Jacques Greene – Ready EP

Posted in Chroniques on August 27th, 2012 by Dat'


Step in the arena



Bon clairement, le mois d’aout, c’et le pire mois pour uploader son site. Les lecteurs ont autre chose de prévu, et les rédacteurs n’écrivent pas non plus car ils sont mieux à cramer leurs fesses au soleil. Bon, pour moi, ce n’était pas vraiment ça, car à Tokyo on crame tout court, écrasé par la moiteur digne d’une ile tropicale (on est dans les 80% d’humidité) et des températures qui ne descendent jamais, même la nuit (je voyais il y a peu des dépêches sur la canicule en France, comme quoi il faisait 35 degrés le jour, mais surtout 25degres la nuit à Lyon, et que c’était un record). Les mecs, au Japon, il fait 35 degrés le jour, et c’est quasiment la même chose la nuit. C’est d’ailleurs un truc que je ne comprendrais jamais. Pendant 1 mois, tu restes collé à la même température, que tu te lèves tôt pour aller bosser, que tu te balades un après midi ou que tu sortes d’une boite à 4 heures du matin. C’est gluant.

Bon, évidemment en Aout, des disques sortent. Je ne savais pas trop quoi chroniquer, et j’étais vraiment parti sur le Teengirl Fantasy, au tracklisting vraiment alléchant (des feats de Panda Bear ou Romanthony) et surtout une promesse de confirmer ce que l’on avait entendu dans le bien sympa premier album. J’achète le disque, malgré sa pochette repoussante (on commence à avoir l’habitude), et je le lance avec la bave aux lèvres : quelle déception. Enfin non, ce n’est pas vraiment mauvais, c’est surtout que ça n’a aucun intérêt. Pas de souffle épique, pas de grande fresque spatiale comme l’on pouvait en trouver dans le premier LP… tout reste plat, sans relief, sans morceau qui te frise la colonne. Tout le potentiel entrevu dans certains morceaux sublimes (Cheaters, Forever the Feeling…) d’il y a 2 ans a disparu. Et c’est triste.

Je voulais aussi chroniquer le nouvel EP de World’s End Girlfriend, mais je n’ai pas pu le chopper, édition ultra limitée. Affaire à suivre. L’Ep de Bambounou ne m’a pas non plus passionné. Il me restait alors une nouvelle salve de Jacques Greene, ma tête favorite de ce mouvement Uk / 2step / House qui n’en fini plus de sévir. 2eme Ep cette année. Et franchement, cette nouvelle monture écrase celui sorti en Janvier.







Ca commence comme un Burial, avec un rythme 2step lourd et des voix éthérées. Donc bon, déjà, tu sais que tu vas aimer ce Ready, que ça va être drôlement bien. Mais la “Jacques Greene touch” arrive vite, et démontre bien heureusement que le canadien est loin de n’être qu’un copycat du mystérieux londonien. Des synthés s’immiscent dans la structure, le tout prend des apparats plus techno, et c’est parti pour la plongée club de folie, avec fumée de clopes en mode pure de pois, et mannequins drogué(e)s affalé(e)s sur les sofas. Le morceau n’oublie jamais de respirer, avec des breaks qui font ressurgir les voix d’anges slow-motionnées, mais le tout tabasse grave comme toute bonne track qui se respecte après 4heures du matin. Bombe imparable. Qui a justement ce petit coté “tube drogué” qui manquait au dernier Ep de Mr Greene.

Prism débute façon plus futuriste, on pourrait caser cette introduction dans un Wipeout 2097 sans problème (c’est un immense compliment pour moi). La mélodie se fait plus enjouée, plus entrainante, mais c’est les voix pitchées, arrivant en nombre, qui donnent le top départ, et envoient le morceau sur les rails d’une techno hypnotique et libidineuse. Milieu de track, une litanie cristalline se fait entendre, et te téléporte de la cave cradingue au toit d’un building écrasé par le soleil. Plus aérienne, plus mélodique, moins encrassé, Prism envoie vite dans les nuages, du long de ses 7 minutes 30.

Mais mais mais… Dakou clôt cet Ep. Et Dakou, n’est disponible que sur l’édition digitale de ce Ready EP. Alors je vais le dire haut et fort, et c’est rare : laissez tomber le vinyle, et sautez sur la version itunes. Parce que ce dernier morceau est immense. Un vrai diamant. Tout est là pour faire de Dakou un grand titre. Des voix pitchées parfaitement placées. Un rythme techno caverneux. Une mélodie sublime. Dans les 30 premières secondes, quand le clavier s’enroule seul, soutenu par ce trait mélancolique, avant que le tout parte en club, tu sens littéralement ta colonne se raidir. Le morceau n’arrête pas d’évoluer, de se déplier, de chialer sa tristesse toujours matinée d’une facette dancefloor absolue. C’est le grand écart parfait entre spleen et décadence, c’est pile ce que sait faire de mieux Jacques Greene, c’est ce que l’on avait perçu une poignées de fois dans ses anciennes productions (Good Morning, Another Girl, Lotus Flower remix…) et ce que l’on attend absolument de lui dès qu’il sort un truc. Tu arrives à la moitié de ce bonheur, et tu te dis que c’est déjà bien mortel. Jacques Greene, peu avare en grosses mandales, réserve pourtant une sacrée surprise. Tout à coup, sans prévenir, une grosse ligne Acid déboule dans le morceau, histoire de t’arracher littéralement la gueule. Le tout part dans un trip camé du plus bel effet, superbement maitrisé, te collant dans le même mouvement des larmes dans les yeux et des tressautements dans les hanches. Quand le titre meurt, après 7minutes pareilles, tu te dis sans hésiter que ce Dakou pourrait bien être le plus beau titre de Jacques Greene.


Mais tu te dis aussi qu’après deux ans et 7 Ep de grande classe, il serait vraiment temps que Jacques Greene pense à accoucher enfin d’un LP. Tant ce dernier pourrait bruler toute concurrence en un claquement de doigts.









3 Titres – 3024 Records

Dat’

Facebook



Tags: , , , ,

Ruby My Dear – Remains of Shapes to Come

Posted in Chroniques on July 17th, 2012 by Dat'


Crache



L’acier fatigue. Les machines qui implosent aussi. Aux collisions il préfère la mélasse. Aux usines grises et désaffectées la mégalopole, dépressive et bardées de néons roses. Besoin de respirer entre les chocs. De sentir la lumière, le soleil, de croire à la fin de la nuit. Il faut que cela gronde, il faut que cela fulmine, il faut que cela hurle, mais freiner le chaos. Quitte à se faire tabasser, autant être bien installé sur un sofa une clope au bec, qu’attaché sur une pauvre chaise dans une cave, les pieds dans la flotte. Désormais lécher le sang des autres, plutôt que de panser ses propres plaies.

Frog Pocket, dans l’article précédant, l’a bien compris. Violence furibarde certes, mais lumineuse, émotionnelle, brillante. Fracas et destruction oui, mais frissons et mélodies surtout. Ad Noiseam, label au combien indispensable de l’électronique européenne, oscille souvent entre l’étouffant et la clarté. Le label avait frappé fort l’année dernière avec des galettes comme celle de Raoul Sinier (imprimant parfaitement cette dualité), d’Enduser ou Igorrr. Et voila qu’un nouveau français s’y colle, et tente de nous casser la gueule à coup de breakcore, genre qui n’est plus aussi motivant qu’il y a quelques années. Sauf que là, le breakcore de Ruby My Dear est salement propre, riche et racé.








Ne vous méprenez pas, le français tabasse dur sur certains morceaux. Après un étrange Maiden qui aurait pu se faufiler sur le Something Wicked This Way Comes des Herbaliser, Ruby My Dear balance la sauce avec un Rubber’s Head ultra violent, oscillant entre drill’n bass couillue, breakcore épileptique et bassline d’enculé que n’aurait pas renié un Reso. Les notes cristallines qui perlent ne font pas illusion bien longtemps, c’est bien la sauvagerie qui prime sur cette track. A partir de 2min25, c’est comme si on te prenait la gueule pour te la frotter contre le bitume.

Ca commence bien ? Oui. Mais c’est encore mieux sur le titre suivant, Karoshi, le tour de force de l’album. Mélodie japonisante sublime, qui glisse dans tes oreilles en frisant presque avec l’émo. Plus d’une minute trente de beauté, de temples made in Asakusa et de litanies lumineuses. Puis c’est le bordel, le fracas, le chaos total. Break qui explose, rythme qui se cabre, grogne et s’insurge. Pourtant le morceau n’oublie jamais de respirer, et l’on n’est pas sur du tabassage non stop. Chaque soulèvement est vécu comme un permis de tuer,  et les pauses permettent de se remettre le cerveau en place. La mélodie mec. Du breakcore oui, mais de la mélodie belle comme la nuit, aussi.

Ruby My Dear ne résiste pas à balancer quelques ogives nucléaires matinées de reggae-dub. Uken est jouissive, avec sa rébellion fermentée dans la weed et ses voix d’anges tentant de perler dans ce marasme hystérique aux 100 samples. Rhythm-a-ning te sort le dub enfumé qui se fera violer par du hardcore. La longue outro te permettra à peine de laver le traumatisme. Chazz fracassera du Dancehall featuring cordes asiatiques, ça pourrait faire penser à du Filastine sous stéroïde, qui aurait décidé de sortir les basslines pour bruler le monde. Ouai parce que les basslines, ça a l’air d’être l’autre truc de Ruby My Dear. Sur Monk’s Dream, qui n’a de Thelonious que le nom, c’est l’émeute totale, le soulèvement divin, les plaies d’Egypte. Après t’avoir brisé le cœur sur une superbe intro, il faut le souligner. Le mec te caresse dans le sens du poil, te chuchote à l’oreille que tout va bien se passer, avant de te foutre la main dans le mixeur avec le sourire aux lèvres, en mode Goonies pour adultes adeptes de la sodomie.





Mais mais mais… Ruby My Dear a l’intelligence de ne pas tabasser outre mesure, tel un sauvageon adolescent qui taperait sur les murs de sa chambre sans discontinuer. Non, tous les morceaux précités, s’ils sont sacrement tordus et cramés, réservent toujours des plages belles à croquer, pleines de respirations salutaires et mélodies glacées. Ses fresques soufflent le chaud et le beau, et le français sait parfaitement stopper le massacre au bon moment pour éviter l’overdose, et nous emmener sur des terrains plus cléments. Le tout cristallisé sur le très beau Pannonica, son intro hiphop ensoleillé bardé de clochettes candides et violons qui draguent la colonne vertébrale. Alors oui, ça va partir dans une drill’n bass d’écorché, pleine de vrilles et de rouille. Mais putain, qu’est ce que c’est beau, une drill pareille, violente ET mélancolique. Ravagée mais fragile. Ca s’emballe, ça explose de partout, mais ça emporte ton âme dans les nuages. Et cette conclusion qui file la chair de poule, avec ces chants religieux et ce beat claudiquant. On frise la perfection.

Knit for Snow arrivera au bon moment, lorgnant plus du coté de la Bass Music, avec un rythme qui n’en fini plus de se nécroser, et des samples qui ne cessent d’apparaître. C’est beau, et tu en claquerais presque des doigts, si la bassline de la fin, sur cette mélodie aérienne en diable, ne t’arrachait pas la mâchoire. Du bon boulot.

Et puis il y a les deux monolithes, les deux marathons du disque, qui frisent les 10 minutes. Syuma tout d’abord, qui en fera chialer plus d’un avec son simili-orgue désabusé, ses changements de rythmes incessants, ses ruptures abusées, comme si le sol se dérobait sous tes pieds toutes les trente secondes. Et L.O.M (loutre oblique méridionale), qui va te déballer ses couilles des le départ histoire de bien te montrer qui est le patron ici. Sans faire impasse sur les samples français débiles qui doivent bien être tirés d’un reportage made in Tf1.






De la drill de sauvage? Non. Du breakcore de cathédrale ? Sans hésitation. Ruby My Dear te balance sans crier gare (je n’avais pas entendu ses anciennes sorties, si l’on excepte son remix du dj shadow, le seul que j’avais gardé de la compilation d’ailleurs) un putain de disque avec Remains of shape to come, maitrisé de bout en bout. Le bonhomme sait laisser des pauses dans son album, des respirations qui permettent de s’avaler le tout sans s’étouffer.  Mieux, même si le mec ne rechigne pas à te foutre des mandales en pleine gueule, il pense surtout à te planter des étoiles dans les yeux et des papillons dans le ventre. Ecouter un disque du genre en sautant partout dans son appart, c’est bien.

Mais profiter de Ruby My Dear en secouant gravement la tête, tout en ayant la petite larme mélancolique qui te coule sur la joue, c’est encore mieux.






Ruby My Dear – Karoshi





13 titres – Ad Noiseam

Dat’

Facebook




Tags: , , , , , ,

Frog Pocket – Frog and the Volcano!

Posted in Chroniques on July 7th, 2012 by Dat'


Hot Pocket, Frog Jambon



Il est clairement acté que le label Planet-Mu s’est écarté de ses aventures electronica sibyllines pour le Dubstep rugueux et le Footwork sous crack, il arrive parfois que de petites perles émergent.  Come On Primates Show Your Teeth ! sorti en 2007 en faisait parti, sublime disque de drill’bass épique, mélodique et violente. Ce disque cristallisait un peu tout ce qui se faisaient de mieux dans le genre, avec un coté très référencé certes, et une recette un peu systématique, mais diablement maitrisée. Des trésors comme “Bo’Aright”, ou “Rig of the Jarkness” (cette progression…) et surtout “Dungeon Hills” n’avaient rien à envier aux maitres de l’IDM, et soufflaient la tempête tout en pétrissant les cœurs, prolongeant un exercice déjà parfaitement mené sur Gonglot, premier LP sur Mu en 2005. Frog Pocket, écossais de son état, pouvait compter sur sa maitrise du violon (entre autre) pour sortir du tout électronique, et offrir à ses constructions drill’n bass des facettes classiques belles à pleurer. Depuis ce disque, il y a 5 ans donc, plus aucune nouvelle, pas une sortie, rien, que dalle. On avait presque oublié l’artiste. Jusqu’à ce que sorte de nul part, sur une structure ressuscitée pour l’occasion, un nouvel LP intitulé Frog and the Volcano!. Ouvre les yeux, il t’emmène en voyage, sur un nuage, ouvre les yeux.







