Rone – Creatures

Posted in Chroniques on March 8th, 2015 by Dat'


L’amour la nuit







Rone, je l’ai rencontré au hasard, comme les plus belles rencontres. Quand tu ne t’y attends pas, quand tu as la certitude que l’on ne t’y reprendra plus. L’esprit libre, encore cabossé des amours précédents, tu déboules au détour d’un rayon de disque, dans un club, les oreilles libres, le cœur mou. Alors c’est le coup de foudre, la folie directe : la relation qui démarre sur les chapeaux de roues, au risque de se bruler. On passe son temps à baiser un weekend entier, des histoires de chair, des histoires de Flesh. Le début d’une histoire d’amour, ce n’est que mélodie, et passé l’électricité des premières fois, on se roule dans les synthés de Rone jusqu’à l’agonie, jusqu’à ce que les sexes brulent. Le dos griffé. Le dos griffé. Jusqu’au sang. On baise, on baise, on fume une clope à la fenêtre, on baise, et on parle de la vie, de la sienne, de la notre. Des longues phrases, des tirades banales que l’on pensent profondes, pour des moments tellement beaux. C’est Bora-Bora à la maison, c’est des moments de vies romancés ou crus, des mensonges et quelques vérités. On s’invente un personnage, ou l’on gomme certains défauts, parce qu’à chaque début de relation nous est offert la possibilité de se redéfinir.

Alors on passe des semaines, voir des mois, le sourire aux lèvres, à se balader dans Spanish Breakfast. Tous les jours, toutes les nuits. A y penser constamment. Ce n’est pourtant pas l’album de ta vie, mais il y a quelque chose de chaud, de rassurant, un coté aventure aussi. On lui pardonne tout, ses petits défauts (trop court), ses petites manies, et, lors de rares moments fugaces, cela confine au sublime. Alors on baise on baise on baise. Puis on commence à connaître les habitudes. L’excitation de la nouveauté n’est plus là, mais pourtant, chaque rencontre, chaque nouvelle écoute, chaque nouveau rendez-vous est tellement plaisant. On était un peu perdu aux premières écoutes, à ne pas s’avoir que faire de ces nouvelles courbes, de ce nouveau corps, gestion d’émotions nouvelles. On connaît parfaitement le tout désormais. On le chante sous la douche, on le connaît par cœur, on sait sur quels boutons appuyer pour tout faire sauter. De lassitude ? Que nenni. Quel bonheur, cette relation qui partait sur du plaisir spontané, sans lendemain, évoluer en longue quête amoureuse. Spanish Breakfast me faisait danser en club, avant de rentrer explosé, défoncé, chez moi. Des mois plus tard, il m’accompagnait en me tenant la main au boulot, dans mes moments de joies, dans mes déprimes. Un plan cul mâtiné de drogues qui se transforme en relation longue durée, que demande le peuple ?

Tu as envie de pleurer, mais parce que tu es bourrés, et heureux.




Et le temps passe. Un deuxième album arrive. Une sacrée étape, dans une relation, parfois casse gueule, souvent accueillie avec sourires. Seuls les cons ne voulant pas s’engager auront peur de ce genre de défis. Rone, le papillon de nuit volant au grès des mélodies, n’est justement pas qu’un papillon de nuit. La deuxième étape, c’est souvent de prouver que l’on peut être plus sérieux. Alors on police. On police. Les aspérités des débuts, les petits défauts, on les accepte moins. La maladresse tellement mignonne des premiers mois devient un peu agaçante. Alors on gomme. On fait des efforts. Il se gratte les couilles, elle reste collée à son Smartphone. Il est encore un peu gamin, collé à sa PS1. Elle pête un plomb parce qu’il est bordelique. C’était mignon, c’est devenu chiant. Soudainement. Alors on fait des efforts, on rabote. Tohu Bohu, c’est beau. Très beau. C’est la relation stable, sans la drogue et les levrettes sauvage du début. Mais c’est toujours aussi agréable, et surtout, rassurant. Personne ne t’as jamais mieux taillé une pipe/planté sa langue dans ton con qu’un ange qui te connaît sur le bout des doigts depuis un an.

C’est beau putain, c’est beau. Tu fêtes des anniversaires des noëls, des valentines, c’est beau, tu es heureux putain. Bye Bye Macadam, ça te rappelle le début, quand tout était fou, beau, candide. Parade, ça te rappelle quand tu rentrais bourré en hurlant dans la rue, avec ta nymphe dans les bras. Tu roulais sur le monde putain. Maintenant tu roules sur ton canapé, devant la télé, mais c’est bien. Et puisque vous vous connaissez bien, pourquoi ne pas pimenter un peu le bordel, et tester de nouvelles choses ? Ca fait des Let’s Go avec High Priest, mais c’est pas grave parce que tu as confiance et que tu vois bien que ta relation tient debout, que c’est fait ensemble, putain tu es heureux. Alors oui, c’est plus mou. C’est moins l’aventure, les surprises, ce n’est pas tous les jours, mais seulement quelques fois dans le mois. La lassitude ? Pas encore. Pointe-elle le bout de son nez ? C’est possible. Le dos griffé ? va falloir oublier. Le boulot tu comprends, “et si les collègues voient ça”, alors que tu te pointais avec des suçons au taf il y a un an, et tu en étais fier.

C’est beau, c’est beau. C’est mieux construit, plus solide, les fondations sont fortes. Mais la passion n’est peut être plus là. On a troqué la passion pour la sécurité. C’est pas plus mal.

Tu as envie de pleurer, mais parce que tu sens le truc glisser, parfois s’éteindre, alors que tu es pourtant heureux.




Ca fait quelque temps que tu ne l’a pas vu. Avec le boulot, les obligations, les fausses excuses, tout ça. Oh, ça se croise tous les jours hein, mais depuis combien de temps n’y a t’il pas eu le feu ? Le vrai, celui qui brule, qui fait transpirer, qui nique le lit et les cervelets. C’est froid bordel. C’est toujours aussi propre, toujours aussi beau, surtout vu de l’extérieur. Oh, le couple parfait. Il est beau le couple, il est parfait, putain on vous envie, vous avez l’air tellement heureux. Toi, tu reviens chez toi, un troisième disque sous les bras des souvenirs pleins la tête, de la mélancolie à tour de bras. Il fait froid. Tu regardes le frigo et tu penses à Biolay et sa chanson déprimante. On continue d’écouter Rone, tous les jours. Mais ça baise plus. Ca fornique, de façon robotique. Une obligation presque.

Pire, tu commences à comprendre que ta nymphe fréquente d’autres personnes, des Bachar, des Kondo… elle ne le cache même pas, ça ne t’intéresse plus, et le pire, c’est que tu t’en fous. Parce que c’est déjà mort. A l’intérieur, tu le sais. Ca prendra peut être encore six mois. Six mois à trainer un cadavre. A s’engueuler, des hurlements inutiles (Ouija) parce que entre deux séances d’ennuis (Memory, Calice…) il faut bien un peu de tension, un peu d’électricité (de belles disputes neanmoins avec Sing Song). Les gueulantes ont remplacé les baises sauvages, il faut bien se décharger d’une façon ou d’une autre. Et pourtant tu continues, tu tentes de regarder vers l’avant, de faire des voyages, des propositions. Parce que c’est rassurant. C’est RASSURANT. Ca fait des années que tu écoutes cette musique, donc tu fais quoi si tu te retrouves tout seul comme un con ? Ca fait peur, de se retrouver seul. Mieux vaut trainer un cadavre hein ? Jusqu’à ce que tu en puisses plus, faut le trainer ton cadavre, hein ? Jusqu’à ce que tu en chies du sang hein ?

Alors c’est fini, c’est mort, et pourtant, au détour d’un regard, d’une soirée, d’un geste, tu te souviens que tu etais amoureux. C’est un peu amer, un peu triste, mais il y a une légère chaleur dans ta poitrine. Tu te rappelles de tous ces putains de moments, mélancolie belle et lunaire. C’est Mortelle, c’est beau, c’est le plus beau truc depuis des années dans ta putain de relation de couple. C’est nouveau et c’est avant. C’est rassurant et ça pue la baise des premiers jours. Tu penses même à quitter la ville et tout recommencer à deux, comme aux premiers jours. Ca te file les larmes aux yeux, tu es heureux, tu te dis que tout peut repartir, l’étincelle est là, l’amour aussi, bien enfoui sous un paquet de merde. Alors tu espères, comme un niais, comme un con. Tu te dis, “putain Rone, produit de la pop française, fait un album entier avec Daho, et on deviendra le couple le plus incroyable de l’univers”  Les minutes passes, l’étincelle trépasse, elle ne te regarde plus, et voilà que l’on s’engueule à nouveau pour rien. La lassitude. Et tu te rends compte que dans ce couple, il n’y a que du vide. Pas de rage, pas de lien. Mêmes les conflits sont vides, sans passion, sans feu.

Tu pleures parce qu’il ne reste plus rien. Plus d’amour, plus de haine, plus rien.

L’amour dure trois albums.
















12 morceaux – Infine

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CUM ON MY SELECTOR 19 : Hyacinthe, PNL, Nathan Fake, Dj Paypal, Sonny Digital, Ta-ha, John Tejada, Burial

Posted in Chroniques on February 15th, 2015 by Dat'


Ca commence par du rap hypnotique, ça finit par de la techno hypnotique



Hyacinthe – Sur la route de l’ammour / Retour aux pyramides

On ne va pas chercher à faire de la fausse pub, ou mettre en avant de fausses pensées. Pas de favoritisme, du Hyacinthe dans ces pages, il n’y en a pas eu depuis son premier Ep officiel il y a deux ans. Et ce n’est pas faute de vouloir en parler tous les jours. Mais j’ai attendu, j’ai rongé mon frein, pour parler de l’implacable. L’intelligence de l’instrue, la violence des phrases, la rage du reste. Ca gerbe sa tristesse, ça suinte la mélancolie, et dans sa tête, c’est la merde, mais il en rigole. Ca me rappelle quand j’étais plus jeune, que j’avais envie de bouffer la planète, de me frapper le torse en hurlant parce que j’avais envie d’être heureux, de faire des trucs. Je ne savais pas quoi faire, je tournais en rond, je ne faisais rien à par dégueuler des mots sur une page word. Hyacinthe, je l’envie. Il est jeune, mais il roule déjà sur le monde. Il a su quoi faire, et il est déjà plus fort que nous. Alors là, il revient, il éructe sur du Ital Tek, puis il feule sur du Krampfshaft. Ce double clip, c’est pour annoncer un deuxième album, et crois moi, ça va être assez magnifique. Parfois vulgaire mais tout est vrai ? Ouai. Et, depuis l’autre bout du globe, hâte de redire bonjour à Hyahya.






PNL – J’comprends pas

Les gars de PNL, ils m’avaient foutu une tarte gigantesque avec leur “Je vis je visser“. Ce n’etait pas nouveau, mais 1/ l’instrue était magnifique 2/ ça transpirait la sincérité, et franchement, dans le rap français, c’est quelque chose de plus en plus rare (= en voie de disparition). L’album est annoncé pour 2015, quelques extraits qui raffalent bien, mais pas de claque similaire au titre précédant. Et voilà que déboule J’Comprends pas. Alors déjà, point important, d’où vient cette instrue ? Elle est putain de magnifique. On croirait entendre un Métro Boomin dépressif après avoir trop trainé dans un RER. Cette instrue, c’est un diamant fou, un truc qui écrase la majorité des productions à gros budgets (un comble vu que les mecs semblent sortis de nul part). Mais PNL, c’est aussi la science de la mélodie, et si l’on était déjà convaincu que les mecs balançaient les meilleurs refrains du rap français actuellement, celui de J’Comprends Pas est le coup de grâce, la confirmation. Pour finir, dans cette overdose de mecs qui se croient à Chicago alors qu’ils ne trainent qu’à Lille, PNL aligne du spontané, de l’entier, sans ellipse. C’est coupé au cordeau, on n’est pas dans le conte, dans le glamour, c’est un putain de documentaire. Les gros balaises font du rap filmé par Micheal Bay. Chez PNL, c’est du rap sans filtre, camera à l’épaule. Du vécu. Du sale, du violent, certes. Mais du vécu.






Sonny Digital – Everything feat Chevy Woods

Je ne sais pas pourquoi je n’ai pas mis Sonny Digital comme ‘Man Of The Year’ dans mon top de l’année dernière. Enfin, si : j’ai tout simplement oublié. Et pourtant, le bonhomme méritait tous les louanges. Morceau de l’année avec “I’m the Man“, coup de grâce avec “Good”, sans oublier les productions implacables pour Drake & Makkonen (mythique Tuesday), Que ou Wiz (OUY, cet alien)… Le mec semble faire un sans faute pour le moment, tout droit sorti des profondeurs des mixtapes de Gucci Mane pour marcher aujourd’hui sur le hiphop comme un Guingamp sur la ligue 1 : il ne sera jamais le premier, mais il aura toujours l’air plus sympa que les autres. Et quand tu ne t’y attends pas, quand tu baisses ta garde, boum, il te sodomise en pleine lucarne. Alors on guette chacun de ses mouvements, et avec Everything feat Chevy Woods, on est a nouveau dans le dur. Production magnifique (pouvait t’il en être autrement ?), ultra puissante et émo dans le même mouvement, avec refrain dépressivo-parfait. On pense secrètement que le morceau est trop court, avec une conclusion superbe mais frustrante, et l’on attend surtout un gros projet du bonhomme. Parce qu’avec un talent pareil, on en viendrait presque à croire que des bretons pourraient régner sur l’Europe.






Dj Paypal – I’m Ready

Bon là tu va cliquer sur la video, et tu vas me dire, “c’est quoi ce bordel ?”. Ca te fait penser à du vieux Daedelus, et son chef d’œuvre Denies The Day’s Demise, en mode brasil matiné de drogue. Mais ce morceau, qui joue la samba hystérique, renferme bien d’autres secrets. Ce truc, c’est le tube débile de l’année, la montée jouissive qui fera bouger tous les bassins en mode épilepsie. Dans les clubs ! Dans les clubs putain, il faut jouer ça dans les clubs ! Le temps que tu lises ces lignes, tu en es encore qu’à 1 minute du morceau environ, et tu ne comprends pas. Tu te dis que ce Dj Paypal c’est marrant, mais que bon, de la house brésilienne balancée à plein régime, ce n’est pas nouveau. Tu te dis presque que c’est chiant, que tu as cliqué sur la mauvaise vidéo, que mon Selector est raté. Et puis là, tout d’un coup, à partir de 1min45, tu tends l’oreille, tu te marres, tu te sens con, et tu hurles HOLY FUCK IL Y A T’IL UN MOMENT PLUS CATCHY ET TUBESQUE QUE CE TRUC DEPUIS LE DEBUT DE 2015 ?!? La réponse : non.






Burial – Temple Sleepers

On avait laissé Burial sur des morceaux presque pop, des fresques légères plus proches d’une Katy Perry sous Rivotril que d’un morceau de UK Garage hardcore. Comme toujours, l’anglais est scruté, attente folle et constante. Et voilà qu’en ce début 2015, même pas sur Hyperdub, Burial balance un titre original sur un vinyle obscur. Oubliez les voix sucrées et quasi-refrains, Bubu revient au dancefloor, au Uk Garage saupoudré de club. Ca balance des synthés drogués, ça cartouche un rythme envolé, et ça part même en pure jungle oldschool sur le dernier tiers. Avant une conclusion complètement cinglée, à filer la frousse, redescente de drogue violente et psychotique. On ne comprend plus trop ce qui se passe, ça part presque en best-of hit machine. Et bizarrement, ce sont ces 60 dernières secondes, complètement folles, Mr Bungle en mode techno, qui sont les plus belles. Les plus éloignées de ce que fait l’anglais. Mais les plus belles du morceau. En espérant que le bonhomme se mette soudainement à faire de la musique pour camés en pleine overdose. Et comme toujours avec Burial, c’est les voix pitchées, c’est les âmes errantes, c’est les clubs en dépression. Et c’est toujours aussi fou.






Ta-Ha – Lil Bit

J’ai un contentieux avec l’imagerie actuelle du r’n’b drogué actuel, oscillant entre année 90 et seapunk camé. J’adore, et c’est une des directions que je prends très régulièrement avec mes photos. Mais dans ce foisonnement hystérique, on peine à distinguer le vrai du mimétisme. Pour un The Weeknd, combien de parodies ? Pour un Bones, combien de vidéos youtube moches à se planter des clous dans les yeux ? Et souvent, on privilégie l’imagerie à la qualité, et peu peuvent se prévaloir d’être aussi pro dans l’amateurisme qu’un Yung Lean. Alors alors alors, il faut quoi pour tout démonter ? Une instrue parfaite. Une voix parfaite. L’esthétique, au final, on s’en bat les roustons. C’est le bonus, la cerise, l’happy ending. Et trouver cet équilibre, c’est rare. Très rare. La Ta-Ha, je ne sais pas qui est-elle, je ne sais pas ce qu’elle a fait, mais ce morceau, il est parfait. Demoiselle perdue à Tokyo ? Bordel il ne faut pas chanter comme ça, tu viens de rouler sur le web avec un truc pareil. Il ne manque plus que des néons de toutes les couleurs dans ton clip. Les sirènes droguées, c’est les sirènes que l’on veut entendre en club. Les vraies sirènes. Voix parfaite ? On n’en est pas loin. Instrue parfaite ? Tu rigoles, c’est encore mieux que ça.






Nathan Fake – Glaive

Oh Nathan Fake ! Cela fait longtemps que l’on ne t’avait pas vu ! Comme un vieux pote parti en goguette, que l’on suivait vit fait au grès de ses actualités, à mater ses photos facebook avant de l’oublier la seconde d’après. Ouai Nathan, on te voyait gigoter au loin dans la musique, mais depuis combien de temps n’avait t’on pas pris le temps de se poser pour boire une bière et vraiment faire attention à nos vies respectives ? Depuis quelque années, je faisais semblant de te connaître, mais à part un like par ci, un retweet par là, pas vraiment de contact hein ? Pas de chair, pas de foutre, que du numérique. A bas les hashtags et les notifications, prenons nous la main, et avançons ensemble, même pour une soirée. Faut que je te le dise, tu ne m’avais pas touché depuis un bail Nathan. Et en te voyant débouler, sans trop prévenir, par surprise, en souriant, j’en ai eu les larmes aux yeux. J’ai repensé à nos annnées où je passais mon temps à t’écouter en dansant dans ma chambre de jeune adulte. J’ai repensé à ta musique qui m’avait flingué le cœur. Ton Glaive, c’est un morceau sublime, un truc qui m’a arraché la colonne vertébrale dans sa deuxième moitié. La mélodie. Tout est une histoire de mélodie. Et même si tu es déjà reparti, et que les timelines vont effacer la continuité et l’émotion, au profit de l’immédiateté et de l’instantané, je peux te dire qu’avec Glaive, tu m’as marqué au rouge fer, pour une année entière. Et je ne posterai même pas ça en statut Facebook. Je ne veux pas que tout disparaisse en 5min dans ce maelstrom d’informations. Je veux garder ce moment pour moi. Égoïste ? Sans contestation.






