Odd Nosdam – Level Live Wires



L’étrange musique de Mr Nosdam…






On en parlait il n’y a pas longtemps, le label Anticon a décoché 3 salves de bonne augure en cette fin d’année, après avoir tiré à blanc pendant pas mal de temps : L’excellent disque de Sole, le bien perché Telephone Jim Jesus et un nouveau disque d’Odd Nosdam donc. (Sans oublier, pour être exhaustif, l’album des Three More Shallows en début d’année). Odd « David Madson » Nosdam, c’est tout d’abord l’artiste par lequel l’identité visuelle si forte d’Anticon existe, se chargeant de pas mal des artworks du Label sur ses premières années. Mais c’est aussi (et surtout) un musicien atypique et prolifique. Fort d’une poignée d’albums solos, sans réellement renverser, il est aussi l’instigateur du groupe Clouddead, avec Why ? et Dose One. L’un des premiers disques de Hiphop mutant atterrissant en France. Disque de Hiphop que les gens refusaient d’appeler Hiphop, excepté les createurs, presque incompris. “Clouddead? This is not Hiphop”. Impossible à classer car inclassable, le disque de Clouddead a ouvert une brèche que beaucoup (trop) de musiciens ont choisi d’arpenter. Dans le même mouvement, le Monsieur a pas mal produit pour ses potes, s’est occupé d’une bonne partie du projet de Mike Patton, Peeping Tom, et collabore avec Mùm, Boards Of Canada, Hood…



Et voila qu’Odd Nosdam, fort de ces multiples expériences, revient avec un album énigmatique, Level Live Wires, alignant pourtant les feats alléchants en rang d’oignons : Tv On The Radio, Jel, Why ?, Bracken… Ces pauvres bougres ne devaient pas s’attendre à un tel traitement.













Sous couvert de cet artwork peut chaleureux se cache un dessin de toute beauté et surtout une grosse surprise : Un deuxième disque caché, notifié nulle part, ni sur la pochette, ni sur les premières reviews, ni même à l’intérieur dans les crédits. Tellement inattendu que je ne l’ai trouvé que trois jours après. Imaginez la surprise. Pour le contenu, on y reviendra en fin de texte.





On s’y attendait, le son d’Odd Nosdam est sombre. Très sombre. L’écoute de son précédent essai, « Burner », suffisait pour s’en convaincre. La bien nommée intro On va rapidement mettre dans le bain. Nappes bien crades, saturées tout en restant étouffées, cassées et parasitées, le tout surplombé d’un beat bien rampant. On ne fait pas dans la fête d’anniversaire. Se taper 11 titres dans le genre risque d’être un vrai exploit. Et pourtant, dés les premières secondes de Kill Tone, les doutes s’envolent. Des notes cristallines perlent, roulent sur nos oreilles. Une harpe, un peu sale, veillotte, titubante, tente d’éclaircir la masse principale, cette espèce de résonance profonde qui court sur tout le long du titre. Qui revoit directement aux disques de Drone, style musical noir et âpre. Pourtant condamnée à l’errance dans l’obscurité la plus totale, le titre va s’ouvrir petit à petit, s’armer d’une rythmique en rentrait et déstructurée. Des voix fantomatiques, comme des échos sortant de multiples recoins cette grotte sans fond, qui viennent tisser une tunique de plaintes réconfortantes. Et tout bascule, la Harpe se mêle à un piano sublime, pour porter le tout dans les nuages.
Une vraie métamorphose, touchante. Celle d’un être difforme devenu ange. Le repoussant né dans les égouts devient un prince. On laisserait presque une larme tomber, tant cette pureté, noyée dans cet océan de saleté, semble fragile.
Il y a surtout ce “son”, qui va courir sur tout l’album. Alors que certains offre une qualité de production incroyable (Le dernier Venetian Snares ou le Chris Clark pour ne citer qu’eux), Odd Nosdam choisit de constamment noyer son disque dans des flots de parasites, dans une chape de scriitchhhfzz hypnotisants, ou grésillements, craquelures et autres brouillages sonores auraient la place d’honneur. Où un son lourd, omniprésent, enfermé, enveloppera tout ce qui passera sur ce Level Live Wires. Comme si Odd Nosdam avait enregistré son album dans un Micro Onde. Il suffit pourtant de peu pour cacher cette coquille, comme la splendide mélodie cité au dessus, tellement candide et pure que son contraste avec les sonorités caverneuses ferrait presque peur.