5 ans ont passé, et Frog Pocket n’a pas vraiment changé. Les dix premières minutes passées sur l’album suffisent de convaincre que l’écossais est toujours aussi sauvage, sans jamais oublier l’émotion. Pourtant, si le musicien n’a pas muté, il a évolué sur certaines sonorités, dans la manière de faire exploser ses morceaux notamment. Bholcan démarre sur des violons ombrageux, se déliant pendant plus de 2minutes, avant qu’un rythme électro lent, hiphop de fin de vie, rampe en gémissant sur un champ de bataille dévasté. L’orchestre se réveille peu à peu, on est clairement dans la fin d’un film de guerre, avec nappes mortuaires et guitares lancinantes. Le beat vrille progressivement, trébuche, hésite. Et c’est la dernière scène, l’assaut du désespoir, la charge finale qui déboule : énorme mur du son, guitares saturées, goules hurlantes, shoegaze de fin du monde. On a pigé, Frog Pocket ne fait plus hurler ses machines lors des climax, il convie un mur de gratte noisy pour t’arracher la gueule. Même effet, puissance décuplée. La fin du morceau est désolée, on croirait presque retomber sur la Mezzanine, qui vient de se prendre un tapis de bombe sur la tronche.

Ces déchirures shoegaze-noisy, on va les retrouver plus d’une fois sur cette galette, avec l’éponyme Frog and the Volcano notamment. Là aussi, on va nous servir une longue introduction, et un rythme claudiquant. Ca prend énormément de temps pour se poser, pour t’enlacer, pour te griller les neurones. Pour un titre qui dure 10 minutes, c’est de coutume me direz vous. Oui, d’autant plus que les détails ne manquent pas, que chaque soubresaut de rythme s’imprime, chaque petit changement délecte. C’est céleste, aérien, fragile. Beau surtout. On sent le truc monter, on perçoit la violence sous jacente du morceau, qui s’emballe, péte graduellement un plomb. 4minutes, tu commences à retenir ton souffle, tu sens que ça va partir. 5 minutes, Shoegaze épique sur drill’n bass cramée, c’est sublime, épique, ton cœur est écartelé. Tu vois Pale Saints qui voudrait faire un feat avec Flashbulb ? M83 qui voudrait poser ses nappes sur du Aphex Twin ? C’est un peu le même trip. Et ça continue d’exploser, de gronder, de rugir. Le rythme se transforme en perceuse, les claviers en typhons. De l’or en putain de barres.

Tu veux continuer à te faire poncer le cerveau ? Pas de problème, un peu plus loin se trouve Spider Fog, qui démarre comme une Desert Session dans Joshua Tree, avec une guitare près des dunes, avant qu’un rythme commence à cavaler tranquillement. Tu visualises bien Frog Pocket lancer sa boite à rythme et jouer de la gratte dessus, en tirant sur une clope sans filtre. Au bout de 6 minutes (le titre en fait 11), on commence à voguer vers l’IDM, avec un beat plus frappé, et quelques nappes à l’horizon. Ca commence à groove sec, Chris Isaac a fait ses valises pour être remplacé par des sonorités aciiiiiiiid et de brusques revirements de métronome. Jusqu’au traumatisme final, énorme mur noisy à t’arracher les implants PIP, attaque héroïque d’un androïde qui veut tout détruire sur son passage. D’une violence abusée, mais brève (orgasme d’environ 1 minute) qui prend tout son sens dans cette conclusion ultra chaotique. A place to Bury my ears, please.





Je vois venir les vieux de la vieille : “ouai mais Frog Pocket, ben il fait tout le temps tout cramer à la fin de ses morceaux, au bout d’un moment, c’est un peu redondant t’as vu”, et je ne peux pas dire le contraire, c’est même le principal (seul ?) reproche que l’on pouvait faire à Come On Primates… LP. Ici, c’est moins systématique, et ses dégâts atomiques sont bien disséminés dans l’album. Car ici, les morceaux drill’n bass ne se finissent plus forcément par une charge de babouins en ruts.

Crow Hill Jig lorgnera du coté des après midi pluvieux avec ses notes cristallines et ses violons lancinants, le tout parsemé d’un petit rythme qui claque sévère. Taquets imprimés sur la nuque, frappant sans crier gare, les boites à pensées du bonhomme servant une electronica racée qui va virer au mélancolico-mystique avec cette guitare de toute beauté, et ses cordes cinématographiques. Au lieu de s’emballer, le morceau deviendra aérien, sublime conclusion pleine d’optimisme et de lumière, avec une mélodie à chialer et des soubresauts rythmiques qui contenteront les oreilles en quêtes de fêlures. Négatif presque parfait des tracks énervées du dessus, on troque ici les grondements industriels pour l’amour et les sourires candides. Ca me ferait presque chialer tellement c’est beau tiens.

Prog Focket (ahah) n’invoquera pas les ouragans non plus, et partira sur une drill’n bass très ressemblante à ce que l’on pouvait trouver dans les anciens albums du bonhomme. Ca craque de partout oui, mais ça sent surtout les grands espaces, les courses à plusieurs dans les prairies bardées d’herbe verte, écrasées sous un soleil de plomb. Il y a tout, guitare, violon, rythmbox en roue libre et nappes larmoyantes, et c’est foutrement bien fait. Castle Green fera méchamment penser au Flashbulb de l’époque Kirlian Selection (le morceau aurait pu se glisser dedans sans soucis) et conjugue electronica fragile avec cordes et notes de simili-harpe pour te draguer le palpitant. Même ton chat adore ça.

Enfin, Frog Pocket, comme d’habitude, ce n’est pas que de l’electro déstructurée ou rugissante, mais aussi quelques vignettes acoustiques bien branlées, où John Wilson nous montre comment bien manier le violon et la guitare. Bird Flower Jig fera un peu flipper avec ses percussions aquatiques, mais le bref Monimail Tower, ou la conclusion Snow Dance voleront bien des cœurs avec leurs cordes pincées et leurs mélodies asthmatiques.





Bon, impossible de ne pas révéler la grande similarité entre certaines sonorités de morceaux  de ce nouvel LP avec celui sorti il y a 5 ans (Crow Hill Jig ou Prog focket auraient clairement pu se glisser dans Come On Primates…) et le musicien continue de faire des morceaux en mode “longue montée > explosion > conclusion acoustique”. Certes. Mais putain, comme ce type le fait bien. Et puis Come On Primates… était un album qui te donnait beaucoup de bonheur, alors que cette nouvelle galette lui ressemble, on peut lui pardonner, il y a plus grave dans ma vie.

Car même si l’on sait presque d’avance comment Frog Pocket va faire évoluer ses morceaux (si l’on excepte l’enchanteresse conclusion de Crow Hill Jig, innatendue), comment il va malmener ses derniers, on ne peut que s’incliner devant sa maitrise de l’exercice. Impossible de renier le plaisir fou à écouter ces longues tirades orchestrales et furibardes, ces fresques gorgées d’émotion et de violence. Sans compter que ce petit coté shoegaze noisy vs drill sur certains morceaux (Frog and the Volcano, ce chef d’œuvre) donnent de nouvelles couleurs à l’écossais, et rappelleront parfois même les meilleurs moments de World’s End Girlfriend.

Frog Pocket sort un album electronica hors temps, un album qui aurait pu sortir en 2001 comme en 2020. Il y a des recettes qui ne se périment pas, et quand il s’agit de se faire arracher la gueule grâce à des envolées drill’n bass de folie et des mélodies superbes, on ne peut que demander du rab.

Belle mandale, superbe disque, gros coup de cœur.






Frog Pocket – Frog and the Volcano






10 Titres – MouthMoth

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Cum On My Selector 4

Posted in Chroniques on July 1st, 2012 by Dat'


Nous sommes des créateurs avant tout




>         Action Bronson & Riff Raff – Bird on a wire

Ok, Riff Raff a une tête de dégénéré. Ok, taper Riff Raff dans youtube, c’est avoir 99% de chance de tomber sur une daube, à l’instar de Lil B. Ok, Action Bronson a raté sa vocation en ne participant pas à la création de Epic Meal Time. Et pourtant, les deux mecs viennent de pondre l’un des plus gros titres hiphop de ces 6 premiers mois, le tout bardé d’un clip superbe. Le morceau tient évidemment d’abord grâce à la superbe instrue de Harry Fraud, que l’on entend partout en ce moment, et qui prend du galon presque toutes les semaines (il faut écouter le dernier album de Smoke DZA entièrement produit par Mr Fraud). Bref, cette instrue minimaliste, sans réelle progression contient pourtant une boucle hypnotique comme la mort, presque parfaite. Et puis tu as l’ouverture de folie d’Action Bronson, qui assassine le morceau en quatre phrases : “Blow a kiss to my dick / Wash my body with a sponge / Leaving the party with your daughter / In the morning do karate in the water”. L’autre zozo assure le taff avec un couplet maitrisé et étonnamment court comparé à celui du gros balaise, et qui étonne quand on s’est tapé touts les grosses merdes pondues par Riff Raff auparavant. Les Mc se taisent, mais l’instrue continue de rouler, comme par magie, pendant une bonne minute restante, histoire de nous convaincre que l’on a bien dans les tympans l’un des beats/morceaux de l’année.






>         Kahn – Margeaux part I & II

L’album de James Blake ayant subit un rejet assez incroyable lors de sa sortie malgré son succès dans certains médias, je me suis toujours demandé si des groupes allaient quand même suivre les pas de l’anglais. Kahn (de mon coté inconnu au bataillon avant ce morceau) balance avec Margeaux un Ep qui pourrait clairement s’inscrire dans la lignée du James Blake LP. Mais ici, point de chant minaudant mis au premier plan. On ressort le rythme Uk Garage et la bassline sautillante . Le chant autotuné est bien présent, très beau, éthéré en diable, plus abstrait, incantations illogiques et cotonneuses couchées les unes sur les autres. La part II partira même dans un délire un peu plus fragile, les mots sont inaudibles, pas de phrases, mais des syllabes et expirations malaxées et mises en petit tas sur un rythme parfait et une mélodie cristalline. Il va falloir surveiller le bonhomme de très près sur ses prochaines sorties…






>         Future – Turn on the lights

Comme de coutume avec les albums de rap mainstream épousant l’indépendant (Kid Cudi, Drake, Kanye West…), il m’est impossible d’aimer un LP sur sa globalité. Quelques morceaux rayonnent, cartonnent tout sur leurs passages, mais sont placés au milieu d’un LP mi-figue mi-raisin, ou qui s’éffondre complètement à mi-parcours. Future, on en parle beaucoup. Son album Pluto aussi.  Et comme d’habitude, impossible d’accrocher sur plus de 50% du disque. Mais en naviguant tranquillement dans le LP, on tombe sur Turn On The Lights. Putain ce morceau ! L’intro splendide, cette utilisation du vocoder parfaite, cette voix pétée, cette instrue complètement émo, ce synthé qui n’en fini plus de s’envoler… Le mec te parle d’amour, de sa nana rêvée, et il s’adresse à nous comme s’il était à moitié bourré, à moitié en train de chialer, toujours sur le fil, la voix éraillée, cassée, crevée, pilonnée par un vocoder qui devrait être toujours utilisé de cette manière. L’album paraît presque fade à coté de ce titre puant la vodka et la barbe de trois jours. Au lieu d’un rapper qui rappe normalement à coté de Rick Ross ou Snoop, on entend ici une épave qui postillonne au sujet de sa muse, les yeux rouges et les mains tremblantes, avant de s’écrouler par terre.  On aimerait presque être à sa place.






>         Phon.o – Fukushima

Bon, Phon.o a clairement sorti un des albums de l’année avec son Black Boulder. Pourquoi en reparler ? Parce que la Modeselektion vol2 vient de sortir, et que dans cette compile bardée d’inédits se trouve ce Fukushima, qui explose toute concurrence. Ce morceau serait sur Black Boulder qu’il incarnerait le meilleur morceau du LP, à égalité ave Slavemode. Rien de spécial, c’est du Uk-2step bien pute, avec voix dance pitchées, rythme de folie, et progression qui te rendrait fou, tuerie absolue qui te ravagerait tout dancefloor un peu camé sur les bords. C’est tellement bien fait, tellement maitrisé, que l’on frise l’orgasme auditif. Une des bombes electro de 2012.






>        Danny Brown – Grown Up

Danny Brown m’est sympathique, même si son album XXX ne m’avait pas renversé, alors qu’il contient pourtant des moments bien coolos. Le flow du type est assez atypique, ses punchlines crades et marrantes, et son coté gros drogué hype couplé à une attitude candide désarçonne forcement. On le voit partout, il fait des featurings en rafales, à ne plus pouvoir le suivre. Et entre deux apparitions, pour le fun, il te balance un morceau, Grown Up, qui va un peu à contre courant de ce que l’on entendait sur XXX. Quelque chose plus lumineux, pas prise de tête, sympa et marrant.

Je n’ai pas grand chose à dire sur cette track, que j’écoute simplement souvent avec plaisir. En fait, ça me rappelle un pote, qui, à chaque fois que je n’étais pas convaincu par un morceau qu’il me passait, me disait “mais attends mec, ce morceau, il passe crème !”. Ben voilà, ce Grown Up de Danny Brown, il passe crème. Grave.






>         Squarepusher – 4001

Ce n’est plus un secret : je n’ai pas vraiment apprécié le dernier Squarepusher, que j’attendais pourtant depuis des lustres, surtout qu’il imprimait un retour vers l’Idm sauvage de ses débuts. L’album est trop technique (on a l’impression que le mec passe tous ses plug-ins ableton en revue), trop dans la démonstration, trop “trop”, et ne m’accroche pas vraiment mélodiquement non plus. Pourtant, impossible de nier que la galette contient quelques morceaux assez énormes, comme l’affolant Dark Steering.  Mais surtout l’ouverture 4001, qui m’a mis une baffe violente. Parce que contrairement à pas mal de ses potes dans Ufabulum, ce 4001 est beau. Vraiment beau. Les synthés qui démarrent 1min37, avec ces réminiscences trance/dance m’ont littéralement arraché l’échine, et l’accélération qui suit juste après te décroche la mâchoire à coup de talons. C’est Squarepusher qui revient vers l’Idm épique et émo, celle qui négocie les virages pour te taper directement dans le cœur, tout en n’oubliant pas de te faire lever les bras. Ce morceau pourrait renverser un dancefloor entier, et te faire pleurer un dimanche soir seul dans ton appart, à regarder la pluie tomber. C’est hystérique et mélancolique dans le même mouvement, et ça synthétise parfaitement ce coté beauté vs chaos qui définie pour moi l’IDM que j’aime par dessus tout.






