repasse”) On trouve enfin le Lp, on le claque dans la chaine Hifi, et on pleure tellement c’est beau.
Bon je mens un peu en disant avoir totalement oublié le disque, car certains titres de l’anglais tournent encore assez régulièrement dans ma tête (Camargue, Naphtali et Con Spirito). C’est surtout qu’il me fallait une bonne introduction, et que le disque pour lequel j’ai retourné ma collection de Cd était une compilation Dance Machine. Le genre de truc que l’on ne dit pas trop, surtout en début d’article. Là ça va c’est à peu près caché entre deux lignes, pas de problème. On pleure en regardant l’artwork aussi. Bref, on était sur Electronic Highway, ses mélopées inébranlables, des litanies qui me feront toujours chavirer, à croire que mon cœur mou est resté soudé au préau, malgré mon entrée dans cette vie d’adulte pleine de vice.
A dire vrai, le morceau ouvrant Electronic Highway, The Tower Of Naphtali restera pour moi l’une des plus belles pièces de la musique électronique mélodico-mélancolico-naive, à ranger à coté d’un Amenity de Link, d’un Twangle Frent d’µ-Ziq ou Even Spring de Plaid. Les trucs que vous avez écouté mille fois, et qui vous arracheraient pourtant toujours une larme en public.
Parce que la mélodie, et ces petites clochettes espiègles, filent vite le bourdon. 10 secondes de superposition de Bells et de nappes ambiant, et l’on sait déjà que le morceau va être grand, sublime, parfait. Ce morceau, c’est la grâce incarnée, une fresque qui se retrouve vite encrassée par un rythme hypnotique.
Ton palpitant obstrué par la graisse, c’est le rythme. Ta dernière rupture passée à la moulinette, c’est la mélodie. Les deux premières minutes, ça pourrait être un tube de stade, un rouleau compresseur trance, vu l’évidence du tout, mais Cj Bolland préfère balancer ça dans un écrin cristallin et fragile, histoire de nous violer l’échine. Tiers du morceau, le tout s’éteint sans prévenir, avec pour seul sonorité ce rythme en mode aorte pétée, et le tout bascule dans un truc tellement émo que l’on a envie de se couper les veines pour asperger ses anciennes lettres d’amour tant la mélodie est belle. Evidement, la litanie du départ revient, tout se superpose, alors nous on craque, on est déjà à se rouler dans les nuages en se disant que putain, le truc à 15 ans mais il sonne tellement parfait que s‘il sortirait aujourd’hui on pleurerait devant sa tv en attendant, en vain, qu’il passe sur Mtv pulse. Et ce n’est pas l’attaque élégiaque de la pénultième minute qui nous fera dire le contraire. Désossé moralement par ce bijou absolu. A chaque putain d’écoute.
J’en vois déjà rigoler en disant que le morceau du dessus sonne actuel. C’est un peu comme dire que le On d’Aphex Twin (assez proche) est tellement Ghetto qu’il semble tout droit sortir de Windows Vista. Certes. Alors j’ai une autre cartouche en réserve, avec Con Spirito. Long morceau à la structure drum, cette track laisse débouler directement de superbes nappes Trance qui n’arrêtent pas d’onduler, foutant dans les toilettes crades d’un club le morceau christique 12 o’clock de Vangelis. Mélange de claviers célestes et chants angéliques, avec un petit grain pute, le tout est parfaitement taillé. D’ailleurs l’anglais le sait, et laissera courir tout le morceau comme ça, sans réel changement, si ce n’est des ondulations et des passages de relais entre les synthés et les rythmes (qui friseront l’indus pendant une poignée de seconde, avant de se noyer dans la mélodie) Une vraie course de 8 minutes entre une litanie parfaite et un métronome dérouillé, qui flottent, se croisent et s’envolent. On ne sait plus si l’entité club est cristallisée par les nappes, droguées, dance, enfumées, ou par ses rythmes violents et nécrosés. Mini-jupes tournant en slow-motion vs usine démontée aux folles machines. Pourquoi actuel ? Parce qu’avec des beats plus ronds ou espacés, c’est exactement ce que l’on retrouve partout actuellement, ces nappes trances étouffées et droguées dont est gorgé un disque comme MMX II de Clubroot… Ce genre de passages incroyables qui me friseront toujours la gueule, noyées dans des volutes Dubstep ou sur un lit déstructuré.