John Tejada – One Step

Voilà que je parle de Nathan Fake, et qu’au même moment, Tejada sort également de l’ombre sans prévenir. Et lui aussi, je faisais semblant de le connaître ces dernières années. Fevrier 2015, c’est la réunion des anciens élèves de la techno racée? Je t’avoue Tejada, j’ai cliqué sur ton clip parce que l’on a un ami commun sur Facebook, et que je savais qu’avec son share, je ne serai pas déçu. J’ai confiance en ce mec. Et j’ai pensé que cela serait une bonne occasion que l’on reprenne contact. Alors j’ai pressé play. Et j’ai pris cette intro d’enfoirée dans la tronche. C’est magique. Ces synthés lunaires, matin à marcher sous la rosée après une nuit blanche, cette mélodie en suspension, qui semble autant venir d’un documentaire sur Saturne que d’un club londonien crasseux et mélancolique, c’est fou. Et puis il y a ce claquement, ce fumigène qui s’ouvre et qui balance le morceau sur quelque chose de plus référencé, mais de toujours aussi beau. Suspension, drogue et lettre de rupture. Ce n’est pas du sombre, c’est de la lumière, blanche. Mais pas celle qui brule les yeux en plein après midi. La lumière douce, apaisante, le luminou rassurant éclairant les coins de chambres. Avec plein de fumée, comme dans le clip de Clement, le contact commun dont je parlais, qui a décidé depuis quelques mois de bruler les rétines du monde avec ses clips de folie. Alors je vais te dire Tejada, les motivation-songs, avec des lyrics comme ça, surtout dans la techno, ce n’est pas trop mon truc. Mais bordel, avec cette première minute trente lumineuse, j’ai qu’une envie : écouter ton album.






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TOP 2014 – Rétrospective

Posted in Chroniques on January 18th, 2015 by Dat'


> Rétrospective 2014



Comme chaque année, ce top n’est pas foncièrement là pour présenter les disques révolutionnaires de 2014. Simplement ceux que j’ai le plus écouté, que cela soit en pleine nuit devant mon ordi, sous la lumière d’un réverbère, en soirée ou avant d’aller au boulot le matin. Les coups de cœur, les grosses baffes, que le disque soit considéré comme une sortie “importante” ou complètement inconnu au bataillon. Le plaisir de chanter un truc sous la douche, ou de chialer pendant un moment dur. Surtout, comme chaque année, n’hésitez pas à poster vos coups de coeur en commentaire de cet article, Car évidemment, il doit y avoir de grands absents, oubliés, ou pas écoutés. Il y a aussi des disques qui sont complètement passés à la trappe, souvent sans le vouloir.

Encore une fois, plusieurs catégories dans cette rétrospective : Un top 12 albums, sans distinction de genre, les Top Tracks 2014, le Artist of the year, la bonne idée de l’année, et les meilleures idées de l’année écoulée, le tout écrit entre deux bières. Ce top est un peu plus court que les années précédentes, et un peu en retard aussi, car les déménagements et l’écriture, ça fait rarement bon ménage.



Les titres des disques en couleur renvoient aux chroniques respectives (le cas échéant)





> Top albums 2014




KG – Passage Secret

Anges noirs déchus reviennent sur terre pour tout détruire. KG, c’est l’homme mystérieux qui trainait il y a presque 10 ans sur Gooom Records, scarifiant mes tympans à vie avec deux disques fondateurs, dont “Adieu à l’électronique“, mythique. 10 ans ! Ce mec que l’on avait oublié qui déboule sans prévenir, comme un père allant acheter ses clopes et revenant une décennie après avec une famille complète sous les bras. Et quel retour ! Rock allemand hardcore, shoegaze planant, fresques électronica foutraques, on oscille toujours entre le foutage de gueule et le magnifique, avec des putains de passages lumineux (P36, Mein Herz schlägt nur für dich, Claque-merde ou 440, magnifiques) et un brassage de genres qui force le respect. Mais surtout, à l’instar d’un Taylor Swift aux MTV Awards, KG réussi, avec son Passage Secret, le tour de force de rafler la première place dans toutes les catégories : meilleur disque rock 2014, meilleur disque electro 2014, meilleur artiste français, meilleur artiste allemand, meilleur comeback 2014, plus belle chevelure 2014 et award d’honneur pour l‘ensemble de sa carrière. Un putain de patron je vous dis.


Sebastien Schuller – Heat Wave

Un autre revenant inattendu, autre français dont on avait oublié l’existence, sauf lors de nos soirées dépressions où l’on se devait de lancer machinalement un petit Happiness LP des grands soirs. Sur ses morceaux electronico-pop, Sebastien Schuller se transforme toujours en spectre, à hululer sur des mélodies à crever. Mais cette fois, Heat Wave tient plus du synthétique à néons nuits blanches que de pianos cristallins. Les boites à rythmes sont plus présentes, les claviers s’envolent, le tout semble presque enjoué. Il y a même, ô surprise quelques tubes dans Heat Wave. Mais que l’on ne si trompe pas, Schuller sait toujours mieux que quiconque cracher des mélodies hallucinantes de beauté, des trucs qui te choppent et te coupe en mille la colonne vertébrale. Schuller ne s’écoute plus affalé sur un canapé entouré de lettres de ruptures. C’est maintenant au volant d’une Chevrolet, à fond sur le périphérique d’une mégalopole, aveuglé par les néons, qu’il faut s’en délecter. Dans les deux cas, pas de soucis, le mec fait toujours autant chialer. Allez, facile, un des disques de l’année.


Clark – Clark

Brrr, on avait presque perdu espoir en Clark avec ses dernières livraisons, même si son best of remix était sauvage et plaisant. Mais l’anglais semble avoir rangé ses guitares acoustiques. Non, il les a piétiné, défoncé, annihilé, histoire de sortir l’album le plus froid et électroniques qu’il a pondu depuis bien des années. Clark revient au son radical d’un Turning Dragon, ou d’un Empty The Bones Of You. Le bonheur, c’est fini. Plus de voix, plus d’espoir, plus de soleil. Ici, tout est gris, enneigé, glacé à mort. C’est la rave partie dans la crevasse post-avalanche, les longs errements sous LSD dans la taïga, c’est un album techno pur, aux rythmes souvent binaires, avec, comme toujours chez Clark, des litanies belles à crever. Mais c’est aussi, et peut-être pour la première fois chez le musicien, un anglais construit comme un monolithe, un disque massif et homogène, presque linéaire, sans coup de mou ni track hors sujet. Un objet fort, beau, dansant, complet, superbement mis en musique, avec quelques moments fous (There’s is a distance in you, aberrant). Un grand disque ? Pas vraiment. Mais une putain de galette jouissive, assurément.





– Run The Jewels – Run The Jewels II

On a vu Run The Jewels dans tous les tops en cette fin d’année. Le genre de disque acclamé avant même sa sortie, plaqué partout dans les medias hype, avec un Killer Mike de tous les combats politiques, un El-P une énième fois aux manettes pour des prods sombres et torturées, des feats faisandés (Zach De la Rocha, sérieusement ?)… Un disque qui faisait chier avant même d’être écouté. J’ai justement mis du temps avant de trouver la force de lancer ce nouvel album. Mais après quelques minutes seulement, impossible de résister, un constat implacable s’impose : Run The Jewels roule sur tout le monde, écrase toute concurrence, nous vomit sa domination totale en pleine gueule. Instrues ultra violentes, au potentiel club affolant (Oh My Darling, Blockbuster Night Part1, Close Your Eyes, Early, Love Again…), bangers détruisant tout sytème audio de bagnole, Run The Jewels II est empli de tubes frontaux, hystériques, explosés par deux MC en roue libre. Tout le monde dit que c’est bien ? Normal, c’est vraiment bien.


Objekt – Flatland

Il y a eu de la légende cette année en IDM. Et c’est pourtant du coté d’Objekt que l’on a remporté la timbale. Car Flatland n’est pas un énième disque d’electronica torturé, avec bruits d’ordinateurs et glitchs dans tous les sens. C’est un putain de disque sensible, où les robots pleurent et font l’amour. Tabassage industriel, digressions Warpiennes presques oubliées, et surtout tubes concassés lâchant de sales mélodies (Ratchet meilleur morceau du disque, magnifique, dansant et explosé, que demande le peuple ?). Même quand le tout commence de façon trop absconse, Objekt a l’intelligence de briser le marasme par des envolées émo et cristalline (Strays, crise d’épilepsie mutant en balade solitaire dans le désert). Taillé à l’or fin, peu d’albums arriveront à la cheville de ce bordel l’année prochaine, du sacré bon boulot.


Travis Scott – Days Before Rodeo

Dans le royaume des albums, les mixtapes sont reines. Si cela fait quelques années que l’on a plus à débattre sur le fait que les tapes gratos sont souvent bien meilleures que les albums officiels, on ne pensait pas tomber sur une telle livraison de la part de Travis Scott. Car Days Before Rodeo n’est pas seulement la meilleure tape de 2014, c’est surtout la meilleure chose dans le genre arrivée dans mes tympans cette année. Complaintes auto-tunées expérimentales, trap droguée pleine de surprise, on passe du tube club dangereux (Mamacita, Backyard Freestyle…) aux complaintes dépressives débordant de spleen (Quintana pt2, magnifique, ou Zombies, improbable…). Travis Scott se balade sur 12 morceaux formant un objet ultra cohérent, dur, poisseux, et partant dans des territoires presque inexplorés, avec en sommet un Skyfall feat Young Thug fou, où les deux Mc se transforment en chamans hystériques et émo. Un mélange entre la dépression d’un 808&heartbreaks, la pimperie d’un Rich Gang et la violence psychotique de n’importe quel LP émanant de Chicago, une mixtape qui n’en a pas fini d’être décortiquée, bien plus riche et intéressante que bien des sorties cette année. Le style ultime, ce n’est plus se pavaner avec de belles fringues, mais de réussir à sortir une mixtape en se droguant au maximum sans clamser.





Plaid – Reachy Print

Ah Plaid, groupe de mon enfance, mélodies candides, envolées christiques, chialer lové dans son canapé. On attendait un album de Plaid, on a eu un bon album de Plaid. Mais plus encore. Pour la première fois, les anglais sortent un disque bon de bout en bout, une galette cohérente, concentrée, pertinent à 100%. Mais surtout, Plaid prend des risques. Des fresques electronica-enfantines, du fan-service, il y en a forcément. Mais il y a aussi de véritables tours de force, des boulets qui bousculent les fondations : le magma mélancolique de Ropen, la pop de Matin Lunaire, la techno du magnifique Navofanny, le Disneyland dépressif de Liverpool St, le spectral et sublime Away… avec, en plus, une profondeur de son que l’on n’avait jamais croisé chez le duo. Rien n’est nouveau chez Plaid, rien ne révolutionne la musique. Mais dieu, que ce disque est beau ! Melodies évidentes, mélancolie qui déboule de partout et tabasse tout ce qui bouge. On n’en demandait pas plus. Un bonbon, une friandise triste, fragile, et belle.


Gabriel Garzon-Montano – Bishouné: Alma del Huila

On nous a fait chier cette année avec un Pharell plus niais encore que des Teletubbies sous MD, alors que dans le noir, recroquevillé dans une impasse attendait Gabriel Garzon Montano. Rythmes chauds, voix parfaite, musique ultra racée.
Mais cet EP est symbolisé par un titre magnifique, Pour Maman, une des plus belles choses entendues cette année. On a le beat le plus rond, le plus puissant, le plus noble de 2014. Un truc qui fait vrombir les âmes, trembler les murs et pleurer les voisins. Un truc qui tabasse la nuque, et fait friser les duvets. Tremble Dj Darky, reste en Allemagne dans ton bouge libertin, le beat parfait est ici. Depuis la sortie de son disque, le bonhomme ouvre pour Lenny Kravitz, parcoure le monde, et l’on espère qu’une chose : avant de céder aux sirènes du mainstream, que le Gabriel Garzon sorte en 2015 un album soul qui annihilera toute concurrence.


Moodyman – Moodyman LP

On peut aller chercher dans des milliers de disques house ou techno sortis cette année, pas un n’a plus de classe, de sex-appeal et de chaleur que ce nouveau Moodyman. Depuis quelques années, j’avais lâchement cessé de m’intéresser à ce monsieur, pour causes de sorties moins enthousiasmantes, moins cultes que ses premiers LP. Mais cette fois, autant aller droit au but : cet album sent le cul. Vraiment. Ca pue les frottements de peau, les cambrures ruisselantes. Et pour la première fois depuis quelques temps, cela ne semble même pas forcé. Moodymann semble en avoir rien à branler, il balance une galette je-m’en-foutiste qui n’a aucun sens dans le tracklisting, mais qui recèle de trésors absolus (Desire est un morceau immense, un chef d’œuvre). La vraie musique de strip clubs, c’est celle de Moodymann. Le moite, le sombre, à peine illuminé par cambrures et néons. Celle qui provoque érections et flaques de cyprine avant même que les corps se mettent en branle. Un vrai plaisir.





– Vince Staples – Hell Can Wait

Il y a eu le brulot Run The Jewels, toutes armes dehors, à rouler sur le monde en hurlant. Et à l’opposé, il y a eu également Vince Staples, plus posé, plus calme, mais tout aussi revendicateur. Il y a du Ferguson, il y a de l’émeute, il y a du braquage dans ce disque. Du pragmatisme, de l’analyse, un peu de folie, même si loin des débordements hystériques de sa bande de potes de chez Odd Future. C’est dur, âpre, loin d’être radio friendly, même si l’on trouve quelques tubes naissants, comme ce 65 Hunnid imparable. Cela pue le souffre et le béton, un bon petit story-telling sur tout le disque, réaliste mais pas chiant. Et des sirènes, des sirènes partout. Les sirènes de l’urgence, du siège et de la rédemption. L’enfer peut attendre ? Merde, 2015 vient de débuter, et on y est déjà mec.


River Bones – Pure

J’avais déjà parié une bonne partie de mes deniers en 2013 sur ce français, auteur d’un LP traumatisant, Mort, mélange entre violente trap slow-motion et ambiant religieux sectaire. C’était de l’inédit, même si les fondations étaient connues. 2014, le bonhomme délaisse la trap pour le footwork, mais sa mixture est toujours aussi violente, malade et sublime. C’est les chants angéliques, c’est l’odeur de la mort, c’est la noirceur absolue, c’est ultra violent et fragile dans le même mouvement. Il y a Unsex, un des morceaux de l’année, avec son break ambiant ahurissant. Il y a Serene, prière thug mélangeant gunshot et anges déchus. il y a autant d’ambiant que de black metal chez River Bones. Autant d’électronica que de footwork, autant de Burial que de world music, autant de dance pute que prières fanatiques choppées dans des âshram perdus en haut d’une montagne. Il y a le meilleur de tout ça, avec une bonne dose de mort, et c’est ce qui rend la musique du français si unique.


Machine Girl – WLFGRL

Ecouter ce WLFGRL, c’est se sentir comme un vieux, terré chez-lui, matant la photo de son amour de jeunesse, sans avoir les couilles de décrocher son téléphone pour reprendre contact. Parce que tu sais pertinemment que les coïts improvisés dans les chiottes d’un club où une âme perdue te crache son haleine chaude dans le creux de ton cou, c’est terminé. Que la prise de drogue/alcool sans craindre d’être explosé au boulot le lundi et de foirer des contrats, c’est terminé. Que de partir en bagnole avec des potes sans but, le coffre rempli de bière, sans avoir cette putain de peur latente de chopper un cancer, c’est terminé. Alors on se plonge dans ce Machine Girl avec une mélancolique larme à l’œil, à maugréer doucereusement sur le passé et sur une vie désormais trop tranquille. Amorphe, un peu triste mais le sourire au lèvre, en bougeant sagement la tête sur une musique qui, il y a 10 ans, nous faisait encore méchamment bander.





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> Artist of the year 2014 : BONES





Cette année encore Bones a été partout, à balancer des albums tous les deux mois, tous plus réussis les uns que les autres. Si le rappeur peut pêcher par excès de créativité, et via une imagerie vintage un peu trop systématique, la pertinence de sa musique, et la qualité des livraisons ne failli (quasi) jamais. 5 albums, plusieurs EP dont un projet folk fantomatique ‘SurrenderDorothy’, l’américain aura impressionné avec un Deadboy LP ultra émo, un Garbage LP ultra violent et un Rotten LP dépressif. Sur 2014, seul Skinny aura été légèrement décevant, légèrement trop sombre et effacé. Mais si l’on devait faire un albm best of de l’année, Bones trônera en haut de tous les classements albums 2014. Il suffit d’écouter Return Of The Pimp pour s’en convaincre. Et surtout WeDontBelieveYou, un des morceaux les plus fous de cette année.





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> La friandise de 2014 : French Montana x Harry Fraud – Mac & Cheese 4: The Appetizer





Entre deux mixtapes bien trap, French Montana a eu la bonne idée de balancer un apéritif concocté avec son pote de toujours Harry Fraud. Et l’on est loin du bourrinage gangsta habituel. Sur cet Ep de 7 titres, les prods sont magnifiques, aériennes et émo, et French est impérial. Entre sample cramé de Lana Del Rey (Poison, pop et parfait) et prods cloud matinées de voix pitchées (le morceau en deux temps How You Want It, la remise en forme de Playing In the Wind), on a même le droit à un petit chef d’œuvre, un des plus beaux morceaux de l’année avec l’intro Haaaaan: Rayons de soleil, orgues et émotion, la grande classe Nestor.