>         Neako – The Lufthansa Heist & 1 333 777 2323

Revoila Harry Fraud, pour la deuxième fois sur l’article. Pas de ma faute si le mec produit gemmes sur gemmes. Ici, c’est le Mc Neako qui s’y colle, aka le rappeur ayant les pochettes de mixtapes les plus moches du monde (à égalité avec M.I.A) et les titres les plus chiants à retenir (après le drukqs d’Aphex Twin). Le Neako a donc sorti il y a peu une nouvelle mixtape pour te griller la cornée avec son artwork, mais aussi pour te caresser les oreilles. Dans cette LVLZebra, du très bon, dont un LVLNWK et son utilisation d’un vieux vieux titre de Moby (j’ai eu du mal à replacer le sample), ou un sauvage LVLerika ARMY. Mais deux titres sortent clairement du lot, et écrasent la mixtape de façon atomique : le très très beau et aérien 1 333 777 2323, qui commencerait presque comme un Burial, et délivre une instrue parfaite pour le flow posé de Neako. Deuxième tour de force, Harry Fraud épaulera le Mc sur The Lufthansa Heist, et son instrue pleine de volutes droguées, là aussi à tomber. Bonheur.






>         Gravious – Lodestone

Certes, ce morceau n’est pas apparu en 2012, mais l’année dernière. Mais il est tellement cool qu’il me fallait le glisser dans cet article. Ca commence comme un bon dub, avec cliquetis métalliques, échos qui vont bien et bassline rugueuse. Tu t’attendrais presque à ce qu’un mec vienne toaster sur le tout, mais c’est une mélodie cristalline qui vient se greffer au tout, histoire de t’envoyer planer directement dans les nuages. Le titre passe du dub à la techno londonienne, ça s’enflamme, s’envole et se nécrose, et des notes simili-8bits viennent perler dans le morceau. L’Ep Junction City de Gravious est une bombe dans son ensemble, oscillant entre dub cradingue et techno aérienne de grande classe (la track Lunar Module est superbe elle aussi). Un bon plan pour les oreilles.






Dat’

Facebook




Tags: , , , , , , , ,

Andrew Bayer – It’s Artificial

Posted in Chroniques on June 20th, 2012 by Dat'


English Breakfast



Alors certes, cet album était déjà placé dans le Top 2011. J’en avais parlé un peu, vite fait, car ce disque avait marqué mon année, mais n’avait pas fait l’objet d’une chronique dans ces pages, comme des tonnes d’autres sorties oubliées. La flemme, le manque de temps, le manque d’envie, Fukushima ou les oreilles rayées, je ne me souviens plus de la cause.  Mais ça arrive, et bien trop souvent. Vu que mes Tops sont un peu trop fleuves, ce disque, dont pas grand monde n’avait parlé l’année dernière d’ailleurs, pouvait passer inaperçu entre les bombes balancées par Seekae, The Weeknd ou Kuedo. Mais depuis quelques semaines, je ne sais pas pourquoi, je me replonge dans ce It’s Artificial que je n’ai pas quitté sur la deuxième partie de l’année dernière, à cause de certaines tracks proprement hallucinantes. Plus j’écoute ce disque, plus je me dis qu’il fallait cracher une petite chronique, juste pour le plaisir.

Et pour qu’Andrew Bayer, après m’avoir démoli l’échine en 2011, puisse continuer à distribuer des claques en 2012.








L’album assure musicalement un grand écart étonnant, mais loin d’être désagréable, imprimant une progression dans les styles musicaux, pour un produit final varié mais gardant une réelle identité sur tout le LP. On commence tranquillement sur Nexus 6, et sa longue intro ambiant. Piano clair, nappes discrètes, mélodie presque émo, on flotte au ralenti en tentant de se frotter aux nuages. On pourrait presque entendre une voix shoegaze à l’horizon. Mais au lieu de teintes éthérées, c’est un abstract glitch’hop d’enfoiré qui déboule et raye de la carte toute velléité de rêves ouatés. Le beat tabasse dur, les synthés s’enroulent, Nosaj Thing et edIT ne sont pas loin. Jolie tuerie pour toutes les nuques. Pourtant, Andrew Bayer n’oublie pas la légèreté de son intro, et ferra taire les beats pour un long break lunaire émo, laissant les synthés chialer dans les échos, avant de les tabasser une dernière fois par une rythmique qui n’en fini plus de se cabrer dans toutes les directions.

Très bon titre donc. Mais ce n’est rien à coté du phénoménal Dedicated To Boston’s Waste Management System, l’une des deux merveilles du disque. Putain, ce morceau… Tu sais déjà que tu vas chavirer avec ces violons émo, ces petites clochettes candides, cette mélodie qui te donne envie de courir dans les champs bretons une paille dans la bouche, comme quand tu avais 12 ans. La grosse baffe ?  C’est le rythme hiphop nickel, ultra massif. Il te brise la colonne vertébrale en une seconde, en un coup, comme une punition divine, le coup de fouet que tu redemandes encore et encore sur tes petites fesses rougies. Non mais sérieux, ce rythme n’est pas parfait ? Le truc qui te donne envie de headbanger, de lever les mains en l’air, de taper du poing, et de chialer ta mère dans le même mouvement. Ce beat, c’est allez relever les compteurs dans les rues de Miami avec ton lowrider rose fluo et tes chaines en or, tout en pleurant sur les lettres de ruptures de toutes tes ex réunies. Ah oui, tu as noté ces chœurs religieux qui filent la chair de poule ? Et bien il va se retrouver seul pour un break cristallin tout en retenu, avant que le rythme de folie revienne te tabasser jusqu’à la mort, te fasse pisser le sang directement via l’aorte. Et le pire, c’est que tu aimes ça. La fin est juste épique : c’est comme manger un Kebab avec Booba sur la muraille de Chine, c’est voir ton chat se faire écraser alors que tu es dans la piscine du manoir de Hugh Hefner, c’est genre aussi agréable que de te faire caresser les couilles par les battements de cils d’un ange à la tête bien placée.


Bon, c’est logique, à l’écoute de ces deux morceaux, tu te dis “putain, ça c’est un sacré album d’abstract hiphop / bass music, ce Lp d’Andrew Bayer est émotionnellement mouvant”. Ouai. Tu t’attends à une troisième saillie  déstructurée et pas piquée des hannetons. Et bien, rien de tout ça. Counting The Points te balance la meilleure intro de 2011, pour l’un des meilleurs morceaux de 2011. Une intro qui dure… 2min30, sur un total de 8 minutes.

Et là, on change complètement de délire. Tu as déjà pleuré sur de la Trance ? Tu aimerais qu’Aphex Twin fasse bouger les stades et mouiller les petites sœurs ? Tu voudrais que Tiesto se mette à faire de la musique que tu pourrais passer dans une église ? Ne cherche pas plus loin. Alors oui, l’intro donc : au départ, il y a que dalle. Puis une mélodie qui descend du paradis. Une mélodie ? LA mélodie. Un truc avec des synthés beaux comme la vie. Qui s’installent, s’enroulent, copulent, te donne envie de te tirer une balle dans la tête tellement c’est mélancolique. Mais vu que c’est trop beau, tu ne le fais pas, et tu regardes plutôt la ville mourir, la nuit, perché en haut d’un immeuble. Entre dans le Void. Non mais sérieux, c’est quoi cette intro ? Ce truc 50% trance, 50% analord, 100% épique ? 2min30, un petit piano arrive, un synthé plus agressif aussi. Le morceau commence vraiment. Là ce n’est plus une mégalopole et ses lumières que tu contemples, c’est carrément l’espace, les météores, le bigbang. Le rythme Techno déboule, tu te retrouves dans un putain de manga avec des couleurs pétantes, des néons qui explosent, des bagnoles futuristes qui violent les rues.

Ok, tu bouges la tête, tu as rangé le paquet de mouchoir, tu te dis qu’il est l’heure de danser, fini de pleurer. Tu te trompes. La mélodie de l’intro revient, et couplée au rythme d’enfoiré, ça t’arrache littéralement la tête. Ce passage, c’est la fin, c’est la mort, c’est la perfection. C’est un peu comme si le Pwsteal LdpinchD d’Aphex Twin était remixé par Armin Van Buuren. Oui, c’est bizarre énoncé comme ça, mais j’y crois à fond. C’est épique comme une charge spatiale, comme un immeuble qui s’effondre avec tous habitants qui se tiennent la main en pleurant. C’est le futur, c’est la décharge, c’est la pendaison. C’est Tokyo qui s’enroule sur elle même, c’est conduire à 200km/h dans un tunnel bardé de lumières rouges et jaunes, c’est se jeter par la fenêtre après une dernière fois avoir fait l’amour, c’est regarder un porno moldave sur un écran rétina.  Tu penses que la toute fin du morceau est un peu superflue ? Tu n’as pas tort. Mais ce n’est pas grave, il suffit de revenir au début pour te retaper un orgasme.





Alors forcément, après deux morceaux aussi grandioses, la vie va te paraître bien fade. Mais pas le reste de l’album. De toute façon, on va se repasser ses deux titres ad vitam eternam avant de continuer de découvrir le reste. Mais après ? Et bien, il faut compter sur Andrew Bayer pour assurer méchamment. Monolith porte bien son nom, il tape dans les 9min. Intro bien énigmatique là encore, mais on va vite taper dans la Trance progressive. On ne se cache plus. Fini les larmes, on veut bouger son petit corps. Bassline de salopard, qui grogne et gronde comme jamais, et qui te drague les hanches. Ca se cabre, ça vrille, mais ça n’explose pas. Le rythme te pousse les épaules de droite à gauche, les claviers laissent perler une bien belle mélodie. Mais tu attends cette putain d’explosion, au fur et à mesure que le morceau prend de la rondeur, emplie l’espace, grignote les murs. Mélodie fragile, le tout se tasse, prières et souvenirs radieux au programme. Et boum, on part dans le tube vicié, la bombe ravageuse, le truc qui se doit de passer en club à 4 heures du mat’ pour couper des jambes. Et dans le dernier quart, on lâchera les chevaux, à coup de murs du son, de mélodies cradingues et de rythme qui ne faiblit jamais. Ressentir les coups de règle sur les doigts durant les cours de math en CM2 ? Et bien c’est pareil, mais en dansant.

A Drink for Calamity Jane calmera le jeu, et partira dans une tech-house un peu plus deep, rêveuse et cotonneuse, à base de synthés fragiles et bourrés d’échos. On pourrait penser à un The Field sans les bugs de répétition, à un tunnel tout émo, qui part quand même dans un final tout aussi épique que ses potes du dessus. C’est juste plus aérien, plus rêveur, plus irréel. Andrew Bayer pense aux drogués, ce qui est sympa, et à tout ceux qui, sur un dancefloor, aiment avoir la tête plantée dans les nuages. Du beau boulot. On se retrouvera dans un délire similaire avec From The Earth, mais en encore plus émo, presque religieux, avec chœurs céleste, grosses nappes pleines de brouillard, et mélodie enfantine. Là encore, c’est drôlement beau. Tu as joué à Baten Kaitos ? Tu te souviens, la scène dans l’église, quand tu devais sauvegarder ? Bien joué, c’est un peu ça, mais remixé shoegaze-techno.

Alors forcément, en lisant ces pages, tu te dis que c’est un sans faute. Et bien, pas vraiment. Paper Cranes est sympa, assez tubesque, riche dans sa progression, et plutôt mélodique. Mais elle n’a pas la force des autres morceaux. Le tout semble un peu “forcé”, pas vraiment naturel. On n’est pas horrifié, mais on n’y retournera pas avec le plus grand des sourires non plus. Si on suit bien l’affaire, l’album commence en mode glitch-abstract hiphop, puis part sur de la Trance épique, pour se diriger progressivement vers une techno plus aérienne. Il fallait donc finir cette logique évolution par un morceau ambiant. La mélodie à base de clochette pourra en rebuter certains, il y a un coté “fêtes de noël” indéniable, mais l’ajout de synthés shoegaze et de voix que n’aurait pas renié M83 permettent au tout de clôturer admirablement l’album.






Alors voilà, c’est tout con, mais ce disque est complètement passé inaperçu à sa sortie. Et c’est bien dommage. Parce qu’il contient des titres absolument phénoménaux, avec en tête Dedicated To Boston’s Waste Management System et l’incroyable Counting The Points (le dernier Orbital à coté : pouet-pouet). Parce qu’il te file 50 minutes de musique à tomber, traversant les genres avec une aisance assez folle : Qui pourrait se targuer d’être playlisté par Armin Van Buuren, tout donnant envie aux Mc de poser sur ses tracks, sans oublier de draguer les amateurs d’electronica belle comme la mort ? Qui peut aligner dans le même album un morceau abstract quasi-parfait à faire rougir Clams Casino et une bombe dancefloor belle à pleurer ?

Le mec impressionne, étant pourtant relié par son label et ses connections à la Trance la plus putassière qui soit (ce qui n’est pas un défaut), arrivant à s’extirper de ce carcan pour accoucher de diamants, tout en gardant ce petit coté dance-épique qui fait le sel du mouvement enchainé à Ibiza et consœurs de fiesta. Bref, une chronique désintéressée pour un superbe disque de 2011. C’est peut être hors sujet, mais que voulez-vous, en cette semaine pluvieuse, j’avais besoin, juste un peu, de m’émerveiller.






Les deux mandales :


Andrew Bayer – Counting The Points





Andrew Bayer – Dedicated To Boston’s Waste Management System





8 Titres – Anjunabeats

Dat’

Facebook




Tags: , , , , ,

Ametsub – All is Silence

Posted in Chroniques on June 11th, 2012 by Dat'


King of the ants



Si la musique électronique japonaise continue de tranquillement se scléroser en magasin et de perdre en qualité à tel point que cela rend les rayons de disques minés par 90% de bouses, il reste néanmoins de sacrés représentants d’une électro belle, racée, et parfois (de plus en plus rarement) radicale.  Si la mort de Rei Harakami a laissé un gros vide, et résulte toujours, 1 an après, d’hommages inamovibles dans les magasins (à l’instar de Nujabes), des mecs comme Aoki Takamasa, Joseph Nothing, Himuro Yoshiteru ou Goth-Trad continuent de bien secouer le pays, tout en trouvant un relatif écho dans les contrées éloignées.

Le nippon Ametsub avait frappé un grand coup en 2009 avec The Nothings of the North, album d’electronica éthérée tirant vers l’ambiant. La recette glitch vs ambiant vs piano pouvant paraitre faisandée, mais l’album tenait plutôt bien la route, avec de superbes titres (66, Off road 264, Peaks Far Afield…) qui contrebalançait quelques fresques profondément chiantes. Ametsub était capable du meilleur comme de l’anodin, mais se posait quand même largement au dessus de la mêlée quand la recette prenait. Cette nouvelle sortie, All Is Silence, ne pouvait que créer l’évènement dans le cœur tendre des adorateurs d’electronica made in Japan.









Le packaging est toujours aussi classe, assez proche dans le design du LP précédant, et nous apprends qu’Ametsub est un sacré globe trotteur, ayant enregistré son album entre Tokyo, Reykjavik et Madrid. Les amateurs du bonhomme reconnaitront directement la patte du japonais sur la majorité du disque. Pourtant, on peut clairement affirmer qu’Ametsub a un peu ouvert sa musique, et ne se limite plus à ses gammes trop bien étudiées.