Toujours coincé entre les nuages et la piste de dance, le nez dans la pisse de chiottes et le cœur en escapade, avec le très long Nec Plus Ultra, 11 minutes au compteur. Il n’y aura ici que rythme Drum’bass et nappes ambiant à te cramer la gueule tellement elles sont belles et parfaitement posées. Ca pourrait sembler long, durer des plombes. Que nenni, il règne ici une atmosphère de conduite dans le désert, de paysages défilant derrière la vitre d’un tgv, de ville mourant au petit matin observée du haut de son balcon une bière à la main. Fresque c’est le mot. Hypnotique aussi, superbe surtout.
On pense que Cj Bolland lâche les chevaux avec Zenith. Ici, le rythme tabasse des le départ, entre Techno racée et drum métallique, ça claque de partout, ça tressaute dur, des bleeps vont vibrer la nostalgie, qui t’en mélodira-tant. On frise le banger rave-ish agressif, mais à partir de la 3 minute, une nappe affolante déboule, toute fragile, tentant de survivre sous les excavations, avant de se retrouver seule et de partir dans une mélodie sublime, incroyable, mi-trance, mi-angélique, se faisant rapidement charcuter par un rythme et une bassline qui arrachera la jugulaire de tout amateur d’électronique mélancolico-fracassée. Le final plonge dans l’épique exacerbé, ça explose de partout autour de toi mais en même temps tu sanglotes des tympans tellement c’est beau.
Bones sortira le simili-amenbreak pour quelque chose de carrément Drum’n bass, seche et claquante, avec en prime la petite bassline bien jouissive qui fait “pom pom pompompom pom pom” pour te faire dodeliner de la tête. De nouveau, ce sont les synthés incroyables qui porteront le morceau au firmament (oui carrément) avec une mélodie aérienne et saccadée à m’arracher les larmes. Dans mon bidou j’ai la triperie qui fait des bonds, des papillons dans le ventre, des fourmis dans les hanches et des larmes dans les yeux.
Catharsis sonnera plus squelettique et frontal, rappelant clairement l’album précédant de Bolland, 4th Sign, plus enlevé, mais beaucoup moins mélodique (si l’on excepte le diamant Camargue, et le craqué Pendulum). Il sera pourtant parfaitement tenu, avec cette arrivée de chœurs fantomatiques à raidir l’échine, hululant distinctement sous l’amas de beats névrosés.
Ce qui est intéressant, c’est de voir le basculement du disque, à partir de la fin de ce morceau. Les 7eme, 8eme et 9eme morceaux, sonnent, eux, clairement plus datés, plus vieux, accrochés dans le passé. Car Cj Bolland, sur les 3 derniers titres, fait hurler les machines, balance du gros son, et se retrouve alors confronté à des tics un peu dépassés, que l‘on ne retrouve pas dans la sincérité mélodique du dessous. La Drill indus de Spoof sonne comme une vieille face-b rejetée de Fluke, et crache ses larsens un peu dans le vide, sans réelle émotion. C’est plutot cool comme morceau, mais ça n’a plus le même impact que ceux du dessus… Neural Paradox, avec ses 9minutes, fatiguera avec sa première moitié vraiment vieille, dissonante et presque irritante. Le morceau pouvant être considéré comme le seul vrai raté du disque. Car le final Drum Tower déboite, grosse techno pachydermique bien cyberpunk. C’est jouissif, bien foutu, mais cela reste, dans ses sonorités, indéniablement ancré, soudé dans une période qui sonnait très Fluke, Wipeout, premiers Prodigy et Chemicals Bro. La mélancolie n’est plus là, effacée sous la débauche de beats et de machines furieuses.
Et c’est en chialant sur la beauté des deux premiers tiers de l’album, puis en se marrant en pensant à ses gouters d’après école en écoutant les 30% restant, que l’on peut dégager un super concept philosophique dans la musique électronique :
La beauté d’une mélodie semble traverser le temps, rester actuelle dans nos palpitants malgré ses 15 ans d’âge, là ou la débauche d’effets portent clairement le poids des âges. Car ce sont clairement les mélodies qui portent le disque, s’agitant sur des rythmes impeccablement ciselés certes, mais clairement en retrait par rapport aux claviers magnifiques. Car à l’instar d’un On d’Aphex Twin, un morceau comme The Tower Of Napthali continue de faire son office et de nous ravir même si l’on sait bien que le truc date pas d’hier. Les synthés de Con Spirito trouvent leur écho dans biens des disques Dubstep Uk Garage aux apparats putassiers psychotropés d’aujourd’hui, et d’autres coups de génie comme Zenith continueront de décaler les mâchoires d’un revers de beat.