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> Les meilleures idées de 2014 :


Noumzee – I Count Two Guns (Young Thug) // Mike Paradinas – Trancework




Pure Baking soda avait eu, l’année dernière, l’excellente idée de compiler les meilleurs morceaux d’un Gucci Mane qui avait sorti trop d’album pour que l’on puisse tout suivre. Mais Guwop en prison, un autre fou s’est revelé cette année, Young Thug. Et si les projets du bonhomme n’ont pas été si nombreux que ça (si l’on excepte des mixtapes sorties à l’arrache par BrickSquad et les deux indispensables Rich Gang), il a été de tous les featurings, dans tous les albums. Quoi de mieux que de de compiler et résumer cette année folle dans un mix d’une heure balayant les interventions les plus marquantes de ce génie dégénéré ? C’est sur l’Abcdr, et c’est gratuit ICI
L’autre craquage de l’année dernière, c’était le pauvre fou qui avait télescopé Boards Of Canada et Gucci Mane le temps d’une mixtape. En 2014, Paradinas prend son genre chéri, le footwork, pour remixer des tubes dance pute intemporels, histoire de redynamiser nos “la plus grande discothèque du monde” d’antan, mais en mode crise d’épilepsie. Ecouter du Olive, du Da Hool ou du Alice Deejay en mode Ghetto-chicago-hystérique, ça n’a pas de prix et c’est ICI.





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> Top Tracks 2014


– Doseone feat The Light Of Love Children’s Choir – Weight In Song
– ARCHNGL × HAARPS – Lotus
– Darius – Vanyll
– At Her Open Door – Even Better
– Denzel Curry – Parents
– Lakutis – Jesus Piece
– Man vs Indian Man – Ice Accountant
– Girl Band – Lawman
– Moderat – A New Error (Enerys Piano Cover)

– Krampf x Gucci Mane – My Chain
– Daisuke Tanabe – Alice
– Vendredi – Chiara
– Hidenka x Fumitake Tamura (Bun) – Soul Fire
– Jody HighRoller (Riff Raff) – Let Me Drive
– Tame Impala – Stranger in Moscow
– Sky Ferreira & Ariel Pink – My Molly

– Seekae – Test & Recognise
– 123mrk – Versatile
– Vendredi – Chiara
– Sky Ferreira – You’re not the one (Cid Rim remix)
– Hecq – Steeltongued (Raoul Sinier remix)
– Powell – So We Went Electric
– Sick Team – Addiction
– Samaris – Viltu Vitras

– U ziq – Taxi Sadness
– Nil Hartmann – 30
– Last Night In Paris – New Benz
– Filastine – Sixty Cycle Drum
– Objekt – Ganzfeld
– Fwdslxsh – 4 U
– Surrenderdorothy – Whatcouldpossiblygowrong
– SZA – Julia

– Lofty305 x Torus – Echosexxx
– Andy Stott – Violence
– Rival Consoles – Helios
– Roots Panorama – Mars
– Zennor – Tin
– Sonny Digital – I’m The Man
– N.O.S ft Ademo – Je Vis Je Visser





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> Top Videos 2014






> l’année 2014 des potos de DFHDGB (en attendant une sacrée fournée 2k15)






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> Autocongratulation : La pochette bien d’un disque très bien :





Cette année, j’ai eu la chance de faire les photos pour la pochette du premier et tant attendu album de METEK. Cela aurait été malhonnête d’en faire une chronique and co, mais je ne pouvais pas ne pas en parler rapidement. Disque de rap de l’année pour certains, ovni chelou pour d’autres, on sera de toute façon tous d’accord sur un point : Riski est un disque de rap comme on entend peu (jamais?) en terme de sincérité, un disque personnel et fou, avec un METEK qui crache ses tripes à la tronche du monde. Un album qui représente parfaitement l’artiste, légende si l’en est. Pour les curieux, pour en savoir plus, l’excellent article de Snatch qui résume tout, et c’est mortel : http://snatch-mag.com/article/metek




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> Le livre 2014, et ce fut une évidence :





Le Diable, Tout le Temps // Donald Ray Pollock

Je n’en parle pas vraiment, mais je dois lire autant que j’écoute de la musique, voir plus. Sauf que faire des chroniques de bouquins, je ne sais pas faire (et ce n’est pas faute d’avoir essayé). Malgré tout, faire un selector spécial bouquins, ça m’aurait bien tenté. Et en point d’orgue, il y aurait eu ce Le Diable, Tout Le Temps; livre hallucinant, désesperé, bourré de crasse. La crasse la plus horrible qui soit, celle des fous déments, des pédophiles, des religieux hystériques, des pervers, des ratés. Celles des petites villes enclavées, pleine de transpiration jaune, de mouches qui volent et de cadavres pas encore canés. C’est un autel satanique débordant d’animaux morts. C’est aussi, et surtout, de l’amour, beaucoup d’amour, mais rongé par la pourriture. C’est des situations parfois belles, candides, lumineuses, mais annihilées de la pire façon qui soit. C’est le livre le plus brutal et le plus sincère, et bizarrement avec le plus de tendresse que j’ai pu lire depuis un bail. Et en plus, c’est superbement écrit. La vie est médiocre, oui, et se termine toujours dans une flaque de pisse.




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> Pour finir :

Ce fut une année mouvementée, et la cadence des articles en a pâtit légèrement. Pas de soucis, on se pose en 2015 (j’espère, on ne sait jamais ce que la vie nous réserve du moins) et les projets + articles vont affluer (toutes proportions gardées)

Merci encore, bonne année, santé, argent, protégez vous les oreilles, pour ne pas devenir un sale drogué aux médicaments faire des sevrages de l’angoisse. On part vers 2015, et ça sera encore le bordel. Tout ça dans le plus grand chaos, c’est la neuvième année pour les Chroniques Automatiques qui commencent, bientôt les 10 !


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Brrrr brrrrr


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Sebastien Schuller – Heat Wave

Posted in Chroniques on December 22nd, 2014 by Dat'


La vie la nuit



Sebastien Schuller est surement l’un des mecs les plus discrets de la pop electro en France. Le bonhomme aurait pu avoir une carrière à la Emilie Simon (en terme d’exposition), surtout à la sortie de son premier album il y a maintenant plus de dix ans. Happiness reste un petit chef d’œuvre d’émotion, un disque comme l’on en croisait rarement à l’époque dans les bacs français, entre ritournelles tire larmes épiques (Tears Coming Home, sublime), fresques instrumentales à crever (Edward’s Hand, ou Wolf, qui me flingue encore l’échine même après dix ans d’écoutes intensives et quelques incursions très Radiohead (sur Donkey Boy, impossible de le nier). C’était l’un des disques les plus réussis de l’époque, et reste encore une référence absolue pour les amateurs d’electronica-pop. Puis plus rien, avant un deuxième album 5 ans après, qui bizarrement, commençait de façon très empruntée, avant de balancer une deuxième moitié de Lp phénoménale (The Border, Last Time, New York, Battle… !). Un disque en demi-teinte, mais qui ravissait quand même pas mal les esgourdes.

Et encore une fois, plus rien. A même en oublier l’existence du musicien, qui, paraît-il, s’était installer aux USA. Un ou deux morceaux perlent sur le net, mais on passe à coté faute de battage médiatique, et si Schuller était toujours présent dans les cœurs via ses précédents cd, on espérait même plus une nouvelle sortie. C’est dire l’étonnement d’entendre, 5 ans encore après son dernier LP, l’annonce de Heat Wave.







Et si la direction prise avec Heat Wave est légèrement différente de ce que l’on connaissait chez Schuller, le bonhomme n’a pas perdu la main pour nous sortir des morceaux instrumentaux lumineux, sublimes et fou. Silent est beaux, tout simplement. Mélodie de dingue, progression épique, ampleur à filer le vertige, on a à peine commencé l’album que l’on se prend dans la gueule une des plus belles tracks de 2014.

Mais Sebastien chante, et c’est là que l’on attend le monsieur au tournant. Habitué aux morceaux électroniques mais chauds, plein d’instruments et de rondeurs, Heat Wave étonne de prime abord. On sent que le bonhomme a été inspiré par les longs boulevards américains de Philadelphie, et s’il est bien trop facile de rattacher son nouveau disque à Drive, il est impossible de ne pas le citer, tout comme les Chromatics et autre pop vaporeuse de nuit. Boites à rythmes ralenties, synthés froids en slow motions, motifs qui se répète sous la lumièr blafarde des lampadaires, Night Life symbolise bien ce petit changement dans la musique du français. Toujours aussi émo, toujours aussi belle, avec ce chant qui flotte aux milieux des morceaux, hululant comme un fantôme. Mais aussi plus robotique, sans jamais être désincarnée (même si les premiers Cold War et Endless Summer ont du légèrement mal à faire vibrer les sensibles cordes).

La première claque, celle qui libère le disque, c’est Memory – Les Halles, qui commence sur un rythme bouffon, presque cliché, en mode groove de pacotille. Sauf que les claviers déboulent, le chant aussi, et l’on comprend le sens de tout ça, la beauté qui se superpose, et qui explose comme jamais lors des refrains. Putain, ces synthés qui s’envolent, c’est magnifique, la folie, sans parler du dernier tiers lunaire, où tout se déplie de façon ahurissante. Tu n’as pas envie de chialer à partir de 2min44 ? Cœur de salaud !

Et les mandales s’enchainent, avec un Black Light taré, qui aurait du se glisser dans la BO de NightCall, avec son refrain à frémir, et son coté new-wave ultra appuyé (et parfaitement exécuté). Encore une fois le morceau décolle dès sa moitié, et c’est à rendre dingo tout émo digne de ce nom. Et ces derniers perdront littéralement pied avec l’autre chef d’œuvre du disque, As We Sleep In a Japanese Garden, qui commence avec ses clochettes toutes guillerettes et sa voix trainante, renvoyant clairement à Happiness Lp. Tu sens poindre dès le début une mélodie tubesque, un truc qui va te casser la colonne vertébrale, mais le Schuller est un animal qui ne se laisse pas facilement attraper. Alors on navigue entre petites clochettes et voix cuttées, avant que le basculement s’opère, à partir de 3min. Et là mon bonhomme, c’est pas la petite cassure pépère. Non. C’est le moment de grâce, la musique touchée par les anges. C’est une mélodie qui explose et t’emporte avec elle. C’est des carillons qui chialent, des synthés qui démarrent en trombe. C’est même plus épique, c’est carrément une putain de charge héroïque. La conclusion la plus parfaite échouant dans tes oreilles, la cavalcade magnifique. Ramasse ton cerveau, il vient d’éclater, impossible de gérer un truc pareil.

Regrets renverra lui aussi aux tubes de la décennie précédente présents sur Happiness, mais avec ce groove funky en plus. C’est toujours autant en apesanteur, avec un Schuller insaisissable au micro, mais dieu, que c’est beau quand les refrains démarrent. Ca pourrait être un tube dantesque, une pop song à la Taylor Swift ravagée par les spectres, noyée sous 3 mètres de bétons, écrasée par une mélancolie magnifique. Imparable. En parlant de boites à rythmes et de ce coté « froid américain chromatics », on a le long Disillusion, qui rappellera un temps les instrues plus chaude croisée sur Evenfall. Ici, on tombe lentement dans un tourbillon de pianos et rythmes irréguliers, ça décontenance, mais ça passe crème.





La surprise est toujours meilleure quand on ne s’y attend pas une seconde. Un album de Schuller, on n’y pensait même pas. Il sort, en catimini total, avec une toute petite couverture médiatique, et l’on se demande si le mec, en 10ans, ne sentait pas un peu la poussière, ne sortant pas un disque complètement faisandé. Que nenni. Ce Heat Wave est sublime. Je dirais même qu’il est une des plus belles sorties de 2014. Un album bon de bout en bout, sans aucun raté (même si les pistes 2 & 3 draguent moins, elles restent plaisantes), mais surtout avec de sacrés moments sublimes. Sebastien Schuller avait l’habitude de nous flinguer la tronche, et a dans sa carrière un joli petit lot de morceaux mythiques. Mais là, il en rajoute une sacrée tripotée. Certaines tracks sont majestueuses, et il sera difficile de faire mieux qu’un Japanese Garden, un Les Halles, un Silent ou un Regrets l’année prochaine.

Le musicien revient en catimini et vient pourtant de rouler sur toute les sorties du genre cette année (désolé Seekae), et si certains lui reprocheront de s’accoquiner un peu trop à la new-wave, on répondra que le français ne s’inscrit pas du tout dans le mouvement post-drive :

Car au lieu de faire des larcins dans une ville morte à deux heures du mat’, Sebastien nous présente sa mégalopole d’une amorce de nuit, pleine de néons, jusqu’au début de matinée. Ce coté mélancolique et éthéré d’un lever de soleil, plein de brouillard, vers 5h30. Et dieu, que ce nouveau jour est beau.






Sebastien Schuller – Nightlife






Sebastien Schuller – As We Sleep In a Japanese Garden






10 morceaux – Self Released

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River Bones – Pure

Posted in Chroniques on December 8th, 2014 by Dat'


Ne vous inquiétez pas, la jeunesse va bien.



River Bones, on l’avait croisé dans ses pages il y a plus d’un an, avec un album improbable, Mort, qui sortait de nul part, perdu dans la masse gazeuse de milliers de bandcamp, mais dont le traumatisme est encore présent. Mélange improbable de trap religieuse, de mélancolie à la Burial et d’ambiant sectaire, l’album était une folie pure, un monolithe magnifique, massif et dangereux. Il y avait des écueils, des erreurs de jeunesse oui. Mais le français impressionnait en aspirant toutes ses influences, pour recracher une mélasse indescriptible. Comment définir sa musique ? Un terme seulement : prière thug.

Mais plus grand-chose depuis pile un an, et son EP footwork énervé A Greater Love. Pas un seul son estampillé River Bones, à part un side-project d’ambiant flippant. Alors, quand le bonhomme déboule sans crier gare 365 jours après sa dernière galette, on ne peut que se balancer en levant les bras de bonheur. Même si l’on va morfler dur.







On va aller droit au but, le premier morceau de ce disque est un putain de chef d’œuvre, une des tracks de l’année. River Bones a fait un vrai saut en un an, et la richesse, la profondeur de ses productions filent le vertige. Sur Unsex, tout donne la frousse. L’intro, magnifique, avec cette mélodie à chialer. Ce coté seul, perdu dans l’espace, à dériver alors que parasites et bruits blancs emplissent les tympans. Puis, c’est la déflagration. Le Footwork, cher à River Bones depuis son dernier Ep, déboule ici en hurlant, et tabasse tout ce qui bouge. Gang dans le métro, agression sonore, transe épileptique, on est pourtant toujours en train de planer car les fantômes chantent encore clairement à l’horizon. Alors tu vois les étoiles te foncer dans la gueule pendant que les anges te bercent, et c’est putain de magnifique. Ces voix qui se mettent à chanter pile à 2min, c’est la folie pure. Mais le passage à tabac ne dur qu’un temps, et le silence se fait, avec un sample mortel qui te fait penser que tu vas basculer dans la caribbean music. Un couple de minutes dans le vide, ambiant mortuaire, passage sublime, un des plus beaux moments de cette salope d’année 2014. Sérieusement, c’est quoi ce break ahurissant, beatless, qui filerait les larmes aux yeux à n’importe quel cœur de pierre ? C’est la mort, toujours, mais sereine, presque espérée. L’euthanasie après de longs mois de lutte.
Et le lyonnais n’en a pas fini avec tes esgourdes, et repart dans la violence, avec un dernier tiers sonnant comme du Mount Kimbie vs Juke, via cette mélodie en pointillé, voix en rafales et hystérie des rythmes. La conclusion furibarde fracasse la colonne. Tout est aspiré dans ce morceau : du footwork, de l’ambiant, de la musique world/religieuse, du Burial, du 2step. Et pourtant, le mélange se tient à la perfection. Mieux, on décèle les influences, mais elles sont annihilées, concassées, pour recracher d’un mélange quasi inédit. Ahurissant morceau.

Serene optera pour un traumatisme plus éthéré, lente intro renvoyant à Mort, entre prières vaudous et hiphop enfumé, avec une profondeur et des détails dans le son qui étourdissent, avant de filer vers une prière imposante mais lumineuse. Rive Bones convie toutes les religions pour un morceau mystique, Prière Thug absolue, trap de cathédrale, chute dans le gouffre. Tu écoutes ça, tu as envie de te convertir direct. Quelle religion? Aucune idée, mais croire en dieu semble tout à coup vraiment cool.

United repart sur une techno footwork pure, morceau le plus enlevé de l’EP, avec rythme soutenu et prod cauchemardesque. Là encore, le vertige est de mise, avec ses hurlements semblant sortir de manga ou films de kung fu, mais transformés ici en hurlements inhumains, en démons sortant des enfers. Certains morceaux de World’s End Girlfriend passeraient pour du Disney à coté de ce bordel sans nom. Et après la baston règlementaire, quasi épileptique, le morceau va encore s’ouvrir, doucement, avec des samples de voix prenant le contrepied du purgatoire précédent, dance émo matinée de “Love You / Love you” pitchés, pour un final oscillant entre un Phon.O sous crack et du footwork cancéreux. Tornade folle, gâteau aux mille étages, c’est usant mais jouissif, comme le plus dangereux des rollercoaster.

Après une correction pareille, il faut poser l’ambiance, et Severe, du haut de ses 9 minutes, s’en chargera. Samples en pagaille, ville fantôme d’on ne sait où qui mute graduellement en monstre sacré (flippante intro néanmoins), le morceau passera par toutes les circonvolutions, fourmillant de samples/field recording/voix non identifiées, avec une mélodie simple qui rate parfois une note pour devenir légèrement nauséeuse. On devrait se sentir bien dans ce lieu pieu, et pourtant tout tangue, tout tourne, pour fleurter avec l’angoisse totale pile à la moitié. Bien heureux sont les meurtris, ils arriveront sur une conclusion lumineuse et pacifique. On ne se passera pas ça avant d’aller au boulot, mais bordel, quelle folie.

River Bones n’est pas terroriste, et finira son Ep par un titre presque pop, le plus ouvert de ses albums surement, avec Us, balade trap en slo-motion avec chant vocodé, renvoyant autant aux derniers Burial qu’au très vieux morceau d’Alif Tree, Both Sides, mais après avoir avalé une bouteille de sirop pour la toux cul sec. C’est beau, mélancolique, et encore sacrement religieux, même si le prédicateur se prend carrément pour Future.