Après une excellente intro presque abstract, Rufouslow débutera l’album de façon aérienne, entre cliquetis expérimentaux et nappes ambiant, pas loin d’un vieux Autechre. Le Japonais ne s’empêche pas de parasiter ses morceaux avec des complaintes d’androïdes qui hululent aléatoirement sur le morceau. Si le morceau est loin d’un grand huit, le tout est d’une richesse dingue, ça fourmille de détails, et les petits changements mélodiques sont légions. Blotted Out commencera de façon presque éteinte, avec une mini harpe electro fragile et litanie cristalline, pour un morceau presque aquatique. C’est comme écouter un ancien Warp la tête sous l’eau, à se laisser bercer par les synthés et les bugs sonores. Mais au moment de boire la tasse, après un break slow-motion qui étouffe et te laisse lentement couler vers le fond, le morceau se soulève, et part dans un shoegaze de folie, à base de grosses nappes émo et échos qui te prennent la gueule pour te la coller chez les anges. C’est d’une beauté folle, tout en restant extrêmement dosé et subtil. Un tour de force, lumineux.

Muffled Blue n’aurait pas été renié par Plaid, avec sa mélodie mi-cristalline mi-piano, enchevêtrée par les bleeps et glitchs electronica chers à Ametsub. Si le piano un peu convenu du départ fait penser aux anciens exercices du Japonais, le fait que le tout se face bouffer par ces roulements fragiles porte le tout, et vole les cœurs. Cloudfall donnera l’impression de se balader dans les nuages, avec un rythme plus sec collé au cul, d’étranges bleeps qui rongent graduellement la structure du morceau, et une mélodie aérienne superbe. On aura même le droit à du vrai ambiant pur jus avec Sun Of Madrid, où seules des synthés languides guideront les tympans. Reste qu’Ametsub limite cet exercice à quelques rares moments du LP, ce qui n’est pas plus mal. Seul le bien morose Lucent n’arrivera pas raiment à convaincre.



Car le Japonais offre une facette un peu plus dansante et rythmée sur ce nouvel album, offrant une respiration salutaire et une diversité qui manquait peut être un peu à son précédant essai. L’exemple le plus frappant est évidemment Precipice Drive, techno dépouillée mais malgré tout épileptique, avec un rythme binaire qui va tabasser des synthés giclant de toute part. C’est comme se pointer dans une rave la tête encore embouée par une nuit sans sommeil : Le beat est étouffé, et laisse la mélodie se dévoiler, déployer son squelette et vriller sous les bugs et assauts discrets d’Ametsub qui s’amuse à casser la structure du titre. C’est superbe, cela aurait pu se caller sur un Oversteps sans soucis, et la dernière minute qui part dans un shoegaze mélancolique finira d’achever les plus réticents.

Vestige for Wind Day est un putain de monument, avec une première partie sublime, mélodie à te décrocher la colonne vertébrale, une putain de ligne qui copule avec un rythme nécrosé, bourré de soubresauts. Tu sais que cela va être un grand titre, que cela rivalise avec bien des acteurs historiques de l’electro mondiale, quand le morceau change doucement de direction, et part dans une techno hypnotique, très émo, avec des synthés qui rampent en chialant leur mélancolie. Le tout part dans une course au ralenti, on se demande ce que veut fuir le morceau, ça ne s’arrête plus, les synthés et effets sonores tombent en slow-motion sur nos têtes, les balles ambiants frôlent les oreilles, une réussite absolue. Dimmur ressortira aussi le pied techno, pour une mélodie fragile faite de clochettes et d’arpèges fascinants. Pas de changement brutal, pas de construction échevelée, une simple et belle progression envoutante. Over 6633 balancera la même recette, en plus expérimental, avec des arpèges synthétiques qui n’en finissent plus de s’enrouler autour de chants d’oiseaux, le tout plongé dans une purée de pois, un vrai brouillard sonore qui n’est pas sans rappeler les exercices d’Actress sur son dernier disque. Avec beaucoup plus d’émotion, de détails et de poésie.





Le Japonais Ametsub, sur ce nouveau LP, impressionne par son sens du détail. Chaque morceau recèle de synthés, de mélodies cachées, d’anfractuosités, et surtout de surprises. Et ce sont ces surprises distillées tout au long de l’album qui le portent, qui donnent une richesse impressionnante au LP, et détachent ce dernier de la majorité des disques ronflants du même genre.

En injectant un coté plus direct et plus techno à son disque, Ametsub sublime son All Is Silence, et évite de rendre une copie similaire à son LP d’il y a 3 ans. Car même si l’univers est semblable, il y a un monde entre The Nothings Of The North et ce All Is Silence. Ce nouveau disque est plus beau, plus varié, plus riche, plus mélodique et se pose comme l’un des indispensables de l’électronica 2012. Un petit diamant.







Ametsub – All Is Silence (album sampler)






12 Titres – Nothings66 Records

Dat’

Facebook




Tags: , , ,

Budamunk – Blunted Monkey Fist

Posted in Chroniques on June 4th, 2012 by Dat'


Un gangster, j’ai toujours rêvé d’être



Ok ok je suis désolé de me toucher constamment le chibre sur Tha Blue Herb avec tous mes articles, mais ce n’est pas de ma faute, vu que le groupe de Sapporo est la meilleure formation from Japan. Mais il n’y a pas qu’eux en hiphop japonais, et l’on a déjà du croiser deux ou trois autres noms dans ses pages. Je pense au crew MSC, une belle bande de camés qui errent entre le kabuki-cho et Okubo-dori. A dire vrai, surement l’un des rares groupe du pays qui parlent de crack, de gangsta-deal et de combines mafieuses en connaissance de cause (contrairement à la centaine de groupes america-fakes peuplant les enceintes tokyoïtes), et si tu croise Kan dans la rue, il ne vaut mieux pas se foutre de sa bedaine. Tu as aussi la bande à Dj Baku, et tous ses potes de PopGroup/Kaikoo, avec les Mic Jack Production en tête (qui ont un peu perdu de leur superbe).

Bon évidemment, j’évite de parler de tous les débilos à la M-flo, toutes les daubes hip-pop qui peuplent les charts Japonais, et tous les tubes j-pop qui balancent un couplet rap pour la forme, par des mecs que tu verras une fois dans un clip, avant qu’ils disparaissent dans le néant du roaster Avex. Le tout à écouter histoire de te donner envie de te planter un couteau dans l’oreille, puis d’y presser un citron, avant de foutre du gros sel sur les lambeaux de chair restants.

Mais depuis deux trois ans, un Mc est partout dans les magasins : S.L.A.C.K. Le mec sort des albums tous les six mois, et après un Myspace produit entièrement par lui même, s’est découvert une bande de sacrés balaises. Au milieu, un beatmaker, Budamunk (ou Budamunky selon les releases) qui s’occupe d’une bonne partie des productions du label Jazzy Sport, et sort lui aussi des  disques en rafale. Le mec a d’ailleurs sorties les meilleurs prods du HH japonais avec son groupe composé de SLACK et ISSUGI. J’ai pensé à lui pour un article, car son dernier Ep vient de sortir. Alors autant remonter au LP précédant, qui est sorti il y a quelques mois seulement (j’ai hésité avec le LP Green Butter, mais je préfère vraiment ce Blunted Monkey Fist).  Le mec a clairement écouté trop de Krush, de Dilla, et semble fumer beaucoup de pilons. Parfait. Tu veux de l’abstract posé pour chiller sur ton balcon avec une bonne bouteille à la main ? Ca tombe bien, j’ai ce qu’il faut.








La chronique ne va pas être très élaborée, car dans la forme, c’est du abstract hiphop pur et dur : une boucle qui tourne, un rythme qui claque (mais pas que). Budamunk, en plus de maitriser son sujet, semble bien plus enclin que pas mal de ses comparses à inviter des Mc sur ses prods (américains comme japonais, ce qui est reflété dans ce disque). Il semble de plus bien apprécier les samples asiatiques, et une bonne moitié des tracks de ce disque profitent des douces mélodies d’un Koto, d’un Erhu ou d’un Shamisen.

Alors tu as Blunted Fist, parfait morceau instrumental, assez gangsta dans l’âme, que certains Mc américains n’auraient pas reniés. C’est peut être le morceau instrumental le plus marqué de l’opus, car les autres titres se font bien plus enfumés, c’est le brouillard, ça titille les nuques plus que les hanches. Les morceaux sont pour la plupart assez sombres, rugueux et bourrés de parasites. Bundamunk Funk II et Stalactite ne s’embarrassent pas de fioriture, on est assez proche d’un Fucked-up Pendulum de Krush, mais avec une mélodie japonisante dans le deuxième morceau, qui pointe dans la purée de pois du tout. On distingue à peine quelques notes, c’est du plus bel effet. Waterfall Meditation sera peut être le morceau le plus mélodique des instrumentaux, avec beat de folie, du Erhu (violon chinois) malaxé par la MPC, et quelques effets taillés à la perfection. Bonheur. Mais le plus bel instrumental du disque est surement Rift, morceau qui était déjà sorti dans le disque du collectif Sick Team. On a tout. Le beat bien sec qui casse la nuque, la mélodie mélancolique à chialer, ce coté cave bouffé par la fumée de clope, le morceau parfait à écouter en traversant sa ville dans le noir le casque vissé sur les oreilles. C’est sur ce morceau que l’on pige tout le talent de Budamunk pour balancer une dose qui n’a rien de spécial en apparence, mais qui frôle pourtant la perfection.

Certes, le bonhomme assure avec sa MPC, pour tailler des instrues dans son coin. Mais le Japonais a clairement l’habitude de travailler avec des MC, et il apparaît bien plus souvent en crédit de production qu’en solo (le mec a même taffé avec Illa J, entre autre…). Ici, la moitié du disque est dérouillé par des Mc en grande forme, américains comme japonais, ce qui assure une once d’originalité non négligeable. Première grosse tuerie avec l’asiatique At the top remix feat Rogue Venom & Joe Styles (avec qui Buda a fait un album entier). Le morceau est une mandale violente, ultra efficace, parfait. On retrouvera les deux potes nippons de Bundamunk sur Monkey Business feat SLACK et Issugi donc, à forte teneur orientale là aussi.

Toujours les mélodies asiatiques cassées par la MPC sur l’excellent Guess Who Remix, et sa brochette de Mc américains, et belle tuerie avec Fatal Strike et ses 5 mc japonais. Bundamunk utilise passe aussi chorales et chœurs à la moulinette sur Murderous et surtout sur l’énorme Bad Beautiful feat les cinglés de PSG. Ce dernier est surement le meilleur morceau “avec Mc” du LP, instrue de folie à base de chants d’enfants passés en diagonale, et un beat coupé en mille morceaux. PSG l’avait déjà prouvé avec le bien chelou album David, les mecs savent rapper sur des samples pétées, et cela se sent. Grosse maitrise.





Bref, Bundamunk balance avec Blunted Monkey Fist un parfait LP d’abstract hiphop, enfumé en diable, super laidack, mais bien hiphop grâce à une belle cargaison de Mc, ce qui permet au disque de ne pas se complaire dans “la bonne boucle et le bon beat point barre”. Vu que le Japonais est suractif, on devrait clairement entendre à nouveau parler de lui dans les mois qui viennent, et c’est tant mieux.

Disque parfait pour marcher dans la nuit noire avec une bière à la main, écrasé par la lumière des réverbères, ou en roulant tranquillement sur son skate, en sortie de soirée, les mains bien enfoncées dans les poches. Autant en profiter.






Budamunk – Rift





Budamunk – At the Top feat Joe Styles & Rogue Venom





Jazzy Sport – 17 Titres

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Phon.O – Black Boulder

Posted in Chroniques on May 26th, 2012 by Dat'


Graves Graves Graves



Il était une fois 2005. Deux albums allaient sortir et bousiller mes tympans : Le Côte Ouest de Tepr et le Burn Down Town de Phon.O.  Grosses basses bien grasses, synthés méchamment agressifs, pour une recette que l’on sentait déjà pointer dans les Ep de Modeselektor, qui n’avait pas encore sorti d’album à ce moment là (mais qui allait appuyer sur la gâchette avec leur Hello Mom !). Défini à l’époque par Infratunes (j’avais découvert le disque grâce à la chronique sur le site, c’est dire comme cela remonte) comme premier vrai représentant de la contestée Eurocrunk, un pendant européen, instrumental et ralenti d’une vague pimp aux US, ce Burn Down Town était devenu un disque culte (même s’il a un peu vieilli) dans mes oreilles, balançant des sonorités plus putassières, tout en restant foncièrement crades et underground. Deux morceaux en point d’orgue, le cultissime et imparable En Duo Avec George W, que je me repasse souvent avec toujours autant de plaisir, ainsi que les ravageurs Kyoto Station 6pm ou Ridin’ Dirty.

Puis plus rien, à part quelques maigres EP entre 2005 et 2011 pour Phon.O, qui réapparait sans crier gare en fin d‘année dernière sur le label de Modeselektor, et une nouvelle direction : (presque) fini les claviers gras et les basses pachydermiques, on passe au Uk / 2step racé et lunaire. Etonnant, un peu comme si Hudson Mohawke se mettait à faire du Fennesz. Une énième et barbante déclinaison d’un son à la Burial ? Loin de là, Phon.O a bien trop de métier et de talent pour tomber dans un piège pareil.








N’y allons pas par quatre chemins, l’album est une pure tuerie. Bourré de bombes Uk/2step electronica ultra mélodiques, superbement taillées. Nightshifts, ça porte bien son nom, tu prends ton service dans une boite crasseuse, à naviguer entre la fumée des clopes et les minijupes. Entrée en matière presque club, mais tout en retenue, cisaillée avec prestance, tout en restant plus rentre dedans et moins précieux qu’un Jacques Greene. Mais Phon.O impressionne sur ce disque par sa maitrise de la mélodie. Uk émo pour sur, qui drague le palpitant, qui tutoie autant les cieux que les ordures. Yudasi, bass music funèbre pas loin d’un Seekae laisser perler une litanie magnifique. Le morceau ne dure que 2 minutes, mais la progression est parfaite, véritable petit bijou électronica. Sinon… dub cristallin avec Hopelight ? Check ! Uk garage rétro et technoïde avec Die Machinistin ? Check ! 2-step fantomatique noyé dans les échos ? Black Boulder est dans la place.

Tu cherches les grosses tueries de l’album ? Il faut écouter ABAW 723, qui te sort la mélodie hypnotique, les voix susurrées et le beat uk qui drague l’échine. C’est le gros tunnel techno avec les nappes qui t’étouffent, tu chavires en slow-motion aveuglé par les stroboscopes après trop de verres et médocs dans le nez. Le morceau fait du surplace pendant 4minutes30, et c’est pourtant beau comme la mort. Ce mélange parfait entre club music, mélodie camée et Uk garage fantomatique, c’est ce qui me manquait sur pas mal de disques sortis récemment.