Le seul petit regret dans ce disque, c’est de ne pas avoir de représentant un peu plus techno façon Camargue, indispensable track, qui a vieillie mais qui reste énorme, highlight de la galette précédente. Car Electronic Highway se focalise exclusivement, ou presque, sur quelque chose plus Idm, de plus déstructuré et mental. Je redeviens de toute façon toujours gamin quand une musique électronique sait me titiller avec les vraies mélodies, les belles, les cristallines, les intemporelles. Qu’elles soient noyées sous du Dubstep, de la drill, de la drum, posées sur un lit dance, noise ou rock. C’est beau, jouissif, et cela a ce petit je ne sais quoi de mélancolie qui vous accroche pour une bonne partie de la vie.
Hop, inserer tout pleins d’autres phrases sérieuses dans la conclusion, je voulais juste parler d’un disque qui me prend les tripes, ces dernières étant peu remuées par les rayons disques d’Aout, la période ayant toujours été propice au retour vers l’occas’ et l’envie de retourner aux vieilles galettes. Parce que l’été, on a surement un peu plus de temps libre pour s’abandonner.
CJ Bolland – The Tower Of Naphtali (album : Electronic Highway)
Cj Bolland – Camargue (album : The 4th Sign)
9 Titres – R&S Records
Dat’
This entry was posted on Tuesday, August 24th, 2010 at 6:28 am and is filed under Chroniques. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.
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Je viens tout juste d’écouter “The Tower Of Naphtali”, c’est magnifique ! Ca me rappelle les plus belles heures de l’électronica ! O_T
J’aime beaucoup son morceau “Obsidion ” qui ouvre l’album “The Analogue Theatre” (1996) par contre passé 3,4 titres, on arrive à “The Prophet” et là ça devient gratiné style techno lourdingue !!! Mais c’est quand très drôle à écouter aujourd’hui ! 🙂
une fois de plus découverte totale pour moi 😀 (une habitude haha)
J’aime beaucoup “The Tower Of Naphtali”, excellent.
Par contre je n’aime pas trop “Camargue”, trop “dance” pour moi, enfin, la mélodie est bonne, mais l’apparat me gène, et c’est bizarre, on dirait presque que ce n’est pas le même artiste lol 🙂
Trés bon article sinon, comme d’hab ! 🙂
Ca fait un bail que je n’ai pas écouté CJ Bolland et je n’ai même pas ce Electronic Highway. Il faut dire qu’à l’époque, il sortait disques sur disques. Merci pour la piqure de la rappel.
………………. une petite nouveauté depht affect chorea ep,la 2 est surprenante “pop” écoute là
http://poprevuexpress.blogspot.com/
bref sympa,un peu moins “méchant” qu’avant…….
WeirdLman ==> Yep effectivement, ce Tower fait tres “belle electronica d’avant”… Je n’aime pas trop son album Analogue Theatre par contre… A dire vrai, à part les deux premiers albums de Bolland, ou je n’apprécie pas des masses, ou je n’ai point écouté… !
Janvier18 ==> ahah oui Camargue est tres Dance, mais j’adore vraiment, ces vieux morceaux Dance-Trance-Techno… apres oui les deux sont bien differents, Electronic Highway est l’opposé du précédant et son Camargue, en etant beaucoup plus electronica…
Funky5 ==> Ouai j’ai vu ça, je trouve le morceau avec Riddlore absolument énorme… Je suis vraiment content que le groupe revienne, ça faisait un bail que j’attendais de leurs nouvelles… une chronique de l’Ep passera peut etre dans ces pages ahah…
ha mais comme je pleure
mouahah, j’ai lancé Tower of Naphtali pour lire la chro en écoutant, à peine appuyé sur play je me suis dit “ok, ça, ça va déchirer”… puis je commence à lire et c’est pile ce que tu dis en parlant du titre, mais vraiment c’est trop ça quoi !
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