Commençant à être vieux, je suis impressionné par la propension qu’ont certains jeunes à tout aspirer pour recracher d’une mixture inédite. A l’instar d’un Krampf, River Bones impressionne par ses productions, par cette capacité à créer une musique référencée mais pourtant venue d’ailleurs. On sent où le français veut en venir, et l’on sait d’où il vient. Mais en plus de gérer un bon  disque, le gars arrive à porter le genre au stade supérieur.

Car le footwork a besoin de mecs comme ça, d’aventuriers bordéliques sortant un genre musical de son carcan trop âpre. Ils sont trop peu. Il y a Kuedo, oui. Et River Bones maintenant. Nécessaire pour une écoute de salon, de nuit avec le cœur crevé, et pas seulement en dansant comme un fou dans un club. Il y a une richesse hallucinante dans ce Pure, qui efface tous les défauts et (rares) erreurs de jeunesse que l’on sentait poindre sur ses précédentes productions. Des morceaux magnifiques (Unsex et Severe en premier), un Ep sans un morceau raté, et surtout, une puissance émotionnelle folle pour les amoureux de musique mystique. Ce n’est même pas du fan-service, rassurant en te servant une musique belle mais déjà entendue. Nope. River Bones va piocher partout et te sort une recette incroyable : il y a autant d’ambiant que de black metal chez River Bones. Autant d’electronica que de footwork, autant de Burial que de world music, autant de dance pute que prières fanatiques choppées dans des âshram perdus en haut d’une montagne.

Je m’enflamme ? Peut être. Mais écoute Unsex avec le cœur brisé, et revient me dire que tu n’as pas été bousculé. River Bones est perdu dans la galaxie des milliers de bandcamp, oui. Mais il vient de balancer un EP indispensable, une des meilleures sorties de l’année, c’est assuré.











5 titres – Autoprod

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Clark – Clark

Posted in Chroniques on November 28th, 2014 by Dat'


Quand il y a de l’amour, les cicatrices sont aussi jolies que des fossettes



Comme beaucoup d’artistes chez Warp, Clark a symbolisé pendant une paire d’année un sacré coup de mou dans le roaster du label. Dieu chez les dieux, Chris Clark avait aligné une demi-douzaine de disques sans faute aucune, avant de balancer un Iradelphic frustrant et des EP Fantasm Planes & Iradelphic Sessions quasiment indigents. On sentait le bonhomme sur la dangereuse pente de la pop-isation champêtre, que peu arrivent à maîtriser avec succès, résultant sur un ennui rarement illuminé par quelques morceaux fous (le majestueux Com Touch). Certes Clark nous avait rassuré avec son Feast/Beast, collection monumentale de remix enragés, entre déflagrations noise et montées épiques comme il sait si bien le faire. Mais la plupart des morceaux étaient déjà connus, et le double disque ne donnait pas vraiment d’indices sur la direction qu’allait prendre l’anglais (et malgré la sortie un Ep bien frontal, Superscope, qui était plutôt sympa bien que salement anecdotique).

L’anglais allait t’il revenir une tulipe dans les cheveux et une gratte acoustique dans les mains, ou plutôt avec l’envie de déchaîner les enfers à nouveau, après sa pause arcadienne ? Ni l’un ni l’autre. Mais oubliez le soleil d’Iradelphic, et ne cherchez pas les directions multiples d’un Totems Flare. Car ce nouveau Clark est froid, très froid. Un putain de monolithe.








Il suffit d’écouter le premier single de ce Clark pour être rassuré. Mieux, pour se sentir pousser des ailes. Parce que Winter Linn est plus qu’un tube. C’est une charge épique, folle, violente, presque abusée. Une ode dance kitch défoncée par des hurlements de synthés quasi humains. Une force brute, qui tourne dans tous les sens, qui n’arrête pas d’imploser, attaque militaire contre une mélodie belle comme la mort. Car oui, chez Clark, ce qui est beau, c’est la mélodie. Qui explose, qui se fait démolir par des nappes monstrueuses. Anges tabassés, en sang, mais sortant toujours vainqueurs du conflit. C’est aussi le morceau au rythme souvent binaire, aplat Techno que l’on va retrouver tout le long de ce Clark LP. Difficile de décortiquer le morceau tant chaque seconde est majeure, tant le tout est fou. Growls Garden atone, le monde qui pleure, Armin Van Buuren se faisant sodomiser dans un trou noir.

Unfurla tabasse encore plus, avec une atmosphère plus enjouée, autre digression imparable d’un LP qui ne s’embarrasse pas et tape dans le dur. Sans hésiter, sans discontinuer, quitte à sonner dancefloor au possible. Naïf ce morceau ? Pas faux. Le pied techno sourd peut étonner, Clark ayant habitué à plus de fractures. Mais loin est l’ère de la banale techno. Tu sens les sirènes poindre, les barrissements à l’horizon ? Et c’est à partir d’une fracture brutale, pourtant mélodique, que les choses s’emballent et frôlent le passage à tabac. Clark fait des tubes ? Putain, on attendait que ça !

L’anglais confirme à qui veut la velléité techno de son disque, avec Strenght Through Fragility, traversé de bout en bout par un métronome régulier. Sauf qu’ici, point de déchirure, pas de cavalcade, d’explosion hors norme. Ici, c’est un piano tout simple, à chialer, qui se faufile entre grondements et battements de cœur. Morceau tout simple, perle noir dans un bordel sans non, fresque complètement anémiée. C’est pourtant l’une des plus belles tracks du disque, un petit chuchotement fragile balayé par une vague noise finale. On aurait voulu ça plus long, certes. Ça n’a pas la force brute d’un Night Knuckles non plus, évidemment. C’est pourtant magnifique, indispensable sur l’album.

Et plus on avance, plus l’on se dit que Clark épouse une forme assez similaire à Turning Dragon. Pas dans la sauvagerie, rassurez vos tympans. Mais dans cette façon de présenter un album au départ très direct, bien techno, assez “straightforward” (même si les surprises sont légions), pour dériver petit à petit vers quelque chose de plus complexe et expérimental : sur-violence avec Sodium Trimmers, aka soirée club avec des vampires, ou Banjo qui explose dans tous les sens, massacre tout ce qui bouge à coup de lasers incontrôlés et mélodie quasi-satanique. Du satanisme dans l’air, il y en aura avec Snowbird brisure du disque, basculement vers des territoires plus accidentés. Ici, on frôle l’ambiant, mais en mode ville vide peuplée de machines géantes renversant les buildings. On pense au remix de Kuedo par Clark et ses androids pachydermiques, sauf que le morceau est ici traversé par des voix d’anges psychotiques et une mélodie trop candide pour être honnête. Malaise et peur, un peu. Mi-morceau magnifique avec cette nappe folle qui déboule et emporte le tout dans une steppe glacée à perte de vue, le morceau passe de la comptine flippante, du manège détraqué aux divagation d’un homme perdu en haute montagne, calme face à la mort.





Mais Clark n’a rien d’un dépressif louche, et sait sortir des feux d’artifices dès qu’il le faut. Pour cajoler nos cœurs. Nous foutre des papillons dans le ventre. Mais des putains de papillons mortels. The Grit In the Pearl est l’autre grand morceau du disque, et nous fait dire, après des années à ruminer Iradelphic que le Clark dont nous étions amoureux est revenu. Mélodie de folie, sublime, à chialer sa mère. Synthés lunaires, truc qui se chante sous la douche en hurlant. Rythme en retrait, que tu devines ravageurs sous peu. Déjà, c’est beau. Mais quand tout s’emballe, que tout hurle, que tout cogne, que tout s’envole c’est parfait. Car à 1min40, c’est ton palpitant qui se fait la malle. Bouge toi, c’est ta colonne qu’on assassine !! Tour de force,  va danser avec les morts, et pense à eux en tournant sur toi même. Donnez moi des nuits blanches, que je puisse sauter ad vitam eternam sur ce truc. Alors comme d’hab avec Clark, tout se casse, tout se nécrose, tout meurt, s’étouffe et s’arrache. Un peu trop tôt, clairement. C’est mauvais pour le cerveau, oui, mais c’est jouissif.

Beacon, Clark 100% pur jus avec arpèges de synthés en mode tsunami, qui engloutissent tout de façon graduelle avant de violer le spectre sonore, puis de partir en vrille cristalline en fin de course (la bonus track japonaise Treat semble presque en servir une version épurée, ralentie et lumineuse, bien que pas indispensable).

Bon, faudrait peut être un ou deux morceaux nul ? Non mec, il y a Silvered Iris qui se ramène, dance musique cancéreuse, monstruosité sortie d’un Totems Flare, mais avec un moignon en prime. Bruits de pas dans la neige, mélodie nauséeuse, rythme métrique au départ, puis rapidement flingué, on ne se sent pas à l’aise. Pas à l’aise à cause de la mélodie, à cause des accélérations soudaine, à cause des sons employés. Puis, pile au milieu, c’est le traumatisme, la gerbe après la bière de trop, avec la pièce qui tourne, la vue qui se déforme, le cerveau qui n’en peut plus de la vie. Hiphop déconnant et malade, techno qui s’emballe et se prend les pieds dans le tapis avant de vomir ses tripes. Ce morceau, c’est le Zui Quan, la boxe de l’homme ivre. Tu ne comprends rien, ça tourne dans tous les sens, tu te fous presque un peu de sa gueule. Sauf qu’à la fin, tu n’as pas vu la mandale venir, et tu gis la tête en sang dans le caniveau.

Bon, et vu que tu viens de prendre une dérouillée, tu préfères rendre les armes. Manque de pot, une dernière correction déboule, et pour le coup, avec There Is A distance In You, ce n’est pas la petite baston de maternelle. C’est le Viêtnam mon bonhomme. C’est la pluie de feu sur tes oreilles. L’Armageddon. En plus, tu le vois venir de loin, ce morceau. 7minutes, fin d’album, tu sens le bordel qui s’annonce. Et Clark ne s’embarrasse même pas 1 seconde, il te lance dès l’entame, après un écho de cathédrale, la meilleure mélodie de l’album. Dès la 25eme seconde, tu te dis “ah ouai, il va être sérieux sur ce morceau”. Les claviers sont fous, c’est le truc que tu chantes en pleurant, c’est la mélodie que tu cherches depuis ta naissance, coincé dans ta consigne automatique. 1min30, bassline qui déboule, tonnerre qui gronde “ah ok, vraiment vraiment sérieux…”. Digressions enfantines, on attend un peu, avant de finalement lâcher “bordel, il est sérieux là ???” à 2min30, quand le beat pilonne, quand les nappes hurlent, quand tout fonce vers les astres. C’est la déraison, l’angoisse, la beauté folle. Et c’est quand ton corps a trop dansé que Clark, encore une fois, invoque la nécrose, l’hiver noir, le désastre. Nappes qui hurlent, grondent et barrissent. Armée d’éléphants zombies soufflants dans leurs trompes, paquebot géant qui démolit les ports. Oh, la mélodie subsiste dans ce marasme, et c’est ça le plus beau. Toi, tu te retrouves bouche bée, sur le cul après une chevauchée pareille, avec les oreilles qui sifflent et le cœur qui bat la chamade. Et ce n’est pas dans Everlane que tu trouveras la rédemption. Juste un peu de réconfort peut être, avec ce bien bel écrin ambiant et des anges enfin pacifiques, perdus dans le brouillard.





Tu me vois venir, de très loin. Moi, fan boy de Clark, annoncer tout de go que cet album est dingue, qu’il défonce tout, qu’il est la sortie majeure de Warp cette année. Et tu auras raison, je pense cela mot pour mot. Mais en plus, Clark se paie le loisir, peut être pour la première fois, de sortir un LP réussi de bout en bout. Pas un raté, pas une merde, pas un morceau fainéant. Même les pièces ambiants sont belles comme tout, loin d’être redondantes. Certes, il n’y avait pas de merde dans un Turning Dragon, un Totems Flare, un Body Riddle. Mais il y avait quelques écueils, des morceaux moins engageants, des pistes qui s’écoutaient sans réel plaisir. Sur ce Clark LP, tout est bon. Tout s’enchaine. Et la cohérence est là. Maximum.

L’album est glacé, l’album est techno, l’album est parcouru par la dépression. Il y a de la neige sur tous les morceaux. Ça dégouline de solitude, ça pue le sexe mort. C’est une longue cavalcade qui ne s’arrête jamais, et qui empile les morceaux cultes (Winter Linn, Strenght Through Fragility, The Grit in the Pearl, There’s a distance in you font parti des meilleures compositions de Clark, sans hésitation aucune). Certes, l’anglais nous ressort encore et toujours son gimmick de “tuer” les morceaux dans leurs deux tiers, de dynamiter à coup de nécroses une track pourtant folle. Et si l’on aurait aimer entendre une The Grit in the Pearl s’étirer plus longuement (un edit club à venir ?) comment résister à la coulée de lave magnifique détruisant Distance In You ?

Clark est fort, Clark réassure sa suprématie, Clark a, avec un album surprise, encore tout gagné cette année.





Clark – Winter Linn






Clark – The Grit In the Pearl






14 titres – Warp / Beat

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Dorian Concept – Joined Ends

Posted in Chroniques on November 7th, 2014 by Dat'


Her Pears Taste Like Ears



On a tous croisé dans notre vie un gars sympa, un type gentil. Celui qui est au fond de la classe, mais qui ne fout pas le bordel. Il est discret, un peu rêveur, pas assez charismatique pour être le jeune loup ni assez brillant pour être le binoclard du premier rang. Il passe presque inaperçu durant l’année, évitant questions pièges et mises en avant. Au boulot, c’est le mec planqué derrière son ordinateur, à ne jamais faire de vague, un peu suiveur, mais toujours là pour rendre service ou faire une heure supplémentaire histoire de te dépanner. Tu ne ferras pas ta vie avec, tu ne l’inviteras que peu lors de tes soirées délurées, et pourtant, à chaque fois que tu le côtoies, tu passes un moment vraiment agréable, à rêvasser en regardant le ciel, avec des silences dans la discussion, pourtant jamais gênant. Un mec normal.

Dorian Concept, c’est un peu ce type-là, qui avait sorti une galette en 2009, gentille digression bass music qui sortait en pleine bourre “nu-abstract”  avec les Nosaj Thing, Depth Affect ou Flying Lotus, qui se sont depuis réfugiés dans d’autres genres. When Planets Explode  était un bon disque, qui n’avait rien de spécial, qui pouvait presque être qualifié de suiveur, mais qui déroulait une recette sacrement réussie et maîtrisée, avec un axe fort sur les mélodies (ce qui est toujours une bonne chose). Le musicien a depuis opéré une quasi-disparition à part quelques éparses EP, pour revenir sans prévenir avec un album qui semble à mille lieux de son prédécesseur, en mode brochette de douceurs.







Dorian Concept ne va quasiment plus s’embarrasser avec ce fameux nu-abstract qui sonne désormais plutôt poussiéreux. L’album sera blanc, lumineux, optimiste. L’introduction The Sky Opposite, drôlement belle, suffirait pour résumer la direction prise par ce nouveau LP : Un croisement entre Kettel, Baths et un Run Into Flowers de M83, de la mélodie qui s’emballe et des synthés guillerets, une approche quasiment pop d’une tirade electronica à sourires. C’est léger, beau comme tout, ça rappelle autant Gooom Records que les teen movies américains passés en slow motion.

Et toute la première partie de disque ne se déparaitra jamais de cette légèreté ô combien nécessaire pour nos palpitants trop souvent enchainés. Ann River, Mn est un pur diamant de pop bricolée, d’electronica dansante, avec petites voix cachées et mélodie entrainante. Manège cassé et nostalgique, plein de couleurs chaudes et de chants guillerets, on frôle le petit tube de chambre, le morceau que l’on va écouter le matin pour se remettre sur pied, à chercher l’espoir perdu dans un quotidien morne et décérébré. Comme si Mûm se décidait de jouer sur la répétition plus que la chanson, ce deuxième morceau commencera une fresque heureuse, entre longs morceaux insouciants (Mint), cavalcades ouatées (Nest Nest) et abstract heureux à la Bibio (l’euphorique et imparable Clap Trap 4, qui rappelle Ambivalence Avenue, mais de façon plus rieuse).

Sur la première moitié du disque, seul Draft Culture donne des coups de latte et sort du carcan “electro joviale”, malgré une introduction toute champêtre. Le morceau mute rapidement en bombinette dancefloor un peu sale, à coup de bassline bien grondante et mélodie de milieu de nuit. Oui, la mélodie papillons-dans-le-ventre sera bien de la partie, et les oiseaux tournent toujours autour des têtes, mais ici, l’objectif est plus de fracasser des nuques plutôt que de courir dans les hautes herbes. Morceau de folie en constante mutation, un des highlights du disque, sandwich club abritant un cœur de guimauve dégoulinant et sucré.




Mais alors, est-ce que Dorian Concept a abandonné toute velléité abstract / bass music ? Pas tant que ça. Ça balance du son bien massif, des instrues qui claquent, mais cette fois, on est dans le bigger than life, dans la mélodie rouleau-compresseur, dans l’émotion quasi trop présente. Mais quand c’est bien fait, pas besoin de bouder son plaisir. The Few est aussi dans l’imparable, dans le tube, dans l’entêtant, là encore proche des exercices de Bibio. Wrong Rythm Studies, bonus track japonaise bizarrement placée en milieu d’album, ressort les anciens exercices de Dorian, avec une bass music plus agressive et saccadée, bien plus portée sur le beat que la mélopée à chanter sous la douche, et fait du bien entre deux fresques sucrées. Trophies, qui commence comme un Clark cassé, fait aussi plaisir dans sa progression, plus calme mais tout aussi syncopée. Les apparats sont plus électroniques, moins pop, plus directs. Longue montée d’arpèges qui s’enroulent à n’en plus finir, c’est beau, et c’est dans cet exercice que Joined Ends excelle.

Et après le morceau uptempo de la première moitié du disque, Dorian Concept nous réserve une autre petite surprise avec 11.04.2012, morceau house fantomatique superbe, mélodie attrape cœur bouffée par le brouillard, soirée en club passée avec l’oreille collé au mur de béton, à tenter d’écouter ce qui se passe dans la salle voisine. Synthé qui pleure et track qui ne démarrera jamais, laissant les fantômes chialer leur peine en buvant des shots, aveuglés par de tristes stroboscopes. Peine de vit et vies cassées, on ne savait pas Dorian Concept capable de voler les cœurs avec de la house simplissime, mais belle comme jamais.