Même combat pour Mosquitoes, qui démarre façon Burial 2012, avec cette rythmique 2-step qui sort des tréfonds londoniens, de caves remplies de cadavres rongés par la dope. Mais ce coté Burial va se faire graduellement bouffer par une nappe Trance pachydermique, qui défonce le morceau tranquillement, te donnant l’impression d’écouter un concert d’Amin Van Buuren à travers un mur de béton. Le tout laissant perler des réminiscences du Phon.O d’antan. Slavemode sortira lui aussi ce petit coté Trance dépressive que tu écoutes à 5am après une nuit blanche. Quand le morceau se soulève à partir de la moitié, crache cette belle mélodie putassière avec son synthé bigger than life, et que le rythme se remet à gronder après être resté effacé pendant plus d’une minute, c’est mandale en pleine tronche. Un travail énorme sur le dernier tiers, avec les voix qui interviennent par milli-secondes et cette mélodie qui donne envie de lever les mains. Le tout devient presque candide, léger, lumineux, après avoir arpenté la crasse d’une rue noire : réussite totale. Le onzième morceau, intitulé 12th, est une longue progression épique sur plus de 6 minutes. Très Moderat dans l’âme sur la première moitié, étouffée et caverneuse, le morceau va partir en Uk accéléré, course vers les étoiles, bassline grondante, parfaite conclusion d’album.

Mais Phon.O sait aussi composer avec les voix, et nous sert au sein de ce Black Boulder deux morceaux de folie avec chanteurs en featuring. Un certain Pantasz et sa voix cristalline accoucheront d’une soul belle comme la mort sur Twilight, 2-step de folie avec mélodie trançouille progressive et claviers lunaires. Et c’est la beauté suprême avec Leave a light on, et sa mélodie façon gouttes d’eau qui te hérisse les poils sur les bras, et une voix pure comme de la glace. C’est très émo, ça ferait presque penser à certains des premiers essais de Artful Dodger avec ces petits violons synthétiques durant le refrain, mais putain, qu’est-ce que c’est soigné.





Au final,  et c’est bien là la première qualité de ce disque, ce Black Boulder de Phon.O arrive à trouver l’équilibre parfait entre dancefloor émo, Uk garage racé et bidouilles électro-mélodiques, comme très peu d’autres musiciens UK/2step/bass music ont pu le faire jusqu’à lors. Oubliez le bien trop mou et faisandé nouveau Clubroot (belle déception), car c’est chez 50weapons que la fusion se passe.

Soufflé par ce disque, peut être enfin celui que j’attendais dans le Uk garage, tant il a toute les qualités pour écraser la concurrence, cristallise tout ce qui se fait de mieux dans le genre, et défonce toute la brochette de LP sortis depuis 2007, marquée à vie par le Untrue de Burial, impossible à détrôner. Et le plus drôle, c’est que cet LP si travaillé, si absolu, si bien taillé, vient d’un mec qui était loin de faire dans la dentelle auparavant. Mon héros de 2005 revient 7 ans plus tard, sans trop avoir donné de nouvelle et sans crier gare, pour me foutre une énorme torgnole. Merci, j’apprécie.

Un des meilleurs albums de cette première moitié d’année, assurément.






Phon.O – Slavemode





Phon.O – ABAW 723






11 Titres – 50 weapons

Dat’

Facebook




Tags: , , , , , , ,

Tha Blue Herb – Total

Posted in Chroniques on May 14th, 2012 by Dat'


I’m not your typical japanese



Bon, je ne vais pas refaire une intro présentation, vu que j’ai chroniqué un Ep de Tha Blue Herb il y a deux mois. Ne pas hésiter à glaner des informations sur la précédente chronique donc. J’annonçais dans le texte un album pour cet été, je ne pensais pas qu’il arriverait si vite. Même si, au niveau du climat au japon, les saveurs estivales commencent à se faire sentir. Autant passer directement au packaging, et comme toujours avec Tha Blue Herb, on a un très bel objet entre les mains. L’artwork est certes très frustre, difficile d’en comprendre le sens, mais l’intérieur rassure, à base de belles photos et d’un livret fournissant tous les lyrics en japonais ET anglais (thanks guys). L’album, qui dure presque 70 minutes, est accompagné en magasin d’un cd bonus, “Nuclear Damn”, et de stickers en tout genre.

On sentait avec l’ep Still Raining, Still Winning que Tha Blue Herb n’allait pas imprimer une révolution aussi forte qu’entre son premier et second album, ni assurer un revirement aussi marqué entre la deuxième et troisième galette. On avait un premier Lp vraiment hiphop, un second bien expérimental, et un troisième très electronica. Avec Total, phase 4 de la carrière du meilleur groupe de hiphop japonais, on va affiner la recette. Voir même opérer un petit retour aux sources.








Après un titre instrumental, Into Raw, pas vraiment indispensable (mais au dernier tiers plutôt bien branlé), Tha Blue Herb nous plonge dans le concret  avec We Can…, et une instrue qui aurait pu sortir de Life Story. Même écrin électronica, même Mpc qui claque, avec une mélodie qui perle en fond. Un titre classique et plaisant, qui fait bien son taff. C’est avec Everyday New Dawn que le disque prend son envol, avec une instrue superbe, où une mélodie cristalline tente de se frayer dans les parasites. C’est dosé à la perfection, les beats sont presque en retrait, seule la litanie prime, avec une progression très légère, très belle quand on prête attention. Ill-bosstino est évidemment nickel dans les déclamations, et les scratchs sont même de retour, pour intercaler quelques exclamations quasi-hurlées. Le morceau se finira sur un chant fantomatique, pour une conclusion à filer la frousse. Surement le meilleur morceau de l’album.

Tha Blue Herb revient à ses premiers amours avec des morceaux bien plus directs qu’avant. On croise quelques tubes dans ce Total, ce qui était soigneusement évité sur les deux précédents LP, les morceaux frontaux étaient depuis quelques temps réservés aux EP (Phase 3, C2C4, Straight Years, Still Raining Still Winning…). En ce sens, Tha Blue Herb repart sur les terres de son premier album, dans le fond tout du moins. Total est moins homogène que le monolithe Life Story, troisième album inénarrable, mais se permet quelques incartades imparables, plus hiphop :

Lost In Music Business, sorte d’égo-trip en mis en filagramme avec un marché de la musique japonais sclérosé est surement l’un des titres les plus “normaux” qu’ait pu balancer TBH depuis un bail. Facile de fredonner le refrain dans la bouche, tout en s’imprimant d’une prod toujours au petit oignons. On aurait presque pu le glisser sur le premier album du groupe, même si l’instrue bien plus foisonnante et bourrée de détails sent 2012. Ici, c’est les refrains, ou les gimmicks servant de repères, qui tranchent avec ce que faisait le groupe. On est moins dans la longue tirade électronique simplement dérouillée par des mots. Full Mental Jacket balancera le même genre de morceaux plus direct, avec un piano et une mpc qui n’en finissent plus de copuler. Tha North Face claque dur et balance un hiphop bien sec et simple. Get Ready, balancera une instrue qui semblerait niaise, pour un morceau bien engagé (ce qui n’est pas si commun dans le j-hiphop), entre charge universelles (les mensonges politiques), constats faisant suite à l’electrochoc du 11mars 2011 (les forces politiques n’ont rien branlé depuis 1an à part se bouffer le nez) et questionnements bien japonais (“Le Japon existera t’il dans 100 ans, ou deviendra t’il une simple annexe chinoise?” “Quand allons nous ramasser les os des soldats morts dans les îles du sud?”).




Mais Tha Blue Herb n’a pas abandonné les expérimentations et autres divagations electronica chères au groupe sur ces dernières années. Saturday Night, Sunday Morning & Aternoon convaincra les plus réticents. Dans ce titre, Ill-Bosstino et O.N.O font parler leur amour pour la techno de détroit, avec une longue intro qui n’est pas sans rappeler le psychédélique 智慧の輪. Tunnel electro qui aurait pu figurer sur la galette d’Herbest Moon, side-project techno-dub du groupe, avec un Mc qui s’en donne à cœur joie sur cette instrue pétée. Milieu du morceau, la musique se fait engloutir par la foule, on débouche sur une deuxième partie apaisée, à base d’habillage electronica du plus bel effet et guitare acoustique sur ambiant.

Brighter sera l’autre grosse mandale du disque, avec une instrue electro bien progressive, pour contenir une hargne latente qui n’est pas sans rappeler le malade C2C4. Stand On The Word te sortira l’instrue de folie, ultra complexe, elle aussi pas loin des exercices Herbest Moon, electro expérimentale fourmillant de détails impossible à chopper en une écoute. Le morceau se nécrosera graduellement vers un piano-spoken word fantomatique. Tha Blue Herb case enfin toujours un morceau ovni dans ses disques, souvent très long. Ici, c’est la conclusion Right On, morceau de 8min30, qui part sur une ouverture bien émo, à base de cordes dramatiques et Mpc qui claque. C’est épique, ya du bigup à dj krush et tous ses autres potos, pour finir sur une longue outro façon Echospace accompagné de violons. Du bon boulot.






Tha Blue Herb nous sort avec Total un Lp sacrement solide, peut être même plus solide que Sell Our Soul (experimental et éclaté) et Life Story (grosse fresque electronica à écouter d’une traite), sans être aussi frappant que ces derniers néanmoins, à cause d’un parti-pris moins radical. A dire vrai, et pour la première fois depuis le 1er Lp du groupe sorti il y a 14 ans, on va écouter Total en passant sur ces morceaux préférés, et laissant de coté ceux qui passionnent moins. En reprenant une charte plus hiphop, avec quelques morceaux plus frontaux,  et en ouvrant sa recette, Tha Blue Herb sort de carcan “rap experimental” pour repasser dans le “hiphop indépendant”, même si certains morceaux restent complètement inclassables.

On sent une ouverture, par de minimes détails (les deux trois tubes, l’utilisation de plus en plus présente de l’anglais) direction qui était presque obligatoire vu le succès grandissant de Tha Blue Herb dans son pays. Le groupe n’est plus la formation de l’ombre qui agissait des tréfonds de Sapporo, mais désormais celle qui fait des featurings avec des excellents espoirs devenus horreurs locales (Seeda par exemple), et qui se retrouve en tête de gondoles en magasin / clip à la tv. Ceci étant à relativiser avec le fait que je n’ai pas rencontré au Japon un seul japonais connaissant Tha Blue Herb.

Pourtant, le groupe se radicalise au niveau des lyrics, avec des textes beaucoup plus critiques, sociétaux, imprimant la aussi une démarche plus hiphop comparé aux deux précédents albums. La situation du Japon depuis la catastrophe de mars 2011 n’est pas étrangère à ce revirement, tant elle a secoué la vie des Japonais, dans tous ses axes. Tha Blue Herb sort de sa zone de confort : moins de “Motivation lyrics”, moins de métaphore, et bien plus de critique frontale. Le pays était dans un marasme du quotidien, il est aujourd’hui secoué, les plaies à l’air, et Ill-Bosstino semble appuyer là où le mal se fait (la politique japonaise qui frôle le ridicule, le nucléaire et sa lente pollution, la destruction d’un japon plus vraiment debout). Impression renforcée avec le cd bonus, Nuclear, Damn long et beau morceau décharné de 8minutes parlant de la contamination nucléaire au Japon, avec détails poignants, entre écoles abandonnées pour cause de radioactivité, détails sur la vie de tous les jours (bouffe contaminée, province de Fukushima abandonnée) et charge rude sur la situation actuelle (en gros, “les vrais responsables de la catastrophe nucléaire ne seront de toute façon jamais punis, le Japon est trop lâche pour changer…”). Le tout donnant une lecture très intéressante, et un point de vue qui n’est pas forcément mis en avant et toujours difficile à assumer publiquement au Japon.


Mais Tha Blue Herb à l’intelligence de rester Tha Blue Herb, et continue de déclamer son rap sur des productions étouffantes, fortement électroniques, sur des durées gargantuesques (la majorité des morceaux font au moins 5 minutes), confirmant qu’O.N.O reste l’un des meilleurs beatmakers. Le groupe continue le tour de force de percer petit à petit, de se poser comme formation incontournable dans l’indépendant japonais, mais aussi dans le quasi-mainstream : Ill Bosstino lui-même annonçait il y a des années qu’être underground, ce n’était pas faire un concert avec 3 péquins dans une cave, mais bien d’utiliser tous les medias pour infiltrer les masses, et grandir dans la conscience collective sans corrompre d’un iota sa recette.

Tha Blue Herb balance donc un nouvel indispensable avec ce superbe Total, qui suffira à convaincre qu’au Japon, le groupe est bien bien au dessus de tout le monde. Du grand art.





Tha Blue Herb – Brighter









13 Titres – Tha Blue Herb Recordings

Dat’

Facebook




Tags: , , , , , ,

Actress – R.I.P

Posted in Chroniques on April 26th, 2012 by Dat'


Silent Hill



J’ai longuement bassiné avec le Uk garage et ses dérivés Bass dans ces pages, mais je n’ai pourtant jamais abordé le sujet Actress. Ce jeune Londonien avait explosé en 2010 avec un deuxième album, Splazsh, qui ne m’avait pas vraiment retourné. C’était bien foutu, plutôt beau, tout le cahier des charges était rempli. Mais je n’arrivais pas à être passionné. Reste que le bonhomme semblait clairement maitriser son sujet, et que ses prochaines sorties risquaient de casser la baraque. Le mec à passé deux ans à naviguer entre la production d’une nouvelle galette, des tracks pour le (très bon) projet de Damon Albarn DRC Music, et des remixes pour Radiohead ou Panda Bear…

Actress a d’abord secoué les forums à l’annonce de son nouvel album, chaque topic intitulé Actress – R.I.P était suivi d’un bon nombre de messages façon “putain j’ai cru que le mec était mort”. Pas de débat sur la pochette par contre, ce qui est étonnant, vu que pour moi le truc ressemble à un dérivé du logo des jeux olympiques de Londres, avec un dessin presque aussi déviant sexuellement. Mais je dois avoir le mal d’esprit tourné.