Et comme pour prendre le contre poids de ce trop plein d’émotion, on va se prendre en pleine poire un éclair Noise de quelques secondes, qui va débuter sur Freakout 3. Le titre va très rapidement calmer le jeu, pour laisser dialogues non identifiables se faire noyer dans un océan de nappes brumeuses, plus ou moins saturées, laissant l’impression de vous abandonner dans l’espace. De dériver dans le noir absolu, tournant sur soi même sans avoir réellement de repaire. Difficilement distinguables, certains larsens s’apparentent à des choeurs mortuaires. Pas de rythme, rien que ces ondes électriques, oscillant plus ou moins sur la même fréquence, et cette impression d’apesanteur assez impressionnante. Avant de se faire une nouvelle fois fracasser la tête par un son industriel ultra saturé, nous tirant de notre rêverie, d’un coma qui s’annonçait eternel.

On accueillerait presque le rythme appuyé de Fast Hook comme une bénédiction. La voila notre balise, notre checkpoint, salutaire, sous forme d’une MPC toute pourrie. La mélodie façon Drone est toujours de la partie, emplie de résonance pour cette fois, et secondée de discrets scratchs presque apathiques. Mais la grâce est là, et apparaît encore comme une vraie bénédiction. On l’entend, arriver, de loin, comme le point lumineux d’une fin de tunnel, pour grandir peu à peu, prendre de l’importance, sublimer le tout. C’est la voix de Jessica Bailiff, folkeuse expérimentale, qui donne une vraie aura au titre. Encore une fois, on se plait à écarter les bras et à frôler les nuages dans ce maelstrom d’impuretés et de nappes rugueuses mélangé à cette voix angélique. Mais la belle se fait abattre en plein vol, et l’atterrissage est presque trop brutal. Pas de violence, non, mais un silence presque trop pesant après un tel ravissement.









Et apres un bien enlevé Blast, où le rythme bien cradingue aura enfin le beau rôle, déboule sans prévenir The Kill Tone part 2 suite du petit bijoux décortiqué plus haut. Et si la harpe revient faire une apparition, elle va se faire accompagner par un piano à la mélodie rapide et accrocheuse. Mais la vraie « nouveauté » ici, c’est les apparitions de Why ? et Tunde Adebimpe, l’un des chanteurs de Tv On The Radio. Mais ici (et c’est un compliment), ils sont clairement au service de la composition, à l’instar du dernier El-p, et non pas en simple Feat prestigieux de façade pour émoustiller le monde. Why ? va tout d’abord dérouler son flow haché et caverneux, pour accoucher sûrement du moment le plus concret du disque. Puis Tunde Adebimpe va ululer de sa voix cristalline, petit moment de grâce, sans jamais sortir le tout d’une noirceur impressionnante. Il faut le savoir, Odd Nosdam noie littéralement ses invités vocaux, et si l’on peut les reconnaître en tendant l’oreille, ils s’imbriquent tellement bien dans la structure finale que les entendre est presque naturel. On soupçonne de discrètes cordes sur certaines tessitures. Grand morceau, toujours aussi brumeux, mais transpirant, encore, l’innocence…

Blast fera intervenir un autre invité, Chris « Bracken » Adams, aussi chanteur de Hood. (Qui ont sorti un indispensable de la musique, « Cold House » ). Au final, le titre est clairement le morceau le plus balancé du disque. Démarrant sur une sonorité persistante à faire perdre l’équilibre, comme un « Fa » gardé tant bien que mal par un Micro-onde, qui va se faire dévier de sa ligne conductrice par de multiples sonorités de machines. Grondements, mises en marche : le soulèvement des robots n’est pas loin. Au sein du tourbillon, effarant, C.Adams qui chante d’une voix totalement désincarnée, à peine reconnaissable dans ce Midgar sonore. Le final, entre sirènes bizarres et complainte du gars, en paralysera plus d’un.

Up In Flames sera (un peu) plus chaleureux, avec ce sample tout délabré, un peu vieillot, qui va tirer le morceau vers une longue montée captivante et agréable. L’ambiance y est plus cotonneuse qu’accoutumée, et l’on se délecte de ses scratchs discrets, ouvrant la voie à un Synthé entêtant et un Beat bien massif. Le tout complètement retourné par de brefs échos, des éclats parasites, des aspérités en veux-tu en voila. Une fille à la voix d’or susurrera une mélopée avant de se faire littéralement balayer par un mur de saloperies jouissives et crapoteuses.

L’album se terminera sur un Off toujours aussi opaque au premier abord, alignant une nappe torturée, vrillant dans vos oreilles au bon vouloir de son géniteur, avant de lentement s’éteindre.








Le deuxième disque « bonus » et caché comportera toutes les Faces B et rejets de ce Level Live Wires, et une ou deux pistes fractionnées pour le plaisir des remixeurs forcenés (Kill Tone et Freakout). Pas indispensable, mais initiative à saluer. Le disque comporte néanmoins quelques petites criques sympathiques à accoster, comme ce très beau Ambiant Fat Hooks, refonte planante de son grand frère ou Lil Tone Kill Two, bien plus éthérée que les versions présentes sur le disque initial, avec une belle ligne de choeurs pour supplanter les textures grises du titre original. Bonne petite idée enfin, réunir l’ouverture et la conclusion de Level Live Wires sur Full On/Off.










