Mother City
L’abstract Hiphop étant devenu l’apanage des américains, from Los Angeles si possible, et devenu très discret du coté des français, si l’on excepte quelques survivants comme Depth Affect, Flakes ou Onra, il est assez appréciable de voir Fulgeance débouler avec son premier Lp, plutôt attendu par votre serviteur après une série de maxi oscillant entre le sublime (sur All City Rec) et le cool (sur Musique Large). Pierre Troel utilise sa MPC avec une habilité peu commune (même si l’on reste loin de certains pétages de plombs ahurissants), en passant au fil des années d’un abstract enfumé à des pistes plus bouncy et appuyées.
To All Of You, et sa pochette qui ressemble drôlement à celle du Seekae (sorti plus tôt cette année), c’est de rendre hommage aux villes visitées tout le long des pérégrinations musicales mondiales de Fulgeance, entre Los Angeles, Vilnius, London, Tokyo ou la Normandie. Chaque morceau sa ville donc, une bonne manière de multiplier les ambiances et de prouver que même si l’on ne sort que son premier Lp, on a déjà pas mal perdu ses valises entre deux avions.
Niveau packaging, c’est classe et simple, avec un petit texte explicatif et surtout 6 tracks bonus, pour tous les pays, donc pas de jaloux. Avec entre autre Brokenchord dans le crew, ce qui en impose. Niveau musique, on va tout de suite poser cartes sur tables : Fulgeance (putain, tu prononces ça comment ?) ne révolutionne pas grand chose. Un beat, une bassline, des petits synthés qui virevoltent, point barre. Commencer le LP avec La Cité des Anges, c’est un juste retour à l’envoyeur. Morceau qui vise tranquillement ta nuque donc, avec un petit coté rétro dans les synthés qui n’aurait pas déplu à Kuedo. Une minute de temps, ça devient tout de suite plus pimp, avec des graves bien forcés. Le genre de son qui te racle les tympans avec violence. Tu claques des doigts, tu te dis que le morceau est sympa, mais il prend son envol dans la dernière minute, avec un synthé sublime qui te fout la mort, un espèce de truc electronica qui ne résonne que 15 seconde, mais qui te fout une droite et soulève le morceau.
Je parlais de bassline, parce que Fulgeance, il à l’air d’aimer ça. Il te sort des basslines d’enculé, des trucs qui résonnent sur 3 étages. Attention, je ne parle pas de WOBBLEWOBBLEWOBBLE. Nop. Le français aime la belle bassline bien rugueuse, qui se tord et exulte pendant que des handclaps bien placés te font bouger le bassin. Glasgow Lunacy, ça gronde mignon, Pierre Troel a du passer sa tournée écossaise dans des caves bien profondes. C’est imparable, ça fait trembler les murs, et quand la petite mélodie guillerette déboule au milieu de l’orage, tu te mets à danser au milieu de la rame de métro, avant de succomber sur la conclusion presque oldschool, entre synthés granuleux et vocoder discrets. Mortel.
Bassline caverneuse toujours avec Vilius Bump, qui te saccagera une sono en deux minutes. Ca doit sacrement secouer en Lituanie. Fulgeance joue le contraste, se sert des basslines comme bases des morceaux, pour balancer subrepticement des mélodies forcemment mises en valeur afin enrichir et adoucir les tracks, procédé faisant systématiquement mouche vu le bordel ambiant. Même combat avec London Calling, qui respire méchamment les bassement londoniens, en ralentissant un peu le tempo, laissant intervenir quelques voix screwed et en poussant encore plus les graves. La litanie métallique finira d’achever les plus réticents.
Mais Fulgeance n’aligne pas que les baffes en forçant sur les graves, et sait prendre sur le LP une direction un peu plus expérimentale ou ouatée, comme sur le bien nommé Hiver Normand, où Fulgeance renoue avec les teintes abstract plongées dans le brouillard. Typiquement le genre de texture que j’adore, avec une track en constante évolution, bourrée de détails et de changements de rythmes, avec mélodies cristallines et voix fantomatiques. En plus c’est long, tu as largement le temps de t’y perdre. Bonheur.
Montefalco Mato balance surement le plus gros rythme du Lp, et si la bassline est là aussi absolument imparable, c’est la chorale flippante et les vocalisent chelou qui te finiront à coup de talon. Peut être le meilleur morceau du disque, tout du moins le plus efficace et le plus riche. Il faut balancer ça en club dans une fin de set, pour terrasser les derniers debout. Les deux morceaux Dub (“dub”, pas “dubstep”, ne cherchez pas de dubstep dans ce disque) que sont One For Bestow (qui va démolir la vie de tes voisins) et le joyeux Espresso Freddo permettront de filer un peu de sourire à la galette.
Mais c’est clairement Sweet Sofia qui surnage sur To All Of You, en s’écartant complètement du reste du Lp. Morceau très court, de deux minutes, à l’electronica Warpienne pas si éloignée d’un Plaid, mais brutalisée par un beat imparable, Sweet Sofia te fait regretter que Fulgeance n’ait pas opté pour une ou deux autres tracks dans le même genre, tant il semble maitriser ce dernier. L’album se finira sur la brumeuse Tokyo Blue Nostalgia, lente montée electronica-abstract avec une mélodie qui se déplie graduellement, pour se retrouver bouffée par le bruit blanc. Du joli boulot.
Pour la brochette de remixes en fin d’album, ces derniers ne sont pas forcément indispensables, mais on appréciera le travail de déconstruction hallucinée de Josip Klobucar sur Hiver Normand, la relecture ultra-massive de Brokenchord pour London Calling, le funky remix de Vilnius Bump par Ben Butler & Mousepad ou la Noise-émo de Yosi Horikawa sur Tokyo Blue Nostalgia.
Fulgeance, sur ce To All Of You, n’invente pas grand chose, (j’imagine que ce n’est pas le but) mais fait rudement plaisir (là, c’est plus probable). Bien foutu jusqu’au bout des pads, sans morceau raté, cela fait surtout plaisir d’entendre un mec te balancer des basslines imparables sans tomber dans le dubstep de charcutier. Il n’est pas si loin d’un edIT dans la démarche d’ailleurs. C’est de l’abstract Hiphop, du Hiphop instrumental, du Los Angeles beats, de l’electronica, bref, ce que l’on veut, mais c’est parfaitement taillé. Même si l’on attendra jamais, sur ce Lp, le niveau de certaines de ses tracks d’antan (celles parues pour la série 7×7), le français te sort de belles bombinettes sans forcer.
A ce stade, je dois normalement je dois trouver une phrase Télérama pour conclure habilement, mais je ne sais que dire, à part que Fulgeance vient juste de sortir un album qui déboule dans mes esgourdes pile au bon moment. J’avais besoin de morceaux de la sorte, et To All Of You les sert sur un plateau d’argent. Excellente galette.
10 titres + 6 titres – Melting Pot Music
Dat’
This entry was posted on Friday, December 16th, 2011 at 1:58 am and is filed under Chroniques. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.
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C’est vraiment excellent.
J’adore aussi les morceaux qui proposent plusieurs changements de rythme et d’ambiance, et ici j’suis bien servi =)
La meilleure découverte depuis Depth Affect, et ça encore grâce à toi ! ^^
Bonjour,
Je vous prie de m’excuser. Je n’ai malheureusement pas trouvé comment vous contacter autrement que par commentaire.
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