L’album semble partager entre deux styles de morceaux. Les ambiants beatless d’un coté, extrêmement atmosphériques et mélodiques, et les house-techno étouffés de l’autre, musique de club coulée dans le béton. Ascending sera une très bonne représente de R.I.P, mélangeant parfaitement les deux styles. Techno ouaté au beat tellement brumeux que l’on ne l’entend presque pas, réduit à une pulsation cadavérique, alors qu’une mélodie cristalline fait son office, et progresse doucement vers les nuages. Marble Plexus fera plus penser à du Echospace, entre le rythme doucereux, les grésillements et parasites flirtant de toute part, et une mélodie bien moins évidente à attraper. Serpent prendra la tête de tous ceux qui ont mis un pied à Tokyo, car le “bruit des feux rouges” tokyoïtes, qui nous insurgent de traverser en tant que piéton, est présent sur tout le long de la piste. Ca dérange un peu et c’est dommage, tant la progression du morceau est belle, avec ces nappes qui n’en finissent plus de grandir, ayant pourtant commencé comme simple point à l’horizon.

Shadow From Tartarus servira une techno caverneuse, comme si le Flashback de Laurent Garnier était noyé dans la flotte, dans un bocal lui même enterré 6 pieds sous terre. Raven tapera dans le rachitique expérimental pas dénué d’intérêt, là où Caves of Paradise fera directement penser au dernier Ep de sieur Burial. A dire vrai, la seule piste réellement house, qui ne se cache (presque) pas devant des apparats étouffés est The Lords Graffiti, parfaite track club à la mélodie et claviers imparables. Un vrai petit tube qui trancherait presque avec le reste de l’album, mais qui donne un coup de fouet au tout. Le dernier morceau, Iwaad, mettra tout le monde d’accord, entre techno neurasthénique presque Trance et réminiscences Uk Garage à te dresser les cheveux sur la tronche.

De l’autre coté, on a des divagations beatless, encore plus éthérées, pas loin d’un duo Warp-ien adepte de clochettes (suivez mon regard). Uriels Black Harp aurait pu se trouver dans la BO de Tekkonkinkreet sans soucis, avec ses notes de synthés qui n’en finissent plus de tomber, le tout mâtiné de grésillements bien crades. Jardin commencerait presque comme un morceau du chat Nora sur son piano, va petit à petit muter en complainte à la Plaid, façon 35summers, caverne de crystal où les gouttes d’eau glissent avec grâce sur les stalactites de glace. C’est très beau, même si l’on est interloqué sur la première minute. La litanie prend du galon, se concrétise, et emporte. Cette petite boite à musique malade volera plus d’un cœur.
Ok, Holy Water et Tree Of Knowledge ne passionneront pas des masses. Mais Actress remportera tous les suffrages avec N.E.W, superbe tirade ambiant mélodique, longue fresque où une mélodie se baladera en ajoutant des notes à droite et gauche de son escapade sonore. Cela aurait pu être le morceau de conclusion, le choix de finir l’album sur un morceau uptempo après celui là étant d’ailleurs assez étrange.





Actress sort un album étonnant, comme coulé sous une dalle de béton. Techno faisait autant penser à Echospace qu’à Plaid, lorgnants parfois vers des rives dancefloor mais ne se privant pas d’incartades experimentales, le disque s’offre le privilège d’être beatless sur 50% de ses morceaux, ce qui n’est pas une proportion négligeable. Pourtant, tout coule dans nos tympans sans heurt sur 60 minutes, tant le tout est homogène par ce coté musique dans le brouillard, qu’elle soit parasitée par un beat house ou réduite à une simple mélodie. On pense aussi à Burial, on pense à Braille, on pense à Jacques Greene. On pense aussi au précédant Actress évidemment, mais donnant sur un tout de plus belle facture, riche dans sa simplicité, dans cet enchevetrement de tracks perdues sous la pluie. Ecouter cet Actress, c’est un peu comme trainer dans un club après ingestion de calmant, à vouloir se noyer dans la machine à fumée qui s’escrime à engloutir le dancefloor avec ses volutes. On cherche sa Mary dans une purée de pois grise et poisseuse sans trop y croire, fantasmant sur une Maria perdue dans une techno brumeuse et fascinante.

Actress sort un disque qui laissera pas mal de gens de marbre, mais pourrait aussi être considéré comme un classique à la fin de l’année, tant la singularité de ce LP est forte. Une vraie réussite.










15 Titres – Honest Jon

Dat’

Facebook




Tags: , ,

Two Left Ears – divAAAtion

Posted in Chroniques on April 19th, 2012 by Dat'


I own Panem bitch, so call me Buttercup. I can wipe your hips with my cream if ya muthafuckin’ butt is up.



On avait laissé Two Left Ears en 2010, avec un album qui s’était glissé dans mon top de l’année. Superbe galette mi-abstract mi-IDM mi-8bits, avec quelques missives belles à pleurer (18ème ; Six Pack Of Dolls…). Si l’album était un vrai fourre-tout de styles, souvent au sein même d’un morceau, il jouissait d’une maitrise peu commune pour un premier LP. Autant dire que l’on attendait la suite avec impatience, afin de savoir si Two Left Ears allait tirer la couverture vers l’IDM mélodique ou quelque chose de plus direct et percussif. L’ep d’Extra Pekoe n’ayant pas forcément eu la force que l’on attendait après le 1er disque (et malgré un partagé fetishisme pour les filles à talons hauts), les questions restaient ouvertes sur ce *divAAAtion* à la pochette vraiment chelou.








Après une intro qui n’aurait pas fait tache dans un Caretaker, Marshmallow Lento e Largo déboule avec ses voix de diva parasitées, cette musique classique étouffée et une contrebasse nickel. Le morceau, pendant presque deux minutes, va laisser les textures se déplier, les chants perler, la mélodie s’installer. Histoire de bien nous faire comprendre que Two Left Ears ne badine pas avec la production, nous surinant le fait que chez eux, on sait bâtir des putains d’édifices sonores, de toute beauté. Un rythme abstract discret va intervenir et secouer le tout, doucement, sans jamais enlever le coté ouaté et suranné-ethéré du tout. C’est vraiment une petite fresque très belle, organique en diable, impressionnante dans la précision et le travail sur les samples. Organique ? Clairement : Meredith Palpite va offrir un abstract avec pour seul fil rouge des soupirs et expirations. Diablement hiphop et ultra sexuel dans le même mouvement, le morceau va se déplier pendant plus de deux minutes, avant de nous vriller l’échine avec des voix soul qui interviennent à l’horizon, chapeauté par un accordéon, transformant la complainte moite en grandiloquente pièce tire-larme. Ces voix, cette progression, cette apparition presque angélique fait tout le morceau. Entre 2min15 et 3min20, c’est absolument sublime, d’une classe folle, le plus beau passage de l’album. Puis le morceau s’éteint presque, ça sent l’Amérique, les vieilles Cadillac, le goudron et les radios cradingues. Clavier électro massif, nu-abstract qui tord le cœur, on part sur une deuxième partie plus anxiogène, tout aussi maitrisée. Avec ce morceau, Two Left Ears s’illumine, enterre son premier album, et une bonne partie des productions françaises avec.

Jay Divas, hommage à Dilla si l’on en croit le soundcloud du groupe, est le morceau le plus direct du disque, vraie pièce abstract hiphop jouissive, avec beat qui vrille et voix charcutées. Ca bute violemment, plus encore quand le morceau part dans une 8bit de folie, avec un rythme qui va casser plus d’une nuque. Le disque s’enchaine naturellement, et 1.1 optera pour une partition plus expérimentale, plus grésillant et saturée, malaxant toujours des samples de grande classe. Nosaj Thing n’est pas loin. Le shoegaze n’ont plus sur la conclusion, fin d’une jolie progression dans le brouillard.
On regrette que Prisma Im Prisma ne soit pas plus longue, simple interlude pourtant superbe, à la mélodie parfaite. Frustrant. Fuori Totto décollera les tympans, electro-shoegaze fantomatique, sans rythme, au final un peu dispensable même si plaisante. Sa longue mort débouchera sur le très beau Fur Die Isolierung And Goodbye qui reprend un peu la mélodie de l’interlude du dessus pour un abstract racé, ultra émo et imparable, comme si Cyann&Ben se coltinait Abstract Keal Agram le temps d’un morceau.





Cet album trop court et incomplet (décidemment…) impressionne pourtant grâce à un travail sonore et une qualité de production irréprochable (voir mirifique sur certains morceaux). Les mecs ont peut être deux oreilles gauches, mais pas deux mains inhabiles pour ce qui est d’utiliser leurs machines. Les 10 morceaux brillent tous par leur coté cathédrale, matiné d’abstract qui drague directement les nuques. C’est souvent beau, parfois jouissif, et parfaitement branlé dans les diagonales. En creusant ce coté abstract plus que l’IDM du premier Lp, Two Left Ears pourrait à terme se tailler un morceau de choix dans le paysage electro français.

Il aurait juste fallu deux ou trois morceaux de plus à ce très bon *divAAAtion* pour se transformer en grosse claque. Promis, on tendra la joue avec plaisir lors d’un éventuel troisieme album.















9 Titres – Two Left Ears

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Clark – Iradelphic

Posted in Chroniques on April 8th, 2012 by Dat'


Pourquoi battait son coeur



Après 4 ou 5 chroniques traitant de Chris Clark dans ses pages, difficile de refaire une introduction bardée d’élèments servant à introduire le bonhomme. D’autant plus que tout le monde le connait, et que tout le monde attendait un nouvel album de l’anglais, qui n’avait pas donné de nouvelles depuis 3 ans. Car après avoir terminé une trilogie d’une qualité infinie, entre un Body Riddle parfait, un Turning Dragon apocalyptique et un Totems Flare rempli de tubes viciés, Clark a du se demander ce qu’il pouvait bien faire, et quelle direction arpenter. Celui qui a presque revolutionné la façon de percevoir le “son” avec Body Riddle, chef d’œuvre de production en 3D qui te ramassait les tympans, avant de partir dans la sauvagerie la plus totale, a du se reposer tranquillement dans sa campagne anglaise, une bière à la main, à regarder l’horizon sur fond de folk psyché. Car avec Iradelphic, c’est un nouveau visage que montre Clark.

A noté que le Clark est vendu au Japon avec un disque bonus, Throttle Monolith, regroupant les Ep Throttle Promoter, Throttle Furniture et une bonus track. Le packaging d’Iradelphic est lui est sacrement moche, avec une back cover qui m’a fait penser à des vieux disques genre The Black Dog, c’est dire…







L’album commence presque là ou l’on avait laissé Clark. Une guitare, seule, perdue das les échos. Henderson Wrench laisse parler une sorte de Flamenco lunaire, pas déplaisant, déboulant sur Com Touch, vrai morceau “à la Clark”. Mélodie de folie qui se déplie à n’en plus finir, dès le début on est happé dans ses arpèges lumineux, dansant dans nos tympans. Franchement, je trouve ça d’une beauté absolue. A remercier dieu que mes oreilles marchent encore assez pour entendre ce genre de truc. Le morceau reste au départ assez retenu, moins bourrin que ce que l’on avait depuis deux LP. Mais le morceau prend corps, Clark nous balance sa science sonore, et le tout débouche sur un rythme Hiphop de folie, un truc de fou furieux, accompagnant la mélodie de façon magistrale. Quand les petites voix perlent, c’est à chialer. Le morceau, comme bien souvent, va se nécroser et se retrouver bouffé par les parasites, histoire de nous laisser complètement sur le cul. Sérieusement, ce moment hiphop émo, c’est clairement le meilleur passage du disque.
Tooth Moves va se présenter comme une longue outro de Com Touch, en reprenant au départ la mélodie de cette dernière avec une guitare acoustique fragile. Le tout va se déployer tranquillement avant de partir dans un délire de synthés psychés. Le tout va se noyer tranquillement sur l’interlude Skyward Bruise (Descent), qui est pour moi le plus beau morceau du LP avec le Com Touch précité. Superbe pièce ambiant, post apocalytpique, ou seule une ligne mélodique chante au milieu des gravas, avec pour seuls compagnons quelques fragiles synthés. C’est superbe, à te dresser les cheveux sur la nuque. Quel dommage que ce morceau ne court pas pendant quelques minutes de plus.

Open sonne le retour des voix dans la musique de Clark, avec une invité, Martina Topley Bird, qui est presente sur 3 morceaux d’Iradelphic (Secret, The Pining 2 et Open donc). Si Open semble être une longue intro du titre qui va suivre, il surclasse sa suite, avec ce chant langoureux, ce rythme massif et surtout cette mélodie cristalline qui me flingue le moral, légitimant tout le morceau, incongrue et pourtant parfaitement placée. Secret va plus lorgner vers le Triphop enfumé des années 90, mais avec un son passé au nucléaire, et une Martina Topley Bird qui fait encore parfaitement le boulot (A croire qu’elle est toujours plus à l’aise chez les autres que sur ses propres sorties). Le morceau va rapidement basculer dans un flamenco de l’enfer, qui n’en finit plus de grincer dans tous les coins, c’est réussi. Ghosted restera par contre une énigme, longue et morne progression qui va déboucher sur un excellent passage chanté qui… s’arrête malheureusement au bout de 30 secondes (??). Le titre aurait pu avoir un sacré potentiel avec 2 minutes de plus. Black Stone et son piano solitaire servira de calme interlude (malgré tout clipé sur plus de 5 minutes), afin de nous laisser débarquer sur le trio The Pining 1, 2 & 3.

Alors là, attention, on tient l’autre pièce magistrale du LP. Enorme et épique montée faite d’instruments acoustiques concassés, The Pining 1 file une putain de frousse, sonnant la charge sur plus de 4 minutes. Ca commence de façon très retenue, avec plusieurs guitares acoustiques se tirant la bourre, pour tomber sur un rythme imparable, et des cuivres qui giclent dans tous les sens. Le tout mâtiné de nappes ambiant du plus bel effet. Le dernier quart arrachera tout coeur un peu mou, avec des synthés Dance qui se fraient un chemin dans tout ce bordel, pour une outro-émo affolante. Pas le temps de respirer, The Pining 2 entre en scène, on prend la même mélodie, mais on la démonte avec un rythme de folie, à faire trembler les murs. C’est encore plus épique (faut le faire) et entendre la Martina Topley Bird susurrer une petite litanie, arriver des tréfonds du morceau pour se retrouver au premier plan, ça t’arrache le palpitant direct. Le break est mirifique, d’une beauté folle, solaire en diable, flawless victory. The Pining 3 ne poussera pas les choses encore plus loin et c’est un peu dommage, mais on ne rechignera quand même pas devant cette jolie outro glacée, faite de guitares et petites clochettes. La conclusion du disque sera ambiant, et Broken Kite Footage nous servira des nappes religieuses et voix d’anges que l’on semblerait écouter avec la tête plongée sous l’eau. Le seul bémol, c’est que sur ces 5 belles minutes, il n’y a strictement aucune variation, Clark nous sert la même boucle de dix secondes ad-vitam eternam, sans un synthé de plus, une petite disgression. Juste une boucle, point.
Un conseil, ne cherchez pas la version Japonaise, pas besoin. Le titre bonus, Lysergic Plane n’a aucun intérêt, simple flatulence électronique passant par là pendant 3 minutes. En terme de surprise, on est loin du dernier Plaid ou du Autechre. Etonnant quand on sait que Clark a toujours filé de vraies bonus tracks vraiment énorme. Dommage.