Le disque finira sur une tirade ambiant mélodique portant bien son nom, Tried (Now Tired), reprenant les gimmicks ensoleillés de l’album, mais sur un mode plus las et lent, légèrement à bout de souffle, même si épique (avec un petit clin d’œil à Secret Of Mana peut-être ?)




Oh, clairement, cet album (au bien joli titre) n’invente rien. On est dans l’accessible, dans le gimmick mélodique qui marche à tous les coups, dans la progression sucrée frôlant le fan-service. Joined Ends est facile, assimilable dès la première écoute, presque sans réelle surprise. Et pourtant, que l’écoute est belle. Le plaisir est simple, direct, dans fioriture. Comme depuis des années, Ninja Tune n’est plus dans l’innovation, mais sort encore un disque sympa, lumineux, réussi de bout en bout. On n’est pas là pour marquer l’histoire, loin de là. Mais nous coller quelques papillons dans le ventre c’est certain, et c’est déjà ça.














13 titres – Ninja Tune / Beat Records

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CUM ON MY SELECTOR 18 : Rival Consoles, Lofty305, Andy Stott, Sonny Digital, LFO, Pachanga Boys, Roots Panorama, Zennor, NOS & Ademo

Posted in Chroniques on October 17th, 2014 by Dat'


J’ai regardé le passé en me disant



Lofty305 x Torus – Echosexxx

Il y a parfois des évidences. Un objet total, un concept qui brille dans toutes ses grandes largeurs. La track, parfaite, spleen absolu chuinté par Lofty305 sur une prod folle de Torus. On ne comprend pas trop ce que murmure le rappeur de Miami, qui se fait encore plus abstrait qu’avec Ryan Hemsworth. Mais on assiste bien à une noyade dans des nappes au moins aussi belles que les plus belle nappes de Clams Casino. Vent, bruit blanc et mélancolie exacerbée, c’est validé instantanement. Et puis il y la vidéo, réalisée par Mr Clement Oberto, qui avait déjà fracturé des rétines avec son film pour Plaid. Le clip, avec des néons, des filles belles, des néons, des belles filles, des néons. Des filles invulnérables, avec leurs blazes parfaitement mis en évidence, histoire de présenter les combattantes façon Killer 7 ouaté. MAIS EN PLUS IL Y A MON CHAT DANS CETTE VIDEO. PAS LE CHAT ETRANGE DU DEBUT MAIS LE SUPER CHAT GRIS VERS LA FIN QUI EST MAGNIFIQUE. Des néons, des divinités et le plus beau chat du monde : nickel.






Andy Stott – Violence

J’ai un rapport ambivalent avec Andy Stott : traumatisé par son Passed Me By. Franchement convaincu par son We Say Together. Clairement déçu par son Luxury Problems. Fortement hypnotisé par son split Drop The Vowels. Difficile de savoir à quoi s’attendre avec le bonhomme, et c’est clairement son coté “club englué puis dilué sous 3 mètres de béton” qui m’intéresse le plus. Et pourtant, avec Violence, qui se démarque de ce modèle, je me suis pris une vraie claque. Un morceau de fou, tour de force pachydermique, slow empoisonné puant la dépression. On appréciera évidemment la dimension du morceau, qui semble s’ébattre en 3D dans nos oreilles, avec des respirations hallucinantes. On sera marqué par le passage à tabac du milieu de track, indescriptible. Mais la vraie mandale du titre, c’est ce gimmick mélodique, cette zébrure cristalline qui interviendra tout le long du morceau, cette échappée fragile et brève qui flingue le palpitant, cette mini seconde répétée ad nauseam, pouvant se targuer d’être la plus belle seconde de musique entendue en 2014.






Rival Consoles – Helios

Oh, un revenant ! Revoilà Rival Consoles, qui m’a marqué pour l’éternité avec son album IO, façon Aphex Twin de club, mélancolique de dancefloor, grand écart parfait entre Analords et Tepr (ça existe). Un LP immanquable pour les amateurs de mélodies belles à crever écharpées par des beats de bucherons. Le mec était revenu en 2011, mais la déception fut grande, son 2eme album était malheureusement bien plus terne. Alors on oublie, puis on retombe au hasard sur un de ses anciens sons, nous poussant à voir ce que Rival Consoles devient aujourd’hui : joie, il sort un nouvel Ep. Et l’anglais ne semble finalement pas avoir perdu de sa superbe, avec un sacré morceau single, Helios, marche techno rêveuse partant graduellement dans une montée épique, à base de cascade de synthés et tourbillons de mélodies. Ca n’invente pas la poudre, mais inutile de bouder son plaisir, qu’importe le flacon pourvu que l’ivresse te fasse voler au milieu d’une pluie d’étoiles, les bras bien écartées au milieu du club. Bonheur.






Pachanga Boys – Time

Ok ok, ce n’est pas nouveau, mais je ne connaissais pas. Et vu les chiffres sur youtube, je devais être coincé dans un sous-marin. Les morceaux techno-hédonistes, d’habitude, c’est loin d’être mon truc. D’autant plus quand le tout est en mode hippies qui se dandinent en se matant dans le reflet de l’objectif. Mais putain que ce Time est beau. C’est 15 minutes de bonheur, de beauté pure, d’abandon. C’est la solitude, les sentiments et la déraison. C’est des claviers de folie, émo en diable, avec voix d’anges en filigrane. C’est une mélodie à crever, c’est une progression tout en douceur, à pas de chats, matinée de drogue et d’amour fou. A 6min25, tu sais que ce morceau est un des morceaux de ta vie. Ce Time, ce n’est pas faire la fête comme des cons, oh non. C’est danser avec ton âme sœur, le visage bien calé sur son épaule, à sentir l’odeur de ses cheveux. Une odeur que tu reconnaitrais entre mille, qui te fait sauter le cœur à chaque fois. Mon père m’a dit un jour “si tu n’apprécies plus l’odeur de ta femme, si tu es incommodé, c’est que tu ne l’aime plus”. Alors toi, tu te perds dans le creux de son cou en espérant que ce moment n’arrive jamais. Tu abandonnes, et tu danses le cerveau embué, brouillé par la peur de ce qu’il se passera juste après. Enlacés, pas de futur, pas de projet, surtout pas… Juste deux âmes tristes dans une brève bulle de joie, alors que la rave crève le ciel à 200 mètres de là.






Roots Panorama – Mars

Pas besoin de se creuser la tête pour trouver de beaux morceaux. Pas de révolution pour Mars, juste un morceau de techno parfait, entre divagations émo à la Rone et optimisme à la Plaid. Plaisir tout simple de milieu de nuit, pour une track que l’on aimerait légèrement plus longue, histoire de perdre toute notion de temps. Ces Roots Panorama sont pour moi complètements inconnus, et semblent n’avoir sorti que 2 Ep en 4 ans, ce qui est bien frustre. Mais google n’a pas inventé les alertes pour rien, on va pouvoir suivre chaque future sortie de ces bonhommes à la trace.






Zennor – Tin

Avec une oreille distraite, on pense avoir une track house normale dans les esgourdes, avant de se rendre compte de la mutation constante de cette dernière. Tin, c’est des synthés qui apparaissent sans crier gare, des oscillations hypnotiques, des rythmes s’apparentant plus à des pulsations cardiaques qu’à un pied techno. C’est un tube fractionné, une mandale club en mille morceaux, un morceau d’impasse crade. Les synthés qui interviennent come la marée, en flux et reflux, engloutissant la structure squelettique du tout. C’est futuriste et pourtant étrangement organique, et c’est, malgré sa courte durée, le highlight de l’Ep fraichement sorti de Zennor. Hâte d’entendre la suite des hostilités.






Sonny Digital – I’m The Man

Tu te lèves de ton canapé, l’haleine empestant la bière ou la clope, selon tes vices. La pièce tourne autour de toi, tu es encore défoncé de la veille. Dans la tête des flashs, de l’excès, tu t’es bien amusé. Pourtant la demoiselle de ta vie vient de disparaître. Alors tu rumines, tu te sens triste, même si tu as une vie de fou. C’est un peu ce que dit Drake continuellement dans ses morceaux, sur des super prods bien émo. Et c’est bien souvent très très bien. Sauf que là, il y a Sonny Digital, qui déboule sans prévenir, et qui lâche un morceau qui enterre presque tout ce que peut faire le canadien. Prod incroyable, super mélancolique, longue, expérimentale et super smooth dans le même mouvement (ce solo de gratte imparable), avec un refrain à tomber. Ca va faire papillonner bien des colonnes vertébrales. Ce I’m The Man, c’est autant le tube de l’année que la complainte suicidaire d’un alcoolo au cœur brisé. Le grand écart parfait.






N.O.S ft Ademo – Je Vis Je Visser

Des mecs qui crachent leur neurasthénie sur des instrues lancinantes, on connaît bien le système. Sauf que le prodo de N.O.S & Ademo te sort l’une des meilleures prods entendue cette année dans le rap français. Claviers lunaires, beatless dans ses grandes lignes, avec quelques rythmes spartiates, histoire de retourner le couteau dans la plaie, et de magnifier l’effet du bordel. La description du spleen est clinique, sincère, réaliste. Un jour sans fin, l’ennui est cyclique, un putain de tour de force par des mecs que je ne connaissais pas. On se demande presque comment un morceau aussi abouti peut sortir dans l’indifférence générale, alors qu’il roule sur la majorité de ce que l’on peut entendre dans les bagnoles en ce moment. Equilibre tenu et ténu entre rap 100% fr et élucubrations américaines embrumées, tu le chantes sous ta douche et tu l’écoutes en rentrant chez toi, en pleine nuit, le casque vissé sur les oreilles. Le crew PNL semble préparer quelque chose pour la fin de l’année (ça commence avec Gala Gala), et dieu, si c’est de ce niveau, ça risque de talocher bien des mâchoires. Continuez de vomir votre solitude après deux bouteilles les mecs, ce morceau tabasse.






LFO – Butterslut

Les RIP et compagnie, ce n’est pas vraiment mon truc. Mais quand un mec que l’on a écouté pendant la plus grande partie de sa vie disparaît, cela fait forcément un pincement au cœur. On ne va pas refaire l’histoire de LFO, de son importance folle pour beaucoup de gens ou du clip de Freak, dément. Voir de son taff hallucinant sur Homogenic, évidemment. Juste envie de claquer un morceau dans le Selector, qui m’est revenu directement en mémoire en apprenant la nouvelle. Butterslut, rouleau compresseur en souvenir d’adolescence, morceau d’une violence folle, Face B méconnue de Mark Bell, qui donne un petit coup du vieux certes, mais qui n’est pourtant pas démodée, et qui sonne toujours d’actualité, surement à jamais. Au final, la seule vraie malédiction de vieillir, c’est bien de voir petit à petit les gens disparaître, et cela de plus en plus régulièrement.






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Aphex Twin – Syro

Posted in Chroniques on September 29th, 2014 by Dat'


La grande bouffe



Nous y voilà. 8 ans après un des albums de ma vie, et 6 ans après deux EP énigmatiques, Aphex Twin revient aux affaires. Sincèrement, ce retour me semblait encore plus ubuesque que le nouvel album de Portishead à l’époque (mais moins que celui de Faith No More). Aphex Twin, c’est évidemment le traumatisme musical de mon adolescence, en apothéose à la sortie du RDJ LP puis de Drukqs, objet mystique que j’ai mis des années à décrypter, à retourner dans tous les sens, à écouter encore aujourd’hui. Aphex Twin, c’est évidemment la tête de gondole de l’electronica, le messie de l’Idm, la caution bon gout. On a érigé en standard ses albums sur Warp, ses clips mythiques, ses interviews cultes. Depuis son retour annoncé, à base d’une promo habile (et légitime, pourquoi railler un label et un musicien, de talent, qui tentent de mettre tous les chances de leur coté pour gagner du fric et se remplir les poches ? Si faire de l’IDM interdit à ses acteurs de se payer des putes et nager dans une pluie d’oseille, quel est l’intérêt d’en faire…), on parle de Drukqs, on parle de Syro, on parle de renaissance, on parle de mythe.

Mais on ne parle pas des Analords. Et c’est quelques temps après écoute à l’époque, que je me suis rendu compte d’une chose : son Chosen Lords est surement mon disque préféré du type. Celui que j’ai le plus écouté aussi. Plus jeune, avant ce disque, c’était le chaos, le duel mélodico-drill’n’bass qui me flinguait l’échine. L’impression de me retrouver devant des cathédrales magnifiques, que je ne comprenais pas forcément, l’émotion dans le conflit. Puis Chosen Lords est arrivé, avec ses morceaux dépouillés, et surtout ses mélodies hallucinantes. Plus de besoin d’excavations torturées, on était dans l’émotion pure, brute, presque régressive, avec des morceaux simples, parfois club (Pwsteal. Ldpinch.D, mon morceau préféré d’Aphex Twin, bizarrement, combinant à la perfection l’envie de pleurer et l’envie de danser), avec une triplette finale de morceaux surclassant tout ce que j’avais pu entendre du musicien jusqu’à lors. J’avais enfin compris, après dix ans d’écoutes intensives, que ce qui me plaisait chez Aphex Twin, ce n’était pas la complexité de sa musique, mais bien la simplicité cristalline de ses mélodies. Même dans un maelstrom comme Mt Saint Michel Mix…, ce n’était au final pas l’hystérie qui était fascinante, mais bien cette mélopée qui pouvait se chanter sous la douche, tube pop candido-dépressif plus beau que tout.

Il y avait les mêmes bases chez The Tuss, mais pas la même magie,  malgré des tracks cultes. Alors quand Syro fut révélé, que les premiers échos parlaient d’un disque assez proche d’Analords, avec des morceaux “simples”, Aphex parlant lui même d’un disque straightforward avec des compositions loin de ses déflagrations expérimentales, je me suis frotter les mains jusqu’à en faire saigner les paumes.








Sur Syro, j’avais envie d’entendre de la chanson qui me fait chialer. Des tranchées rythmiques flamboyantes, du Vordhosbn, du Peek 824545201 ou du Mt Saint Michel 2.0 (mes autres track vénérées d’Aphex), de la mélancolie, une mini dose de putasserie, des explosions bruitistes, des claviers sortant de nul part. Un disque vivant. Car les disques d’Aphex sont des disques vivants. Et c’était bien parti pour me draguer les poils de cul. Car les morceaux que l’on connaissait depuis des années, semblaient, malgré les enregistrements dégueulasses, bien remplir leur office. Les Metz Track et Manchester Track semblaient réunir tout ce que j’aime chez Aphex.

XMAS_EVET10 (Thanaton3 Mix), anciennement Metz, est magnifique. Mélodie à mourir, lente progression, et une richesse à filer le vertige. Un mille feuille sonore improbable, des détails par centaines, des motifs perlant avec une grâce folle (le combo voix + claviers à 2min45, que l’on ne retrouvera plus, est un des plus beaux moments du disque). Un morceau qui se déplie pendant dix minutes, sans jamais répéter les mêmes motifs, tout en gardant une cohérence extrême, coulée de lave avançant engloutissant tout sur son passage. Un diamant, malgré une conclusion superflue.

Même constant pour Minipops 67 (Source Field Mix), ex-Manchester, condensant tout ce que l’on connaît chez Aphex. Ce rythme et ces voix nauséeuses de Windowlicker, les claviers pute de Fenix Funk, les mélodies éthérées à la On, le coté goguenard de beaucoup de ses prods. C’est beau, efficace, dansant, là encore riche à en crever. Le morceau est limpide, facile à écouter, et pourtant, aucun pattern, aucun motif ne se répète, ne sera entendu deux fois. Une mutation sans régression, un paysage qui se déplie, sans espoir de retour.

Ce parti pris de Syro, de ne jamais nous faire revivre les mêmes motifs, rejetant toute notion de chorus, refrain, structure, construction par séquences, est assez impressionnant. C’est même ce qui rend les morceaux les plus directs de Syro comme les plus réussis. Les deux premiers cités donc, mais aussi PAPAT4, plus belle pièce de l’album, et pouvant se classer aisément dans les plus belles tirades crachées par l’anglais. L’ex Singapore Track est exactement ce que je voulais entendre sur ce nouveau disque. Une putain de mélodie, belle comme la mort, pleurée par un synthé d’une beauté et d’une teinte incroyable. Le rythme est étonnement oldschool, simple drum’n’bass loin des attentats d’antan, et accompagne simplement une litanie candide et belle comme tout. Là encore, le morceau, pourtant simple, mute constamment, ne se répète jamais vraiment, car même si le synthé principal reviendra, cela ne sera jamais dans la même configuration que dans la minute précédente. Un tube, un diamant émo, un bordel rétro, un morceau qui te renverse la tête en arrière en te tirant par les cheveux, t’oblige à ouvrir la bouche, pour y déverser des bocaux de lépidoptères par centaines. Avale, mâche, digère : ça y est, tu as des putains de papillons dans le ventre.

Même combat pour 4 bit 9d api+e+6, morceau tout en retenue, à rapprocher des Analords, avec un rythme bien funky, et une mélodie encore une fois complètement dingo. A 2min20, tu auras le passage le plus funky de l’année, ça tabasse, c’est tout beau et ça te donne envie de te déhancher dans une boite de province. C’est peut être le seul gimmick qui reviendra deux fois dans l’exact même forme, dans tout Syro. Et c’est très bien, vu que c’est peut être les meilleurs 30 secondes de l’album. Entre les deux, passage ambiant émotion bien Warpien.

Dans cette histoire de titres directs, il y a même 180db_, ânerie Aphexienne qui ne semble avoir aucun sens. Sorte de rejeton façon Mr Oizo flingué au rohypnol, (on attend presque des « bruce Willis is Dead » au milieu du morceau…), le titre fait tourner ad nauseam un gimmick club crétin, qui pourrait nous donner envie de sortir MDMA et glowsticks, si le tout n’était pas parasité par des sirènes malades, des claviers déréglés et un vrai malaise général. En écoutant ce morceau, tu as un peu l’impression de voir une pub i-phone à la mi-temps d’un match de foot. Sauf que la nana qui tient le téléphone à 800 euros a des moignons, doublé d’un cancer avec tumeurs apparentes. Banger en phase terminale, tube de stade sous chimio, c’est chelou en diable, mais pas désagréable.