Mais revenons au sujet principal: Ce disque de Odd Nosdam va faire fuir la majorité de la population. Il est pourtant d’une justesse assez incroyable. Taillé dans le souffre, dans la solitude et dans le noir absolu, l’écrin musical Level Live Wires recèle de moments de beauté impressionnants, d’une candeur et d’une grâce à faire peur des que l’on repense une micro seconde à l’âpreté de ce disque.
Un disque atypique qui n’a peu d’équivalent, et qui arrive à télescoper la musique électronique, le Drone, le hip-hop et la Pop. Le résultat est proche de opacité la plus totale si l’on ne l’écoute que d’une oreille distraite. Il faut clairement pousser le volume à fond, percevoir la richesse des compositions, leurs multiples strates, leurs innombrables tiroirs, et se laisser emporter dans ces petites pièces abstraites. Pour me contredire, l’immédiateté et la beauté de morceau comme Kill Tone sauteront aux yeux des la première seconde. (Seul l’ultra irritant We Dead est à éviter, mais il dure bien heureusement moins d’une 1 minute 30).
Je vais sûrement être l’un des seuls à le clamer, mais pour moi, ce Level Live Wires est une grande réussite. Un disque touchant et effrayant en même temps, dégageant quelque chose de bizarre, étonnant, fascinant. Comme un compte pour enfant morbide mis en musique. Un disque rare, qui a sa place dans le meilleur des productions Anticon.


Peu de disques proposent aussi une telle saleté assumée, une telle ode aux craquements des vinyles, aux erreurs de câblages, aux parasites, aux sons passés par trop d’étapes pour être bien proprets… tout en proposant (bien heureusement) un incroyable relief dans la production (il suffit d’écouter Freakout 3 pour s’en convaincre). Le caractère Lo-Fi et cradingue n’est donc clairement pas un aléa de production bon marché, mais bien une pulsion assumée de son créateur qui veut reussir à étouffer son disque sans en enlever une once de richesse. Et confronté aux petites perles de mélodies distillées ici et là, le tout acquiert une aura presque unique.



Ce disque ne s’adresse de toute façon qu’à une frange extrêmement restreinte de personnes :


Ceux capables, blottis dans l’obscurité la plus totale d’une usine désaffectée, de rêver d’un petit brin de soleil.









11 titres + 11 Titres – Anticon
Dat’








  1. wony, visiteur Says:

    Alros ca ca me fait plaisir. C’est une trés bonne nouvelle. J’avais vaguement entendu parlé d une sortie d odd nosdam mais je n en avais rien lu. Ca a l air tout de même différent de ‘Burner’ vu ce que tu en dis.

    Hors sujet : Tu sais pas si il y a une sortie Why? prévue pour bientot?

  2. Dat' Says:

    Ben justement en allant sur le site Anticon pour étayer l’article, j’ai vu avec surprise qu’un EP de Why? sortait le 27 Novembre.

    Sinon le Nosdam est effectivement plus concis, plus brut que le Burner… Un peu plus “beau” au final je trouve, même si cette notion est tres subjective…

  3. Aeneman Says:

    Salopiaud 😆 ce genre de phrases tu sais que

    Ceux capables, blottis dans l’obscurité la plus totale d’une usine désaffectée, de rêver d’un petit brin de soleil.

    ça me fait envie à mort :nerd:…peut-être même plus encore que le Sole même si j’en ai envie aussi de celui-là

  4. LordMarth Says:

    Je vais me laisser tenter pour rejoindre cette frange de personnes blottis dans l’obscurité…

  5. Dat' Says:

    Hey bien n’hesitez pas à me faire part de vos reactions…

  6. Zdenek, visiteur Says:

    Ravi de lire ton avis sur ce disque.

    La prochaine fois j’attendrai que tu le pondes, le label sera plus content. :p

    Ton patron ^^

  7. Dat' Says:

    AHAHAH je ne m’y attendais pas à celle là XD

    Il faut dire que je ne l’ai pas acheté des sa sortie, mais mi-septembre. J’ai repoussé son texte depuis des semaines, tellement de bonnes choses ces temps ci. Mais j’étais obligé d’en parler avant la fin de l’année, de ce disque. C’est un petit coup de coeur, malgré son coté tres opaque au premier abord…

    Je viens de louper une augmentation là ^^

  8. LordMarth Says:

    mais :mdr: mr le patron comprenez qu’on a besoin de lui pour passer des nuits plus colorés avec nos beaux petits casques de combat 😀

  9. Richard Ellenbogen - Beverly Hills Body Says:

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