L’album est bon. Il se déroule sans accroc. Très vite. Trop vite. L’album est beau. Le son est toujours aussi impressionant, la production hallucinante, les mélodies tires larmes. Mais l’album est surtout profondement incomplet. Pour schématiser, en écoutant ce Iradelphic, j’ai l’impression de me retrouver devant :

1/ Henderson Wrench – intro
2/ Com Touch – track
3/ Tooth Moves – outro
4/ Skyward Bruise – interlude
5/ Open – intro
6/ Secret – track
7/ Ghosted – demi track
8/ Black Stone – interlude
9/ The Pining 1 – track
10/ The Pining 2 – track
11/ The Pining 3 – outro
12/ Broken Kite Footage – outro

C’est cette impression d’avoir une enfilade d’interlude, d’intro et d’outro, avec 4 ou 5 morceaux au milieu, qui vice le disque. Ça flirte avec le syndrome du Mount Kimbie d’il y a deux ans. Iradelphic est sauvé par le fait que tout est beau, tout est reussi, pas un morceau n’est réellement à jeter (même si je ne comprendrai jamais l’arret soudain de Ghosted). Mais ça glisse trop vite, ça file comme le vent. A l’écoute, on a l’impression d’etre devant un album qui tente constamment de s’échapper, pour disparaitre au bout d’une vingtaine de minutes. Dans notre Itunes, le prochain disque commence à tonner alors que l’on se croiyait encore au milieu du Iradelphic. On a au final l’impression d’entendre un gros Ep, ou un LP super light… alors qu’il fait paradoxallement presque la même durée que Body Riddle.

En plus, certains interludes qui reprennent la recette de morceaux passés n’ont pas la force d’antan. Henderson Wrench est bien moins belle qu’Absence. Broken Kite Footage n’évolue pas, et fait beaucoup moins d’effet qu’un The Autumnal Crush. Black Stone coupe bien le disque, mais reste assez anodin face à pas mal d’interludes made in Clark. On est frustré. Frustré d’entendre ce sublime Skyward Bruise s’effacer au bout de deux minutes, alors qu’il en méritait deux fois plus. Enervé d’entendre Ghosted se dérober au moment où il commence vraiment. Déçu de voir que The Pining 3 ne pousse pas le bouchon encore plus loin.

Frustré, déçu, mais aussi ravi par la beauté folle d’un Com Touch, qui se glisse dans les meilleurs morceaux de Clark, conviant chaos et mélodie à pleurer comme seul ce dernier peut le faire. On est aux anges de voir les The Pining 1 & 2 se déplier à n’en plus finir, emportant Clark vers quelque chose de plus acoustique, mais tout aussi sublime dans sa construction, dans sa force. Content de voir que Clark sait toujours gérer les voix, et balancer des tracks flirtant avec le tube imparable (Open et Secret), même si moins dérangés et tire-larmes que sur Totems Flare. Album sur lequel Clark avait presque atteint sa forme ultime, que j’aurai aimé voir cristallisée sur un nouveau disque.


Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dis : je n’ai aucun problème avec la nouvelle orientation de Clark, à jouer de la guitare acoutisque dans ses morceaux et à flirter avec l’indie, car le mec se débrouille comme un chef, une fois encore. Juste que ce Iradelphic souffle constamment le chaud et le froid. Pas dans son contenu, qui se revèle maîtrisé et reussi de bout en bout, mais dans son contenant, dans sa façon d’être construit, organisé, formant un tout trop elliptique, fugace et tronquée.

Ce Iradelphic est un très bel album, contenant quelques pépites comme seul Clark peut les faire. Mais j’attendais bien plus que le seul plaisir éphémère de parcourir un album trop bref.






Clark – Com Touch





Clark – The Pining 2





Clark – Black Stone





11 Titres – Warp Records / Beat Records

Dat’

Facebook




Tags: , , , , , , ,

Raoul Sinier – Covers

Posted in Chroniques on April 2nd, 2012 by Dat'


The night, the bay & the messenger



On savait déjà que Raoul Sinier était balaise au niveau des remixes ( son excellente relecture de Shook Ones Part II, son mix pour Goutes Mes Disques….) et maitrisait l’exercice des covers, via son Ep Cymbal Rush / Strage Teeth & Black Nails, qui contenait une excellente refonte d’un morceau de Thom Yorke. Car quand Raoul Sinier s’attaque à un morceau, il n’est pas du genre à brancher sa webcam et sortir sa gratte acoustique pour miauler sur youtube. Il balance tous ses synthés les plus massifs, sa guitare bien cradingue et ses effets sonores de l’apocalypse. On en avait parlé avec lui il y a quelques temps, le parisien aime les accidents sonores, les explosions électronica et les excavations expérimentales. Mais il voyait plus loin, et depuis deux albums, avait élargie son univers via le chant, tout en balançant ici et là deux-trois covers ultra reussies.


Quand on voit le projet Covers de Raoul Sinier apparaître, on commence à se marrer un peu, rongé par la curiosité sadique d’entendre Raoul Sinier, passé maitre dans la torture de ses machines, reprendre du Prince ou du Metronomy. Il n’est pas vache le Raoul, il file le tout gratos, un vrai LP de covers, 11 titres pour 50 minutes de musique où il arrive à attirer des mecs comme Jimmy Hendrix ou Portishead dans son univers tout fracassé. Car c’est bien là la force de cette compile : de complètement transformer des morceaux que l’on connaît tous, et de les noyer dans l’univers de Raoul, pour former un tout ultra homogène, ce qui est un petit tour de force vu l’origine des morceaux, qui n’ont aucun rapport sur le papier.







Dans ce recueil au bien bel artwork, on trouvera donc les beaux Messenger (de Blonde Redhead ) plongé dans les claviers fantomatiques, le dinguo Sin In My Heart qui se trouve encore plus dérangé que dans l’original, ou une épileptique refonte d’un titre phare de Jimmy Hendrix. Ok, on grincera un peu des dents sur la relecture du Joga de Bjork, seul raté de cet ensemble de covers (avec le Doors un peu anecdotique), mais en même temps, difficile de suivre le duo Mark Bell/Bjork.
Et puis on entendra surtout un Raoul Sinier qui se lâche complètement, et accouche de refontes bien cool : L’imparable Bela Lugosi’s Dead, qu’il arrive a transformer en tube dissonant, tout en réactualisant un peu le morceau de Bauhaus. Radiohead est aussi pimpé à la sauce 8bits, pour partir dans un refrain à base de chapelés de synthés cristallins, à te vriller la colonne vertébrale (la puissance du truc à plein volume est à crever, vraiment mortel). On s’attaquera même à l’ultime The Rip de Portishead, plongé dans l’ultra électronique, un morceau qui va comme un gant à Ra, à base de synthés ultra nauséeux et envolée dans les nuages.

Mais les trois covers les plus réussies, celles qui te filent des petits frissons dans la nuque, tellement elles sont éloignées des originaux et parfaitement maitrisées sont :
Celle de Prince tout d’abord. Déjà, Raoul Sinier qui reprend du Prince, c’est pas piqué des hannetons, et rien que pour ça, la tape mérite d’être téléchargée, tellement le principe est gonflé. Le morceau ultra sexy et langoureux se transforme en pépite electronica froide et dérangée, avec un putain de break lumineux flirtant avec le chaos sur toute la deuxième moitié de la track, à te dresser les cheveux sur la gueule. Le passage le plus mortel de ce LP gratos, un vrai tour de force. Tu prends Prince, tu lui coupes les couilles, tu lui fout une camisole en le bourrant de médocs, et tu le laisse se jeter en hurlant sur les murs de sa cellule capitonée.

The Night, de Morphine (que je ne connaissais pas) est tellement dans l’univers de Raoul Sinier, qu’il pourrait avoir été glissé dans son Guilty Cloaks sans problème. Orgues électroniques, break fracassé, progression presque religieuse. L’un des morceaux les plus réussis de la tape, super beau et mélancolique. (L’original est superbe aussi, j’aurai découvert un truc comme ça). L’intérêt de la cover est ici encore cristallisé, car le morceau de base n’est nullement éléctronique, et le gap de style entre les deux productions est énorme.

Et il y enfin The Bay de Metronomy, absolument hystérique, pour reprendre un morceau original qui transpirait le swag et les cigares au bord de la piscine de ta villa.  On croirait presque que la cover est ratée au départ, sur le premier couplet, avec ces notes toutes bizarres et décalées. Ca met un peu mal à l’aise, on ne sait pas trop à quoi se raccrocher. Mais dès le refrain, c’est la fin du monde, avec un synthé ultra massif, pachydermique, qui détruit tout sur son passage. Raoul Sinier hulule comme un dingue, les claviers s’envolent, deuxième couplet, on a compris le truc, doigts qui claquent, des mélodies se greffent au rythme bizarre et c’est putain de beau, on chante pour accompagner le tout, énorme tube pop complètement malade. La fin est apocalyptique, mortelle, où comment prendre un morceau imparable et le passer au lance-flammes.



Voilà, Covers LP de Raoul Sinier, c’est gratos, c’est beau, c’est gonflé, et à télécharger ici :



>> http://www.raoulsinier.com/-Raoul_Sinier-Covers.zip






Metronomy – The Bay (Raoul Sinier cover)






11 Titres – Self Released

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Melodium – The Island

Posted in Chroniques on March 28th, 2012 by Dat'


Broken Kite Footage



Melodium, qui a sorti une bonne dizaine d’album, reste bien présent dans mon cœur avec son “La tête qui flotte”, petit chef d’œuvre qui pointe surement dans mes disques preferés malgrés les années. A le caller à chaque fois dans les discussions traitant des excellents disques français pas connus (à coté des Depth Affect, Avia ou Abstrackt Keal Agram, dans des genres bien differents), à le faire écouter à des proches dès que l’occasion se presente. J’en avais d’ailleurs casé un bout dans la mixtape France vs Japon, car je ne pouvais pas faire une compil’ sur des morceaux de l’hexagone sans placer un Melodium. La Tete Qui Flotte, plus que autres disques de Laurent Girard, arrivait à synthétiser un mélange parfait entre une electronica mélancolique et ritournelles pop lumineuses. Seul disque du Nantais à tenir cet équilibre certes, mais pas le seul disque digne d’intérêt, Melodium balançant chaque année un Lp tirant la couverture vers differentes directions, qu’elles soient très electronica ou au contraire tournées vers un folk plus posé.

La force du bonhomme, c’est de faire de grandes comptines avec des bouts de ficelles. Son nouveau LP, The Island, imprime encore plus cette recette épurée, pour un disque quasi-dénué de charges electroniques, en apparence.







Pour comprendre comment marche The Island, il suffit d’écouter les deux premiers morceaux. Lacrymae commence en mode émo-cristallin, avec une petite mélodie à la harpe, qui va se déplier, pour accueillir différents instruments timides, et imprimer une progression de folie. En évoquant la musique de Mélodium, on parle souvent de souvenirs d’enfance, de mélancolie, de vieilles photos trainant dans les tiroirs de notre table de nuit. C’est tout à fait ça. Ici, on marche sur une plage, à la poursuite de son enfance, d’une petite copine. Le crissement final simulerait presque les pas dans le sable un peu humide. Bref, tous ces clichés à la con que l’on nous ressort constamment, mais que l’on ne peut oublier. C’est tout simple, tout bête, tout malingre et rachitique comme musique. Ca ne tient qu’à un fil, et pourtant ça marche parfaitement. C’est beau. C’est putain de beau.

Pas de chant ? Non. The Island va alterner morceaux instrumentaux et chansons featuring notre émo-nantais préféré. Sur The Dark Home, on tombe en terrain plus connu, du Melodium comme l’on en croise sur une dizaine de Lp. Une guitare avec des accords rachitiques, une voix posée et grave, presque hypnotique. Petite folk-song sans prétention ? Oui, jusqu’à ce qu’un hululement chelou casse le coté “cabane dans les bois” du tout. Rythme électronica claudiquant, cordes larmoyantes, petit piano candide. Bonheur.

Pour schématiser, l’album se départage donc entre pistes instrumentales et morceaux chantés. La cassure est nette, pas comme sur un La Tête Qui Flotte. Mais les deux exercices valent le coup d’oreille. Car même sans sa voix, Melodium pond des petites merveilles, comme le très progressif Supervacuum, construit comme une longue montée électronique (mais acoustique, je me comprends), avec une harpe qui va se laisser bouffer par des instruments à vent Midi, et autres synthés hypnotiques. In Deserto, encore plus tire-larmes, laisse une mélodie au piano se délier, c’est à chialer même si c’est encore une fois tout simple, et que cela ne tient à rien. On à l’impression d’entendre un gamin qui a ramené ses petits pianos et ses bichtouilles à percussion pour faire un morceau dans sa cuisine. Pourtant, ça te fait l’effet d’une balle dans le crane tellement c’est beau. Plus le morceau progresse, plus on a l’impression d’entendre un Yann Tiersen vs Beirut, avec les lignes de piano qui copulent entre les cuivres. Peut-être le morceau le plus réussi du disque. Normalement, quand un morceau est beau, j’utilise le champ lexical du “arrache de cœur, fusil à pompe dans les intestins et malaxage de colonne vertébrale sale batard” dans mes chroniques, mais là, on est clairement plus dans “papillon dans le ventre et larmichette au coin de l’œil” tant le tout est fragile, léger, sur le fil. Ca ne te file pas une grosse mandale, mais ça vient te bercer avant de pioncer, te caresser doucement la joue, et toi, tu as juste le palpitant qui se serre comme lors de ta première lettre de rupture.


Balanci fera encore plus cousu de fil blanc, avec ces petites notes qui se posent sur le morceau avec la bouche en cœur, pour une fin presque épique. (épique façon “tu sors de ta couette toute chaude pour aller chopper une bouteille d’eau en pleine nuit”, mais épique quand même). Gaima sort les cordes et les glitchs electro discrets pour une sombre petite fresque.