Malgré tout, Syro est malade, et un problème le gangrène. C’est d’ailleurs ce qui fait la force de certains des morceaux (l’évolution constante) qui en tue d’autres. Si les traits de génie sont bien là, si la folie est là aussi, Aphex Twin semble vouloir trop en faire, accouchant de morceaux ultra frustrants. Ce phénomène est parfaitement cristallisé par la bonus track japonaise, MARCHROMT30A edit 2b 96. La mélodie est sublime, parfaite, Aphex Twin t’es au top, je me masturbe sur tes synthés parfaits, et j’éjacule sans discontinuer. Le chant au vocodeur tabasse, ça frôle la chanson de l’année, single imparable. Mais POURQUOI ne pas tranquillement développer son morceau autour de la mélodie, façon Analords ? Pourquoi choisir de tout casser, de balancer des sonorités toutes moches, des gimmicks quasi-aléatoires qui, loin de mettre en valeur le squelette de base, l’enlaidit au maximum ? Je ne peste pas contre le chaos, car c’est bien les velléités guerrières d’Aphex Twin qui sublimait les mélodies (Vordhosbn ou Mt Saint Michel pour les citer à nouveau). Mais ici, la violence est dans la souillure, le parasitage d’une mélopée folle. Que l’on retrouvera abimée, désossée, dénaturée par des effets de style ultra superflus. On pensait partir sur l’un des tous meilleurs morceaux de l’anglais, et l’on se retrouve devant une ébauche de chef d’œuvre massacrée à coup de couteaux.

Pourquoi balancer un CIRCLONT14 (Shrymoming Mix), et le lézarder de bruits tous moches, sans jamais le bordel respirer (et dieu sait si le morceau méritait de ne pas mourir étouffé) ? La même pour Syro u473t8+e (Piezoluminescence Mix), qui recèle de tellement de belles choses, qui, en plus de se faire défoncer par tous les orifices, ne reviendront jamais nous faire un signe de main après leur premier passage. Même pas une deuxième fois, laisse tomber, la beauté est passée à toute vitesse, j’espère que tu as eu le temps de prendre une photo pour en profiter en rentrant chez toi, d’humeur lasse. Sans parler d’un Produk 29 qui ne démarrera qu’en fin de course, pour un passage de ligne d’arrivée bien désappointant.

Et c’est comme ça pour bien des morceaux, frustrants, riches mais lourds, te ravissant pendant 10 secondes avant de te laisser complètement sur le carreau. Le seul morceau bordélique à s’en sortir avec les honneurs, c’est CIRCLONT6A (Syrobonkus Mix), fascinant lui aussi dans sa constante fuite en avant, et qui, malgré quelques choix sacrement moches, arrive à nous foutre des taloches une demi douzaine de fois en à peine 6 minutes (la mélodie épique à partir de la 1er minute, suivi de la montée émo à filer la chair de poule, la guitare tubesque ouvrant la 3ème minute, le tunnel aux basses pachydermiques précédant la 4ème minute, puis l’ouverture finale cristalline). Un vrai coup de maitre, une fresque ahurissante, qui se pose à coté des meilleures réalisations de l’anglais.





On se retrouve au final avec un album multipliant les tours de force, mais avec un sentiment de frustration fort. Oui, il y a de beaux moments, et pourtant, ça sonne parfois forcé. Certes, Aisatsana est une conclusion lumineuse, optimiste, salutaire après un maelstrom pareil.

Mais on sent qu’Aphex avait devant lui les pièces d’un puzzle parfait devant les yeux, sans jamais avoir réussi à le compléter de la meilleure façon possible. Trop de morceaux coupent l’herbe sous le pied, trop de tracks proposent des moments de pure folie qui n’apparaissent que quelques secondes avant de disparaître à jamais. Les meilleurs morceaux étaient effectivement ceux déjà dévoilés pendant les lives d’Aphex (si l’on excepte CIRCLONT4A), et rien, vraiment rien, dans ce Syro n’égale ce que l’on a pu entendre dans les meilleurs moments de Chosen Lords, dernière galette en date.

Les mélodies ne sont plus libres, elles ne se chantent plus, elles n’ont désormais plus le temps de briller. Il faut prendre sa pelle, son pied de biche, et aller au turbin histoire de grappiller quelques notes, au risque de s’essouffler et de rebrousser chemin. Je ne parle pas de difficulté d’écoute, car Syro est surement le LP le plus simple à écouter d’Aphex. Sauf qu’auparavant, affronter le maelstrom en valait la chandelle, car on tombait sur de vrais trésors. Ici, c’est braver la tempête pour seulement récolter quelques piécettes. Tout pirate de ce nom préfèrera se saouler dans une taverne en chantant des vieux classiques a tue tête, plutôt que de partir sur une aventure pas réellement remunératrice (oui, un Every Day, un Vordhosbn ou un Crying in Your Face, ça se chante).

Syro est un album solide et plaisant, mais ne possède ni la fragile beauté hypnotique d’un Chosen Lords, ni la richesse ahurissante d’un Drukqs, ni les émotions candides des premiers LP du bonhomme. Syro est un disque sympa, un bon album, comportant de bien belles individualités, similaires à des petits jeunes fragiles qui semblent écrasées par les gros balaises bruyants et repoussants du groupe, éructant comme des gros porcs au fond du bus. C’est un disque qui fait plaisir, qui drague le palpitant, qui nous fait même clairement rêver le temps de quelques tracks. C’est déjà pas mal. Mais qui me vole mon cœur, me tabasse le cerveau et m’arrache la colonne vertébrale ? Pas franchement.






Aphex Twin – Aphex Twin – minipops 67 [120.2][source field mix]






13 Titres – Warp / Beat Records

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Seekae – The Worry

Posted in Chroniques on September 15th, 2014 by Dat'


Ghosts & Voices



On avait laissé Seekae avec une galette magique, un des meilleurs albums de 2011, voir de la bass-music en général : +Dome. Mélange pété de uk garage et de rock émo flingué, ce LP était un disque certes référencé (impossible de ne pas penser à Mount Kimbie), mais surtout ultra bien branlé, ciselé à l’or fin, contenant de vrais bijoux (difficile de se remettre après l’écoute de Go, 3 ou Face Facts…). Les Australiens étaient presque des inconnus et arrivaient pourtant à coiffer aux poteaux tous leurs petits potes. Mais une grande victoire implique de grandes responsabilités, et le groupe était attendu au tournant pour leur nouvelle livraison. Surprise, et signe funeste au départ, Seekae annonce, comme tous les autres, vouloir se “pop-iser”, s’adonner à la vraie chanson, aux minauderies dépressives. L’ambition sincère, l’envie de draguer les stades.  Et pourtant, rester coller à un micro n’avait pas vraiment réussi à Mount Kimbie, ni à Phaeleh, encore moins à Darkstar (pire virage du genre). Seul James Blake s’en est sorti avec les honneurs, mais de justesse, et avec quelques dommages collatéraux.








Il a suffit de deux singles magiques, et d’une pochette angoissante (les trois membres du groupe superposés pour créer un 4eme musicien fantôme) pour nous rassurer. Seekae fait des chansons, oui. Mais Seekae continue de faire pleurer, c’est certain. Allergiques aux voix, passez votre chemin, le crooner est là sur la totalité des titres, si l’on excepte une bien belle introduction, Black Out, mi-urbaine mi-mélancolique. Another, dévoilé il y a un an, reste sublime. Longue montée au rythme martial, claviers trance-pute étouffés, voix parfaite, on navigue les yeux pleins de larmes dans une caverne de glace défoncée par le beat pachydermique. C’est beau à en crever, avec une ouverture finale magnifique, qui joue sur la frustration, et qui révèle toute sa beauté en s’éteignant, alors que l’on attendait un dernier coup de semonce. C’est un morceau qui soulèverait un stade, qui pourrait terrasser les radios et infiltrer les coeurs du monde sans difficulté.

On avait Test & Recognise, deuxième single mis en orbite il y a quelques mois, rassurant sur la musique des australiens, assénant le fait que certes, Seekae partait vers la pop, mais en gardant toute la richesse de son disque précédant. Première minute presque trop cadrée, qui va vite vriller dans une pop-uk-psyché violente, entre élucubrations Clark-iennes et bugs non identifiés. C’est jouissif, surprenant, puis beau, avec une conclusion que l’on aurait aimé entendre pendant de longues minutes encore. Les claviers sont dingues, et à 2min20, c’est trop beau pour être vrai. Un craquage en règle, émo et drogué, 3 minutes partant dans tous les sens, faisant le grand écart entre bombe 2step et tube r’n’b salace. Une vraie folie (la refonte de Flume est complètement dingo également).

Si ces deux morceaux étaient connus, et pouvaient rassasier notre attente, il était tentant de craindre un coté trop cadré sur un album entier, avec deux trois coup de semonces pour un ensemble trop balisé, oubliant les racines electronica du groupe. Rassurez vous, des bangers, il y en a d’autres. A dire vrai, les 6 premiers morceaux puent la réussite, on est proche de la flawless victory avec fatality bien crado. Hands est dans le pur Seekae période +Dome, avec une instrue oscillant entre rock cradingue et 2step claudiquant (si si, c’est possible), mais avec une voix grave en bonus. Boys peut prétendre au plus beau morceau du disque avec, Another, pour vrai morceau rock-blues, avec une lancinante guitare égrenant une mélodie à chialer, et le chanteur à la voix sur-modifiée pour partir sur des tons caverneux hypnotiques, pour un final à filer la chair de poule, à base de “I gat this boys coming at me now” répété ad nauseam. Folie sublime, je craque.
L’autre tour de force du disque, c’est The Worry, du haut de ses 6 minutes, commençant très lentement, pop electro candide et langoureuse, pas loin d’une new-wave optimiste. Encore une fois, on trouve ça cool, mais on aimerait que cela aille plus loin. Et c’est pile à ce moment qu’un clavier de folie déboule, et nous transporte dans une techno tubesque sublime. Le chanteur reste bloqué sur une phrase, la mélodie te balance dans un club crade puant le cul, avec des lasers qui te flinguent la rétine et des synthés qui visent la colonne vertébrale direct. Cœur sur le pied, danser et chialer, ce morceau est parfait dans sa dualité.





Et c’est après 6 ogives de suite que l’album va subitement prendre du plomb dans l’aile, en alignant les deux seuls ratés de la galette. Further ne propose rien de bandant, pop légère & légèrement kitsch avec petites flutes, presque hors propos au milieu de la galette.  Oxen Calm part sur une idée intéressante, celle d’exploser une ballade par des zébrures monstrueuses faisant passer borgore pour un joueur de harpe, mais là aussi, la recette ne prend pas, le tout est trop brouillon, pas assez violent ni assez catchy pour nous draguer les esgourdes, et ne rentrant pas vraiment dans la cohérence du reste.
Heureusement, les dernières estocades sont belles. The Stars Below fait dans la techno sourde et étouffée, à écouter en roulant dans la mégalopole la nuit, aveuglé par les lumières cycliques d’un périphérique. Tube écrasé et anxiogène, le morceau n’évoluera pas mais hypnotise par son coté 2step bétonné et salace. Le coté dépressif et désabusé du morceau impressionne,  se posant dans ce que le groupe a fait de mieux sur sa courte carrière.

Toujours dans le froid avec Still Moving, proche des dernières élucubrations de Radiohead, avec une pop fantomatiques, ultra froide, bourrée de détails et glitchs informatiques, qui va partir dans une Trance dépressive du plus bel effet sur son dernier tiers. Certains seront clairement hermétiques à l’exercice, mais pour les amateurs de tunnels electro-depressifs, c’est du tout bon.  Plus d’émotion avec un Monster s’avançant sans gêne comme étant le morceau le plus “normé” du disque, vignette blues-rock rondement menée, crooning de bar enfumé, sans surprise mais parfaite à hululer sous la douche après être rentré du boulot.
Tais terminera ce disque en mode super émo, pas loin des anciennes élucubrations d’un Sebastien Schuller (!), avec synthés à se damner, et chant en cristal, histoire de bien dresser les cheveux sur la caboche. Les violons de la conclusion violeront bien des âmes. A l’a première écoute, je suis complètement passé à travers ce morceau, avant de le réécouter et de me prendre une taloche stratosphérique dans la tronche. On n’est plus du tout dans le Seekae que l’on attendait et chérissait il y a quelques années, mais dans le game de la pop-electro-spectrale, ce morceau se dresse tout en haut de la pyramide. Magnifique.





Alors forcément, si l’on était amoureux du uk-garage claudiquante bluesy et mélancolique du dernier album de Seekae, le virage pop de The Worry peut faire flipper. Mais les australiens semblent pouvoir conquérir tous les sommets. La perfection des compositions, la beauté de la production, des mélodies, du chant, et ces instrues qui reste parfois très liées à +Dome permettent d’enchainer tours de force sur tours de force. Certains morceaux ultra mélancoliques sont hallucinants en tout points (Another, Boys, Tails, qui filent le vertige avec leur pop au cœur cassé) et les bangers cradingues émo (The Worry, Test & Recognise, The Star Below…) contrebalancent un album qui aurait pu sonner légèrement trop sage et policé sans eux.
Mais si l’on excepte un très léger ventre mou, (les morceaux 7 & 8 en déça du reste), The Worry se dresse comme un album de folie, consacrant un groupe réussissant toute ses mues, accouchant surement du meilleur LP émanant de l’eternel concept “je faisais de la bass-music maintenant je fais de la pop” (et dieu sait si les concurrents sont nombreux).

Morceaux beaux à s’arracher la colonne vertébrale, avec une entame de 6 morceaux mirifiques, Seekae peuvent être considérés comme de très sérieux prétendants pour une place dans les tops de fin d’année. La réussite est quasi-totale.





Seekae – Another





Seekae – The Worry (teaser)





Seekae – Black Out (teaser)





12 titres – Future Classic

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CUM ON MY SELECTOR 17 : Objekt, Nil Hartman, SZA, Last Night In Paris, Filastine, U-ziq, Fwdslxsh, Surrenderdorothy

Posted in Chroniques on September 1st, 2014 by Dat'


Le temps est désarticulé



U ziq – Taxi Sadness

Après m’avoir choqué pour encore au moins 10 ans avec son LP Chewed Corner de l’année dernière, U-ziq joue le généreux et revient avec une galette bonus, proposant 6 morceaux inédits ou présents sur des sorties difficiles à glaner (l’édition japonaise de C.Corner, ou la mixtape filée si tu achetais l’album sur Planet Mu dot com). Annoncé comme ayant une couleur plus candide, Rediffusion claque la mélancolie sépia des années fanées, avec en point d’orgue ce bien trop court mais ô combien magnifique Taxi Sadness. Mélodie belle comme le jour, teintes régressives, vague à l’âme, on tient le genre d’écrin electronica frôlant la perfection, que l’on se passera en boucle pour éclairer ces quelques nuits écrasées par la solitude.






Nil Hartmann – 30

6 ans d’absence, c’est bien trop. Un seul Ep à son actif, plus quelques bien rares morceaux à glaner sur le net, c’est frustrant. Et voila que Nil re-déboule de nul part, annonçant comme tous les ans l’éventuelle sortie de son premier album avec un premier single. “30″, c’est une litanie folle, qui donne envie de chialer, de prier, de danser, de se bourrer la gueule, de mourir. Quelque chose qui se chante sous la douche, qui se hurle défoncé en pleine nuit. C’est comme avant, mais en mieux. Nil, en 2014, c’est tout simple, mais c’est putain de beau. Tout est une histoire de mélodie.






Last Night In Paris – New Benz

On avait laissé Last Night In Paris avec un LP et un Ep qui avaient retourné 2013, en roulant sur toutes autres releases gratos de l’année. Savant mélange entre electro burialisé, uk garage racé et hiphop drogué, le confidentiel collectif, dont on a toujours pas pigé toutes les ramifications, n’hésitait pas à balancer un banger rap de folie s’écroulant sans prévenir dans un ambiant émo slow motion. Tracks sublimes, flow parfait, productions de folie, Last Night In Paris m’avait littéralement flingué le cerveau. Nouvelle année, nouveau projet, annoncé en amont par un nouveau tour de force, tube hiphop parfait glissant graduellement vers une conclusion lumineuse, histoire de naviguer de nouveau dans les hautes sphères de l’émo. Le groupuscule déroule sa recette avec un aplomb fou, sans forcer, s’en est presque indécent. Si le nouveau projet sort avant la fin de l’année, on risque de frôler le chef d’œuvre.






Filastine – Sixty Cycle Drum

Filastine fait parti de mes grands amours passés chez Jarring Effect. Completement fan des deux premiers albums de l’activiste (le fou Burn It et Dirty Bomb), j’ai pourtant complètement zappé de suivre ce que faisait le bonhomme ces dernières années. Sorti de ma mémoire, voilà que je vois débouler dans ma timeline un nouvel Ep à sortir sur Jarring. Premier extrait, Sixty Cycle Drum en impose, superbe fresque défonçé, à la litanie ronge-cerveau et rythme effréné. Filastine est toujours le meilleur pour incorporer des éléments world music à un banger club imparable (à partir d’1min30, ça retourne les colonnes vertébrales), ça tabasse, une belle réussite.






Objekt – Ganzfeld

Sans prévenir, Aphex Twin bien de réveiller bien des cœurs endormis avec l’annonce de son nouvel album. L’IDM et autres joyeusetés fracturées sont plus mémoires qu’actualité dans mon palpitant, et si l’on attend notre dose de Syro(p) avec impatience, il y a en parallèle de sacrées belles sorties pour se faire violenter le cerveau avec grâce. Objekt s’avance avec un parfait morceau, aussi dansant que cristallin, aussi sec que mélancolique. Ca claque dans tous les sens, ça te chiale une putain de mélodie, club triste et équations putassières, hypnose tranquille, c’est beau.






Fwdslxsh – 4 U

Comment ais-je pu passer à coté de cette track mirifique, morceau absolument mythique d’un des beatmakeur énigmatique du crew Last Night In Paris ? Absolument parfaite de bout en bout, émo à en crever, aux mélodies folles et progression camée, ce 4 U est effectivement un putain de cadeau, un morceau qui ma crevé le cœur dès la première montée de synthés. Alors ouai, tu vas me dire que ça respecte tout le cahier des charges de l’electronica-ambiant-uk-burialisante, et je ne peux que te donner raison. Mais même si la leçon est suivie à la lettre, le résultât en est que trop beau. Fwdslxsh ne sort pas beaucoup de sons, et l’on attend de pied ferme ses collabs avec les rappeurs du dessus, ainsi qu’un éventuel album solo. Car se faire piétiner le cœur en cette année morose, c’est presque orgasmique.