Du coté chant, il y a le premier single The Feeble Light, super tristoune, mais putain de belle. Pas grand chose, à part une gratte avare, une voix sombre et des simili-cordes. C’est lugubre, linéaire, désertique. Mais ça prend aux trippes. Salement. The Outside part dans quelque chose plus rythmé, presque hiphop dans le rythme. C’est délabré là aussi, il n’y a rien à part de rythme qui drague ta nuque, la guitare famélique et le petit piano orphelin. La voix est presque inaudible, à peine murmurée. C’est pourtant imparable. La grande classe. Bon, The Pseudo Friends fait un peu Radiohead sans le sou au premier abord, mais quand le morceau part dans ses refrains cristallins-electro-cosmiques, à base de synthés et d’échos psychédéliques, tu t’envoles avec tes tympans, trop de drogues. A dire vrai, seul The Little Robot se foire un peu, et se pose comme le petit raté du disque. La musique est belle, mais la voix se pose bizarrement, trop hésitante, presque fausse, cassant la jolie litanie. Dommage. Mais pas grave, car le disque se termine sur le long (6min30) Sine Ictu, piste instrumentale en deux parties. L’une très sombre, à base de cordes menaçantes et drones âpre, avant de basculer sur une conclusion électro plus candide, mélancolique en diable, longue chute ouatée et hypnotique.






Si The Island n’est pas la livraison la plus impressionante/poignante du bonhomme, elle continue de tracer le chemin au combien plaisant qu’arpente le Nantais. Semblant vraiment fait avec trois bouts de ficelles, pas exempts de bugs et surprises que l’on croirait presque improvisées, The Island arrive quand même à te prendre la gorge au détour de titres humbles et presque rudimentaires, comme l’ouverture Lacrymae, In Deserto ou la plupart des morceaux chantés durant le disque. Mais en imprimant une progression electronique à des pistes folk, Melodium sort de cette musique feu de bois pour flirter avec les nuages. Et prouve qu’une belle chanson, qu’elle soit jouée avec un orchestre à 50.000 dollars ou avec trois babioles dans sa chambre, reste une belle chanson.

On attend avec impatience une prochaine livraison un peu plus fracturée, mais pour le moment, il est parfait d’habiller nos nuits avec ce fragile The Island. Pour courir mentalement derrière son cerf-volant, la main droite accrochée à un cornet de glace, et l’autre bien callée dans la pogne de son père.







Melodium – The Feeble Light













Ps : Et foncez écouter son album La Tête Qui Flotte !




11 titres – Audio Dregs

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Instant Promo : ANDY KAYES & MURMUR BREEZE

Posted in Chroniques on March 22nd, 2012 by Dat'

 

A murmur without a face





Je ne peux décemment pas faire une chronique objective du nouveau Andy Kayes, vu que je me suis chargé des biographies de l’artiste publiée sur son site officiel and co, mais je ne peux néanmoins pas passer sous silence la sortie de ce Alone In Numbers, premier album que j’ai attendu depuis bien longtemps (depuis sa première tape gratos sous le pseudo de Manimal à dire vrai). Le mec qui m’avait foutu des claques sur ses nombreux feat avec les Gourmets (qui eux aussi m’avaient tué avec leur excellent premier album gratos “le plus gourmand des gourmets” il y a un bail… putain ça me rajeunit pas, je l’écoutais tout le temps dans le bus en allant à la fac), avait tracé lentement son chemin à base d’Ep (avec notamment le très bon Invisible, qui installait plus sérieusement Andy Kayes dans le paysage français) pour arriver sur ce premier album en 2012.

On l’a toujours dit, la particularité d’Andy Kayes est de pouvoir rapper autant en anglais qu’en français, mais c’est la langue de Shakespear qui est privilegiée sur ce LP. Les thèmes restent ceux qui sont chers au Mc, tournant autour de la solitude, de la vie quotidienne, de se sentir perdu dans la foule, dans sa bulle. Et comme pour Invisible, les instrues de Alone In Numbers déboitent serieusement. Bonetrips est au sommet de son art, balances des ogives de folie, revenant sur un Hiphop mélodique visant la nuque et le palpitant.

Evidemment, il y a les petites bombes I’m Just a Man (l’instrue mortelle) ou Dreamcatcher qui ont déjà tourné, mais aussi la petite bombe Man Without a Face avec un Copywrite qui brule complètement le morceau. On a même Thavius Beck en guest-star de luxe pour la prod’ de Sandcastles In Concrete, pour une fin d’album assez dingue, avec en point d’orgue Infinite, qui est surement la plus belle instrue du disque.

Ce qui marque le plus dans cet Andy Kayes, c’est ce coté “sans époque” du disque, assez difficile à décrire, avec cette posture intelligente de ne pas lorgner vers le futur (pas de synthés electro qui partent dans tous les sens) ni vers le passé (on est pas non plus dans un boom-bap new generation à la Entourage). Comme si Andy Kayes avait juste voulu nous faire écouter son hiphop, celui qu’il aime, l’intemporel, le brut, sans réellement se soucier de se placer quelque part, dans une mouvance ou un style quelquonque. En cela, et avec la direction musicale prise dans ce disque, Andy Kayes est surement “alone in numbers” dans sa tête et la foule, mais un peu aussi dans le hiphop, en livrant un drole de disque un peu esseulé et unique au milieu des prods d’aujourdhui, tranchant avec les galettes rap que l’on a l’habitude d’écouter ces derniers temps. Et si ce choix d’une direction très personnelle peut avoir des désavantages (pas de morceau révolutionnaire dans le Lp, pas de couverture médiatique parlant du “next big thing”), ce Alone In Numbers en tire aussi sa force : Andy Kayes balance simplement un album super bien foutu et qui fait du bien par sa propension à servir un hiphop qui se fait rare ses derniers temps.










—————————–



Meme mouvance, mais autre style, la aussi, pas de chronique mais un rappel, notre label adoré Cooler Than Cucumbers s’apprete à sortir dans l’hexagone le LP Foreshore Reverie du groupe Murmur Breeze, groupe aillant fait son trou depuis quelques années avec son hiphop sombre et experimental, proche des élecubrations Anticon d’antan. Le disque s’était récolté pas mal de bonnes critiques (ici ou ) et avait percé dans quelques tops 2011 via cet album sorti sur Decorative Stamp, et le groupe était largement present, sous plusieurs entitées (Absurd et James P Honey), dans la gargantuesque compilation gratos filée par le label l’année dernière (toujours téléchargeable). Le Mc de Murmur Breeze, groupe qui a aussi le cul planté entre l’Angleterre et la France, revient avec sa voix grave et son flow nonchalant pour chevaucher des instrues lunaires, sombre et abstract, s’autorisant pas mal d’instruments chelous, comme des cordes poussiéreuses, histoire de renforcer ce coté nauséeux parcourant le disque. Difficile de faire du track par track ou de parler d’un morceau et pas d’un autre, tant le Lp est homogene dans ce coté oppressant et cradingue (musicalement), boue dense s’infiltrant lentement dans les tympans. Disque un peu malade, chapeauté par un James P Honey qui s’autorise un chant au bout du rouleau et ultra nonchalant sur quelques morceaux, pour vite repartir sur un flow mitraillette (Float, clippé, en est le parfait représentant). Le disque oscille entre le folk-hiphop funèbre sans beat pouvant faire penser à un Buck65 sous codéine et rap expérimental qui ferait passer les instrues des solos de DoseOne pour des face-b d’un Katy Perry.

L’identité graphique du groupe, via clips et pochettes, est toujours aussi maitrisée (les artwork et clips sont superbes), et si la musique de Murmur Breeze ne va pas filer la banane au petit déjeuner avant d’aller au boulot, le disque se case obligatoirement lors de longues nuits blanches éclairées passées à boire des bières en compagnie de la seule blafarde lumière de son écran d’ordinateur. Ce Murmur Breeze, c’est un peu comme écouter du Hiphop bien assis dans un micro-onde après avoir avalé une tablette de Dogmatil. Et c’est drôlement agréable.

http://ctcrecords.bandcamp.com/album/foreshore-reverie-vinyl-edition








Reverbère Records & Cooler Than Cucumbers

Dat’

Facebook




Tags: , , , ,

Tha Blue Herb – Still Raining, Still Winning

Posted in Chroniques on March 18th, 2012 by Dat'


Phase 4 


Pour enlever toute objectivité à cet article, je peux m’avancer en propulsant Tha Blue Herb comme étant l’un des plus grands groupes Japonais de ces dernières années, et l’une des toutes meilleures formations Hiphop expé mondiale. J’avais parlé, dans ces pages, du dernier Lp du groupe from Sapporo il y a 5 ans. Depuis, plus rien, aucune sortie, à part deux dvd lives et quelques feat. Pour revenir un peu aux sources et présenter la formation, Tha Blue Herb avait sorti il y a 14 ans un premier LP très hiphop, rempli de bombes imparables, assez classique dans le fond, mais qui se démarquait déjà dans la forme avec quelques missives plus abstracts et enfumées, dont certaines racines était planté dans la pure lignée d’un Dj Krush. On avait là un disque de hiphop japonais qui faisait jeu égal avec ses compères occidentaux. Mais c’est avec leur deuxième Lp que le groupe a pris son envol (et commencé à dépasser les frontières), Sell Our Soul, chef d’œuvre de hiphop expérimental et éclaté, avec de vraies fresques sonores, le Lp pouvant se targuer de contenir le plus beau morceau du hiphop japonais (Smile with tears, qui porte bien son nom). Ce Sell Our Soul reste l’un des disques les plus singuliers qu’il m’a été donné d’écouter dans le Hiphop.

Le groupe prendra le temps avant de sortir un troisième album, et enrichira sa discographie avec une BO et pas mal d’Ep, exercice que Tha Blue Herb maitrise parfaitement, comme sur le génial et claustrophobe “The way hope goes”. En 2007 sort Life Story, dernier LP en date, les japonais opérant un virage plus electronica, l’album étant beaucoup plus posé, encore plus nocturne, avec des instrues lorgnant parfois vers un Plaid passé en slow-motion. Un petit diamant à nouveau, parfait disque pour nuit blanche. Impossible de compter le nombre de ces dernières, pendant lesquelles j’ai écouté ce Life Story.

5 ans donc, à guetter a moindre sortie du groupe, en espérant que ce dernier lâche un Lp. Mais les Japonais savent se faire désirer entre chaque album, (3 albums en 14 ans, c’est pas énorme) afin que ce dernier puisse avoir une identité propre, chaque album annonçant une “phase” que le dvd “phase 3.9″ avait conclue en 2011. Ce Still Raining Still Winning semble amorcer la 4ème, avec un nouvel album pour cette année. Prières entendues.









Bon ça va être rapide, vu qu’il n’y a que deux titres. Petite précision qui a son importance, Tha Blue Herb, comme dans toutes ses anciennes releases, inclut les paroles en japonais ET en anglais, pour permettre à tout le monde de bien comprendre. La pochette est bien belle, et doit faire son effet en vynile.

Si Tha Blue Herb est aussi haut, c’est évidemment grâce à son MC Ill-Bosstino, mais aussi grâce au beatmaker O.N.O, qui te sort des instrues tellement belles et abouties que cela en est presque indécent (alors que ses livraisons solo ne m’ont jamais vraiment retournées, étonnamment). Sur Still Raining, Still Winning, c’est encore la grosse folie. L’intro est sombre entre pluie qui tombe, dialogue chelou et cordes dramatiques. 30 secondes, la MPC se met à claquer grave, et l’on a en fond d’instrue des claviers bien synthétiques, qui se font plus discrets que sur le single Straight Years, ce qui n’est pas un mal. La production regorge de détails, c’est du multicouches, mais c’est tellement bien mixé que Bosstino peut cabotiner au micro sans problème. Justement, le MC cultive encore plus son coté prophète, en scandant de sa voix érayée des lyrics qui nous demande de se rebeller, de ne pas se laisser aller et fait des parallèles avec la façon de faire du hiphop. Un morceau excellent, noir mais efficace, comme pouvait l’être Phase 3 en son temps. Mais c’est la face B du single qui va vraiment violer les cerveaux :

Heads Up est excellent, un morceau comme seul Tha Blue Herb sait le faire, d’une force dingue, à ranger à coté des C2C4, Motivation ou Smile With Tears. La prod commence pourtant bizarrement, avec ce petit synthé guilleret, qui va pourtant vriller dans le cradingue, avec roulement de beat à toute vitesse, et flow de Bosstino passer sous filtre. Mais c’est cette mélodie de 4 notes qui fait tout, qui rend le truc épique, qui n’arrête pas de progresser, avec un refrain mi-cristallin mi-electronica. Le texte, déclamé avec ferveur, te pousse à reprendre pied, à te motiver pour reconquérir ta dignité, pour te pousser à agir, à dépasser les traumatismes, ce qui est un peu la marque de fabrique du groupe. Mais ils prennent encore plus leurs sens depuis cette année, avec un Japon complètement meurtri et détruit, et dont les discours de “lève toi et ne te laisse pas abattre” fleurissent en ce moment. La dernière minute est vraiment belle, avec ses rythmes balancés à toute vitesse, et cette mélodie qui n’en fini plus de démonter l’échine. Du gros boulot.






Comme Phase 3, ce nouvel Ep semble donc annoncer un nouvel album pour Tha Blue Herb. Et franchement, ça semble grandiose. Le groupe garde cette teinte très electronica de Life Story, mais les productions de O.N.O sont cette fois encore plus riches, moins posées et plus portées sur le multicouches. Ca déborde de détails, ça fuse dans tous les coins, c’est un bonheur pour les oreilles. Quand à Ill-Bosstino, il assure comme jamais au micro, la voix de plus en plus éraillée, toujours plus sur le fil entre le rap prophète et l’extinction de voix. Ce n’est pas un organe de gros fumeur, mais celle de quelqu’un qui a passé sa vie à hurler ses textes en concert, et ça apporte encore plus de cachet au tout.

Alors malheureusement, la chaine Space Shower Tv, l’équivalent de MTV au Japon, semble se la jouer faucheuse du web, et il est quasi impossible de trouver des clips officiels de Tha Blue Herb (et de pas mal d’autres groupes du même pays) sur Youtube, dont ce nouveau single, ce qui est débile car limitant à mort l’exposition internationale. J’imagine que la chaine doit acheter l’exclusivité des videos. Donc vous me pardonnerez l’absence quasi-totale de son relatif à ce nouvel Ep (je ne peux par contre pas résister de caller un ancien morceau). EDIT : Good news everyone !! Le Clip regroupant les deux morceaux en versions courtes est disponible depuis ce matin, et ne semble pas labellisé Space Shower, ce qui devrait éviter de les voir effacés…

On attend le prochain album, qui pourrait être un vrai monument s’il suit la direction donnée par cet Ep. A la fin du morceau Still Raining, Still Winning, Tha Blue Herb nous lance un « see you soon, hey buddy, see you soon ! ». Putain, on a tellement hâte.







Tha Blue Herb – Still Raining, Still Winning (short version) & Heads Up (short version)

Les deux morceaux font 5 minutes chacun, ici ils sont dans des edits de 3 minutes, qui donnent déjà une bonne idée de ces derniers.







Tha Blue Herb – 智慧の輪






Tha Blue Herb – 路上 (Sell Our Soul LP)





2 Titres – Tha Blue Herb Recordings

Dat’

Facebook




Tags: , , ,