Surrenderdorothy – Whatcouldpossiblygowrong

On a tous eu notre période ado au cœur brisé, à écouter de la musique triste en pensant détenir la vérité, à regarder ses camarades de classe s’ébattre dans la cour de récréation. Casque sur les oreilles, feuilles mortes, cartables défoncés, premières amourettes derrière le préau et jeu de la bouteille pour tenter d’annihiler la virginité (et chopper une mononucléose). Alors après avoir vu Pauline embrasser Bobby alors que la bouteille était légèrement plus vers, ben tu rentrais sous la pluie en écoutant des morceaux tristes, genre du Faith No More à fleur de peau. Surrenderdorothy (aka Bones, encore lui), c’est exactement ce moment précis ultra émo, mais en mieux, avec des guitares tristes, un beat rachitique et un mec qui te susurre des « nobody wants meeeee » avec une voix brisée. Et c’est à la fin d’un morceau comme ça que tu trouves la force nécessaire pour comprendre que plus tard, tu seras le plus beau, le plus cool, et que tu rouleras sur cet enculé de Bobby sans problème.






SZA – Julia

Bon, la girl next door produite par Kendrick Lamar qui feule des mots doux sur des instrues éthérées, ça puait l’arnaque. J’ai d’ailleurs longtemps refusé d’écouter cette nana malgré les retours dithyrambiques, me limitant à quelques feats pas renversants ici et là. Loin d’avoir la voix la plus marquante du miaulement game, SZA compense et se démarque par l’intelligence et la pertinence de sa musique, comme quelques rares autres demoiselles (FKA Twigs), en employant XXYXX ou Toro Y Moi pour les instrues. Mais surtout, il y a Julia, track complètement folle, à l’instrue parfaite, genre M83 meet Ciara. Julia, c’est des synthés de folie, mais c’est surtout un refrain ahurissant, le plus catchy et tire-larmes de l’année. Et c’est ce bref instant de folie, intervenant par deux fois seulement, qui porte ce morceau aux nues.







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Machine Girl – WLFGRL

Posted in Chroniques on August 22nd, 2014 by Dat'


In a way, I am dead already



>Article précédemment publié sur PLAYLIST SOCIETY< 


Après 30 ans, on est plus vieux que jeune. Les rêves de gosses commencent à s’estomper, remplacés par une légère frustration d’avoir loupé des étapes dans sa vie. On déroule les choix cruciaux que l’on a pu arpenter, les vies loupées. Niveau musique, on comprend enfin pourquoi nos vieux radotent sur les mêmes disques, et appréhendent de se diriger vers de nouveaux sons : parce que c’est rassurant. J’ai toujours pensé que les adultes à la quarantaine bien tassée avaient de légers problèmes d’oreilles, une hyperacousie latente, quasi imperceptible, rendant plus simple l’écoute d’un disque déjà assimilé par l’organisme depuis 15 ans, plutôt que de se lancer dans une nouvelle aventure accidentée. Bonjour énième visite à Saint Malo, goodbye voyage improvisé en Inde passeport en poche.







Mais loin d’être des vieux croulants, nous sommes encore dans une période où l’inédit peut draguer les esgourdes, surtout si cela répond à des genres résonnant encore dans nos synapses. Et c’est un peu le parti-pris de Machine Girl qui te balance un album de footwork/jungle/rave ultra bourrin, madeleine de Proust convulsée et violente.

Car ici, c’est la menace permanente, c’est le disque inécoutable pour une bonne partie du monstre-foule. C’est la fête de cave droguée, c’est l’apocalypse techno, c’est la crise d’épilepsie aux relents barbituriques. Tu as Krystle (URL Cyber Palace Mix) qui désintègre une techno dreamy avec des amen breaks ultra violents, avant un long tunnel pleins de synthés qui volent dans tous les sens. Gimmicks surannés, bâtons fluos, on se croirait chez Ceephax, l’ironie en moins, l’ultraviolence en plus. Tu as les tunnels gotchico-grime façon Ginger Claps, qui malaxe la mélodie en boucle pour renvoyer vers un bordel cauchemardesque. Ou la juke-rave de かわいい Post Rave Maximalist, frôlant le hardcore avec ses synthés traumatiques, qui ferraient passer tes soirées dans la boue en Bretagne pour des classes vertes à Kiddy Land.

Oh ne t’inquiète pas, tu as aussi du footwork plus calme et réglementaire, à l’instar du faussement candide 覆面調査員 (GabberTrap Mix), mais on ne reste jamais longtemps sans une progression jungle cosmique hallucinante comme sur la longue fresque d’Hidden Power,  comme si Jean Michel Jarre s’était muté en distributeur de taloches déréglé. Ça n’invente rien, ça copie tout, ça fout un pan entier de musique dans un mixeur, pour recracher une bouillie obscène et jouissive, maculant de sperme fluorescent les mornes murs de ta baraque.


Rien de nouveau, certes, mais alors, pourquoi ce disque plutôt qu’un autre ? Parce que d’un point de vu strictement musical, ce WLFGRL est un des meilleurs disques jungle matiné de footwork entendu depuis quelques temps. Ici, point de  références hiphop ou street. On est dans la pure folie rave, la baise dans les toilettes, les clubs puants et bétonnés. On est dans la frénésie, le carnage, le plaisir pur et instantané. Un mélange de vice londonien et de régression japonaise, le rappel d’une folie drum’b bass faisandée, et la modernité d’une scène juke encore loin d’être essorée.

Mais aussi parce que – pour une certaine tranche d’âge, il renvoie à ce que l’on ne vit plus que de façon sporadique, voir plus du tout. Parce que l’on est comme Kevin Spacey dans son garage, à fumer des clopes en écoutant Pink Floyd, tentant de rattraper une jeunesse déjà perdue. On se masturbe les tympans dans la douche, les enceintes crachant Machine Girl à fond, en rêvant d’une liberté adolescente, alors que l’on se savonne simplement le dos avant d’aller bosser. On perçoit cette musique rave dégueulasse comme une belle nymphe de 19 ans que l’on n’arrivera plus jamais à fréquenter en personne, sauf à paraître forcément ridicule et pervers, ridés et cheveux poivre sel, dans une fosse entourée de sales jeunes drogués…





Ecouter ce WLFGRL, c’est se sentir comme un vieux, terré chez-lui, matant la photo de son amour de jeunesse, sans avoir les couilles de décrocher son téléphone pour reprendre contact. Parce que tu sais pertinemment que les coïts improvisés dans les chiottes d’un club où une âme perdue te crache son haleine chaude dans le creux de ton cou, c’est terminé. Que la prise de drogue/alcool sans craindre d’être explosé au boulot le lundi et de foirer des contrats, c’est terminé. Que de partir en bagnole avec des potes sans but, le coffre rempli de bière, sans avoir cette putain de peur latente de chopper un cancer, c’est terminé.

Alors on se plonge dans ce Machine Girl avec une mélancolique larme à l’œil, à maugréer doucereusement sur le passé et sur une vie désormais trop tranquille. Amorphe, un peu triste mais le sourire au lèvre, en bougeant sagement la tête sur une musique qui, il y a 10 ans, nous faisait encore méchamment bander.









13 titres – Dred Collective

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>Article précédemment publié sur PLAYLIST SOCIETY< 


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CUM ON MY SELECTOR SPECIAL 2 : Tiago x Dat’

Posted in Chroniques on July 28th, 2014 by Dat'


Life Looks Better In Slow-Motion



Le retour de Tiago dans ces pages étaient obligatoire. Eminent fondateur du label CTC records, membre du site Union Street, et surtout meilleur franco-italo-portuguais sur terre (je n’en connais qu’un), le bonhomme continue constamment de naviguer dans les profondeurs de youtube pour découvrir des artistes cramés, les signer, sortir leurs disques et se faire des millions.
Nous devions rééditer le coup, refaire une sélection comme l’année dernière, pour que one-shot devienne tradition.

Au menu, rap drogué, productions vaporeuses, lyrics flingués, pour des morceaux pas toujours validés. Tout ce que l’on aime pour nos nuits blanches ou pour accompagner nos retours de club, carbonisé.





Naadei – No More

Dat’ : Pas de suspense, c’est pour moi l’une des meilleures instrues de 2014. Quand ça commence, tu penses avoir dans tes oreilles le truc le plus émo de l’année. Puis c’est le truc le plus jouissif de l’année. La nana semble tout droit sortie de The Wire, c’est beau, ça tabasse, perfection. Il paraît que B20 a conseillé le morceau sur facebook ? Plutôt que de s’occuper de sa timeline, le bonhomme devrait prendre le temps de poser sur des instrues pareilles.

Tiago : La sublime Naadei dans un trip nocturne rincé de style et d’éclairage à tubes et de bras levés, l’intelligence de laisser parler la prod de High Klassified pour ne délivrer qu’un refrain géant qui servira à nous gargariser pour un bon moment. We want more.






Bones, Xavier Wulf & Chris Travis – WeDontBelieveYou

Tiago : Triangle équilatéral à succès dans le rap pour garçons émotionnels, Eric Dingus à la prod, Xavier Wulf (Ethel Wulf, ex-Raider) et TeamSESH aux visuels. Des hi-hats parkinsoniens accompagnant chaque larmes lâchées, des envolées de traîtrises pour un final bouche ouverte.

Dat : Rappeurs déjà morts, Boards Of Canada en mode funéraire, émo-thug matiné de rivotril. Un morceau pour les matins encore écrasés par les somnifères. Marcher à l’envers dans des rues crades bardées de néons. Apercevoir la belle Selena gomez, cernes noires et visage creusé, dans son maillot rose fluo, en train de fumer du crack. Ce qui est pratique avec Bones, c’est que chaque année, il balance le morceau de l’année.






Chris Travis – Memphis to LA

Tiago : Kenshin Travis, Chris Travis, Water Boys, ex-Raider Klan nous régale toujours de morceaux brumeux et éthérés mais sur cette prod évangélique de KLVN, Chris se lâche, tout de blanc vêtu, sur un rap brut et laisse la prod jouer avec nos émotions. Une efficacité imparable qui me laisse les poils hérissés et la chair prête à baigner dans un pot.

Dat’ : Chris, t’es mon gars sur, mon favoris, l’incontournable, ma secret story. Quand je vois ta ganache débouler sur les tubes, je sais que je vais me prendre une claque. Parce qu’en plus de débiter un flow d’enfoiré, tu sais choisir tes prods. Et cette prod’ bordel de dieu, c’est tellement beau. Alors continuez de lurker les timelines twitter de vos stars préférées, moi je me plante devant la chaine youtube de Chris, et j’appuie sur F5 toute la journée, dans l’espoir de voir une nouvelle vidéo arriver.






Mikris – S.S.P

Dat’ : Les touristes artistes aiment tourner leurs clips à Tokyo dans une pluie de néons et rues technologico-crades. Les japonais semblent eux étonnamment plus enclins à s’ébattre dans un parc local. Mikris, c’est l’un des seuls japs (avec ERA) à pouvoir te sortir un rap drogué à l’américaine, sans souffrir une seconde de la comparaison. L’instrue est superbe, le mec est chaud comme la braise. Un putain de morceau.

Tiago : Trap et hi-hats rapides pour un rap japonais hanté et spirituel, encore une belle découverte qui montre que le HH fantomatique et étrange made in Japon n’est pas en retard sur le flow !






G-Side – Statue

Tiago : Après un hiatus d’un an, les G-Side reviennent et montrent qu’ils n’ont pas raté une marche de l’évolution du rap, production menaçante et sautillante, auto-tune grinçant et filtre VHS, tout est là : un bijoux de rap en 2014.

Dat’ : Je porte G-side très haut dans mon cœur depuis leur mythique galette Starshipz & Rocketz, et je les croyais à la retraite. Sauf que nouvel album surprise, c’est la drogue, la violence, l’amour et la déraison. Parfait pour les chaudes saisons.






Versace Sachi x Space God – Japanese Hoe

Tiago : Encore une érection face à la culture japonaise, toujours plus présente avec cette nouvelle génération de rappeur. Dans un style très proche d’un Lofty305 (Métro Zu), Ver$ace Chachi réveille en nous toutes ces pulsions développées par les séries de vidéos “The Absurdity of Japanese Pornography”.

Dat’ : Ho-Ho-Hoe, très drôle le clip-tourné-au-Japon-mais-en-fait-non. Bon ils aiment bien les Japonaises, mais beware, car après quelques mois, le prochain refrain du morceau sera “j’ai plus de rêve de célibat que de rêves érotiques” (©hyacinthe). Le morceau passe crème, à écouté sur la meiji jingu à moitié défoncé sur son skate.






Black Kray – Champagne Doves

Tiago : La première fois que j’ai écouté Black Kray, mes tympans n’ont pu s’en détacher, sa voix m’enveloppait dans une sorte de zone confortable où une mélodie au piano m’apaisait. Une esthétique dans la lignée de Team Sesh, tout en VHS, bruit statique et glitch art. Un morceau pour compter toutes les personnes qui pleurent dans votre tête et dessiner des cercles avec votre 3310 d’un main et et caresser des colombes couleur cocaïne de l’autre.

Dat : Il y a une semaine, j’ai fais deux nuits blanches d’affilées, le stress, le sevrage, tout ça. Alors pour me forcer à dormir, j’ai pris deux lexomil avec une bière. Puis j’ai fais une video selfie. J’avais l’air aussi triste que le mec dans ton clip là. Mais en moins bien fringué.






Young L – Dundidit

Dat’ : Pleurer sa vie sur un canapé, un joint à la main, habillé en boubou, c’est de l’inédit. Bon morceau, il sort des enfers celui là, dans le refrain on dirait que le mec est à genoux dans une église, priant pour qu’on l’absous de ses péchés, alors qu’il donne l’impression d’être dans une partouze pendant ses couplets. Dualité mélancolique, émotionnellement mouvant, validé.

Tiago : L’ex membre du Pack ressort le boubou après le succès de sa marque Pink Dolphin, très peu rappé, ce morceau, et tout comme celui de Black Kray, réside essentiellement dans la voix mélodieuse et de ces mots marmonnés qui font mouche. En plein dans le basé, c’est une sorte de transformation qui s’opère, un détachement physique.






Uzi – Scene Girl

Tiago : La génération Tumblr fait des ravages avec ce nouvel hymne à chantonner dans les soirées rap où les 40oz coulent à flot, les femmes portent des leather jogging pants et où l’accroupissement devant les Taco Bell est intense.

Dat’ : T’es déprimé, tu lis une lettre de rupture dans un cabriolet lancé à fond la caisse sur Miami avec des putes en maillot de bains qui se caressent avec du champagne sur la banquette arrière. D’où sort ce latino-indien fragile, qui fait presque passer Yung Lean pour la plus menaçante des crapules? Ca dégouline au maximum, faut le connecter avec Moderat pour faire des chansons tristes que l’on chantera sous la douche avec des ray bans sur le nez.






Tiago & Dat’

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Venetian Snares – My Love Is A Bulldozer

Posted in Chroniques on July 21st, 2014 by Dat'


Quand tu seras en bas, tu flotteras aussi



Cela faisait un bail que je n’avais pas parlé de Venetian Snares. D’une part parcequ’après quelques années folle, le bonhomme avait tranquillement ralenti la cadence, arrêtant de sortir 3 albums par ans. Mais surtout parce que la qualité avait décliné. S’il est impossible de nier la grandeur de certains opus du musicien, qu’ils soient hardcore (Songs About My Cat, Winter In A Belly, Meathole), débiles (Cavalcade of glee…, A Giant Alien Force…) ou dingues en terme de compositions (Rossz Csillag), Venetian Snares avait clairement commencé à nous pomper l’air depuis son LP Filth. S’ensuivit une brochette de disques oscillant entre l’inintéressant et la blague sympa, ce qui, forcément, pouvait frustrer nos petits cœurs pourtant meurtris à vie par certaines productions du viking canadien.







Ce n’est pas la seule raison qui m’a poussé à m’écarter de V.Snares. Mon désamour de ses dernières productions pouvait s’expliquer également par le déclin de mes capacités auditives. On pourrait résumer mon état d’esprit à chaque nouvel LP par un “je n’ai pas le courage”. Pas le courage de me prendre une tempête breakcore dans mes tympans déjà bien blessés. Pas le courage de devoir assimiler un bordel pareil, pas forcément qualitatif qui plus est, alors qu’il me suffisait de balancer un Rossz Csillag pour prendre mon pied et chialer un coup. C’est ça vieillir. Refuser la dangereuse aventure pour se lover contre les rassurants fantômes du passé. Et puis les oreilles rayées empêchant d’écouter un disque sauvage trop fort au casque, alors que c’est pour moi le mode optimal pour écouter V.Snares, c’est embêtant. On ne demande pas à une jambe fracturée de courir un marathon, non ?

Mais il y avait un je-ne-sais-quoi de mystère autour de ce My Love Is a Bulldozer, entre la pochette renouant avec le non-sens d’auparavant, le fait que les cordes classiques refaisaient leur retour et que le chevelu allait se mettre à chantonner (même si ce dernier point semblait me rebuter plus qu’autre chose).

Il n’y a pourtant pas de révolution dans ce nouveau disque. Il nous rappelle que Aaron Funk est toujours au dessus de la mêlée (et je ne parle pas que du Breakcore) pour ce qui de la composition stricte, arrivant à malaxer le meilleur du jazz, du classique, de la pop et d’electronique pour accoucher d’une mixture traumatisante. Les meilleurs moments ne sont pas les plus sauvages, et si un titre comme 1000 years impressionne, c’est autant par sa chevauchée hystérique que par son intro sublime, presque trop rapidement balayée. C’est aussi dans ce morceau, ainsi que sur le suivant, Your Smiling Face, que l’on comprend l’importance de la composante “voix” dans ce LP.

Clairement, ça pourra diviser, et je ne suis toujours pas sur de mon opinion sur ce sujet. Voix grandiloquente, sur jouée, à faire grincer bien des dents, parfaitement maitrisée et clairement maladroite dans le même mouvement. Ça gâchera notre plaisir un matin, avant de nous voler le cœur le soir. Seule certitude, Aaron Funk met mal à l’aise avec son organe. On n’entend pas ici un compositeur se mettant subitement au chant à la Apparat. On entend Ça, car Il est revenu. On perçoit un putain de clown fou qui nous débite des horreurs avec délice, le sourire jusqu’au oreille. Il te susurre des mots d’amour, mais tu as plus l’impression d’avoir un gars qui te propose de te dévorer les entrailles au plus vite. Alors toi tu avances prudemment, entre les violons qui pleurent et les salves électroniques violente, avec un gars peinturluré qui te course en te faisant flipper avec sa grosse voix, partant parfois dans des teintes réellement déraisonnables (Your Smiling Face, notamment).

Malgré Ça, il y a de sacrés bijoux dans le disque, outre les suscités. Des morceaux comme Dear Poet ou 10th Circle Of Winnipeg sont dans le pur Venetian, avec mélodies à tomber et cavalcades émo. On est pas dans l’ultra violence, mais dans le sacrément secoué quand même, et la richesse de chaque morceau enterre mille fois la concurrence (cela faisait bien bien longtemps que l’on avait pas entendu une track de la trempe de 10th Circle chez Aaron Funk).

Il y a de plus quelques morceaux beatless, rappelant que si My Downfall était un LP convenant parfaitement aux oreilles blessés, il n’en restait pas moins un putain de bel album. On viendrait presque à regretter qu’il n’y ait pas plus de pièces instrumentales, ou que Venetian ne ressortent pas un deuxième opus de la même trempe. Deleted Poems ou Your Blanket ne pourront que me donner raison.





Loin d’être un album parfait, loin d’être la sortie de l’année, Venetian Snares réussît néanmoins le tour de force de me donner envie de replonger dans ses crises d’épilepsies. C’est propre, c’est beau, c’est flingué. C’est un peu maladroit, un peu grandiloquent peut-être. Mais c’est rondement mené.

Ça pourrait presque me faire retomber dans de veilles addictions. Car comme dans tout sevrage, il y a toujours phénomène de rebond.






Venetian Snares – 10th Circle Of Winnipeg






12 Titres – Planet Mu

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Phon.o – Cracking Space Pt 1 & 2

Posted in Chroniques on July 7th, 2014 by Dat'


Realest Ever Lived



Après avoir choqué mes tympans en 2012 avec Black Boulder, un des tous meilleurs disques de Uk Garage depuis des lustres, Phon.O s’est calmé, tapis dans l’ombre de 50weapons, le label aux releases pachydermiques de Modeselektor. Il s’est bien glissé dans quelques compilations, mais à part un petit Ep d’inédits, pas grand-chose à se mettre dans le citron. Reste qu’au bout de 2 ans, il faut bien nourrir la masse, et on était curieux de voir le visage qu’allait prendre la musique de Carsten Aermes. Car il ne faut pas oublier qu’avant de proposer un 2-step riche et racé, Phon.O était considéré comme terroriste au milieu des années 2000, avec une musique rouleau compresseur bien loin du calme proposé aujourd’hui.

Il fallait bien 2 EP (Cracking Space pt 1 & 2) sortis coup sur coup pour comprendre que le producteur veut continuer le travail entamé sur Black Boulder, tout en laissant poindre un amour de plus en plus pressant pour la fragilité. Mais est-ce toujours aussi beau ?








Le premier single, Moonwalk, accompagné d’un sacré clip mélangeant les deux choses les plus cool du monde (des chats et des lasers), nous laisse arpenter un chemin rassurant mais diablement bien foutu. Intro lunaire, voix pitchées d’anges déchus, le rythme est 2step, clairement burial-isé (même si ce dernier commence clairement à sortir du modèle qu’il a lui même créé). Bassline du tonnerre, pulsation sourde, longue progression discrète mais superbe, Moonwalk est une pastille parfaite, respectant à la lettre le sempiternel cahier des charges du Uk Garage. Pour la surprise, on repassera, mais pour prendre son pied, c’est impeccable.

Et clairement, sur les deux EP, la moitié des morceaux ne sont pas là pour instiguer révolution, mais pour titiller les colonnes vertébrales. Here Now feat Bass Sekolah, Uk émo avec chant, est beau comme la mort, encore plus réussi que les incursions vocales sur le précédant LP. Rythme plus enlevé, synthés lunaires, mélodie de folie, on est au niveau d’un Moderat des grands soirs, un truc qui donne envie de chialer et file la frousse. Voix cristalline, track quasi club, le tout s’envole dès la moitié, pour ne plus jamais redescendre, avec un final épique. Folie. Balance ça dans un concert, que le peuple entre en transe.

Whi5tleblower servira lui aussi un met rassurant, Uk garage grandiloquent, charge militaire héroïque balayée par la mort, mélodie qui n’en fini plus de monter, on est certes toujours dans la même ligne que précédemment, mais avec des détails qui fourmillent dans tous les sens, comme ce synthé fou qui déboule vers les 4min, et jette le morceau dans un bordel de salopard, avec un dernier tiers massif, écrasant tout ce qui bouge, aux beats tabassant les viscères. Chialer tout en te faisant marcher dessus, c’est possible. Phon.O semble maitriser mieux que personne la recette du 2step émo et gargantuesque, boss du uk game.

Mais le bonhomme ne veut pas seulement nous balader sur des terrains connus en nous tenant gentiment la main. Car Ep dit possibilité de prendre des risques, et l’on trouvera au sein de Cracking Spaces pt 1 & 2 des morceaux tentant de s’émanciper d’un résultat trop attendu. Crystal Math, fresque beatless toute fragile et candide, permettra de nous recueillir la larme à l’œil, tant le coté à fleur de peau suinte par tous les pores de la mélodie. D’autant plus que la dernière minute, avec cette petite litanie façon générique RPG, volera bien des cœurs.

Reste que Phon.o se permet de lâcher les chevaux, et sur Kellerkind et Defrost, on naviguera sur une techno martiale, toujours aussi propre, et parfaite pour une nuit blanche dans club drogué à Londres. Defrost remportera même bien des suffrages avec cette mélodie quasi-chiptune de folie, sublime conclusion que n’aurait pas renié un Clark des grands soirs. Surement la meilleure track des deux Ep. Du sacré bon boulot.





Phon.O n’a pas énormément changé sa musique, certes, mais continue de régner en maitre sur un genre dans lequel il avait déjà explosé toute concurrence via son Black Boulder LP. Bourrés de détails, de moments épiques, de mélodie folles, le Uk garage parfois techno parfois electronica de Phon.O ne révolutionne pas des masses mais cajole à mort les esgourdes. C’est beau, ça tue, ça écrase. Et cela nous fait espérer qu’une chose, après écoute intensive de ces deux EP : un nouvel album, vite, svp.






Phon.o – Moonwalk






Phon.o – Whi5tleblower






Phon.o – Here Now feat Bass Sekolah






6 Titres – 50Weapons

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Plaid – Reachy Prints

Posted in Chroniques on June 20th, 2014 by Dat'


I’ve killed a turtle once  



Les choix de carrière sont parfois impénétrables. Après avoir attendu quasiment dix ans pour balancer un nouvel album en 2012, via le mi-figue mi-raisin Scintilli, Plaid revient sans crier gare 2 ans plus tard avec Reachy Prints. Et cette fois, les anglais semblent resserrer les rangs. Scintilli, qui gardait en son cœur de superbes morceaux, s’éparpillait un peu, empêchant encore le groupe d’accoucher d’un sans faute. Difficile de dire si le groupe s’en est rendu compte, mais en 2014, Plaid revient avec un album court, sans interlude, histoire de privilégier la mandale directe et le traumatisme mélodique. Car c’est bien ça que l’on cherche à chaque nouvelle livraison du groupe. Contrairement à Autechre et consort, il n’est jamais histoire de limites repoussées, de chambardement. On veut juste de la mélodie, de la belle, de là joyeusement mélancolique. Ca tombe bien, Reachy Prints a mis la barre haute de ce point de vu là.







Plus que tout autre formation, et en tant que fanatique invétéré de Plaid (aucune objectivité ici, et à jamais), je n’attends qu’une putain de chose en lançant un nouvel LP du groupe : je veux juste me faire fracturer le cerveau à coup de mélodie. Chercher le morceau qui va m’accompagner pendant dix ans, comme trop de productions du duo, depuis 15 ans déjà. Parce que les Even Spring, les Rakimou, les IO, les Light Rain, je les chante parfois dans la rue, souvent dans la douche, exclusivement dans ma tête, histoire de ne pas passer pour un fou. Des morceaux qui se pointent sans prévenir, régulièrement quand je cherche le sommeil, quand mes pensées vagabondes, quand je suis bourré, quand je suis triste, quand je suis heureux. Traumatisé à vie, certainement. J’ai toujours placé Plaid au dessus de tout ce qui se fait en electronica, malgré l’absence d’un album ultime, pour la simple et bonne raison que ces deux mecs ont réussi à se placer ad vitam eternam dans mes synapses. Scintilli ? Je n’arrivais pas à piger si c’était moi qui avait grandi, ou si le LP manquait d’un je-ne-sais-quoi de magie pour réellement me flinguer l’échine.

9 morceaux (ou 10 avec le bonus), pas de fioriture, de l’efficace, pas de beatless, la promesse était belle en lançant Reachy Prints. OH va respecter le cahier des charges. Presque du fan-service. Pas de surprise. Mais bordel, que c’est beau. Des harpounettes qui pleuvent la mélodie des anges en intro. Puis une constante progression, avec tout ce qu’il faut d’airs cristallins et de mélopée émo. Ca ne ferra que monter, monter, des paillons dans le ventre, et des étoiles plein la tête. Cela en serait presque cliché, correspondant à ce que l’on attend de Plaid à 100%, un peu comme le (très bon) premier single Hawkmoth également, dont j’avais parlé il y a quelques semaines. Mais on ne parle pas du vieux cliché racorni, mais bien de la photo pleine de vie, frappante, débordant de contraste et de couleurs.

Mais le groupe ne va pas s’escrimer à nous ressortir du fan-service. Car la première vraie claque du disque, c’est avec Nafovanny qu’on se la prend. Où l’on entend Plaid faire du Plaid, mais une dose d’inédit en plus. Rythme binaire, bassline caverneuse, on avance pendant deux minutes dans un tunnel hypnotique. Ce n’est pas sombre, il y a juste ce qu’il faut d’oppressant, avant qu’un synthé sublime déboule. 1min15, une complainte parabolique fait son entrée et terrasse les cœurs encore durs. C’est beau comme la mort, et tu sais déjà que tu tiens là un des tous meilleurs morceaux de Plaid. Le choc intervient au bout de 2 min quand tout s’éteint, se calme et que la mélodie se fait divine. Divine. A la première écoute, impossible de ne pas lâcher un « whao, bordel » de circonstance, sous la perfection d’un changement pareil. La track qui s’escrimait au départ dans les bas-fonds, part sur un voyage en apesanteur, candide, cotonneux, sublime, qui n’en fini plus de monter vers les étoiles. Je n’avais pas été aussi impressionné par un morceau du groupe depuis This City (on remonte loin). C’est la claque, c’est le son originel des anglais, la même beauté, la même émotion, mais pimpé par une perfection dans la production assez ahurissante, et ce coté aventureux que l’on pensait avoir perdu. Un coup de maitre.

L’autre commotion provoquée par l’album, c’est Ropen, adoptant lui aussi un parti pris que l’on entendait que trop peu chez les anglais. Plus expérimental et obscure que ses pairs, le morceau s’avance en mélasse émotionnelle aux rythmes pachydermiques, d’une puissance folle. La mélodie, loin d’être évidente, renverse tout, coulée de lave zebrée de sursauts jouissifs. On est dans complainte de fin du monde, mais à la Plaid, avec des synthés qui te chialent leur tristesse de façon absolue. Dépression, amours perdus, mémoires floues, mais avec amour. Longue chute en slow motion, qui n’a pas vraiment de développement, de break, de conclusion, ce morceau est l’autre exercice majeur de Reachy Print, un versant moins évident du groupe, renvoyant légèrement à certaines tirades d’Autechre, voir à Come To Dust, diamant noir du dernier Boards Of Canada. Marche militaire d’éclopés, armée balayée par le vent, Ropen impressionne, désarçonne presque, nous balançant un Plaid qui prend enfin des risques, montrant un visage déjà aperçu mais jamais réellement contemplé. Un des meilleurs morceaux du groupe, tout disque confondu.





Et Reachy Prints n’a pas fini de foutre des claques : on a pas mal entendu Wallet, et sa frustre video, morceau de folie, réunissant ce qui se fait de mieux chez les anglais, mais avec, là aussi, une profondeur étonnante. Les rythmes tabassent, les bugs sonores remplissent le spectre. Mais c’est là encore la mélodie qui va tout emporter, faire saigner les palpitants, draguer l’échine. Si le milieu du morceau pourrait presque faire du surplace, le dernier tiers s’amuse à prendre ta colonne vertébrale pour en faire des papillotes. Pas besoin de trop en faire, le morceau reste toujours en retenu, presque discret face au coté bigger than life de Oh ou Nofovanny, pour une simple comptine mélancolique qui ne sert qu’à te rappeler tes vies passées.

Il y a évidemment le gargantuesque et épique Matin Lunaire, fresque electro-pop légère et colorée comme une bulle de savon, entre fragilité pure et chute dans un puits de néon. Une pop star japonaise pourrait chanter sur ce morceau et ça serait bien. Une armée de filles en fleur pourrait découvrir la vie sur ce morceau, et ça serait bien. Un mec défoncé qui rentre chez lui avec des souvenirs roses plein la tête pourrait écouter à fond ce morceau, le casque enfoncé sur les oreilles, et ça serait bien. La dernière minute du morceau est magique, une putain de conclusion joyeuse, à nous donner envie de sortir les cotillons.

Tether renouera avec le Plaid que l’on connaît bien, le crasseux qui laisse exploser sans prévenir la mélodie divine, le strip club qui se mut en jardin pour enfant, la solitude sourde qui se fait exploser par des arpèges lumineux qui partent dans tous les sens. Mais c’est sans commune mesure avec Liverpool St, qui a pas mal divisé. Et je ne pige pas pourquoi. Tu vas me dire que c’est niais, que c’est sucré, que l’on frôle le Disneyland. Oui, mais merde, c’est ça qui est bon. Parce que c’est putain de beau. C’est le moment où les arcs en ciel te tombent sur la tronche, où les monstres se mettent à danser comme des cons, où tu délivres enfin la princesse pour que vous puissiez copuler sauvagement. C’est la mélodie débile mais parfaite, belle comme le jour, candide à en crever. C’est une sorte de symphonie qui se brise et vrille vers une electro flingué, avec Plaid qui nous sort l’un des synthés indispensables du disque. Ce morceau, c’est le moment où tu balances dans ta bouche des Fizzy Pazzy, quinze ans après avoir mangé le dernier paquet : tu te sens idiot de succomber à ce plaisir enfantin… mais ce gout sucré, ce bonbon qui claque de partout dans la bouche, cette langue colorée qui te fait passer pour un débile, c’est la sensation que tu cherches tous les jours en allant te casser le cul au boulot, pour un salaire de misère. Débile oui, mais heureux.

Oh je sais, je suis un peu lourd avec mes bonus tracks japonaises, mais si certains groupes Warp se foutent un peu de la gueule des japonais, Plaid a toujours pris le bordel au sérieux, avec en point d’orgue le Miamivice de Spokes, ou le fou Outside Orange qui offrait une bien belle plus-value à Scintilli. Le groupe avait prévenu, ils ont écarté quelques morceaux de Reachy Prints, pour accoucher d’un tracklist resserré. Et l’on peut imaginer qu’Away en faisait parti. Morceau qui tournait déjà en live, ce titre bonus fait rentrer le chant pour la première fois sur le disque, pour des apparats très Spokes. Et clairement, si Away n’invente rien, Plaid pousse le trip dans ses retranchements, entre voix d’anges dérouillées par une rythmique imprévisible et mélodie de folie. On croirait presque entendre Imogen Heap en train de se taillader les follicules avec un tesson de bouteille. Après 3 minutes de délire quasi-christique, la dernière minute est absolument folle, à te filer la chair de poule. Pas forcément cohérent avec le reste du disque, mais niveau rouleau compresseur émotionnel, on est plutôt bien servi.

Au final, dans ce disque ultra cohérent, seul Slam pourra paraître un peu frustre, loin des effusions épiques des autres morceaux, avec un ensemble plus linaire, avec une progression timide et un peu empruntée, mais qui se révèle plutôt agréable après quelques écoutes, sans avoir la magie d’un Wallet.





Assez étonnant ces retours en force. On pensait Warp en petite forme, avec des tauliers partant en vrille et des nouvelles signatures loin d’être savoureuses. Mais il y a eu BOC l’année dernière. Et Plaid cette année. Plaid, impérial, toujours aussi fragile et candide, discret et enthousiaste. Comme toujours avec le groupe, on est loin de l’album qui révolutionne tout, du LP qui va changer la face du monde électronique. Mais ce n’est clairement pas ce qui semble les intéresser. Eux veulent juste enchanter les gens, infiltrer nos cerveaux, nous accompagner pour de nouveaux moments de vie. Réactiver les mémoires. Bousculer la mélancolie. Donner, tranquillement, l’envie de voler.

Et pour la première fois depuis un bail, le groupe déboule avec un album complet, efficace, homogène, pertinent à 100%. Elles sont loin, les velléités de fresques sans fin, d’album à multiples facettes, de tracks intervalles. S’il est difficile de placer Reachy Print comme le meilleur disque du groupe, il en est peut être le plus implacable, le plus facile à ingérer, tout en étant le plus riche, le plus dense. Il y a encore les tics et mélodies inhérentes aux anglais, mais les morceaux débordent de détails, de synthés inédits chez Plaid, d’exercices risqués (Ropen, Liverpool St, Nafovonny…), avec une production en mode 3D que l’on entendait pas forcément auparavant.

Certes, il y a toujours du fan service. Mais en écoutant ce Reachy Prints, chose qui m’avait grandement manqué sur Scintilli, je me surprends à nouveau à rêver, à sourire comme un con, à vouloir courir en pleine rue, la nuit, les bras écartés en me marrant. A avoir une mini larme aux yeux au détour d’une litanie mélancolique. Penser aux âmes tristes et disparues. Et me dire que peut-être, je risque de chanter certains de ces morceaux dans 10 ans encore.

Plus que tout, Reachy Prints me rassure légèrement : finalement, je n’ai pas totalement perdu mon âme d’enfant.






PLAID – MATIN LUNAIRE from Clement Oberto on Vimeo.






Plaid – Wallet






10 titres – Warp / Beat Record

Dat’

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